La peur du climat

Des journaux ont titré : « Pourquoi la France va devenir une fournaise ? », « Une dernière chance ! », « La moitié de l’humanité menacée ! » …

En entreprise, les cadres sont formés à « la Fresque du Climat ». Ils trient des cartes postales et les affichent dans « le bon ordre » : l’action de l’homme par l’agriculture et l’industrie aboutit au réchauffement climatique, aux inondations, guerres et famines… Le message est simple : le réchauffement climatique est l’urgence n°1 et l’homme en est coupable.

Ce catastrophisme ambiant se répand spécialement chez les jeunes provoquant, peur de l’avenir, augmentation des dépressions et des suicides, refus d’avoir des enfants, activisme violent.

La société de consommation

Sortons de la dialectique où il n’y aurait pas d’autre choix qu’un capitalisme libéral poussant à toujours plus de consommation, ou un socialisme centralisateur règlementant la vie quotidienne de chacun pour créer une nouvelle société. Les deux sont souvent alliés : des lobbies promeuvent des règlementations qui favorisent la vente de leurs produits en Occident et la délocalisation des productions dans des pays à faible coût de main d’œuvre et de moindre exigence…

Le catholique voit les choses plus simplement : il sait que la Création est l’œuvre de Dieu, qu’il doit la respecter et l’entretenir au bénéfice des générations futures. Il sait aussi qu’il doit travailler pour s’adapter aux évènements et faciliter une vie paisible en société et la protection des faibles contre les malheurs. Il s’intéresse à la vraie écologie et au climat selon sa responsabilité sociale.

Que veut dire « le réchauffement » ?

Plusieurs questions montrent que le sujet n’est pas aussi évident que le prétendent certains militants écologistes.

Les températures selon les régions et les saisons nous intéressent tous : habillement, agriculture, loisirs en dépendent. Une moyenne régionale a du sens, mais que veut dire une moyenne globale mondiale ? Pourtant, c’est cette moyenne mondiale qui est médiatisée !

Chacun comprend qu’il faut des conditions comparables pour faire des comparaisons valables. Or, les stations météo de 1900, alors à la campagne sont maintenant en ville, et de nombreuses régions du monde n’en avaient pas à l’époque. On parle de 1,5°C de plus en 150 ans1, mais il est courant de voir une température à Paris de 2°C à 3°C plus élevée qu’à 30 km dans la campagne. De multiples corrections sont donc appliquées sur les mesures, ce qui peut biaiser les résultats selon les objectifs de celui qui les choisit…

Le réchauffement qui semble exister est-il lié seulement à l’activité humaine ? Certains scientifiques en doutent. En effet, le Groenland2 a été ainsi nommé parce que c’était une terre verte en 985… Des études géologiques et historiques ont détecté des cycles chaud/froid environ tous les 400 ans en France : un « optimum climatique médiéval » (1050-1350) a été chaud, puis un « petit âge glaciaire » (1600-1800) a précédé la Révolution. Ne verrions-nous pas aujourd’hui le retour d’un cycle chaud en partie naturel ?

Pourquoi les médias ne parlent-ils pas de l’influence de l’activité solaire qui est en partie irrégulière (taches et éruptions solaires) ? 

 Affutons donc notre sens critique !

La montée des eaux est actuellement de 1 à 2 mm par an, soit 20 cm en 100 ans. Est-ce ingérable ?

Les célèbres ours blancs étaient 10.000 en 1960. Leur chasse a été interdite en 1973 : ils sont environ 25.000 aujourd’hui mais la propagande écologiste parle encore de leur prochaine disparition.

A l’été 1168, la Sarthe était à sec. En juillet 1183, on vendangeait en Champagne. La Seine gelait en 1656, 1709, 1788. N’étaient-ce pas des dérèglements climatiques ?

Le nombre de tornades aux Etats-Unis est stable depuis 40 ans, mais internet et la TV nous informent aujourd’hui immédiatement de chacune d’elles, ce qui peut nous inquiéter.

Mais n’oublions pas les vrais problèmes !

La Chine construit deux centrales au charbon chaque semaine3 ! La Chine représente déjà 50% de la capacité mondiale de centrales au charbon, l’énergie la plus polluante.

La production moyenne de déchets ménagers en France en 2015, hors recyclage, est de 271 kg par habitant, alors qu’elle était de 180 kg en 19604. Probable effet de la société de consommation et de la multiplication des emballages qu’il faut combattre.       

