Constitution et avortement : loi constitutionnelle du 8 mars 2024

La constitutionnalisation de la liberté de l’avortement fait partie des sujets que nous préférerions naturellement éviter tant elle heurte les consciences droites et montre le fossé qui sépare les catholiques fidèles et les défenseurs de la loi naturelle de la quasi-totalité de la classe politique et médiatique, et même de la grande majorité de nos contemporains. Il faut dire que peu de choses nous ont été épargnées dans les derniers jours de février et la première semaine de mars 2024 : la hâte avec laquelle ont été conduits les débats, les très fortes majorités des votes favorables à la loi dans tous les groupes politiques, la faiblesse des opposants dont le nombre diminuait au fil du temps et qui contrastait avec le triomphalisme débridé de ses promoteurs – le Premier ministre a parlé à cette occasion de « la France, phare de l’humanité » , la timidité de la réaction de l’Eglise catholique, sans compter l’illumination de la tour Eiffel qui affichait, le soir du vote final, les mots « mon corps, mon choix » et la cérémonie organisée place Vendôme pour l’apposition du sceau de la République sur la loi promulguée par le chef de l’Etat. Ce déferlement peut apparaître dérisoire tant le combat des partisans de la révision constitutionnelle fut facile et dénué d’embûches. Il montre en creux la gravité de l’atteinte ainsi portée à la loi naturelle et à ce qui reste de la France chrétienne, ainsi que la facilité avec laquelle pourraient être demain adoptées, sans rencontrer de résistance, d’autres réformes mettant en péril les îlots de chrétienté qui subsistent.

« La France, ont clamé les partisans du texte, est le premier pays de la planète à inscrire la liberté d’avorter dans sa constitution et est fière d’envoyer ainsi un signal de libération à toutes les femmes du monde au nom du droit de celles-ci à disposer de leur corps.» Tout est faux dans cette assertion. Le maréchal Tito avait déjà fait inscrire cette sinistre liberté dans la constitution yougoslave après la seconde guerre mondiale et les constitutions de deux pays européens y font aujourd’hui indirectement référence. Avorter n’est pas pour une femme disposer de son corps mais de celui d’un autre être humain dont la vie a commencé et qui est privé du droit de vivre. Comment parler de libération de la femme alors qu’il y a aujourd’hui tant d’avortements contraints ? Cette prétendue liberté de la femme repose bien sur une fausse conception de la liberté.

Le vote de la loi érigeant le droit à l’avortement en liberté constitutionnelle est une initiative des députés appartenant aux groupes insoumis et écologistes au cours de la précédente législature, (2017-2022) à laquelle les gouvernements de l’époque s’étaient opposés en arguant du caractère inutile d’un tel texte en l’absence de menace affectant ce droit. Après l’arrêt de la Cour suprême des Etats-Unis du 24 juin 2022 qui a supprimé la protection fédérale du droit à l’avortement et donné pleine compétence aux Etats fédérés pour >>> >>> légiférer dans cette matière, plusieurs propositions de loi ont été déposées dans les deux assemblées du Parlement français pour « inscrire le droit à l’IVG dans la Constitution ». Le Sénat a rejeté le 19 octobre 2022 la proposition déposée par 118 sénateurs appartenant à sept groupes politiques alors que l’Assemblée nationale a adopté le 24 novembre 2022 un texte identique. Celui-ci visait à introduire dans la Constitution, dans le titre VIII relatif à l’autorité judiciaire, après l’article 66-1 relatif à l’abolition de la peine de mort, un article 66-2 garantissant à la femme un droit effectif à l’IVG.  Après la protection de la vie des criminels, venait le droit de tuer les innocents. Le texte voté par les députés, avec cette fois-ci le soutien du gouvernement, est venu en discussion au Sénat le 1er février 2023. Tous s’attendaient à ce que la proposition soit à nouveau rejetée quand, à la surprise générale, le sénateur LR de la Manche, Philippe Bas, ancien ministre de la santé de Jacques Chirac, a déposé et fait adopter un amendement introduisant dans l’article 34 de la Constitution un alinéa selon lequel « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse ». Les différences entre les versions des députés et des sénateurs relèvent surtout de la sémantique mais le président de la République a décidé de reprendre le texte sénatorial pour en faciliter l’adoption et le texte voté le 30 janvier 2024 par l’Assemblée nationale, le 28 février par le Sénat et le 4 mars par le Congrès du Parlement dispose que « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. »

Les débats parlementaires ont été décevants. Les opposants ont insisté sur le caractère inutile du projet en l’absence de remise en cause du droit à l’avortement dans notre pays et sur leur attachement à la loi Veil de 1975 dont la révision constitutionnelle trahirait selon eux l’esprit. Les deux tentatives de modification du projet, qui se sont heurtées à un échec, ont porté sur la suppression de l’adjectif « garantie » et sur l’insertion dans le texte de la protection de la clause de conscience qui donne au personnel médical le droit de ne pas pratiquer ni de concourir à une interruption volontaire de grossesse. Au Congrès réuni le 4 mars 2024 à Versailles, 782 parlementaires ont voté pour, 80 contre – honneur à eux car ils ont été soumis à de fortes pressions – et 50 se sont abstenus, tandis que 23 n’ont pas pris part au vote.

