Voués au bonheur

Dieu a créé par amour et pour sa gloire. Or cette gloire lui est rendue par l’achèvement de sa création. Jaillie de Dieu, la créature humaine retourne à Lui, et c’est dans la possession de son Créateur qu’elle trouve sa perfection.

Ce plan d’un Dieu d’amour, le péché ne l’a pas brisé, puisque le Rédempteur est venu « réconcilier toutes choses avec son Père ». Mais ce bonheur, voulu par le Créateur et par la créature, ce bonheur que le plus désabusé des sceptiques continue obscurément de chercher, il va falloir le discerner, le distinguer de ses ébauches et de ses caricatures, le conquérir ! Dieu ne cessera pas de l’offrir au cœur, de le tendre vers les mains avides ; et ce cœur et ces mains devront laborieusement, douloureusement saisir ce bonheur promis aux âmes saintes, sa plénitude étant réservée pour l’au-delà.

 

Voués au bonheur

En tant qu’époux catholiques, nous sommes (créés par Dieu) appelés par lui au foyer, tous deux « voués au bonheur ».

Avant tout, ayons conscience de la grandeur de notre état d’époux, et de celle de notre mission. Ne laissons pas les difficultés voiler nos yeux. Si notre espérance décline, c’est qu’on l’a épuisée en des recherches trop humaines, dans une impatience égoïste, en voulant goûter le Royaume sur la terre ; ou bien, c’est que la foi en la Justice ou la Miséricorde de Dieu s’est étiolée. (A.M. Carré)

Pour autant, nous n’avons pas droit, sur la terre, au bonheur conjugal facile et continu, comme si le péché n’existait pas, comme si la grâce du rachat avait ramené l’humanité à son état primitif sans demander le concours des hommes. Non, chacun doit prendre part à son propre rachat.

Cette lente conquête est demandée aux époux chrétiens. Ils ont en eux les atouts de la réussite : les dons de Dieu et leur liberté.

La grâce du mariage

L’amour humain, rien qu’humain, est incapable par ses seules forces d’assurer l’entente de deux pécheurs. Tout au long de la vie conjugale, si le sacrement de Mariage est un sacrement permanent, c’est que le salut de l’amour conjugal doit être assuré chaque jour, chaque minute. En effet, le péché, fruit de l’égoïsme, de l’opposition de l’homme à Dieu, oppose aussi l’un à l’autre les égoïsmes de chacun des époux. Il rend par là difficile l’adaptation que chacun doit faire de ses propres vouloirs aux intérêts de l’autre et au bien commun. Si le péché n’était pas vaincu par la Grâce, et vaincu constamment, comment pourrait naître et se développer le bonheur de la conjonction de deux vies ? Bonheur naturel auquel la grâce assure une qualité et une amplitude que les seuls vouloirs humains ne sauraient lui donner. Cette grâce sans limite a le pouvoir de conduire ceux qui s’aiment à une harmonie où la joie même de Dieu s’incarne !

Deux époux qui se sont donné la grâce au jour de leur mariage, qui demeurent en état de grâce, et qui nourrissent cet état de grâce, par les sacrements de la route et les mérites accumulés de leurs vies, mettent en commun les trésors de Dieu.

S’ils ne sont plus en état de grâce, malgré beaucoup d’attachement mutuel, le christianisme dit : vous vous aimez mal ! Voilà qui introduit dans l’amour des époux l’exigence de la Croix.

 La Croix

Jésus a tenu dans le creux de sa main toute la douleur humaine, et il l’a jetée, semeur puissant, dans les sillons de la vie, pour qu’elle germât en vérité et en beauté, en vertu aimante et en béatitude. En dressant son calvaire, Il y a invité toutes nos croix ; elles se penchent désormais vers leur sœur divine comme le roseau vers l’arbre.  (A. D. Sertillanges : Notre vie)

La Croix, la souffrance est le moyen choisi par Jésus-Christ : le vrai chrétien ne conçoit pas qu’on puisse en choisir un autre. Le soldat combat aux côtés de son chef, et ne se range pas sous une bannière étrangère. Si Jésus s’est avancé vers la croix, c’est parce qu’il nous y a voulus avec lui.

Toute souffrance endurée par charité enlève une souffrance à quelqu’un. Par la voie du mérite, par l’exemple, au nom de l’amoureuse substitution que le Christ nous permet, nous pouvons sanctifier notre époux, l’acheminer plus haut. Un cœur généreux se donne, aimer c’est se donner, c’est accepter de souffrir. La souffrance pour l’autre, insupportable en elle-même, est belle de la beauté de l’amour, une noblesse offerte à l’humanité.

La liberté

Nous savons par la foi qu’une solidarité plus profonde encore lie entre eux tous les hommes dans l’ordre du salut. Les hommes sont beaucoup plus liés par leurs âmes qu’ils ne le sont par leur sang. Le lien par le sang de la chair est comme un symbole visible du lien par le sang de l’âme. Nous nous communiquons les uns aux autres la vie de nos âmes pour notre salut ou pour notre perdition commune, suivant que nous sommes saints ou pécheurs.

Si le péché d’Adam se répercute sur l’humanité tout entière, la grâce de salut par le Christ a également une portée universelle.