Pour tenir l’objectif de promotion mondiale des voitures électriques, il faudrait multiplier par 15 d’ici 2040 l’extraction minière et le raffinage du lithium (matériau essentiel des batteries, 50% des réserves mondiales sont en Chine5). Et l’environnement dans tout ça ?

Quelques conseils pour les pères de famille

Rappelons-nous donc la beauté de la création et notre rôle pour l’entretenir : apprenons à nos enfants à l’observer et la respecter6. Ne laissons pas le monopole de « l’écologie » aux activistes politisés et aux ennemis de la culture chrétienne.

Cultivons l’esprit de pauvreté et combattons l’esprit de consommation. Les familles nombreuses n’ont pas attendu les militants écologistes pour pratiquer le recyclage, la réparation, l’usage des mêmes vêtements, jouets et vélos par plusieurs enfants successifs !

« N’écoutons pas les oiseaux de mauvais augure qui annoncent constamment de mauvaises nouvelles ou la fin de tout… Entretenons la joie dans notre cœur en regardant les grâces reçues de Dieu » Abbé Troadec.

Comme plusieurs scientifiques, nous pouvons avoir des doutes légitimes sur les données, les méthodes d’analyse ou de simulation : la science n’a pas fini de comprendre ces phénomènes climatiques. Restons néanmoins prudents et équilibrés au travail ou en société sur ces sujets passionnels et facilement diviseurs. Si nos interlocuteurs ne sont pas sensibles à nos doutes, choisissons nos combats. Ne polluons pas l’ambiance et le bien commun par des oppositions bruyantes au tri sélectif ou à la température de 19°C dans les bureaux… Mieux vaut garder son énergie pour promouvoir la famille et la sollicitude envers les handicapés ou contrer la propagande du genre ou de l’euthanasie !

 

Hervé Lepère

1 On compare une mesure sur 10 ans (2011-2020) avec une mesure sur 50 ans (1850-1900)-GIEC.

2 Du vieux norrois Grœnland, lui-même composé de grœnn (« vert ») et de land (« terre »).

3 AFP-France 24 du 27/02/2023

4 ADEME-2021

5 IEA-International Energy Agency

6 Voir article « l’écologie en famille » dans ce numéro

 

Confiance au bureau et apostolat

Deux jeunes en début de carrière se retrouvent :

– Mes clients se plaignaient du service après-vente. Je n’en étais pas responsable, mais j’ai proposé des idées pour arranger les choses. Le patron l’a appris et il me propose de devenir responsable de ce secteur ! Une belle promotion !

– Tu es fou, ça va être difficile ! Moi, je me contente de faire ce qu’on me demande. Je risque d’être mal vu si je donne des idées. D’ailleurs, mon patron est peut-être franc-maçon…

Un employé doit s’engager

Chers jeunes (et moins jeunes), une fois entrés dans le monde du travail, notre devoir d’état ne se limite plus à faire nos devoirs scolaires pour notre bien personnel, mais consiste à remplir notre rôle avec tous nos talents et à contribuer au bien commun. C’est un moyen de nous épanouir et de nous sanctifier.

Un catholique a de nombreux atouts pour y réussir : droiture, sens du devoir, courage et persévérance, honnêteté, humilité, respect des autres, charité, recherche du bien commun et non de son seul intérêt personnel, donc capacité à travailler en équipe, à supporter les caractères imparfaits, à s’entraider… Tous les patrons soucieux de la réussite de leur entreprise (même s’ils n’ont pas les mêmes idées religieuses ou politiques que nous) ont besoin de collaborateurs avec ces qualités ! ça tombe bien : nous les travaillons normalement déjà pour notre progrès moral et spirituel !

Le catholique, contrairement à ses autres collègues, sait que le péché originel existe. Il ne s’étonnera donc pas de croiser quelques clients ou fournisseurs malhonnêtes ou menteurs, des profiteurs ou des colériques, des patrons ou des subordonnés avec de gros défauts. Il pourra être déçu, il devra prendre des précautions pour éviter les situations où ces défauts se manifestent, mais il se maîtrisera ou se corrigera pour ne pas tomber lui-même dans la médisance, la colère, la vengeance, l’orgueil ou le découragement. Il saura pardonner et continuer à faire le premier pas pour le bien commun.