Cette révision constitutionnelle s’inscrit dans la ligne des réformes qui depuis 1975 n’ont cessé d’élargir le droit à l’avortement. D’abord présenté par Simone Veil comme un « ultime recours » pour remédier à une « situation de détresse » et dépénalisé pour une durée de cinq ans s’il était pratiqué pendant les dix premières semaines de la conception du fœtus, l’avortement allait être autorisé de façon définitive en 1979, puis remboursé par la sécurité sociale en 1982. En 1993, la loi crée le délit d’entrave à l’IVG et, en 2001, le délai pendant lequel l’avortement peut être pratiqué est porté à douze semaines, les chefs de service hospitalier ne peuvent plus s’opposer à la pratique d’un avortement dans leur service et la femme ne peut plus être poursuivie pour un avortement hors délai. En 2012, le taux de remboursement par la sécurité sociale passe à 100 %, en 2014, est supprimée la « condition de détresse » d’une portée pratique limitée car la femme en était le seul juge, et en 2022, le délai passe de douze à quatorze semaines.

La liberté de l’avortement avait acquis, avant même la récente réforme, un statut quasi-constitutionnel dans la mesure où le Conseil constitutionnel avait à quatre reprises reconnu la conformité à la Constitution de la loi de 1975 et des mesures qui en élargissaient la portée. La décision du 27 juin 2001, à laquelle a participé Simone Veil en tant que membre du Conseil à cette époque, est intéressante à plusieurs titres : le Conseil avait été saisi par plus de 60 sénateurs (y en aurait-il encore un seul aujourd’hui ?)  sur l’allongement du délai de dix à douze semaines et sur la possibilité pour un chef de service de s’opposer à la pratique de l’avortement dans son service. Le Conseil a décidé que l’augmentation du délai ne remettait pas en cause l’équilibre existant entre la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme de dégradation et la liberté que tient la femme de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789  >>> >>> (« Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. »), ce qui ouvre un champ pour le moins indéfini à son application. Le Conseil, à aucun moment, ne reconnaît à l’embryon la qualité d’un être humain, semblant oublier le principe posé à l’article 16 du code civil : « La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie.» La suppression du droit, pour un chef de service, de s’opposer à ce qu’un avortement soit pratiqué dans son service fut jugée conforme à la Constitution en raison de l’existence de la clause de conscience du corps médical fondée sur la liberté d’opinion, reconnue par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le préambule de la Constitution de 1946 et la liberté de conscience considérée comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République. 

Les conséquences de cette réforme ont été soulignées : la clause de conscience du personnel médical, dont plusieurs députés insoumis et écologistes ont demandé la suppression dès le lendemain du vote, peut être considérée comme étant à risque malgré la décision du Conseil constitutionnel de 2001, le nouveau texte pourra encourager les pratiques eugénistes, et la possibilité de critiquer l’avortement pourra être censurée en tant qu’elle contreviendrait à l’exercice d’un droit constitutionnellement garanti. Nous avons déjà pu constater l’existence d’un tel risque avec les réactions aux propos courageux d’Aymeric Pourbaix sur Cnews selon lesquels l’avortement était la première cause de mortalité dans le monde, avant le tabac et le cancer. Plusieurs journalistes de la chaîne ont désavoué leur auteur et Cnews a dû platement s’excuser pour cette déclaration jugée transgressive. Pourtant les chiffres sont éloquents : il y a eu 232 000 avortements en France en 2022 et ce chiffre est en augmentation constante depuis une trentaine d’années – nous étions à 200 000 en l’an 2000 – ce qui représente 32 % des naissances. Ces chiffres placent la France en tête des pays européens pour le taux de recours à l’avortement : le rapport entre le nombre d’avortements et celui des naissances est de 12 % en Allemagne 12,5 % en Suisse et 16 % en Italie. En outre, la France est le seul pays d’Europe où ce taux continue à augmenter alors qu’il diminue dans les autres pays.

