La famille, lieu d’action

Chers grands parents,

Dans les précédents articles, nous avons traité essentiellement du rôle des grands parents dans la construction, voire la survie de leur propre famille. Il nous paraît utile de parler du rayonnement qu’elle doit avoir sur la société.

Il serait tentant de croire que, dans ce monde « anti-Christ » où « tout est mauvais », le rôle de la famille catholique se résume à exister, éduquer les siens, considérant qu’à l’extérieur il n’y a plus rien à faire. Un saint prêtre[1] de la fin du 19ème siècle exposait au contraire le rôle essentiel que devaient avoir les familles dans cette situation d’effondrement.

La situation de nos contemporains peut s’assimiler à celle d’une population d’affamés. Dans ce cas, le devoir du catholique est de se priver même du nécessaire pour lui venir en aide. Notre société est dans une situation plus grave que celle de la peste ou de la guerre… « La plupart des âmes vont en enfer parce que personne ne prie pour elles » disait la sainte Vierge à Fatima. Il nous faut prier et agir.

La famille ne peut donc se placer en simple spectatrice lucide de la situation, abonnée aux bons journaux, mettant ses enfants dans des écoles réellement catholiques, critiquant avec sévérité la perversion de ses contemporains.

Tout chrétien doit être apôtre et les grands-parents doivent prêcher ce principe dans leur famille.

Cette apostolat nécessite de s’unir : « Là où deux ou trois sont unis en Mon nom, Je suis au milieu d’eux » et « qu’ils soient un comme Mon père céleste et Moi-même sommes un ». Seul, l’individu est impuissant. A cet égard, on ne peut qu’admirer l’unité dont ont su faire preuve nos adversaires pour instiller puis imposer tous les principes destructeurs de la société chrétienne, avançant pas à pas pour rendre évidement nécessaires toutes les perversités de notre société laïque. L’avortement considéré comme une abomination par la plupart de nos concitoyens dans les années 60 est considéré comme un droit absolu par les mêmes qui le condamnaient !

Engageons donc nos familles et engageons-nous nous-mêmes dans les mouvements existants pour défendre la chrétienté que ce soit par le scoutisme, les mouvements catholiques de familles, les chapelets des mamans, les pèlerinages ou autres. Avant de créer du nouveau, soutenons ce qui existe. Cela n’est pas facultatif !

Les responsables de mouvements connaissent les habituelles objections2…

  • « Je ne suis pas compétent, ça n’est pas le moment, j’ai déjà donné… » Les mouvements catholiques ne sont pas des groupements de saints experts mais d’hommes et de femmes dont le principal mérite est d’être là, prêts à servir avec leurs qualités et leurs défauts.
  • « Mon devoir d’état est ailleurs, je dois d’abord être à ma femme et mes enfants ! » Certes mais, comme nous le disions plus haut en période de nécessité, le catholique doit donner plus que son superflu ! De plus, l’exemple que nous donnerons sera un modèle à suivre pour nos enfants et petits-enfants.
  • « Ces œuvres sont inutiles, elles ne touchent qu’un milieu restreint, leur bilan est négligeable ». C’est évidemment faux… certains mouvements ont pour cible les milieux déchristianisés et même dans les milieux catholiques, le besoin de conversion est nécessaire.

Nos familles ne doivent pas rester fermées sur elles-mêmes mais rayonner par l’action. Elles doivent être présentes partout où il y a des combats à mener. Chacun doit s’engager là où il se sent le plus de capacités. La prudence nécessaire à tout engagement devra être compensée par une grande générosité. Comme le disait René Bazin dans le précédent numéro, « n’ayons pas peur » ou plutôt, ayons peur de n’en faire pas assez. Prenons conseil mais sachons prendre des risques !

La position de grands-parents coïncide souvent avec le départ à la retraite ! C’est bien le moment de donner l’exemple3 et de faire profiter d’autres de notre expérience en nous engageant !

Prions sainte Anne de nous encourager aux engagements nécessaires de nos familles car les conversions ne s’obtiennent qu’à la suite de longs et pénibles efforts dont la victoire n’est qu’un fruit éloigné. « Autres sont ceux qui sèment, autres sont ceux qui récoltent ». Il faut agir pour le Christ. Les domaines d’action sont divers mais, finalement, le salut de la société se fera par le catholicisme4.

Des grands-parents

1 « Le devoir des catholiques » 1875 Abbé Le Conte, disponible sur Gallica

2 Ces objections sont citées dans le fascicule de l’abbé Le Conte… comme quoi, rien n’est nouveau !

3 D’autant plus que l’expérience montre que, dans la plupart des cas, quand les parents s’engagent, les enfants le font aussi !

4 Loin de nous l’idée de critiquer l’action politique qui, menée avec prudence contribuera, parfois indirectement, à la restauration de la société chrétienne.

