L’amitié

« La pire solitude est de ne pas avoir de véritables amitiés », disait le philosophe anglais Francis Bacon. Animal social, l’homme ne peut se passer de la compagnie de ses semblables dont il a à la fois besoin pour satisfaire ses besoins matériels, mais aussi et surtout pour accomplir le premier et le plus noble de ses désirs : aimer. Trouver l’être avec qui il partagera sa vie, ses pensées, son existence même est pour lui un besoin dont il a plus ou moins conscience et qu’il cherche à combler par tous les moyens. Mais comment découvrir cette personne choisie entre toutes alors qu’internet et les réseaux sociaux répandent partout le culte de l’apparence et de l’hypocrisie en allant jusqu’à donner le nom d’ami à des personnes qui ne se sont jamais vues et ne se connaissent qu’à travers le filtre trompeur de photos et d’autobiographies soigneusement choisies et maquillées à l’excès ? Dans ce monde où le mal est loué et la vertu méprisée, choisir celui qui sera le confident et le soutien d’une vie implique de redécouvrir le sens même de l’amitié. Pour ce faire, interrogeons-nous sur sa nature, sur sa grandeur et sur les dangers des fausses amitiés.

Les trois amitiés

 

Dans les livres VIII et IX de son Ethique à Nicomaque, Aristote parle de l’amitié comme étant ce qu’il y a de plus nécessaire pour vivre, « car sans amis personne ne choisirait de vivre, eût-il tous les autres biens ». Ce qui définit l’amitié, au risque de faire une lapalissade, est « ce qui est aimable, c’est à dire bon, agréable et utile ». De ce goût du même bien va naître l’amitié, mais encore faut-il qu’il soit accompagné de la bienveillance (non au sens moderne de « neutralité bienveillante » ou de « tolérance », mais au sens étymologique de « vouloir le bien », qui pousse à vouloir partager ce bien avec l’autre) et surtout de la réciprocité de cette bienveillance. Il en ressort alors que la nature de l’amitié va dépendre de son objet, qu’il soit de l’ordre de l’utile, de l’agréable ou de la vertu.

– L’amitié utile

L’amitié fondée sur l’utile est la moins noble de toutes. En effet, ceux qui partagent une telle amitié ne s’aiment pas vraiment l’un pour l’autre, mais plutôt de l’avantage qu’ils retirent l’un de l’autre. Il s’ensuit que cette amitié cesse dès que l’un n’est plus utile à l’autre. Aucun des deux ne ressent de plaisir particulier à la présence de l’autre puisque chacun joue dans cette relation le rôle d’un outil pouvant être assez facilement remplacé par un autre pour obtenir le même bien. Cette amitié est typique des relations entre états : tous deux se prodiguent des marques de sympathie tant que chacun tire un avantage de leur amitié, mais dès que cet avantage disparaît les relations deviennent moins chaleureuses et les dissensions apparaissent, et les amis d’hier peuvent du jour au lendemain devenir ennemis.

– L’amitié de plaisir

Après l’amitié utile se trouve l’amitié fondée sur le plaisir que chacun tire de la présence de l’autre. Là encore, ce n’est pas la personne en elle-même que l’on aime mais plutôt le plaisir que l’on tire de sa présence, en fonction des goûts personnels. Comme pour l’amitié utile, le critère de choix est un critère subjectif. Il suffit qu’il évolue (avec l’âge, par exemple), ou que l’ami cesse d’être agréable (qu’il soit moins drôle …) pour que la relation se fade et s’éteigne. Ce type d’amitié est très présente dans la jeunesse puisque selon les mots de Aristote « les jeunes gens vivent sous l’empire de la passion, et ils poursuivent surtout ce qui leur plaît personnellement et le plaisir du moment ». Loin d’être un jugement de valeur gratuit, il s’agit là d’une simple observation du caractère changeant de la jeunesse et de sa recherche instinctive d’amour, ce qui se traduit par une certaine inconstance dans ces amitiés.