L’Eglise catholique a pris position contre l’inscription de l’avortement dans la Constitution française. Le responsable de Radio Vatican et de Vatican News a rappelé les paroles prononcées par le pape François en 2021 : « L’avortement est un meurtre » et s’interroge : « Comment est-il possible de juxtaposer dans la charte fondamentale d’un Etat le droit qui protège et celui qui sanctionne sa mort ? » La conférence épiscopale française a appelé les catholiques à être des serviteurs de la vie, de la conception à la mort, et a appelé « à soutenir ceux et celles qui choisissent de garder leur enfant (…) et à entourer de notre respect et de notre compassion ceux et celles qui ont eu recours à l’avortement ». Nous retrouvons là toute la prudence, pour ne pas dire plus, du corps épiscopal qui omet d’avertir sur la gravité du péché objectif que représente un tel acte.

 

Alors que faire dans « cette course à l’abîme d’une civilisation en perdition » pour reprendre les mots de Philippe de Villiers ? Ne pas nous décourager, ni nous résigner bien sûr. Essayer modestement de tirer quelques leçons de ce triste événement de notre vie politique. Ne pas céder sur les principes car, n’en déplaise à beaucoup de « modérés », la constitutionnalisation de l’avortement était en germe dans la loi Veil de 1975 et défendre celle-ci pour mieux combattre celle-là est une gageure. Reconnaître aussi que le vrai combat est surnaturel et que si l’avortement est contraire à la loi naturelle, il ne pourra pas être combattu par les seuls moyens humains bien que ceux-ci soient nécessaires.  L’avantage du combat surnaturel est que, même s’il se situe dans le long terme, c’est un combat assurément gagnant. N’oublions pas l’une des dernières paroles de Jésus-Christ à ses disciples : « J’ai vaincu le monde.» J’ai vaincu, cela veut dire que c’est déjà fait…     

Thierry de la Rollandière

 

Placements abusifs d’enfants :

une justice sous influence

Christine Cerrada, éditions Michalon, 2023

La rédaction de notre revue a souhaité proposer à ses lecteurs une recension de l’ouvrage de Christine Cerrada sur les placements abusifs d’enfants. Cette avocate qui milite dans l’association L’Enfance au cœur y mène une enquête sans concessions sur le système français de protection de l’enfance. Dans ce livre qui aurait mérité une plus grande audience, l’auteur met au jour les dysfonctionnements en s’appuyant sur une dizaine d’exemples concrets qui laissent perplexe sur la justice des mineurs et la compétence des professionnels de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE qui a remplacé la DDASS). Ceux-ci vont privilégier, dans leur mission d’assistance éducative, le placement des enfants à l’extérieur de la famille, le plus souvent dans des centres spécialisés.   

Les moyens dégagés par les pouvoirs publics pour la protection de l’enfance sont considérables : 8,4 milliards d’euros en 2018, dont 8 milliards à la charge des départements, le solde étant assumé par l’Etat. Le nombre d’enfants concernés par des mesures de protection était de 330 000 en 2018, chiffre en augmentation régulière de l’ordre de 3 % en moyenne depuis une vingtaine d’années, dont la moitié fait l’objet d’une mesure de placement en dehors de leur famille. D’après l’inspection générale des affaires sociales, la moitié de ces placements aurait pu être évitée, ce qui signifie que pour un enfant « maltraité » qui a pu être « sauvé » en le retirant de sa famille, il y en a un autre dont la trajectoire a basculé parce que le système de protection de l’enfance n’a pas agi avec le discernement requis.

La législation française, prise à la lettre, ne paraît pourtant pas encourager ces dérives. D’après l’article 375 du code civil, les mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par la justice si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises. Rappelons que les mesures d’assistance éducative peuvent être mises en œuvre en milieu ouvert, y compris dans la famille de l’enfant qui y fait alors l’objet d’un suivi socio-éducatif. L’article 375-1 de ce code précise même que le juge des enfants doit toujours s’efforcer d’obtenir l’adhésion de la famille et se prononcer en stricte considération de l’intérêt de l’enfant. Ces dispositions sont, dans la pratique, interprétées en contradiction avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme selon laquelle le placement d’un enfant est une mesure qui ne peut être prise que pour une raison « extraordinairement impérieuse ».     

Des dizaines de milliers de familles sont, chaque année, privées de la présence de leurs enfants parce qu’une situation familiale, le plus souvent banale, a été montée en épingle par un système socio-judiciaire qui dérive sans contrôle. Il est surprenant de constater la facilité avec laquelle une enquête sociale peut être déclenchée : il suffit d’un appel téléphonique signalant une « information préoccupante », passé au 119 par l’école, le médecin, l’hôpital, un proche malveillant ou mal informé, le parent qui n’a pas la garde de l’enfant, un voisin plus ou moins bien intentionné, ou même d’un signalement anonyme, pour que le service départemental d’aide à l’enfance décide en effet d’ouvrir une enquête. Celle-ci est le plus souvent confiée à une association privée qui va émettre des préconisations qui seront largement suivies par le juge des enfants. Ces recommandations sont orientées vers le placement des enfants en dehors de leur famille, par exemple dans un foyer géré par l’association, ce qui met celle-ci dans une situation de conflit d’intérêt évidente en étant à la fois prescripteur et fournisseur et en réduisant l’enfant au rôle de « client ». Les associations se partagent ainsi le budget alloué à l’ASE dont la Cour des Comptes a eu l’occasion de juger les comptes opaques.     