Le catholique sait qu’il doit garder un équilibre entre son devoir professionnel et ses devoirs familiaux et sociaux. Engagé à fond pendant ses heures de travail, il sait que la réussite professionnelle n’est pas le but de la vie et qu’il faut « chercher d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste sera donné par surcroît ». Pour progresser, gardons du temps de réflexion et de formation, et soyons équilibrés. Restons raisonnables : si le travail nous envahit soir et week-end, c’est qu’il y a quelque chose à corriger en nous.  

Quelles belles occasions de progrès personnel dans notre engagement professionnel, dans les joies ou les croix ! Ayons donc confiance en nous, en nos talents et en l’assistance de la Providence : « Mais qui donc peut vous nuire, si vous vous montrez zélés pour le bien ? »1.               

Être un bon chef, c’est exigeant

Que vous dirigiez un stagiaire apprenti, une secrétaire, des bénévoles, une petite équipe ou plusieurs centaines de personnes, votre devoir de catholique sera d’être un bon chef ! Ce rôle est déterminant pour créer les conditions du bien commun. Le bien commun de l’entreprise et le développement personnel des collaborateurs sont non seulement des conditions de succès, mais une contribution au règne du Christ-Roi dans la société. Ne soyons donc ni le chef tatillon, ni le laxiste, mais visons haut pour chacun de nos collaborateurs et dans les objectifs collectifs.

« Chaque évènement quotidien, chaque parole, chaque décision est l’occasion d’un éveil de la vie ou d’une fermeture et d’un repli sur soi (de nos collaborateurs). Aucun instant n’est jamais neutre.»2

Le rôle du chef, grand ou petit, est essentiel pour permettre à chacun de donner le meilleur de lui-même et de progresser dans le respect des valeurs morales. N’attendons pas que nos supérieurs soient parfaits pour jouer notre rôle de chef catholique3 à notre niveau ! Voici quelques pistes de réflexion. « Il existe un consensus autour de 4 fondamentaux pour avoir des salariés impliqués et pleins d’initiatives : simplifier le travail, partager l’information, donner autonomie et autorité, considérer les personnes en tant qu’êtres humains. Mais pour être féconds, ces principes doivent s’imposer à tous les étages de l’organisation et rester liés les uns avec les autres.»4

Nous le sentons : pour bien remplir notre rôle de chef, il ne suffit pas d’avoir des talents innés, ni de travailler sur nos propres vertus, il faut aussi nous former voire nous faire aider. Le catéchisme ne suffit pas ! Connaissons-nous suffisamment la doctrine sociale de l’Église ? Elle nous éclairera sur les droits et devoirs de chaque membre de l’entreprise et de la société.

Des témoignages de patrons catholiques ou des formations5 nous seront également utiles. L’exemple de François Michelin (1926-2015) montre qu’on peut être catholique convaincu et propulser son entreprise au premier rang mondial !

L’apostolat par l’exemple

Employé ou patron, cent fois sur le métier il faut remettre l’ouvrage de notre progrès personnel, naturel et spirituel, et développer nos talents (souvenons-nous de la parabole…). Cet effort pour nous corriger de nos défauts – qui n’en a pas ? – sera aussi visible de nos collègues que nos qualités de chrétien : droiture, persévérance dans le devoir d’état et sens du service, charité par le souci du bien commun et attention à chacun, notamment les plus pauvres, défavorisés ou malheureux, avec le sourire que nous afficherons souvent ! Ce sourire doit être le reflet de notre âme, remplie de la grâce de Dieu.

« La première des conditions de travail, c’est le sourire du chef. Garder le sourire en toutes circonstances, c’est difficile quand, à la fatigue, s’ajoute l’inquiétude, les soucis, les ennuis. Rester détendu et bienveillant est pourtant nécessaire : la figure que le chef fait dans l’épreuve conditionne l’attitude de ses salariés.»6

Ces attitudes et ces sourires seront notre premier et plus efficace apostolat au travail ! Ils rendront possibles, pour quelques-uns, des discussions plus approfondies, des questions ou des conseils. Les grandes fêtes et les évènements familiaux, heureux ou tristes, qui frappent ceux que nous côtoyons et nous-mêmes, seront alors souvent des occasions d’aller plus loin de manière personnalisée et avec la confiance de notre interlocuteur.