Nous savons que tout ce qui nous sanctifie vient de Dieu par Notre-Seigneur : « Sans moi, vous ne pouvez rien faire. » Notre intelligence se sanctifie dans la vérité qui lui est enseignée. Notre volonté se sanctifie dans la loi et la grâce du Seigneur qui ne viennent pas d’elle, elle nous fait vouloir le bien, tendre aux bonnes choses. Notre liberté, fille de celle de Dieu, n’est vraiment à son rang que lorsqu’elle rejoint, par sa soumission, la Liberté première. C’est ainsi que Sénèque, observant que le juste emploi de nos énergies est une délivrance, a pu dire : « Obéir à Dieu, c’est la liberté. »

Nous pouvons donc affirmer que pour obéir à Dieu, pour faire ce que Dieu veut, il faut orienter notre vie vers le bien supérieur de notre famille, accepter les exigences de la Croix.

 

La croix, qu’est-ce à dire ? Nous le savons bien : lutte tenace contre les défauts, oubli de soi, maîtrise des passions, chasteté, respect de la vie, sacrifice de ses aises ou de son temps pour le bien de sa femme ou de son mari, ou de ses enfants, renoncements et encouragements sous tant de formes… Ne nous dérobons pas à de tels combats. Celui qui ne veut pas boire le calice ne pourra pas connaître la résurrection. Pour cela il faut se montrer héroïques, se soutenir et s’encourager l’un l’autre constamment. Les saints et les saintes ont pris sur leurs épaules ce même fardeau, ils en ont eu le cœur fatigué, mais la joie qui demeurait en leur âme en était purifiée.

Le bonheur désiré, le bonheur promis est trop grand pour qu’on le conquière à moindre frais.

 

Sophie de Lédinghen

 

Nos parents dans la vieillesse et la maladie

Nos père et mère sont ceux qui nous ont transmis la vie. C’est d’eux que Dieu s’est servi pour nous donner une âme et une intelligence, et nous leur devons la vie de la grâce par les sacrements, l’instruction de la religion et l’éducation de la vraie vie chrétienne.

L’honneur et les égards que nous témoignons à nos père et mère procèdent de l’amour que nous avons pour eux, c’est-à-dire un sentiment sincère et profond de l’âme. Nous les honorons lorsque nous prions pour eux et que nous mettons tout en œuvre pour qu’ils soient aimés de Dieu.

Aimer nos parents d’un amour de charité

Durant notre enfance, nos parents nous ont appris à les respecter, à leur obéir, exactement selon le modèle de l’amour de tout baptisé pour Dieu le Père. Cela nous est devenu naturel, même si notre pauvre nature humaine se cabre parfois, nous aimons nos parents et leur obéissons. Aimer celui qui nous aime est facile.

Parlons plus précisément de nos parents vieillissants, que nos yeux d’adultes découvrent sous un jour plus réaliste qu’au temps de l’enfance, avec leurs qualités, mais aussi quelques défauts de caractère ou de mauvaises habitudes acquises avec le temps. Qui peut se vanter d’être parfait ? N’ai-je pas, moi-même, un certain poids d’imperfections à tirer quotidiennement ? Mais Dieu commande que l’on aime en toute circonstance. Il y a une différence entre l’amour qui est un acte de la nature, et la charité qui est le fait de la grâce. Or ce n’est pas le simple amour que nous commande la loi évangélique, mais l’amour de charité. Et ce n’est que l’amour de charité qui nous mène vers notre fin dernière ; nous pouvons, si nous le voulons, aimer tous les hommes de cet amour qui provient de la nature, mais nous n’en retirerions aucun avantage pour la vie éternelle.

Pour pratiquer l’amour de charité, il nous faut discerner l’homme de ses défauts, aimer l’homme et détester le péché qui est en lui, un peu comme le médecin aime le malade et hait la maladie. L’amour de charité nous demande d’aimer l’autre comme Dieu l’aime.

Grâce à Dieu, nous gardons cet attachement de l’amour naturel pour nos parents, mais avons à enrichir cet amour en les entourant de toute notre affection, de tous nos soins, sans perdre de vue leur bien supérieur en toute chose, à savoir le bonheur du Ciel.

Nos devoirs d’enfants adultes, vis-à-vis de nos parents âgés, sont à la fois affectifs, matériels et spirituels.

Devoirs affectifs 

Où qu’ils soient, nos parents auront besoin d’être visités, entourés très régulièrement, et cela d’autant plus s’il ne reste qu’un seul parent. Vieillir n’est pas toujours chose simple, ni pour nos parents qui perdent peu à peu leurs forces, ni pour nous qui devons composer entre leurs sautes d’humeur et leur entêtement. Parfois nos parents sont mieux enclins à écouter d’autres que leurs propres enfants. Il nous faut alors avoir recours à un peu d’humour, de gentilles taquineries pour désamorcer les tensions, dédramatiser une situation, sans se moquer ni minimiser leurs inquiétudes.

L’âge et la maladie accentuent souvent les traits de personnalité de manière désagréable. Par exemple, une personne irritable se mettra facilement en colère, tandis qu’une personne impatiente deviendra autoritaire et impossible à satisfaire. Malheureusement, les principales victimes des personnes âgées sont leurs proches.