Il faut malheureusement insister sur le biais psychologique qui imprègne les rapports d’enquête sociale. Ceux-ci utilisent les mêmes termes et les mêmes clichés pour incriminer les familles après un examen superficiel de la situation, le plus souvent à charge, qui laisse une large place à la psychanalyse. Les parents sont vite considérés comme atteints par le « syndrome d’aliénation parentale », concept psychologique qui ne repose sur aucun fondement scientifique. L’enfant qui souffre d’un trouble du neurodéveloppement comme l’autisme peut se retrouver placé car ce trouble va être mis sur le compte de l’éducation qu’il reçoit. Les juges pour enfants reprennent la plupart du temps les termes des rapports, dans leurs décisions. En cas d’appel, celles-ci sont le plus souvent confirmées quand elles ne sont pas aggravées. Les exemples concrets décrits dans le livre illustrent bien l’obstination dont font preuve les enquêteurs et les juges pour justifier à tout prix les mesures d’éloignement des enfants de leur famille.

Les dégâts provoqués par ces placements abusifs sont pourtant considérables. L’enfant privé de l’affection de ses parents va être pris en charge dans une famille ou le plus souvent dans un foyer, avec des éducateurs plus ou moins bien formés à cette tâche, et sera exposé aux risques de violence de drogue, d’échec scolaire, ce qui peut entraîner des fugues et des suicides. En outre, les parents qui ont été privés de la garde de leurs enfants vont être disqualifiés aux yeux de leurs enfants, ce qui rendra d’autant plus difficile leur éventuel futur retour à la maison.     

Cette analyse de la protection judiciaire de l’enfance est intéressante et instructive même si le parti pris féministe de l’auteur est de nature à en altérer la portée. Celui-ci insiste lourdement sur l’avantage donné aux hommes sur les femmes dans ces procédures, ce qui reste tout de même à démontrer. Un peu plus de volumétrie sur ces placements abusifs serait bienvenu, mais faisons à l’auteur le crédit de l’absence de sources disponibles. On ne peut en tout cas qu’être marqué par la multiplicité des acteurs impliqués (cellule de recueil des informations préoccupantes, service de l’ASE du conseil départemental, associations, juges pour enfants, juge d’instruction, procureurs, services de protection judiciaire de la jeunesse) et leur irresponsabilité quant aux conséquences des mesures prises. Il serait intéressant de voir comment mettre en cause la responsabilité de l’Etat du fait du fonctionnement défectueux de la justice, voire même la responsabilité pénale personnelle de ces acteurs.

Nous pouvons aussi regretter que l’auteur ne mentionne pas les causes les plus fréquentes du déclenchement de ces enquêtes et des mesures d’assistance éducative qui en sont la conséquence, à savoir la mauvaise éducation des enfants et la division des familles. Les enfants sont, en effet, les premières victimes de la mésentente entre leurs parents, a fortiori quand celle-ci va jusqu’à la séparation. Les divorces vécus comme épanouissant les enfants relèvent plus de la fausse communication que de la réalité. Nous pourrions aussi ajouter à l’intention des parents un conseil de prudence pour ne pas exposer leur famille au risque d’un signalement qui serait effectué à tort et déclencherait une enquête aux suites imprévisibles.  

En écho à ces dysfonctionnements de la protection judiciaire de la jeunesse, il est permis de rappeler la déclaration faite par le garde des sceaux, Olivier Guichard1 à qui un journaliste demandait, au moment où il quittait ses fonctions, ce qu’il avait retenu de son passage place Vendôme : « J’ai compris qu’il valait mieux ne jamais avoir  affaire à la justice ». Sage conseil.     

Thierry de la Rollandière

 

1 Olivier Guichard, Ministre de l’Industrie (1967-1968), Ministre du Plan et Aménagement du Territoire (1968-1969), Ministre de l’Éducation nationale (1969-1972), Ministre de l’Équipement-Logement-Tourisme (1972-1974), Ministre d’État, chargé de l’Aménagement du Territoire, de l’Équipement et des Transports (mars-mai 1974), Ministre d’État, Garde des Sceaux (1976-1977).