 

Hervé Lepère

 

La confiance dans l’éducation, l’éducation à la confiance  

Thibaud est dans les derniers de sa classe de CM, il est brouillon et se fait remarquer par sa turbulence… Ses parents s’inquiètent devant lui : « que va-t-on faire de toi ? ». C’est pourtant un gentil garçon, obéissant,  et serviable. Mais sa maman, quelque peu perfectionniste, ne peut s’empêcher de passer derrière lui chaque matin pour tirer la couette un peu plus haut sur son lit, et mieux aligner les fourchettes et couteaux lorsqu’il a mis le couvert… Lorsqu’il bricole avec son père, les clous sont un peu de travers, ce n’est jamais assez bien fait : laisse-moi finir dit alors son père !

Thibaud voit que rien ne va jamais malgré ses efforts… C’est un cercle vicieux : un enfant qui a du mal, des parents qui s’inquiètent et ne supportent pas les imperfections, l’enfant qui se décourage et n’est sur le devant de la scène que lorsqu’il chahute… Comment va se passer l’adolescence ? Et après ? Il est urgent de briser ce cercle et de construire un chemin de progrès pas à pas en travaillant la confiance en complément du sens de l’effort.

La confiance en soi est nécessaire

La confiance en soi est une vision réaliste de nos capacités qui nous permet de mieux contrôler nos émotions, prendre des décisions, oser entreprendre et atteindre nos objectifs.

A contrario, on reconnaît le manque de confiance en soi dans la timidité excessive, la difficulté à faire des choix ou prendre des initiatives, la tendance à se comparer en permanence, la crainte d’être moins bon que les autres, la tendance à se sentir nul, l’évitement des situations de conflit, la difficulté à affirmer une opinion différente de celle du plus grand nombre et même la difficulté à accepter un compliment ou une critique. Si notre enfant, ou nous-mêmes présentons ces symptômes, travaillons à en corriger les racines ou à les dominer ! Comment, en effet, réussir sa vie et même rester catholique sans avoir confiance en soi ? Confiance en nous parce que le travail sur notre nature est réel et est accompagné par le soutien de la grâce de Dieu : « aide-toi, le Ciel t’aidera ! »

La difficulté est de concilier (et c’est possible !) le mépris de soi-même, la vraie humilité avec la nécessaire confiance en soi même, parce que nous reconnaissons les qualités que Dieu nous a données, les talents que nous devons faire fructifier par la grâce de Dieu et sa providence. Si vous vous rebellez et vous énervez pour abattre les obstacles ou si vous vous découragez face aux échecs, c’est peut-être un signe d’amour-propre et d’orgueil blessé… Si vous prenez du recul, cherchez conseil, ajustez votre manière de faire et repartez avec courage en comptant sur la grâce de Dieu et sur votre entourage, c’est au contraire bon signe !

La confiance dans les autres et dans les institutions

Chez l’enfant, la confiance en soi se développera grâce à une atmosphère de confiance réciproque avec ses parents, avec ses vrais amis, avec ses éducateurs, avec de bons prêtres, et par des expériences réussies qui l’encourageront.

Le père, en tant qu’autorité, a un rôle essentiel pour le développement de la confiance propre de l’enfant. Il devra développer et montrer sa confiance envers ses enfants, la pratiquer avec son épouse et les éducateurs, et travailler sa confiance en lui-même. Les grâces du mariage et les grâces d’état de la paternité lui sont données ainsi que ses qualités naturelles pour qu’il ait cette confiance.

La confiance commence entre époux, basée sur l’amour, le soutien mutuel, des règles de vie partagées, une communication ouverte et fréquente, la recherche de la finalité commune : conduire toute la famille au ciel.

Donner sa confiance appelle la confiance réciproque et le respect mutuel. En son absence, la méfiance, la peur et les rapports de force s’installeront et nuiront à l’ambiance de la communauté.

Faire confiance nécessite un effort  !

Faire confiance suppose que la finalité soit partagée, que les règles soient claires et explicites, que la personne ait la connaissance et les moyens suffisants pour y répondre. Il faut savoir dire : « je te fais confiance pour… » : mettre le couvert du mieux possible, rentrer à l’heure de chez tes amis…

La confiance n’exclut pas le contrôle, mais nécessite une grande justice dans les récompenses et les sanctions. Il est essentiel de féliciter l’enfant qui fait une bonne action ou un effort et a mérité notre confiance, au moins autant que l’on reprendra une bêtise ou une désobéissance en tenant compte des personnalités et des circonstances.