N’ayez pas peur!

Chers grands-parents,

            Vous avez un rôle important à tenir vis-à-vis de vos petits enfants pour transmettre les richesses de votre expérience. Vous trouverez ici un texte de René Bazin qui pourra vous inspirer pour discuter avec eux :

            « Enfants, si vous voulez être des Français dignes de votre race, défaites-vous de plusieurs peurs que voici :

– N’ayez pas peur d’être bons. C’est là une crainte très répandue et qui donne de leur audace aux mauvais. Ne criez pas votre bonté, mais ne la cachez pas à cause de l’exemple.

– N’ayez pas peur du danger, toutes les fois que le devoir commande. Allez-y vivement, joyeusement comme à la fête.

– N’ayez pas peur des échecs. Le premier est nécessaire car il exerce la volonté. Le second peut être utile. Si vous vous relevez du troisième, vous êtes un homme, vous êtes comme le raisin qui n’est jamais si bon que s’il mûrit sur les cailloux.

– N’ayez pas peur de la médiocrité de fortune. Soyez persuadés que la paix, la fierté, la générosité, l’honneur, la joie aussi, ont souvent été pauvres chez nous. Il y a des races qui cherchent l’argent passionnément. Il y en a qui en usent et qui croient à mieux. La plus belle race française a toujours été ainsi.

– N’ayez pas peur du victorieux, comme si la victoire était une raison. Ne restez pas dans l’esprit de la défaite. Les vaincus s’accusent trop eux-mêmes, ils perdent la moitié de leurs forces à copier leur ennemi. N’ayez pas peur parce que vous vous êtes trompés de bonne foi, mais relevez-vous de l’erreur. Les saints comme tous les chefs-d’œuvre se font lentement.

– N’ayez pas peur de la mode ; ne jugez pas d’une cause, d’une idée, d’une vérité par le nombre de ses partisans. Voyez les chiens. Ils ne considèrent pas la pauvreté de leur maître, ni son isolement. Ils l’aiment. C’est un exemple. Vous aimerez Notre-Seigneur Jésus-Christ dans l’abandon où les hommes le laissent.

– N’ayez pas peur de l’obscurité, de la difficulté de votre métier, car l’homme vaut non pas par l’importance et le retentissement de ses actes mais par la volonté qui l’anime. Un brin de paille ramassé avec amour par une fermière pour le nid de ses poules méritera plus de récompense que dix actions d’éclat faites orgueilleusement. Quand l’homme a cassé des mottes, semé de l’herbe, raboté des planches, conduit un tramway, graissé des roues de wagon, copié des lettres, aligné des chiffres, quoi qu’il ait fait, s’il l’a fait honnêtement, s’il n’a point causé de tort à son voisin, ni blasphémé, ni méconnu la bonté par qui tout subsiste, Dieu lui donne son paradis. Pour ceux qui savent voir, tous les métiers luisent également de ce reflet d’en haut.

– N’ayez pas peur de la guerre. Priez pour qu’elle soit épargnée à votre pays parce qu’elle est accompagnée de grands maux. Priez pour qu’elle ne soit pas injuste ; mais si elle est déclarée, jetez-vous y !

– N’ayez pas peur de la mort, parce qu’elle n’est qu’un passage, le défilé coudé, obscur pour nous, qui s’ouvre sur la plaine de lumière.[1]»

[1] La douce France – René Bazin – Tome Ier – Editions Sainte Philomène

La bienveillance

Chers grands parents,

La maison des grands-parents est évidemment un lieu d’échanges de tous types et de conversations…

Ces échanges donneront forcément lieu à des désaccords qu’il appartiendra aux grands-parents de régler au mieux dans la charité et l’harmonie familiale… C’est fatal, voire nécessaire. Des familles différentes prennent presque obligatoirement des options différentes, la plupart du temps sur des sujets secondaires mais parfois sur des options plus graves. Le rôle des grands-parents est là essentiel pour faire la part des choses en ne transigeant pas sur l’essentiel ; les règles de la famille, les lois morales n’admettent pas d’approximation… tout ce qui peut mettre en péril la vie même de la famille doit être jalousement préservé ! Ce qui est mal ne doit jamais être qualifié de bien même si l’on croit cela nécessaire pour l’harmonie familiale. Ne soyons pas de ces mauvais guides dont parle Isaïe « qui nomment le mal bien et le bien mal et appellent paix ce qui est le coma ». Il est parfois nécessaire de critiquer, et la fermeté, quant à l’expression des principes, est un devoir ! Se taire ne peut que maintenir une paix apparente. Le coma dont parle Isaïe est bien loin de la vraie paix !