Essayons alors d’identifier la cause de leur agacement : douleurs chroniques, pertes d’amis, troubles de la mémoire… Tâchons de ne pas prendre la colère personnellement, de voir le côté positif des choses tout en prenant du recul sur l’aspect négatif. Prenons quelques instants pour nous aérer, ou pour nous défouler en faisant quelque chose d’autre. Parfois les parents s’en prennent à l’enfant adulte qui leur témoigne le plus de douceur, car ils se sentent en sécurité pour le faire. Ils ne maltraitent pas leur fils ou leur fille, mais expriment plutôt leur frustration en s’en prenant à eux. Essayons alors de leur expliquer gentiment la peine que cela nous fait, et éloignons-nous de la situation pour faire comprendre que certains comportements ne sont pas  acceptables. Souvent, il est efficace de pratiquer la vertu opposée au défaut : colère/douceur, paresse/courage, tristesse/joie.

Devoirs matériels 

Tant que notre parent peut rester seul chez lui, nous veillerons à ses différents besoins matériels (aspects pratiques du logement et des objets, confort, ménage, courses, soutien financier, administratif, rendez-vous médicaux, transport…). Le mieux est, sans aucun doute, de le laisser le plus longtemps possible dans son cadre habituel, avec ses affaires personnelles et ses repères. Mais viendra bien assez vite le manque d’autonomie.

S’il ne peut plus rester seul chez lui, il faudra l’aider à envisager d’autres solutions qui pourraient lui convenir autant qu’au reste de la famille (accueil chez l’un de ses enfants, maison de retraite, hospitalisation…), en s’organisant pour qu’il y ait des visites familiales régulières et pas trop fatigantes, car se sentir entouré des siens est surtout ce qu’il reste comme joie pour le parent âgé.

Devoir spirituel 

La plus grande des charités est, autant que cela nous est possible, le salut de l’âme de nos parents en leur offrant les meilleures conditions en vue d’atteindre leur salut éternel. L’amour du prochain doit toujours avoir pour motif l’amour de Dieu. La joie, la générosité et la paix sont trois moyens pour préparer les âmes.

La bonne humeur est source de joie profonde. Mais la bonne entente est difficile s’il n’y a pas quelqu’un qui répande ou entretienne un climat de bonne humeur, particulièrement quand surviennent les frictions. Il semble que la joie touche l’âme et la prédispose mieux à se tourner vers Dieu. Commençons donc par sourire, par donner nous-mêmes de notre joie chrétienne pour élever l’âme de nos parents âgés, car la joie est contagieuse ! Dans l’épreuve de la maladie ou de la vieillesse, donnons-leur la joie courageuse de l’acceptation dans l’offrande. « Ce que veut l’homme, ce n’est pas une attention vague ; c’est un amour qui le renouvelle1. »

La générosité dont l’effort essentiel est de sortir de soi pour être aux autres. Il y a un arrachement à faire de tout ce qui, dans notre vie, peut nous replier sur nous-même. Donnons donc cet exemple du don de nous-même, sans compter nos heures, pour redresser ou maintenir cette âme qui, bientôt peut-être, se présentera au Tribunal divin ; conduisons-la au prêtre pour une confession régulière, une extrême onction qui redonne force et courage à l’âme autant qu’au corps (même sans être à l’article de la mort). Disons notre chapelet ensemble, ou faisons de temps à autre une petite lecture simple qui stimulera des élans du cœur. « La générosité chrétienne, appuyée sur la vertu de force et s’épanouissant dans la charité, nous porte, dans les grandes et petites circonstances, à rechercher sans éclat, sans retour sur nous-même, avec ardeur et persévérance, le bien et le bonheur des autres2. »  

« La générosité est l’inspiratrice de la délicatesse, des égards et prévenances. Elle est génératrice de confiance, de joie. Rien de grand, ni de fécond ne se réalise sans elle1. »

La paix que l’on surnomme « porte du Ciel » !

Aidons nos parents à gagner cette paix qui apporte la sérénité aux âmes saintes. Il nous faut tout mettre en œuvre pour que leur âme soit dans les meilleures dispositions possibles au moment de paraître devant Dieu. Que tout soit non seulement en ordre par le sacrement de pénitence et une contrition aussi parfaite que possible (et cela se prépare doucement, sérieusement, avant la venue du prêtre), mais aussi par le pardon. Comment pourrait entrer au ciel une âme qui n’a pas pardonné, qui n’a pas fait la paix avec ses semblables ? Il faut absolument encourager nos parents à pardonner tout grief, toute injustice ou insulte, qu’ils en soient auteurs ou victimes. On pourra proposer une visite ou un appel téléphonique pour encourager à un pardon mutuel sincère et définitif, tout parti s’en sortira bien soulagé ! Disposons-les enfin avec douceur à sacrifier à l’amour de Dieu leurs attaches, leurs défauts de caractère, leur amour propre et toutes leurs passions passées.

Et nous, encore loin du grand âge, quels vieux parents serons-nous pour nos enfants ou notre entourage ?