Un père perfectionniste voire trop « maternel », fera l’effort d’oser déléguer, s’organiser, lâcher prise et accepter les imperfections en encourageant plutôt la bonne volonté de l’enfant. Il devra valoriser la bouteille à moitié pleine, et non pas la bouteille à moitié vide !

Pour un père naturellement (trop) détendu, distant ou flegmatique, il s’agira de créer des occasions de mettre les enfants en situation de responsabilité, de s’impliquer pour apprendre à ses enfants à affronter des situations nouvelles, des techniques nouvelles et à s’en sortir avec la joie d’avoir réussi !

Développer la confiance de l’enfant en lui-même

Selon ses compétences, chacun trouvera les occasions d’apprentissage par étapes correspondant aux qualités de l’enfant : dans le bricolage, l’enfant commencera par visser vis et boulons, avant d’apprendre à manier la perceuse… Le père commencera par montrer le perçage du 1er trou. Il saura accompagner du geste ou de la voix les trous suivants percés par l’enfant – dans le garage pour ne pas craindre un raté trop visible dans une chambre. Il valorisera ce qui s’est bien passé, indiquera des manières de faire mieux. Puis, il s’occupera d’autre chose en restant proche en cas de besoin. Au bout de quelques séances, l’enfant sera autonome, il en sera fier, il n’aura plus peur de mal faire et saura prendre des initiatives avec confiance.

Le schéma peut être similaire au jardin : passer la tondeuse, tailler les haies puis les rosiers, couper du bois : à la main, à la scie, à la tronçonneuse…La méthode vaut aussi pour les jeux et les services à la maison, la cuisine, la décoration, la mécanique auto, le sport, la musique, le soin des animaux éventuels… L’enfant apprend en même temps une technique et la confiance en lui : ne séparons pas ces deux apprentissages ! Ne confondons pas l’important – sa réussite, sa performance – avec l’essentiel – son développement personnel qui le prépare à l’avenir ! L’enfant apprendra par ses échecs, s’ils ne sont pas permanents et s’il est aidé pour en tirer les leçons, autant que par ses réussites.

Les mouvements scouts et les bonnes écoles, utilisent cette pédagogie du développement de l’autonomie, sous le tutorat des plus expérimentés et apportent un complément utile à la famille pour que les enfants prennent confiance en eux et se préparent ainsi à l’autonomie de l’âge adulte.

Regardons-nous un tailleur de pierre selon son apparence de vulgaire casseur de cailloux ? Il est meilleur d’y voir le constructeur de cathédrales pour l’éternité.

 

Comment regardons-nous nos enfants ? Comme des bébés attardés, comme des ados (un peu) en crise, ou comme l’élite catholique de demain ?

Certes, il faut un peu d’imagination pour voir au-delà du présent ! Et il faudra beaucoup de patience et d’effort. Mais la vision du but ultime va nous guider dans l’éducation. Nous trouverons ainsi la voie qui conduira chaque enfant à tenir sa place dans la société et dans l’Eglise, puis au ciel, celle qui lui apprendra la fidélité, la fierté, la confiance en lui parce qu’il sait qu’il s’appuie sur une bonne formation, une famille, de bons amis, de bons prêtres, et la grâce de Dieu.

    Hervé Lepère

 

Apprendre à voir le beau !  

Une enfant admire une poupée Barbie : « elle est trop belle ! »  Une maîtresse moderne s’extasie devant un gribouillage d’enfant aux couleurs agressives : « bravo, c’est très beau ! »

Un jeune homme remarque une silhouette élancée et apprêtée : « elle est belle ! » C’est peut-être une jolie fille, mais s’il s’avère que c’est une pimbèche ou une précieuse, dirons-nous encore qu’elle est belle ? De tous temps, la femme a été le symbole de la beauté. Mais croyons-nous les magazines qui réduisent la beauté féminine à un physique et à son rituel de beauté : maquillage, soins et parfums ?

Ne laissons pas nos enfants croire que la beauté est une question d’émotion, que des goûts et des couleurs, on ne peut pas discuter, car c’est une question personnelle. Dire que le Beau tient seulement à l’opinion que chacun s’en fait, revient à dire que le Beau n’existe pas.

Ce n’est pas parce qu’un aveugle ne le voit pas que le paysage n’est pas beau, ni parce qu’un ignorant n’en saisit pas le sens qu’un poème est moins beau !

Il nous faut donc ouvrir notre regard à la lumière et éduquer notre intelligence pour voir et aimer le Beau.