– L’amitié de vertu

L’ultime type d’amitié est celui qui a pour base la vertu. Etant un bien excellent en soi, diffusif et stable, la vertu est ce roc sur lequel va pouvoir s’édifier la maison de l’amitié, pour reprendre l’image de l’Evangile. Il va sans dire que les deux autres amitiés sont construites sur le sable, et ne tardent pas à s’effondrer sur elles-mêmes. La vertu rend l’ami aimable en soi, puisqu’elle est souverainement aimable et intrinsèque à la personne. Etant un habitus dans le bien, c’est-à-dire une disposition stable et permanente à faire le bien, la vertu est appelée à durer dans le temps : elle réunit en effet en elle toutes les qualités qui doivent être celles des amis (générosité, bonté, …), ces dernières se traduisant par une volonté constante de s’élever l’un l’autre dans le bien. Des trois différentes formes d’amitié, celle qui a pour objet la vertu est la plus parfaite, car selon les mots de Cicéron « Sans la vertu, il ne peut être d’amitié véritable » ; découvrir sa grandeur nécessite de s’y attarder quelques instants.

L’amitié parfaite

 

Nous disions plus haut avec Aristote que l’amitié est nécessaire pour vivre heureux, et qu’elle a pour objet l’aimable, c’est-à-dire le bon, l’agréable et l’utile. Ces éléments se trouvent tous trois dans l’amitié de vertu, et sont proportionnels au degré de vertu de l’un ou de l’autre des amis. Le bien que l’on va tirer de cette amitié va donc dépendre de la valeur de chacun des amis, mais l’on peut mettre en avant trois constantes qui sont la rareté de cette amitié, le soutien mutuel des amis et leur émulation dans la vertu.

– La rareté de l’amitié

Trouver l’être vertueux qui sera l’ami parfait n’est pas chose aisée, du fait du petit nombre des hommes vertueux d’une part, mais aussi de la nécessité qu’il y a de passer avec lui du temps et d’avoir des habitudes communes. En effet, l’amitié a besoin d’actes pour s’exprimer, pour se maintenir. Un éloignement et un silence prolongé de l’un ou de l’autre des amis ne mettront pas forcément fin à leur relation mais viendront l’affaiblir, comme le traduit si bien le proverbe « loin des yeux, loin du cœur ». Plus que d’une simple fréquentation, c’est de la vie en commun (volontaire) que va naître l’amitié, car celle-ci implique un plaisir causé par la présence de l’autre ainsi qu’une certaine similarité dans les goûts (« qui se ressemble s’assemble »). On reconnaît de ce fait la véritable amitié à ce qu’elle cherche constamment la présence de l’être aimé, ce qui se traduit de la plus belle façon dans le mariage. 

– Le soutien des amis

De cette amitié vont naître des actes réciproques dont le premier est le soutien mutuel. On attend en effet d’un ami qu’il soit toujours disponible à venir à notre secours, et même qu’il prévienne nos besoins. La Fontaine en fait ce beau portrait :

« Qu’un ami véritable est une douce chose !
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ;

Il vous épargne la pudeur de les lui découvrir vous-même.

Un songe, un rien, tout lui fait peur,
Quand il s’agit de ce qu’il aime. »
(Les deux amis).

La sagesse populaire souligne également que « c’est dans le besoin qu’on reconnaît ses vrais amis ». Les peines que chacun rencontre sont en effet le tamis qui laisse passer la poussière des copinages pour ne retenir que la pépite de l’amitié vraie. Ce soutien de l’être aimé est une aide presque indispensable pour avancer dans la vie et surmonter les épreuves, il permet non seulement de sortir de moments difficiles mais aussi de grandir dans le bien grâce à l’exemple de vertu que se donnent les amis entre eux et à la correction aimante qu’ils s’appliquent réciproquement.

– L’intolérance de l’amitié

  « Les vrais amis sont ceux qui nous font remarquer nos fautes, et non ceux qui se taisent. » (Fénelon). La correction entre amis est la plus haute expression de l’amour qu’ils se portent, car elle vise à rendre l’autre parfait, à lui éviter les erreurs. De toutes les œuvres de Miséricorde, elle est la plus grande et la plus délicate à accomplir : son but n’est pas de « jouer au justicier » et de rabaisser ou d’humilier l’autre, mais bien plutôt de le faire grandir dans la vertu par amour pour lui. La correction fraternelle est douce car elle trouve le ton et les mots justes pour remettre dans le droit chemin. Chacun est pour l’autre le tuteur qui permet à la jeune pousse de grandir jusqu’à devenir un arbre majestueux.