Mais, veillons à la manière ! Rappeler les principes n’est pas mettre de l’huile sur le feu ! Je pense qu’il faut surtout prévenir, c’est-à-dire utiliser toutes les situations dont nous sommes témoins pour rappeler les principes qui doivent régir une famille. Il est plus facile de rappeler les principes, par notre attitude et par nos paroles quand nous sommes amenés à commenter des situations extérieures à la famille que de le faire sur des situations nécessairement brûlantes nous concernant directement.

Dans une famille catholique, la fidélité, les obligations religieuses ne sont pas à option ! Même si on doit être charitable dans l’expression des choses, on s’abstiendra absolument de passer sur ce qui est contraire à la vertu. Une chose est de trouver des circonstances atténuantes à un mauvais choix, une autre est de l’approuver. Un divorce, une infidélité, un abandon de la pratique religieuse doivent être condamnés avec la rigueur qui s’impose ! Et tout devra être fait pour que le retour à la normale soit favorisé ! Plutôt que dire « elle a quitté son mari mais reste une femme merveilleuse ». On dira plutôt « elle a sûrement gardé de bons sentiments chrétiens et nous ferons tout pour qu’elle retrouve une situation régulière. Quand elle sera rentrée dans le droit chemin, nous sommes tout à fait prêts à l’accueillir. Mes petits-enfants, prenez-en de la graine ! Quand on se marie, on doit savoir que c’est jusqu’à la mort… ».

Avant que nos petits-enfants n’arrivent à l’âge du mariage, nous aurons malheureusement de multiples possibilités d’illustrer ce qu’il ne faut pas faire et quelles sont les causes et les conséquences des mauvais choix de la vie ! Utilisons-les, autant que de besoin, autant que la discrétion nous le permet, et en ayant soin de ne pas exaspérer les jeunes à qui nous nous adressons !

La bienveillance ne consiste pas à dire que tout est bien (on ne doit jamais transiger sur la vérité !) mais à parler avec la discrétion requise (ce qui est secret ne doit pas être révélé) quand c’est nécessaire (et les leçons à donner à nos jeunes sont nécessaires) et à juger les actes tout en étant indulgents pour les personnes.

Prions sainte Anne de nous conseiller dans ce délicat travail de grands-parents et de nous aider à piloter nos familles avec l’autorité et la délicatesse nécessaires.

Des grands-parents

L’accueil des pièces rapportées

Chers grands parents, (ou plutôt beaux-parents)

Quelles doivent être les principales qualités d’une belle-mère ?

Elle doit être sourde, muette et aveugle !

Cette facile plaisanterie sur les belles-mères illustre la difficulté qu’il peut y avoir à faire vivre sous le même toit des familles d’origines différentes. Elle montre aussi la complexité qu’il peut y avoir, dans une famille qui a trouvé son équilibre, à intégrer une nouvelle pièce, qui a nécessairement reçu un héritage au moins légèrement différent.

Pourtant, l’intégration des époux de nos enfants est capitale si l’on veut préserver l’unité familiale nécessaire à la bonne entente et à l’épanouissement de nos familles !

En la matière, il n’y a certainement pas de recette unique. Il nous paraît cependant utile de réfléchir aux conditions nécessaires pour créer les meilleures conditions d’intégration puis de parler de la manière de régler les difficultés.

Le premier souci des nouveaux beaux-parents sera de réserver le meilleur accueil au nouvel arrivant, quitte à « avaler quelques couleuvres ». Celui-ci devra être valorisé autant que faire se peut. Dans les débats familiaux, on prendra soin de le soutenir de façon qu’il ne se trouve pas seul face au reste de la famille. Un enfant ne reprochera jamais à ses parents d’avoir soutenu son époux même contre lui-même ! En revanche, voir son époux mis en difficulté face à ses beaux-frères et belles-sœurs est de nature à générer de l’aigreur voire des inimitiés[1]. Par cette action charitable, les parents favoriseront l’unité familiale au bénéfice de tous.

Il est bon, pour conforter cet accueil que les parents cultivent des relations amicales avec la famille du nouvel arrivant (cartes de vœux, téléphone pour partager les heureux événements…)

Il y a, bien sûr, les inévitables « réglages » de l’intégration. Dans ce domaine, la discrétion et la délicatesse seront de mise. Sur les aspects secondaires, on informera discrètement le nouvel arrivant des usages de la famille en étant aveugle sur les résultats immédiats. Dans bien des cas, le mieux sera de faire passer cette information par l’enfant de la famille. Si le défaut n’est pas corrigé, il conviendra, avant d’intervenir de vérifier que la gravité de la chose le justifie… il peut être nécessaire d’accepter des imperfections pour conserver la cohésion de la famille… L’unité familiale justifie certainement quelques approximations !

Il y a malheureusement des situations plus graves qui peuvent exiger des décisions plus radicales. Si la morale de la famille est mise en danger, il pourra être nécessaire de prendre ses distances vis-à-vis du ménage concerné ! Là aussi ces mesures devront être prises à regret, en créant le moins de fractures possibles et en faisant savoir que le retour au bercail est intensément désiré. On prendra soin, tout en étant ferme sur les principes, de limiter les paroles de condamnation au strict nécessaire !