 

Voir la beauté dans des genres variés

La beauté d’un paysage n’est pas la même que celle d’une démonstration mathématique, d’un acte de générosité, ou d’un être humain. On parlera même d’une belle récolte, d’un beau chahut ou d’une belle mort…

Quel est le point commun ? En s’inspirant de la tradition Thomiste, disons que plusieurs éléments sont nécessaires pour faire une chose belle : sa perfection (ou plénitude) par rapport à sa finalité, l’harmonie ou les proportions dans la variété des aspects qui la composent, la splendeur ou l’éclat de sa forme : notre intelligence aime la lumière et l’intelligibilité.

Ainsi une maison qui remplit visiblement sa finalité d’être le foyer chaleureux où l’on se retrouve, un lieu qui favorise le repos, et un lien agréable avec son environnement, exprimera une certaine harmonie. Si elle a un certain éclat, sans excès, la maison sera belle.

En revanche, les quartiers modernes aux immeubles composés comme des assemblages irréguliers de cubes de béton, construits par ceux qui pensent que « la maison est une machine à habiter » (Le Corbusier) ne génèrent ni beauté ni bien-être ! Leurs inventeurs se sont trompés de finalité, l’harmonie est absente, le matérialisme utilitariste domine.

« Le Beau, c’est la splendeur de la perfection, ou si l’on aime mieux, la splendeur de l’idéal »1.

 

Apprendre le Beau à l’extérieur

Nous comprendrons progressivement ces notions abstraites lors de visites culturelles ou de promenades dans la nature. Ainsi, nous saisissons bien la plénitude d’une cathédrale. La cathédrale est tout ce qu’elle doit être et possède tout ce qu’elle doit avoir : la capacité de rassemblement, l’hébergement des saintes espèces. C’est le lieu du sacrifice, de la prière, du culte, du mystère, de la prédication… Elle est construite pour la gloire de Dieu et exprime la piété d’un peuple.

Elle nous transporte de l’harmonie et du symbolisme de ses lignes, de son plan et de ses proportions, de sa décoration instructive (vitraux ou statues), de sa lumière ou de sa pénombre qui aident à la prière et au recueillement.

De l’extérieur, elle est un haut lieu de la ville qui attire les regards. Surabondante plénitude, pleine d’harmonie et de splendeur qui en fait sa beauté2.

Apprenons progressivement à nos enfants à voir ces différents aspects : plénitude par rapport aux finalités, harmonie, splendeur. Prenons-nous aussi le temps de regarder et d’apprendre à observer, à élargir les horizons !

Bien sûr chacun a ses dons, ses compétences, son caractère propre et sa forme de culture personnelle. Certains seront plus à l’aise pour mettre en valeur les merveilles de la nature, pour reconnaître les arbres à leurs feuilles ou les pics montagneux à leur profil, d’autres face aux œuvres d’art, à la musique, à la littérature ou aux sciences… Commençons à la maison, chacun à notre place.

 

Apprendre le Beau à la maison 

L’enfant baigne dans l’atmosphère de la maison. Il s’en imprègne. Jour après jour son intelligence est marquée par ce qu’il voit, ce qu’il entend, ce qu’il dit à la maison. Elle est ainsi fortifiée, assouplie, rassurée ou hélas faussée, racornie.

De l’extérieur, l’enfant rapporte beaucoup de faux trésors : publicités, chansons, attrait des jeux vidéo, fascination pour des vedettes sportives ou musicales, pour des camarades qui osent ce qu’on ne fait pas à la maison… Il faut lui apprendre à trier, à voir et à choisir la beauté : beauté des œuvres matérielles, beauté du travail bien fait, beauté des vertus et de l’amour.

Pour cela rien de tel qu’un climat d’équilibre et de joie, un cadre aimé et harmonieux, quelques belles choses selon les moyens de chacun, des conversations animées et proportionnées aux âges et aux circonstances. Tout ceci, avec sérénité, soutiendra la recherche et l’effort vers le Beau, mais aussi le Vrai et le Bien.

« Quand le Beau vient joindre son éclat séduisant au Vrai et au Bien, l’un et l’autre ne gagnent-ils pas plus aisément, plus sûrement notre cœur ? »1.