« La pire solitude est de ne pas avoir de véritables amitiés », disait le philosophe anglais Francis Bacon. Animal social, l’homme ne peut se passer de la compagnie de ses semblables dont il a à la fois besoin pour satisfaire ses besoins matériels, mais aussi et surtout pour accomplir le premier et le plus noble de ses désirs : aimer. Trouver l’être avec qui il partagera sa vie, ses pensées, son existence même est pour lui un besoin dont il a plus ou moins conscience et qu’il cherche à combler par tous les moyens. Mais comment découvrir cette personne choisie entre toutes alors qu’internet et les réseaux sociaux répandent partout le culte de l’apparence et de l’hypocrisie en allant jusqu’à donner le nom d’ami à des personnes qui ne se sont jamais vues et ne se connaissent qu’à travers le filtre trompeur de photos et d’autobiographies soigneusement choisies et maquillées à l’excès ? Dans ce monde où le mal est loué et la vertu méprisée, choisir celui qui sera le confident et le soutien d’une vie implique de redécouvrir le sens même de l’amitié. Pour ce faire, interrogeons-nous sur sa nature, sur sa grandeur et sur les dangers des fausses amitiés.

Les trois amitiés

 

Dans les livres VIII et IX de son Ethique à Nicomaque, Aristote parle de l’amitié comme étant ce qu’il y a de plus nécessaire pour vivre, « car sans amis personne ne choisirait de vivre, eût-il tous les autres biens ». Ce qui définit l’amitié, au risque de faire une lapalissade, est « ce qui est aimable, c’est à dire bon, agréable et utile ». De ce goût du même bien va naître l’amitié, mais encore faut-il qu’il soit accompagné de la bienveillance (non au sens moderne de « neutralité bienveillante » ou de « tolérance », mais au sens étymologique de « vouloir le bien », qui pousse à vouloir partager ce bien avec l’autre) et surtout de la réciprocité de cette bienveillance. Il en ressort alors que la nature de l’amitié va dépendre de son objet, qu’il soit de l’ordre de l’utile, de l’agréable ou de la vertu.

 

– L’amitié utile

L’amitié fondée sur l’utile est la moins noble de toutes. En effet, ceux qui partagent une telle amitié ne s’aiment pas vraiment l’un pour l’autre, mais plutôt de l’avantage qu’ils retirent l’un de l’autre. Il s’ensuit que cette amitié cesse dès que l’un n’est plus utile à l’autre. Aucun des deux ne ressent de plaisir particulier à la présence de l’autre puisque chacun joue dans cette relation le rôle d’un outil pouvant être assez facilement remplacé par un autre pour obtenir le même bien. Cette amitié est typique des relations entre états : tous deux se prodiguent des marques de sympathie tant que chacun tire un avantage de leur amitié, mais dès que cet avantage disparaît les relations deviennent moins chaleureuses et les dissensions apparaissent, et les amis d’hier peuvent du jour au lendemain devenir ennemis.

– L’amitié de plaisir

Après l’amitié utile se trouve l’amitié fondée sur le plaisir que chacun tire de la présence de l’autre. Là encore, ce n’est pas la personne en elle-même que l’on aime mais plutôt le plaisir que l’on tire de sa présence, en fonction des goûts personnels. Comme pour l’amitié utile, le critère de choix est un critère subjectif. Il suffit qu’il évolue (avec l’âge, par exemple), ou que l’ami cesse d’être agréable (qu’il soit moins drôle …) pour que la relation se fade et s’éteigne. Ce type d’amitié est très présente dans la jeunesse puisque selon les mots de Aristote « les jeunes gens vivent sous l’empire de la passion, et ils poursuivent surtout ce qui leur plaît personnellement et le plaisir du moment ». Loin d’être un jugement de valeur gratuit, il s’agit là d’une simple observation du caractère changeant de la jeunesse et de sa recherche instinctive d’amour, ce qui se traduit par une certaine inconstance dans ces amitiés.