Prions sainte Anne de nous conseiller dans ce délicat travail de beaux-parents et de nous aider à piloter nos familles avec l’autorité et la délicatesse nécessaires.

Des grands-parents

[1] Dans un même ordre d’idée, jamais on ne dira du mal des pièces rapportées dans leur dos !

Les usages

Chers grands parents,

De plus en plus, dans nos familles, sous l’effet de la contagion ambiante, les usages catholiques et français qui structuraient la vie s’estompent voire disparaissent. La vie moderne, l’urgence permanente, la fatigue nous font perdre les usages élémentaires d’élégance qui faisaient notre culture.

Ces abandons ne sont pas anodins car ces usages ont été forgés au cours des siècles par la catholicité. Ils sont révélateurs d’un enracinement de notre religion dans notre vie quotidienne.

Aux Etats-Unis, où les usages étaient autrefois très marqués, tout a disparu en deux générations. Tout le monde se souvient du film « la petite maison dans la prairie » où les parents président la table, les tenues, les usages sont appliqués à la lettre, le déjeuner commence par le bénédicité… Aujourd’hui, si vous allez dans une famille américaine, tout a disparu. La famille s’installe comme elle arrive, il n’y a plus de réelle heure pour les repas, chacun va se servir dans le frigidaire et quitte la table à son gré. Les enfants saluent leurs parents par un « hey » qui pourrait aussi bien s’adresser à un camarade de leur âge…

Ces nouveaux usages ne sont pas sans effet sur la vie morale. Un prêtre affecté dans le Kansas nous disait que, quand une famille retournait à la tradition, il y avait tout un travail d’éducation à refaire car cet abandon des usages était en fait le triomphe de l’individualisme !

Nos vieux usages sont, dans une certaine mesure, la marque de la vertu catholique. Ils sont l’acceptation d’usages communs, donc de modestie, d’attention aux autres… on se sert après les autres, on passe le plat, on s’endimanche (ce qui est l’application visible du troisième commandement « tu sanctifieras le jour du Seigneur »). Leur abandon est donc, dans une certaine mesure, le triomphe de l’individualisme !

Que faire ? Ne rien changer ? Sûrement pas, les usages doivent s’adapter à l’époque !

Il faut discerner, dans les changements actuels, ceux qui sont nécessités par l’époque (logement petits, délais restreints pour les repas …) et ceux qui sont les fruits de l’individualisme ou de la paresse !

Je pense que les usages doivent respecter quelques règles : La première étant qu’il y a des règles 1 ! Je n’en retiendrai que deux qui me paraissent essentielles parce que porteuses de vertu.

  • On parle aux adultes avec respect. Si les jeunes se saluent d’un simple « « bonjour ! », quand ils saluent leur père, c’est « bonjour papa 2».
  • Les repas doivent être organisés pour être des moments d’attention aux autres et de conversations 3. Les tenues doivent être correctes, « endimanchées » le dimanche et l’usage doit faire que chacun est tourné vers les autres.

Je ne parlerai pas de tous les autres usages, nécessaires à une bonne vie commune concernant l’usage du téléphone, de la musique, du réflexe du service 4

Tous ces principes doivent évidemment être appliqués avec discernement. Les vacances sont un moment de détente et les ménages peuvent être fort différents. Des exceptions, dictées par la charité et le souci de la bonne ambiance doivent permettre à ces usages, tout en facilitant la vie commune, d’être mis en application d’une manière qui ne soit pas pesante. On permettra par exemple aux petits de rejoindre le déjeuner pour le dessert du dimanche, on tolérera, à titre exceptionnel, un retard au déjeuner pour finir une activité…

Tout cela doit être compris dans le sens où ces usages ont été adoptés : faciliter la vertu et la vie commune par des comportements chrétiens et communs.

Prions sainte Anne de nous conseiller dans ce délicat travail de grands-parents et de nous aider à piloter nos familles avec l’autorité et la délicatesse nécessaires.

Des grands-parents

1 On me dira que les règles ne sont pas les mêmes chez les autres grands-parents. Ça n’est pas grave ! Les enfants doivent comprendre que les familles ont leurs usages propres. Si l’on ne fait pas de la même manière chez grand-père et grand-mère que chez bon-papa et bonne-maman c’est aux enfants de s’adapter !

2 En application de « tes pères et mères honoreras, afin de vivre longuement ».

3 A cet égard, il est certainement bon que les petits déjeunent avant les grands et ne soient pas ensuite admis à la salle à manger.

4 Il arrive parfois que la grand-mère soit la seule personne  à la cuisine pendant que tout le monde discute !