C’est pour cela que la peinture de Fra Angelico nous paraît si belle : « d’une manière qui ne cesse de nous étonner, l’œuvre de Fra Angelico est à la fois plus ancrée dans la réalité humaine, que celle, souvent très idéalisée et très statique de ses prédécesseurs, et beaucoup plus immatérielle (…) Dans sa peinture comme en théologie, la grâce n’ignore ou ne détruit pas la nature, elle la couronne ». « Telle est la gloire de Fra Angelico d’être le peintre qui pour le plaisir de nos yeux et surtout le bonheur de nos âmes nous aura entrouvert le ciel pour nous le faire voir »3.

Les hommes ont besoin de l’enthousiasme du Beau pour surmonter les défis qui se posent à eux. Le Beau est une voie d’accès à la réalité la plus profonde de l’homme et du monde, et ainsi à Dieu. Donnons du Beau à nos enfants et à nos contemporains !

    Hervé Lepère

 

Parents – école : une cohérence indispensable  

Lors de conversations récentes, j’ai été frappé que trois amis me rapportent séparément le nombre beaucoup plus important d’enfants qui s’éloignent de la Foi et de la morale catholique chez leurs amis qui avaient choisi des écoles sous contrat, par rapport à ceux qui avaient fait l’effort d’écoles indépendantes (hors contrat). 

La cohérence nécessaire à notre équilibre

La cohérence dans notre vie nous fortifie et nous permet d’aller plus loin ! A l’inverse, que de souffrances et de fragilités lorsque nous sommes en proie à des conflits intérieurs, des conflits d’autorité, des conflits de personnes… La cohérence entre la famille, l’école et l’Eglise est donc fondamentale pour la réussite de l’éducation des enfants et la construction de personnalités équilibrées.

En effet, la Foi doit s’incarner dans notre vie. Le laïcisme, ou l’œcuménisme moderniste de la plupart des écoles sous contrat, va au contraire couper le naturel du surnaturel ; ils introduisent dans l’âme de l’enfant une séparation qui va à l’encontre de la nécessaire unité de l’être humain. Consultez les manuels scolaires modernes pour voir combien ils s’opposent souvent frontalement à la doctrine catholique et aux traditions de la culture française ! 

Ensuite, la neutralité dans l’enseignement n’existe pas. Du fait du contact fréquent et de leur répétition, les opinions de l’enseignant vont marquer les enfants : sélection, analyse, interprétation, commentaires sur tous les sujets abordés en cours, qui en seront imprégnés.

Enfin, l’adolescent se formera en étant familier de références cohérentes, qu’il affrontera parfois, mais en sachant qu’elles sont importantes. Sans références, l’adolescent devient au mieux un libéral, relativisant toutes choses jusqu’à la Vérité même puisque chacun peut se construire ses propres valeurs.

Rien sans effort ou sacrifice

Il peut falloir accepter la séparation pour la pension, ou des kilomètres de trajet, des scolarités qui pourraient être le plus gros budget de la famille… Mais quelles récompenses que ces sacrifices qui contribuent à la cohérence dans l’éducation !

Joie de voir souvent dès les premiers mois dans une bonne école, les enfants s’épanouir, se développer dans un environnement cohérent avec celui de la famille ; dépasser leurs parents en science ou en piété.

Satisfaction plus tard lorsque les jeunes adultes restent fidèles à la Foi et à la Morale, rayonnent dans la société et avec de bons amis, puis s’engagent solidement dans la vocation ou le mariage.

Récompense éternelle au ciel, bonheur de pouvoir dire « j’ai transmis ce que j’ai reçu » et remercier pour les grâces de Dieu qui n’ont pas été vaines. Si l’un des enfants vacille, les fondations posées lui donneront l’occasion de revenir plus facilement dans le droit chemin, le moment venu. 

La cohérence concrète : s’engager jusqu’au bout !

La première résolution essentielle, après avoir choisi une bonne école est de s’abstenir de toute critique à l’extérieur comme devant les enfants. La perfection n’existe pas dans les œuvres humaines ! Souvenons-nous que la médisance est un péché. En se propageant, la critique s’amplifie comme la rumeur… Une critique sur le caractère d’un professeur peut se transformer après deux intermédiaires en « un ami de mon ami n’est pas satisfait de l’école ». Ce qui fera peut-être renoncer des parents hésitants. Selon l’enseignement de saint Thomas d’Aquin, sachons donc voir le bien avant de noter les imperfections ! 

N’abîmons pas chez les enfants la confiance due aux autorités et professeurs ! Veillons plutôt à ce que les priorités, les règles de vie spirituelle, de comportement en famille, de tenue à la maison soient cohérentes avec celles de l’école.