– L’amitié de vertu

L’ultime type d’amitié est celui qui a pour base la vertu. Etant un bien excellent en soi, diffusif et stable, la vertu est ce roc sur lequel va pouvoir s’édifier la maison de l’amitié, pour reprendre l’image de l’Evangile. Il va sans dire que les deux autres amitiés sont construites sur le sable, et ne tardent pas à s’effondrer sur elles-mêmes. La vertu rend l’ami aimable en soi, puisqu’elle est souverainement aimable et intrinsèque à la personne. Etant un habitus dans le bien, c’est-à-dire une disposition stable et permanente à faire le bien, la vertu est appelée à durer dans le temps : elle réunit en effet en elle toutes les qualités qui doivent être celles des amis (générosité, bonté, …), ces dernières se traduisant par une volonté constante de s’élever l’un l’autre dans le bien. Des trois différentes formes d’amitié, celle qui a pour objet la vertu est la plus parfaite, car selon les mots de Cicéron « Sans la vertu, il ne peut être d’amitié véritable » ; découvrir sa grandeur nécessite de s’y attarder quelques instants.

L’amitié parfaite

 

Nous disions plus haut avec Aristote que l’amitié est nécessaire pour vivre heureux, et qu’elle a pour objet l’aimable, c’est-à-dire le bon, l’agréable et l’utile. Ces éléments se trouvent tous trois dans l’amitié de vertu, et sont proportionnels au degré de vertu de l’un ou de l’autre des amis. Le bien que l’on va tirer de cette amitié va donc dépendre de la valeur de chacun des amis, mais l’on peut mettre en avant trois constantes qui sont la rareté de cette amitié, le soutien mutuel des amis et leur émulation dans la vertu.

– La rareté de l’amitié

Trouver l’être vertueux qui sera l’ami parfait n’est pas chose aisée, du fait du petit nombre des hommes vertueux d’une part, mais aussi de la nécessité qu’il y a de passer avec lui du temps et d’avoir des habitudes communes. En effet, l’amitié a besoin d’actes pour s’exprimer, pour se maintenir. Un éloignement et un silence prolongé de l’un ou de l’autre des amis ne mettront pas forcément fin à leur relation mais viendront l’affaiblir, comme le traduit si bien le proverbe « loin des yeux, loin du cœur ». Plus que d’une simple fréquentation, c’est de la vie en commun (volontaire) que va naître l’amitié, car celle-ci implique un plaisir causé par la présence de l’autre ainsi qu’une certaine similarité dans les goûts (« qui se ressemble s’assemble »). On reconnaît de ce fait la véritable amitié à ce qu’elle cherche constamment la présence de l’être aimé, ce qui se traduit de la plus belle façon dans le mariage. 

– Le soutien des amis

De cette amitié vont naître des actes réciproques dont le premier est le soutien mutuel. On attend en effet d’un ami qu’il soit toujours disponible à venir à notre secours, et même qu’il prévienne nos besoins. La Fontaine en fait ce beau portrait :

« Qu’un ami véritable est une douce chose !
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ;

Il vous épargne la pudeur de les lui découvrir vous-même.

Un songe, un rien, tout lui fait peur,
Quand il s’agit de ce qu’il aime. »
(Les deux amis).

La sagesse populaire souligne également que « c’est dans le besoin qu’on reconnaît ses vrais amis ». Les peines que chacun rencontre sont en effet le tamis qui laisse passer la poussière des copinages pour ne retenir que la pépite de l’amitié vraie. Ce soutien de l’être aimé est une aide presque indispensable pour avancer dans la vie et surmonter les épreuves, il permet non seulement de sortir de moments difficiles mais aussi de grandir dans le bien grâce à l’exemple de vertu que se donnent les amis entre eux et à la correction aimante qu’ils s’appliquent réciproquement.

– L’intolérance de l’amitié

  « Les vrais amis sont ceux qui nous font remarquer nos fautes, et non ceux qui se taisent. » (Fénelon). La correction entre amis est la plus haute expression de l’amour qu’ils se portent, car elle vise à rendre l’autre parfait, à lui éviter les erreurs. De toutes les œuvres de Miséricorde, elle est la plus grande et la plus délicate à accomplir : son but n’est pas de « jouer au justicier » et de rabaisser ou d’humilier l’autre, mais bien plutôt de le faire grandir dans la vertu par amour pour lui. La correction fraternelle est douce car elle trouve le ton et les mots justes pour remettre dans le droit chemin. Chacun est pour l’autre le tuteur qui permet à la jeune pousse de grandir jusqu’à devenir un arbre majestueux.