 

 

Démographie et gouvernement mondial

Une relecture de La Bombe P de Paul Ehrlich (1967)

Certains écrivains sont des auteurs visionnaires, ou apparaissent comme tels, soit parce qu’ils décrivent les tendances du monde à venir, soit parce qu’ils orientent la pensée des décideurs et autres agents d’influence que sont les médias et les cercles de réflexion qui dessinent le cadre de la « pensée unique ». La Bombe P (P comme population) de Paul Ehrlich, un best-seller dont la première édition date de 1967, peut, sous beaucoup d’aspects, être considéré comme un ouvrage d’anticipation mais il a surtout exercé une influence considérable sur les décideurs et les leaders d’opinion. Au-delà de la réalisation de beaucoup de ses prédictions, le livre a orienté les mentalités occidentales en créant un lien étroit entre population, ressources et environnement avec en toile de fond une fausse conception de la liberté individuelle.

Le constat de départ de l’ouvrage est que dans une planète que l’auteur voyait à 7 milliards d’habitants en l’an 2000, des centaines de millions d’êtres humains vont mourir de faim et les survivants vont vivre dans un environnement de plus en plus dégradé en raison de la surpopulation et du gaspillage des ressources. Paul Ehrlich voit la solution dans le contrôle démographique et la gestion économe des ressources.    

L’ouvrage est inspiré par la théorie de Malthus : la population s’accroît plus vite que la production, surtout dans les pays sous-développés où la baisse de la mortalité n’a pas été compensée par une baisse de la natalité. En plus de ce déséquilibre entre population et alimentation, la détérioration de l’environnement peut avoir des conséquences encore plus graves : la surpopulation peut entraîner la disparition de certaines espèces, l’agriculture intensive est consommatrice d’engrais et de pesticides dangereux pour la santé, la teneur en oxygène de l’air diminue, la présence accrue de plomb et de mercure menace la santé, le manque d’eau se profile à l’horizon. Les deux sujets sont étroitement liés : avec une population mondiale de 500 millions d’habitants, la crise écologique pourrait être facilement résolue.

Une solution pourrait être apportée par l’accroissement de la mortalité : la famine, les maladies virales plus fortes encore que la grippe espagnole de 1918-1920, la guerre thermonucléaire, etc. pourraient faire baisser la population, mais c’est à la natalité que va s’appliquer le contrôle démographique que l’auteur définit comme la régulation consciente du nombre d’êtres humains désirables non seulement pour la cellule familiale mais aussi pour l’ensemble de la société. Cette régulation peut être obtenue par un renversement de notre système de valeurs ou bien par la contrainte.

Comme les époux veulent trop d’enfants par rapport à ce qui est collectivement souhaitable, une évolution des mentalités est nécessaire pour aller à l’encontre de ce que représente l’appel lancé par Paul VI à l’ONU en 1964 « à multiplier les pains pour approvisionner les tables de l’humanité et non pas favoriser un contrôle artificiel des naissances pour diminuer le nombre d’invités au banquet de la vie ». Pour réduire, voire rendre négatif le taux d’accroissement de la population, une administration dotée de larges pouvoirs coordonnerait au niveau mondial le contrôle démographique et la protection de l’environnement, ainsi que la gestion des ressources. Des mesures fiscales pénaliseraient les familles nombreuses en réduisant les déductions d’impôts au-delà du deuxième enfant, des primes seraient versées aux ménages sans enfant et aux hommes qui se seraient fait stériliser. Le droit à l’avortement serait garanti. L’éducation sexuelle donnée aux enfants permettrait de faire évoluer les mentalités en discréditant les messages des religions en faveur de la famille nombreuse. Les conséquences de la surpopulation sur l’environnement devraient conduire chacun à modifier son mode de vie en acceptant de rouler dans des voitures de moindre cylindrée, de manger des légumes et des fruits exposés au contact des insectes, d’utiliser des détergents moins puissants et des moyens de transport plus lents. L’aide alimentaire consentie par les pays développés serait réservée aux pays en développement qui mettraient en place un contrôle démographique.

C’est à une révision des relations entre l’homme et la nature que Paul Ehrlich appelle : le rôle fondamental de l’homme n’est plus de dominer la nature comme ce fut le cas depuis la Genèse, mais de vivre en harmonie avec elle. Une population réduite à un maximum d’un milliard d’hommes pourrait vivre avec un confort suffisant dans le millénaire à venir si les ressources étaient gérées avec soin.

Au-delà d’une conception purement matérialiste de l’homme et de la création, le catastrophisme de Paul Ehrlich pourrait a priori faire sourire. La population mondiale a atteint les 7 milliards d’habitants en 2011, certes quelques années après l’an 2000 comme annoncé dans La Bombe P, mais la planète a réussi à nourrir ses habitants supplémentaires. La situation de l’alimentation humaine est meilleure en 2020 qu’elle ne l’était lorsque le livre fut écrit en 1967 avec une population multipliée par plus de 2 en 50 ans.