La vie conjugale a, pour nous, époux catholiques, le grand avantage d’avoir à travailler quotidiennement les vertus chrétiennes. Pour l’amour de Dieu, et l’un pour l’autre, nous combattons pour désherber nos défauts, éradiquer nos germes de vices afin de plaire à Dieu en favorisant l’humilité, la patience, le respect, nous rendant plus agréables l’un à l’autre. Nous essayons, chaque jour, de travailler sur nous-mêmes pour progresser ensemble, avec certes quelques chutes régulières, mais, nous encourageant l’un l’autre, nous nous relevons inlassablement pour avancer encore.

Autre chose qui nous motive aussi, c’est l’exemple que nous donnons à nos enfants. Évitons de râler, de critiquer notre prochain. Tâchons de traiter les autres comme nous aimerions qu’ils nous traitent, faisons preuve de discrétion, d’humilité ou de courage persévérant selon les situations. Prions ensemble, acceptons la volonté de la Providence avec patience et résignation… Le Bon Dieu ne nous demande rien d’impossible, acceptons de voir vieillir nos parents en leur apportant tout ce que nous pouvons jusqu’au bout de leur vie terrestre, et travaillons à être des vieillards les moins pénibles possible pour le bien supérieur de tous.

A notre fin sur terre, du haut du Ciel, nos parents sauront nous encourager dans les difficultés, et nous remercier de toute l’affection et des attentions dont nous les aurons honorés.

Sophie de Lédinghen

 

1 Etienne du Bus de Warnaffe

2 M. Migneaux – Pour faire de nos garçons des hommes de caractère

 

 

Unis pour transmettre

Ce don prodigieux d’un bonheur éternel promis par Dieu aux âmes baptisées n’est pas sans certaines conditions, ni seulement une affaire qui concerne l’Au-delà. Elle dépend de notre foi, de notre bonne volonté, de tous les efforts que nous aurons mis en œuvre dans notre vie terrestre pour aimer, honorer et servir Dieu et ainsi mériter d’entrer dans sa gloire éternelle, dans un bonheur parfait et pour l’éternité. C’est donc ici-bas, dans notre vie quotidienne, que nous préparons notre ciel ou notre damnation pour toujours.

Dieu nous demande-t-il alors de nous mettre perpétuellement en prière pour gagner notre salut ? D’une certaine façon, oui et non. Oui, car la vie de tout catholique est entièrement consacrée à Dieu, chacune de ses pensées, paroles ou actions transformant sa vie en une seule et longue prière. « Que vous mangiez ou que vous buviez, quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu.» Et non à la fois, car vivre sous le regard de Dieu ne signifie pas être à genoux tout le jour en prière, ce qui se ferait au détriment de nos devoirs d’état, mais il s’agit plutôt de réserver chaque jour un temps à la prière, et d’accomplir toutes nos actions et devoirs, même les plus ordinaires, le mieux possible pour la plus grande gloire de Dieu.

Que leurs journées s’écoulent sur leur lieu de travail ou dans leur foyer, les époux ont à pratiquer, ensemble et l’un pour l’autre, les vertus chrétiennes qui les aideront à conquérir en famille le but qu’ils se sont fixés, la gloire du ciel.

 

Amour et soutien mutuel

Partons du principe que nous nous aimons comme Jésus-Christ nous aime, c’est-à-dire au-delà de cette attirance mutuelle, de nos sympathies physiques et morales. Notre amour en sera ennobli, plus solide et durable, parce qu’inconditionnel. Si l’épouse commence à se trouver malheureuse, incomprise… et l’époux délaissé… qu’ils se disent que si leur conjoint a des défauts, ils ont eux-mêmes les leurs, qui déplaisent certainement tout autant à Dieu. Cependant Dieu ne cesse de toujours les aimer, de les supporter, de les prévenir, de leur pardonner. Imitons le Bon Dieu qui nous aime simplement tels que nous sommes. Édifions notre époux par une affection douce et indulgente, opposons des qualités à ses défauts avec générosité, magnanimité. Notre persévérance touchera son âme, sanctifiera la nôtre et attirera des bénédictions sur notre foyer.

Le soutien mutuel passe aussi par une admiration réciproque. Il nous faut non seulement observer, aimer les qualités de notre conjoint, mais aussi savoir le lui dire, lui montrer notre joie d’avoir un mari si prévenant, et notre fierté d’avoir une épouse attentive !

Notre affection aussi doit être visible, de petits gestes tendres, sourires, tous ces petits riens qui réchauffent le cœur et rassurent. Cela n’est pas si simple pour tout le monde, mais un petit effort de temps à autre aura l’effet d’un bien joli cadeau ! Il vous faut savoir, messieurs, que votre épouse a besoin de vos encouragements, remerciements. C’est pour vous qu’elle a tant d’attentions, notamment à la cuisine ou dans sa façon de s’apprêter, sachez la remercier. Ses efforts passent trop souvent inaperçus, elle qui cherche tant à vous faire plaisir, qui guette et ne se lasse jamais de votre affection ! Alors, une petite phrase de gratitude, un petit mot déposé sur la table de nuit si vous êtes un peu timide, ou quelques fleurs feront toujours leur effet !