Montalembert écrivait à son ami Cornudet : « J’espère de toi que tu sois inexorable sur tout ce que tu trouveras de répréhensible en moi et que tu m’en avertisses sur le champ : c’est la meilleure preuve d’une amitié véritable et chrétienne ».

Ce soutien mutuel implique une connaissance mutuelle intime, un « mouvement de cœur qui se verse dans un autre pour y déposer son secret », comme le décrit Bossuet. L’ami devient alors un alter ego, un autre soi que l’on chérit plus que tout et pour lequel on est prêt à tout. Le trouver peut prendre beaucoup de temps et de peines, mais chaque être humain a en lui le désir instinctif de faire la découverte de cette « âme sœur ». Cet élan si puissant et si beau, s’il n’est pas réglé et guidé, peut cependant provoquer de véritables désastres dans la vie d’une personne s’il est pris au piège des fausses amitiés.

Le danger des fausses amitiés

 

Nous parlions précédemment des amitiés basées sur l’utile et l’agréable. Leur infériorité à l’amitié de vertu est évidente, mais elles ne présentent pas de vrai danger tant que chacun des « amis » ne se méprend pas sur la nature de leur relation. Nous avons tous des amis de ces différentes sortes, en fonction des différentes étapes de notre vie. Par contre, les conséquences peuvent devenir catastrophiques si l’un des amis est persuadé de vivre une véritable amitié alors qu’il n’est pour l’autre qu’un outil, un moyen d’atteindre le plaisir ou un bien personnel ; aussi est-il capital de ne pas se laisser submerger par ses sentiments et de laisser à la raison sa part d’action dans la recherche et la création de l’amitié.

– L’amitié entre raison et sentiments

Plus vulnérable aux sentiments à cause de son manque d’expérience, de sa croissance dans la raison et de son besoin particulièrement fort d’affection, la jeunesse (nous ne parlons pas ici que des adolescents, mais aussi des « jeunes adultes ») est, plus que tous les autres âges de la vie, susceptible de se leurrer sur les amitiés qu’elle entretient. Elle confond souvent le plaisir qu’elle retire de la présence de l’autre avec une relation privilégiée, unique, éternelle. Cette erreur de jugement ne provoque généralement pas de conséquences graves, car la personne à blâmer n’est autre que nous-même. En revanche, quand c’est l’autre qui s’est présenté à nous sous des dehors bons, aimables, désintéressés, tout en ne recherchant qu’à tirer profit de nous, alors les effets peuvent être dévastateurs le jour où sa duplicité est mise à jour. Quand celui qui a été le confident intime des secrets de notre âme trahit la confiance absolue qui a été mise en lui, quand l’être que nous avons aimé se révèle n’avoir été pendant toutes ces années qu’un manipulateur et un profiteur, les blessures causées peuvent s’avérer aussi douloureuses que l’affection qu’on lui portait. Il est très difficile pour la jeunesse d’identifier les faux amis, surtout à cause de sa naïveté naturelle mais aussi à cause de ce besoin d’affection dont nous avons déjà parlé. Il est donc du devoir des proches (parents et vrais amis) d’aider par leurs conseils ceux qui sont sur le point de succomber aux charmes trompeurs des fausses amitiés, et d’apporter un certain soin aux relations qu’ils entretiennent. Ceci ne se fait bien sûr pas sans bienveillance et douceur, nous en avons déjà parlé plus haut.

– L’amitié : la chasse au trésor

« Les hommes n’ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe point de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis » (Le Petit Prince, Antoine de Saint Exupéry). Forger une amitié est un processus long et exigeant. Certains y arrivent sans grande difficulté et assez rapidement, tandis que d’autres peuvent mettre des années à trouver l’ami parfait. L’amitié s’apprend et se construit chaque jour. Elle nous aide à devenir meilleur et à atteindre le bonheur, sa forme la plus parfaite étant l’amitié de l’homme avec Dieu, c’est-à-dire la Charité. Elle arrache l’homme à l’esprit d’individualisme qui plane tout autour de lui, dans un monde où l’on fait le commerce des amitiés jetables. Elle lui assure un soutien dans les épreuves de la vie, elle prête une oreille attentive aux douleurs cachées qu’elle est toujours prompte à soigner. Trouver l’amitié vraie est une quête de chaque jour, mais ne porte pas tant sur autrui que sur soi-même, car au bout du compte nous n’avons que les amis que nous méritons.

Un animateur du MJCF