Les idées défendues dans La Bombe P ont contribué à influencer les mentalités : l’augmentation de la population est aujourd’hui perçue comme un risque majeur, l’avortement est autorisé dans la plupart des pays, la contraception artificielle est généralisée dans les pays développés, même dans les milieux catholiques, l’euthanasie est, en droit ou dans les faits, de plus en plus répandue, mais ces écarts par rapport à la morale naturelle ne sont pas seulement imputables à la crainte de la surpopulation. L’attention portée à l’environnement et au prétendu danger que représente la croissance économique annonce le développement durable apparu dans les années 2000 qui tient une large place dans la politique des Etats et la gestion des entreprises, et se retrouve même dans l’encyclique Laudato Si. Il ne manque dans l’ouvrage de Paul Ehrlich que les risques que fait courir la surpopulation sur le changement climatique mais celui-ci n’a été mis en évidence que plus tard, à la toute fin des années 1970. Si Paul Ehrlich évoque l’effet de serre, c’est pour indiquer, comme on le pensait à l’époque, que celui-ci pourrait provoquer un refroidissement de la planète avec le renvoi dans la haute atmosphère de la chaleur solaire destinée à la terre…

L’épidémie du Covid 19 fut aussi l’occasion de promouvoir les effets bénéfiques d’une diminution de la population que la maladie pouvait provoquer. Les propos tenus par l’économiste français Jean-Marc Jancovici, par ailleurs membre du Siècle et de la French-American Foundation, au micro de France Info en mai 2022, sont révélateurs : « Ou bien on régule nous-mêmes [la population] ou bien cela passe par des pandémies, des famines et des conflits. » En mai 2019, il recommandait déjà de réduire la population de façon indolore en ne mettant pas tout en œuvre pour soigner les personnes âgées malades au-delà de 60 ou 65 ans. L’extension des pseudo-libertés individuelles est ici mise au service de la limitation de la population et de la défense de l’environnement. Il n’est pas impossible qu’en sens inverse, la limitation de la population et la défense de l’environnement ne soient pas instrumentalisées pour libérer les individus de la tutelle des religions et en particulier du catholicisme. 

Aujourd’hui, le sujet majeur est moins le nombre d’habitants de notre planète que leur répartition entre les continents. Avec une population européenne de 750 millions d’habitants – en y incluant la Russie – dont beaucoup viennent de l’immigration, face au continent africain d’un milliard et demi d’habitants qui devrait atteindre les quatre milliards à la fin de ce siècle, le status quo est impossible. Les sujets liés à la population n’ont pas fini d’occuper les esprits affranchis de la pensée dominante. 

 

Thierry de la Rollandière

 

Une leçon américaine sur la discrimination positive

La Cour suprême des Etats-Unis a rendu le 29 juin 2023 un arrêt important qui est passé relativement inaperçu en France.  Il est vrai que l’heure était alors à d’autres soucis pour notre pays qui était à feu et à sang, sous le coup d’émeutes urbaines d’une rare intensité. Les deux événements qui pourraient à première vue sembler éloignés l’un de l’autre ne sont toutefois pas sans lien car la décision de la plus haute juridiction américaine porte sur la discrimination positive en faveur des minorités raciales et ethniques. 

Dans cet arrêt du 29 juin dernier, la Cour suprême fédérale a remis en cause la jurisprudence qu’elle avait elle-même forgée dans les années 1960 : à cette époque, tout en interdisant les quotas, elle avait approuvé la pratique de plusieurs universités américaines prestigieuses, privées comme Harvard, publiques comme l’université de la Caroline du nord, consistant à introduire des critères raciaux et ethniques dans leurs procédures d’admission. Les étudiants appartenant à une minorité raciale ou ethnique se voyaient ainsi attribuer des points supplémentaires à la différence des autres candidats. L’objectif poursuivi était de « corriger les inégalités issues du passé ségrégationniste des Etats-Unis et d’augmenter la part d’étudiants noirs, hispaniques et amérindiens dans leurs effectifs ».

A ce stade, il n’est pas inutile de préciser qu’aux Etats-Unis, à la différence de ce qui se passe en Europe, chaque individu est enregistré auprès des autorités publiques selon des critères raciaux (blanc, noir, jaune, amérindien) et même ethniques (blanc, blanc hispanique, métis, etc.). Une telle pratique serait difficilement concevable en France où un projet de révision de la Constitution prévoit d’en supprimer le terme « race » dans le but de mieux combattre le racisme.