Il y a souvent des difficultés réelles à payer les scolarités, pourtant cela reste un devoir majeur. C’est justice pour que la structure de l’école et les enseignants puissent vivre normalement (certains ont aussi une famille à nourrir !). Voyons ces versements comme un investissement dans ce que nous avons de plus précieux : nos enfants et leur salut éternel. Le retour sur investissement n’est pas immédiat, mais il est réel ! Le Bon Dieu nous récompensera au centuple.

J’ai pu admirer des parents qui sacrifiaient leur train de vie, recouraient sans honte aux banques alimentaires, trocs de vêtements, astuces et entraides entre familles, ainsi qu’aux bourses pour financer les scolarités. Certains ont terminé de payer leurs scolarités plusieurs années après que leur dernier enfant a quitté l’école. Que dire, en revanche, de ceux dont les enfants portaient des vêtements neufs de marques à la mode et qui ne payaient pas leurs factures ? Ces mêmes années, des religieuses se sont contentées plusieurs jours de suite, d’une simple soupe le soir, pour que leurs pensionnaires ne manquent de rien et ne s’aperçoivent pas des difficultés…

Heureusement, plusieurs œuvres ont développé des bourses d’entraide1, qu’il faut penser à solliciter. Que ceux qui en profitent en fassent la publicité autour d’eux, pas seulement pour trouver de nouveaux bénéficiaires, mais surtout de nouveaux généreux donateurs : parrains et marraines, oncles et tantes, grands-parents, jeunes célibataires diplômés dont le salaire dépasse largement les besoins. N’ayant pas encore d’enfants, ils ne pensent pas à donner à ces œuvres, et à bénéficier de l’avantage fiscal s’ils payent des impôts2. Plus il y aura de donateurs, plus les familles seront aidées !

Même si nous payons les scolarités à l’heure, ne prenons pas une mentalité de consommateur américanisé qui négocie tout, commente les défauts des produits ou des employés sur internet et multiplie les réclamations !

 

Participer à la vie de l’école, comme à une vie de famille

L’école catholique est si nécessaire à l’éducation que notre reconnaissance doit aller au-delà de la contribution financière. Nos enfants comprendront la valeur de leur école en voyant leurs parents participer systématiquement aux évènements : spectacles, fêtes religieuses ou kermesses, réunions de formation, rencontres avec les professeurs, ventes diverses, travaux… Même lorsque les dates ne nous arrangent pas.

Apprenons à nos enfants à remercier leurs éducateurs principaux par une petite lettre ou carte postale pendant l’été ou les vacances de Noël.

Les éducateurs qui se dévouent, parfois jour et nuit, apprécieront ces témoignages. Ce sont des hommes et des femmes qui sacrifient leur vie pour nos enfants ! Ils méritent notre attention.

 

Et si ce n’est pas possible ?

Lorsque la scolarité dans une vraie école catholique n’est pas possible, les parents devront redoubler d’efforts pour être disponibles à tout instant pour questionner, écouter, corriger, répondre aux questions, éclairer à la lumière de la foi à transmettre. De même, il y aura encore plus nécessité de mieux sélectionner les fréquentations familiales ou amicales et d’orienter le choix  des enfants vers des activités qui développeront leurs qualités morales et spirituelles.

« Les catholiques ne s’emploieront jamais assez, fût-ce au prix des plus grands sacrifices, à soutenir et à défendre leurs écoles, comme à obtenir des lois justes en matière d’enseignement. Ainsi, tout ce que font les fidèles pour promouvoir et défendre l’école catholique destinée à leurs fils est œuvre proprement religieuse, et partant devient un effort essentiel de l’action catholique (…) Qu’il soit donc proclamé hautement, qu’il soit bien entendu et reconnu par tous que, en procurant l’école catholique à leurs enfants, les catholiques de n’importe quelle nation ne font nullement œuvre politique de parti, mais œuvre religieuse indispensable à la paix de leur conscience ».3 

Le pape Pie XI nous confirme ainsi qu’en choisissant d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, le reste nous sera donné par surcroît !

 

    Hervé Lepère

 

1 MCF Mouvement Catholique des Familles, ADEC, Fondation pour l’Ecole…

2 Ils bénéficient d’une réduction d’impôt de 66% du montant du don. Donner 100€ leur coûte seulement 34 € !

3 Pie XI, encyclique Mediator Dei