 

 Et puis, il faut se dépasser l’un pour l’autre, sortir des sentiers battus. Se laisser entraîner dans un jeu de société alors qu’on préfère habituellement se réfugier dans son livre, organiser un menu d’anniversaire avec les enfants en interdisant la cuisine à l’intéressée, composer un joli poème pour dire son admiration et sa reconnaissance…Vous ne manquerez sûrement pas d’idées, car aimer donne des ailes !

 

L’exemple des parents

Pour faire de nos enfants des enfants de Dieu, nous devons les élever pour le Ciel, bien plus que pour la terre. Reconnaissons que c’est surtout la mère qui fait passer les vertus chrétiennes tout droit de son cœur à celui de ses enfants.

Un enfant voit tout, observe et retient les leçons vivantes que lui donnent ses parents. Il s’imprègne de l’ambiance au foyer, pesante ou joyeuse, il la reproduira à son tour. Papa et Maman se parlent-ils gentiment ou s’agacent-ils l’un l’autre ? Il en résultera une sérénité ou une inquiétude dans le cœur du petit. S’il voit ses parents courageux au travail, il sera laborieux ; d’humeur égale ? La sienne sera constante aussi. Les parents ont à travailler à se réformer de jour en jour pour servir de modèles à leurs enfants, leur vie doit être comme un miroir qui manifeste ce qu’ils doivent devenir eux-mêmes. Leur exemple, bien plus que leurs « sermons » s’impriment dans les cœurs. Les parents sont un catéchisme vivant pour cette petite Église que représente leur cellule familiale.

 

Les écueils

Le surmenage, la fatigue peuvent tendre quelques pièges que les parents apprendront à contrôler, voyons, par exemple l’empressement, défaut physique causé par l’état des nerfs. Il provoque une agitation fébrile étourdissante qui empêche toute activité de produire son plein effet. Une personne empressée accomplit une foule de mouvements inutiles, elle se fatigue davantage, gâche son travail. Cette précipitation a un effet instantané d’énervement sur l’entourage. Le mieux serait que l’époux le plus calme des deux prenne la main sur la situation en soulageant la pauvre victime de cet empressement, quitte à l’isoler quelques instants !

 

Cela nous arrive à tous, un cumul soudain de choses à faire en un temps limité, une impression de raz de marée qui nous emporte et dont on ne voit pas l’issue… Il faut alors savoir s’arrêter quelques instants, respirer profondément pour faire retomber la pression, et se remettre entre les mains de la Providence avant de reprendre doucement les choses une à une.

Parfois le découragement nous assaille, nous sommes à bout, recommençons chaque jour… alors nous regardons « chez la voisine » qui a une femme de ménage pour tenir sa maison ; qui, au creux de l’hiver, emmènera sa famille faire du ski ; qui a une belle-mère qui l’aide énormément. Et l’on trouve notre vie triste et monotone… Il est bien connu que l’herbe est plus verte dans le champ d’à côté ! La convoitise est mauvaise, elle détourne les choses de leur vraie fonction. Malheureusement, nous voyons tout ce qui nous entoure comme si nous en étions nous-mêmes le centre ! Puisse Dieu nous apprendre à avoir le regard clair, et nous ferons de toute chose une louange ! Mettons-nous simplement à l’école de Marie.

Qui saura dire la grandeur de notre mariage, où Dieu a mis son œuvre de salut entre les mains du père et de la mère ? Aujourd’hui, Dieu nous regarde dans les yeux et nous demande de nous associer au salut des âmes de notre famille, sommes-nous vraiment décidés à devenir des saints, à posséder Dieu pour l’éternité ? Courage, les grands desseins ne se font pas en un jour !

Nous sommes des héritiers, plus que des héritiers, des continuateurs ; et c’est d’une chose sainte que la garde nous est confiée.

 

Sophie de Lédinghen

 

La pénitence au foyer

Oui, affirment les uns ; la mortification volontaire est nécessaire pour garder l’élan de l’être vers Dieu, pour rester maître de soi-même, pour pouvoir donner aux autres davantage de son temps, de son argent, et se mouvoir plus librement au milieu des grandes ou petites épreuves venant de l’extérieur.

Non, disent les autres ; il y a tant d’occasions de se mortifier, imposées par les circonstances ! D’ailleurs n’y a-t-il pas plus d’humilité à accepter qu’à choisir, à faire acte d’abandon ?

En réalité, la marque de la vraie Pénitence, quelle qu’en soit la forme, est qu’elle est faite par amour. Prenons garde de ne pas négliger l’essentiel en faveur de l’accessoire et de ne pas nous charger au-delà de nos forces. Ce sont surtout les circonstances extérieures qui nous donnent les plus sûres indications : « Un autre te ceindra et te mènera où tu ne voulais pas aller, » dit Notre-Seigneur à saint Pierre. « Les événements sont des maîtres que Dieu nous donne de sa main. » Comment allons-nous les accueillir ?

Si nous acceptons la vie passivement, en courbant le dos, en disant oui parce que nous ne pouvons pas faire autrement, c’est peu pour un chrétien. Mais si nous acceptons avec joie la volonté divine, pour l’amour de Dieu, alors on peut dire que la mortification, quand elle se présente, est bien volontaire, quoique non choisie. Par là nos vies s’établissent dans un authentique esprit de pénitence, nous rapprochant en quelque sorte des âmes qui, dans les monastères, en font profession. N’avons-nous pas en effet, comme elles, mille occasions de pratiquer les conseils évangéliques opposés aux grandes convoitises humaines, malgré les différences de nos existences dans leurs formes et leurs devoirs ?