Dans l’affaire qui a donné lieu à la décision de la Cour suprême de juin 2023, des étudiants d’origine asiatique ont attaqué les universités de Harvard et de Caroline du nord pour discrimination. Malgré l’excellence de leur dossier, les lycéens de cette communauté voient leur candidature très souvent rejetée au profit de candidats scolairement moins méritants mais bénéficiant des mesures de discrimination positive applicables aux étudiants des minorités noires et hispaniques. Les universités concernées plaidaient, pour défendre leur objectif de diversité, que la future élite devait être représentative des différentes composantes du pays. La Cour suprême, par six voix contre trois, a donné raison aux plaignants contre les universités. Dans cette répartition du vote, on retrouve le clivage de la décision rendue un an plus tôt sur le droit constitutionnel à l’avortement. Les six juges conservateurs ont voté contre la discrimination positive soutenue par les trois juges démocrates.  La Cour estime que les candidats « doivent être traités sur la base de leur expérience en tant qu’individu et pas en fonction de leur race » et que les universités concernées ont eu tort d’estimer que « l’assise d’un individu n’était pas les défis relevés, les compétences acquises mais la couleur de sa peau. Notre histoire contemporaine ne tolère pas ce choix ». Le fondement juridique de cette nouvelle jurisprudence est le 14ème amendement à la Constitution des Etats-Unis sur l’« égale protection des lois ».  Dans une opinion dissidente, le juge démocrate d’origine portoricaine, Sonia Sotomayor, a reproché à la majorité conservatrice de la Cour « d’avoir érigé en principe constitutionnel une règle superficielle d’indifférence à la couleur de la peau dans une société marquée par une ségrégation ethnique où la race a toujours eu de l’importance et continue d’en avoir ».

C’est une révolution dans le monde académique américain. Les universités n’auront plus le droit d’utiliser la race d’un candidat comme critère d’admission. A la place, elles devront se contenter de critères socio-économiques « objectifs » tels que la profession et les revenus des parents qui pourraient d’ailleurs eux aussi être contestés et qui ne suffiront pas à porter la diversité raciale au niveau attendu par ses promoteurs. 

Cette décision concerne au premier chef les Etats-Unis mais les questions qu’elle soulève font aussi l’objet de débats de ce côté-ci de l’Atlantique.>>> >>>  Trois conceptions s’affrontent :

– la première que nous pouvons qualifier de méritocratique et qui correspond à la  conception française traditionnelle selon laquelle le mérite doit être récompensé de manière impartiale ; personne ne doit être ni favorisé, ni désavantagé en fonction de ses origines ; cette conception tend à être battue en brèche, même dans un pays aussi égalitariste que la France, par les quotas mis en place dans certaines grandes écoles ou dans les entreprises.

– la seconde que nous pouvons qualifier d’utilitariste selon laquelle sont évalués les gains économiques d’un système par rapport à un autre : selon ses promoteurs, la suppression de la discrimination positive en Californie en 1998 s’est avérée néfaste car elle a détruit de la richesse dans la mesure où, ayant moins accès à Berkeley ou à l’UCLA, les noirs non admis ont vu leur niveau de vie baisser sans que cette baisse ait été compensée par une hausse du niveau de vie des étudiants blancs ou d’origine asiatique admis à leur place. Ce raisonnement apparaît d’autant plus contestable que le salaire et la productivité d’un diplômé dépendent d’autres critères que celui de l’université où il a étudié.

– selon la troisième conception, la responsabilité collective du peuple américain dans la ségrégation raciale doit le conduire à des mesures de réparation à l’égard des descendants d’esclaves. C’est le raisonnement qui sous-tend les décisions de la Cour suprême depuis les années 1960 et la position de la minorité progressiste en juin 2023. 

 

Si l’on s’en tient à la mission de l’université qui est de transmettre des savoirs et de former une élite, il est sûr que la prise en compte de critères tels que la race ou l’origine ethnique des candidats n’a pas lieu d’être dans une procédure d’admission et la décision de la Cour suprême doit être saluée. C’est une décision qui a un retentissement plus large que les seuls milieux académiques car elle remet en cause, au moins en partie, l’approche communautariste qui prévaut dans le monde anglo-saxon qui s’oppose à la conception assimilationniste ou intégrationniste qui était défendue en France. Certains ont vu dans cette décision un coup porté au wokisme qui s’est fondé sur la « culpabilité » des blancs de souche par rapport à leurs compatriotes issus de l’immigration. Quoi qu’il en soit, les deux modèles sont en crise parce qu’ils se heurtent à une immigration de masse pour laquelle ils n’ont pas été conçus et qui les rend dans une large mesure dépassés.  

 

Thierry de la Rollandière

 

L’Etape par Paul Bourget

L’Etape fait partie des premiers romans de la seconde partie de la carrière littéraire de Paul Bourget (1852-1935). Cette dernière commence au tout début du XXe siècle au moment de son retour au catholicisme qu’il avait abandonné à l’adolescence. Sa conversion lui a permis, après qu’il eut étudié les maladies de l’âme, d’en indiquer les remèdes. Hostile au scientisme et à l’incroyance, il prône le retour au catholicisme et s’en prend à la démocratie qu’il accuse de niveler élites et fortunes, d’opposer les classes sociales entre elles et de former des caractères individualistes, ambitieux et aigris. Paul Bourget prend également position en faveur des écoles catholiques, attaquées par le gouvernement de l’époque, qu’il considère comme indispensables à la cohésion nationale et à la morale. Dans ses romans, il s’affiche comme un défenseur de l’ordre social, pour la famille, contre le divorce (dans Le Divorce), pour l’ancienne noblesse (dans L’Emigré) et n’admettra qu’une mobilité sociale progressive dans son roman intitulé L’Etape, publié en 1902.

L’Etape est considéré comme l’archétype de l’œuvre de combat. Le professeur Joseph Monneron, libre penseur, anticlérical, promoteur des principes de la Révolution française, est malheureux dans son ménage mal assorti et déçu par ses enfants. Son fils aîné, Antoine, fréquente les courses et les lieux de plaisir et, pour se procurer de l’argent, en arrive à faire des faux en écritures. Sa fille, Julie, se laisse séduire par un ami de ses frères, Adhémar de Rumesnil, et tire un coup de revolver sur son amant qui l’a abandonnée enceinte. Son dernier fils est un gamin vicieux et mal élevé. Seul le second de ses enfants, Victor, montre une âme élevée mais, fils d’un père anticlérical et jacobin, il est porté vers des idées religieuses qui sont odieuses à celui-ci. De plus, il s’est épris de Brigitte, fille du philosophe catholique Ferrand qui a été autrefois condisciple de son père à l’Ecole normale supérieure. A la fin, l’honnêteté intellectuelle de Joseph Monneron va lui faire admettre la valeur et la générosité de Victor et ne pas s’opposer au bonheur de son fils. Entre temps, le professeur Ferrand va expliquer à son ancien camarade, et c’est la thèse du roman, la cause profonde de ses malheurs. Fils de paysans, Joseph Monneron a voulu s’élever trop vite dans l’échelle sociale pour atteindre une situation à laquelle aucune hérédité, aucune tradition, aucune éducation ne l’avait préparé, au risque de brûler les étapes.

Cette thèse du roman qui lui a donné son titre a, il faut le reconnaître, plutôt mal que bien affronté l’épreuve du temps, au moins dans son côté le plus péremptoire. Fort heureusement, elle ne représente pas, à supposer qu’elle l’ait jamais représenté, l’aspect le plus intéressant de l’ouvrage. Le roman est très bien construit et le lecteur se laisse facilement prendre au jeu de l’intrigue. Paul Bourget y fait preuve de ses qualités d’analyse psychologique de ses personnages. Pour le lecteur du XXIe siècle qui observe les conséquences de la déchristianisation des cadres de la société depuis la fin du XIXe siècle, la description de la famille Monneron montre, au-delà de la réussite universitaire du père de famille, la faillite des illusions rousseauistes des doctrinaires de la Révolution de 1789 et les limites d’une morale qui se refuse à admettre un fondement transcendant. La mauvaise appréhension de la réalité qui en résulte entraîne de nombreuses déconvenues dans l’éducation des enfants. La grandeur d’âme et la générosité des héros catholiques du roman forment un vif contraste avec les traits moins flatteurs des personnages non catholiques. Le roman contient également une description intéressante de la société parisienne du début du siècle dernier et fait aussi croiser le lecteur avec un abbé démocrate qui essaye, avec une bonne foi à toute épreuve, de réconcilier le catholicisme avec les principes de 1789, ainsi qu’avec le fondateur d’une université populaire, type intéressant du juif idéaliste absorbé par des rêves de régénération sociale.

Paul Bourget rejette le déterminisme physiologique d’Emile Zola et explique la psychologie des individus par leur vie intérieure. Pour lui, la vie n’apparaît incohérente qu’aux esprits incapables d’identifier les causes de leurs comportement. Cette anatomie morale, si on poussait ce concept jusqu’à son point extrême, réduirait à peu de choses le rôle de la liberté et de la volonté des personnes et contribuerait à rétablir le déterminisme que l’auteur entend combattre. Les personnages de L’Etape peuvent en ressortir très, voire trop construits, ce qui donne une certaine visibilité mais peut-être un peu de lourdeur à ce qui peut légitimement apparaître comme un parti-pris du romancier. L’ouvrage souligne enfin le rôle essentiel joué dans la société par la famille que l’auteur conçoit comme un relais indispensable entre la Nation et les individus qui la composent. 

 

Thierry de la Rollandière