Esprit de pauvreté

La contrainte financière est actuellement effective à un degré plus ou moins grand dans la plupart de nos familles. Ne pas se laisser irriter par ses constants rappels, ne pas gémir en comparant notre vie à l’existence d’autres, accepter de porter une étoffe moins jolie, de prendre et d’offrir des repas moins fins, de vivre dans un cadre défraîchi qu’on ne peut renouveler, dans un espace trop étroit, mal chauffé ; de supprimer des distractions coûteuses, un spectacle, un voyage ; d’exercer un métier avec ardeur pour faire vivre les siens ; de s’y tenir malgré un trajet fatigant ; de se priver d’aide et d’outillage sans révolte, de demander aux autres de prendre part à tous ces sacrifices, tout en gardant la plus lourde part. Se voir, et leur voir interdire certaines formes de beauté, des fleurs, un piano, des beaux livres…Accueillir les renoncements exigés dans la vie amicale, sociale et même spirituelle. Accepter enfin et offrir la pauvreté dans notre être physique et moral : notre fatigue, nos maladresses, nos incapacités ; accepter, sans ralentir nos efforts de progrès, de ne pas apporter au conjoint, aux enfants, tout ce que nous voudrions pour eux, et aussi de ne pas recevoir ce que nous en espérions. Être heureux de nous dépouiller complètement de nous-même, de voir notre temps, nos pensées, nos forces, notre tranquillité dévorés par les nôtres ; être heureux de ne plus rien posséder qui ne soit pas partagé…  « Mon Dieu, j’accepte toutes ces pauvretés que vous voulez pour moi ! »

 

Esprit de chasteté

La chasteté des époux est d’abord la fidélité de l’un à l’autre jusque dans les moindres pensées. Il est certain que pour beaucoup d’époux, même fortement attachés l’un à l’autre, il y a là de nombreuses occasions de mortification, « tant la nature trouve de plaisir dans les imaginations vagabondes, les rêveries où l’on trouve une liberté illimitée, les relations, une amitié où, sans qu’on veuille entrer aucunement dans le domaine du péché, la vague idée qu’on joue un peu avec le feu ne manque pas d’un certain attrait » (Jeanne Leprince-Ringuet). L’esprit de pénitence, dans cet ordre, nous poussera à ne pas rechercher l’attention, ni les attentions d’autrui, à vouloir oublier volontairement un compliment, à déchirer une lettre flatteuse, à renoncer à telle sortie, à telle occasion de nous montrer sous un jour séduisant… Cependant, ici encore, que nos mortifications soient simples, discrètes, ne mettent pas de complications, de tensions là où il faut la droiture et « la liberté des enfants de Dieu ». La chasteté, c’est encore la façon d’user avec élévation d’âme des joies de l’amour charnel et d’en demeurer maîtres ; c’est la pratique d’une continence que la pauvreté, le manque de santé… rendent souvent obligatoire. Alors la pénitence peut devenir héroïque, toute d’amour : amour de Dieu dont on ne veut pas transgresser la loi ; amour humain de l’époux plein de compassion pour la faiblesse féminine et soucieux de ne point l’accabler d’un cruel fardeau, ou de l’épouse qui, au contraire, accepte la perspective d’un devoir pesant afin que Dieu ne soit pas offensé, et son mari tenté au-delà de ses forces.

Esprit d’obéissance

Ici, l’on a affaire à un conjoint imparfait, à un travail pressant, aux imprévus, aux nécessités des divers membres de la famille… Et voici requis l’abandon de ce qui nous tient peut-être le plus à cœur, celui de  notre volonté propre, celui de notre point de vue pour avoir «  le respect de l’autre », pour réviser nos manières d’être, pour nous améliorer dans notre rôle éducatif, pour accepter de transformer, et même de perdre cette chère petite personnalité à laquelle nous sommes si attachés…Sacrifier nos goûts pour telle occupation, telle manière d’arranger la maison, d’organiser les vacances, renoncer à une foule de petites habitudes sans importance en soi, mais qui sont dans notre tempérament, dans nos préférences sans l’être dans ceux des autres… Ici particulièrement, la mortification, sans être absolument choisie, peut devenir vraiment volontaire. On voit tant d’époux qui n’ont pas un tel esprit de soumission et d’humilité. Cependant que de joie et quelle libération apporte cette attitude de pénitence difficilement acquise ! Elle n’est pas une démission de notre dignité, ni une lâcheté devant les responsabilités dont nous chercherions à nous débarrasser. Joie et libération sont vraiment les fruits d’un réel esprit de pénitence. L’impatience, la tristesse devant les difficultés ne sont plus nôtres et laissent place à la bonne humeur à travers les soucis quotidiens. Et si, malgré une joie profonde de l’âme nous avons un tempérament un peu bouillant, agité, prêt aux paroles ou aux gestes trop prompts, ou au contraire froid et dépourvu de gaité, une mortification tout indiquée et nécessaire au bonheur des autres sera de le travailler pour le rendre plus… « eutrapélique » ! De même en ce qui concerne les défauts de la parole : « Mieux vaut triompher de sa langue que jeuner au pain et à l’eau » (Saint Jean de la Croix)

Ainsi Dieu nous mène par ses chemins, qui ne sont pas toujours les nôtres. Que nos pensées deviennent les pensées du Seigneur ; que nos voies suivent ses voies, même rudes, jusque dans les moindres détails de notre devoir d’état ; ce sera le fruit d’amour pour Dieu qui doit nous inspirer l’esprit de pénitence à rendre notre volonté plus souple, plus aimante, plus virile et plus allègre.

Saint et joyeux Carême !

 

Sophie de Lédinghen

 

Devoirs d’époux

« Est sans tache devant Dieu quiconque accomplit, avec fidélité et sans faiblesse, les obligations de son état. Dieu n’appelle pas tous ses enfants à l’état de perfection, mais Il invite chacun à la perfection de son état. » (Abbé de Fontgombault)

Pour les époux catholiques, le mariage n’est pas une alliance purement humaine ; il est un contrat où Dieu a sa place, la seule qui lui convienne, c’est-à-dire la première.

Le mariage a été institué pour la propagation du genre humain, fin première du mariage. Viennent ensuite les fins secondaires qui sont multiples, et non facultatives ou négligeables, mais tout simplement subordonnées à la première. Il s’agit du soutien mutuel et du remède à la concupiscence qui viennent soutenir, perfectionner la fin première comme un appui à la fois matériel, physique, sentimental, affectif, spirituel. C’est ce soutien mutuel qui est, pour les époux, le moyen providentiel de leur perfectionnement personnel et social, de leur progrès moral et de leur sanctification. C’est en recherchant les fins secondaires que les époux atteindront la fin première.

 

Les fins secondaires

Cette charité que les époux se doivent l’un à l’autre ne sera pas seulement une inclination purement charnelle, ou bornée à des paroles affectueuses, mais résidera dans les sentiments intimes du cœur, et se manifestera par l’action extérieure. L’amour conjugal n’est pas une passion égoïste mais un don mutuel et affectif. « Devoir si grand que l’Apôtre ne veut pas qu’un des époux s’en puisse exempter sans le libre et plein consentement de l’autre. » (Saint François de Sales)

La fidélité conjugale requiert que l’homme et la femme soient unis par un amour particulier, par un saint et pur amour ; ils ne doivent pas s’aimer à la façon des adultères, mais comme le Christ a aimé son Église. Et le Christ a assurément enveloppé son Église d’une immense charité, non pour son avantage personnel, mais en se proposant uniquement l’utilité de son épouse. Le bien de la fidélité conjugale comprend donc l’unité, la chasteté, une digne et noble obéissance qui ont pour effet de garantir et de promouvoir la paix, la dignité et le bonheur du mariage.

Le remède à la concupiscence soutient et fortifie les époux. On appelle concupiscence cette tendance aveugle de nos facultés sensibles vers leur objet. En tant que tendance naturelle, la concupiscence est bonne, mais depuis la révolte d’Adam et Eve contre Dieu, cette tendance est désordonnée, la chair est désormais en révolte contre l’esprit. Ce désordre entraîne des tentations des sens contre lesquelles il faut parfois lutter avec force, obligeant la volonté à choisir entre le bien particulier et le bien supérieur. Ces choix sont certes des tentations, mais qui fournissent aussi des occasions de prouver à Dieu notre amour, d’augmenter notre mérite et de fortifier notre vertu. Quelle que soit la violence de la tentation, Dieu est là avec sa grâce toute puissante pour nous soutenir dans le combat.

« L’homme est le prince de la famille et le chef de la femme ; celle-ci, toutefois, parce qu’elle est, par rapport à lui, la chair de sa chair et l’os de ses os, sera soumise, elle obéira à son mari, non point à la façon d’une servante, mais comme une associée ; et ainsi son obéissance ne manquera ni de beauté ni de dignité. Dans celui qui commande et dans celle qui obéit – parce que le premier reproduit l’image du Christ, et la seconde l’image de l’Église – la charité divine ne devra jamais cesser d’être régulatrice de leur devoir respectif. » (Léon XIII)

« La sanctification mutuelle dans la société domestique ne comprend pas seulement l’appui mutuel ; elle doit viser plus haut, elle doit viser à ce que les époux s’aident réciproquement à former et à perfectionner chaque jour davantage en eux l’homme intérieur. » Leur vie quotidienne les aidera ainsi à progresser jour après jour dans la pratique des vertus, à grandir surtout dans la vraie charité envers Dieu et envers le prochain, cette charité où se résume en réalité « toute la Loi des Prophètes ».

Les deux époux deviennent sanctificateurs l’un de l’autre et l’un pour l’autre. Non pas seulement au sens des réconforts, des élans du cœur, des exemples, des attentions, des dévouements, du partage des épreuves. Au moment où ils ont échangé de façon libre et sincère leur consentement, « ils ouvrent l’un à l’autre le trésor de la grâce sacramentelle ». Il y a là un cadeau particulier du Christ, adapté aux âmes qui se disent « oui », et ensuite à tout leur état de vie. Toutes les vertus, qualités et générosités ultérieures sont transfigurées par cette grâce. Toutes les fidélités y trouvent un appui spécial et privilégié. (Pie XI Casti connubii)

La fin première

Pour aider les époux à remplir leur mission et atteindre la fin première du mariage, qui est non seulement la procréation mais l’éducation des enfants, l’Église fait appel à la raison, au devoir et à la conscience, au véritable amour, à la générosité dans le don de la vie, aux responsabilités des parents, pour décider devant Dieu du nombre d’enfants qu’ils seront en mesure d’élever.

Les parents chrétiens doivent comprendre qu’ils ne sont pas seulement appelés à propager et à conserver le genre humain sur la terre, qu’ils ne sont même pas destinés à former des adorateurs quelconques du vrai Dieu, mais à donner des fils à l’Église, à procréer des concitoyens, des saints, et des familiers de Dieu. C’est pourquoi, dès que naît un enfant dans une famille catholique, il y a obligation de le baptiser. Sans ce sacrement, il ne peut y avoir de salut pour son âme puisque, n’étant pas membre de l’Église, il ne reçoit pas la vie de la grâce.

Un impérieux devoir d’éducation de leurs enfants s’impose aux parents à la fois par la nature, le Créateur, et l’Église catholique. Ce tout-petit enfant que Dieu vient de leur confier, les parents doivent le prendre dans cet état qui n’est presque rien, et l’élever, le faire monter, le conduire jusqu’à la taille du Christ. Œuvre de longue haleine, souvent difficile et ingrate, toujours exaltante ! La raison de ce devoir réside dans le fait que l’enfant n’est pas la propriété de ses parents. Il est un dépôt que Dieu leur a confié et qu’ils doivent conduire jusqu’à sa pleine autonomie, lui fournissant tout ce qui lui est nécessaire pour atteindre le but en vue duquel ils l’ont procréé : le Ciel !

Pour cela, les parents exerceront leurs enfants à développer cette grâce de leur baptême, cette vie divine sanctifiante, cette charité qui rend gracieux aux yeux de Dieu, par la prière et la pratique des sacrements. Alors, dans ces enfants transformés jusqu’au plus intime par cette charité surnaturelle apparaîtra la distinction de fils de Dieu qui gagnera les cœurs autour d’eux ; et leur savoir vivre, leurs bonnes manières, fleurs de la charité, les rendront agréables à leur prochain.

A l’éducation des parents se rattachent deux devoirs : celui de l’école et celui de l’éducation sexuelle.

Pour une éducation cohérente, l’école n’est pas autre chose que le « prolongement de la famille ». Pour la famille chrétienne, il ne saurait y avoir d’autre école que chrétienne. En effet, l’éducation a pour but de préparer l’enfant à sa destinée. L’école chrétienne est celle où tout l’enseignement, toute l’ordonnance de l’école, personnel, programme et livres sont régis par un esprit vraiment chrétien, sous la direction maternelle vigilante de l’Église, de telle façon que la religion soit le fondement et le couronnement de tout l’enseignement à tous les degrés, non seulement élémentaire, mais moyen et supérieur. Et n’allons pas croire que le jardin d’enfants (classes de maternelle) le plus proche de chez nous soit sans danger pour l’âme des petits qui ne font « que du coloriage »… Les histoires que l’on y raconte ne sont plus les contes de notre enfance, mais peuplées de personnages wokistes, et autres « nouveautés désordonnées » plutôt alarmantes… Là où les parents sont contraints de confier leurs enfants à l’école neutre, ils se doivent de collaborer loyalement et cordialement avec les maîtres de cette école, de surveiller et de compléter la formation donnée à leurs enfants.

« Les parents ne sauraient se dérober à cette responsabilité de donner une éducation sexuelle ni par une lâche abstention, ni par un silence coupable à l’heure où leurs enfants attendent d’eux, aux diverses étapes de la croissance, des explications légitimes » (Cal Suenens). Deux erreurs sont à éviter dans cette éducation : la première consiste à en dire trop, et la deuxième pas assez. Beaucoup trop de parents, se dérobant à leurs responsabilités, ne parlent pas de ces choses avec leurs enfants. C’est un grave problème car les conséquences en sont désastreuses pour les enfants. N’ayant pas appris de ceux qui avaient grâces d’état pour le renseigner sur ce qu’il avait besoin de savoir, l’enfant a recherché par lui-même, ou bien s’est laissé former, ou plutôt déformer, par un inconnu plus ou moins vicieux qui lui a appris le mal au lieu de lui révéler le plan de Dieu.

 

Faisons donc de toutes nos obligations familiales un véritable devoir d’état, en les centrant sur Dieu, en faisant d’elles un acte continu d’amour et d’offrande. Alors notre activité s’orientera d’elle-même dans le sens voulu par Dieu, notre devoir d’état sera vraiment le prolongement de notre vie contemplative ; et le rayonnement de notre vie familiale en deviendra infiniment plus efficace. C’est ainsi que les époux chrétiens, appuyés l’un sur l’autre, comprendront que le mariage, sacrement d’union, est aussi un sacrement de persévérance.

 

Sophie de Lédinghen