Aide-mémoire pour les périodes troubles

Ma chère Bertille,

 Dans la période trouble que nous vivons actuellement, j’ai pensé qu’il te serait utile d’avoir quelques repères pour t’éclairer quant aux grandes questions qui se posent sur la Foi et la fidélité à l’Eglise. J’ai lu très récemment le Commonitorium (aide-mémoire) de saint Vincent de Lérins qui avait donné les principes intangibles pour éclairer les âmes troublées. Après avoir cité les paroles de l’Ecriture Sainte qui répondent à ceux qui cherchent la vérité : « Interroge tes pères et ils te répondront ; tes anciens et ils te formeront », il expose les critères de l’orthodoxie (pensée droite).

Je te retranscris telles quelles ces phrases capitales écrites par un saint canonisé. Elles font autorité et elles ont le mérite d’être très claires et très faciles à appliquer :

 « Si moi ou tout autre voulait prendre sur le fait les sophismes des hérétiques qui surgissent de nos jours, éviter de tomber dans leurs pièges, et demeurer dans une foi saine en restant sain et sans atteinte, il faut, avec l’aide de Dieu, abriter cette foi derrière un double rempart : d’abord l’autorité de la loi divine, ensuite la tradition de l’Eglise catholique.

Et dans l’Eglise catholique elle-même, il faut veiller soigneusement à s’en tenir à ce qui a été cru partout, et toujours, et par tous ; car c’est cela qui est véritablement et proprement catholique, comme le montrent la force et la définition du mot lui-même, qui enveloppe l’universalité des choses. Et il en sera finalement ainsi, si nous suivons l’universalité, l’antiquité, le consentement général. Nous suivrons l’universalité, si nous confessons comme unique vraie foi celle que confesse l’Eglise entière par tout l’univers ; l’antiquité, si nous ne nous écartons en aucun point des sentiments manifestement partagés par nos saints aïeux et par nos pères ; le consentement enfin, si dans cette antiquité même, nous adoptons les définitions et les doctrines de tous, ou du moins de presque tous les évêques et les maîtres.

Mais peut-être dira-t-on : « N’y aura-t-il alors, dans l’Eglise du Christ, aucun progrès de la religion ? » Certes il faut qu’il y en ait un, et considérable ! Mais cela à condition que ce soit vraiment pour la foi un progrès et non un changement, étant donné que ce qui constitue le progrès c’est que chaque chose soit augmentée en restant elle-même, tandis que le changement, c’est que s’y ajoute quelque chose venu d’ailleurs. Car si l’on tolérait une seule fois cette licence de l’erreur impie, je tremble de dire quel danger s’ensuivrait de détruire, d’anéantir la religion. Sitôt qu’on aura cédé sur un point quelconque du dogme catholique, un autre suivra, puis un autre encore, puis d’autres et d’autres encore seront abandonnés, d’une façon en quelque sorte coutumière et licite. Et si l’on commence à mêler le nouveau à l’ancien, les idées étrangères aux idées domestiques, le profane au sacré, nécessairement cette habitude se propagera partout, si bien qu’ensuite, dans l’Eglise, il ne demeurera plus rien d’intact, rien d’entamé, rien d’inviolé, rien d’immaculé, mais qu’il y aura une maison de passe des erreurs impies ou scandaleuses, précisément là où se trouvait auparavant un sanctuaire de la chaste et incorruptible Vérité.

Il est assurément nécessaire pour tous les catholiques qui ont à cœur de démontrer qu’ils sont les fils légitimes de leur mère l’Eglise, qu’ils adhèrent à la sainte foi des saints Pères, qu’ils s’attachent à elle et qu’ils détestent les profanes nouveautés des profanes, qu’ils en aient horreur, qu’ils les traquent, les poursuivent. »

 J’espère que ces lignes t’aideront, toi et tes amis, à voir plus clair, sans te laisser troubler au milieu de cette période difficile. Je te conseille vivement la lecture de ce petit aide-mémoire à la portée de tous ; il te montrera que l’Eglise a déjà traversé des périodes bien troubles, et que les saints et les Pères de l’Eglise nous ont donné les clés pour les surmonter tout en gardant la paix de l’âme.

Je te souhaite une sainte année 2024 et t’embrasse affectueusement,

Anne

 

La magnanimité

S’il est une vertu qui ne se rencontre plus beaucoup actuellement, c’est bien la magnanimité, c’est-à-dire l’âme grande.

 Elle évoque souvent l’attitude élevée des rois, mais nous est également nécessaire, afin de lutter contre la médiocrité de notre époque.

Aussi je voudrais, à l’image du Divin Maitre, et des siens, la contempler avec toi, afin qu’elle grandisse en nous.

La magnanimité, c’est la grandeur d’âme. Ame qui s’élève, sans orgueil, dans les petites choses du quotidien, pour les faire le mieux possible.

Sans rechigner, sans se plaindre, sans ménager sa peine, car le regard voit plus loin et plus haut que la triste besogne, agissant par amour de Dieu, atteignant ainsi un peu d’éternité.

C’est le sens de l’honneur qui nous pousse à tenir parole, à accomplir ce que l’on s’est promis ou que l’on a promis.

Si le découragement ou la fatigue nous assaille, la magnanimité nous aide à reprendre avec courage car fille de la vertu de force, elle entraîne à la persévérance.

C’est saint Joseph dans l’épreuve de la fuite en Egypte, partant sans murmure et supportant les adversités du voyage et de l’exil sans se plaindre.

La magnanimité, c’est la patience du Seigneur face au manque de compréhension de ses disciples et à leur vue trop terrestre.

Ce fut ne pas s’irriter et pardonner aux foules qu’Il avait enseignées, secourues, guéries, de Lui témoigner si peu de reconnaissance lors de sa Passion.

C’est savoir saluer avec le sourire celui qui nous a offensé, sans arrière-pensée, lui tendre la main pour repartir ensemble.

C’est pardonner vraiment, durablement sans avoir plus tard une parole blessante, ou entretenir des rancœurs familiales ou relationnelles.

C’est l’habitude de toujours rendre le bien pour le mal, ne pas avoir l’esprit de clan et ne mépriser personne.

Clémence des grandes âmes, souvent chez nos rois chrétiens, qui était l’honneur de la chevalerie et de ceux qui ont l’esprit.

C’est Notre-Dame au pied de la croix, priant pour l’humanité sans une plainte et relevant saint Pierre après sa chute.

La magnanimité, c’est l’humilité de ne pas se mettre en avant, ne pas se froisser d’être négligé, se taire sur nos peines, quand ce n’est pas utile d’en parler, c’est l’oubli de nous-mêmes face à une autre détresse.

C’est aussi humblement et simplement reconnaître ses torts, sans se trouver de mauvaises explications, et savoir se retirer si l’on n’est plus digne.

C’est celui qui, sachant qu’il n’est pas meilleur que les autres, ne s’étonne pas de ses faiblesses mais poursuit sa route paisiblement

C’est l’amour de la vérité sans faux-fuyants, le sens de l’honneur et de la loyauté.

La magnanimité, c’est la générosité de celui qui ne regarde pas au don, qu’il soit physique, moral ou financier, et ne le fait pas savoir.

C’est celui qui sait se sacrifier pour les autres, voir leur intérêt avant le sien et sortir de son confort. C’est celui qui accepte de tout perdre ou de voir échouer son projet, s’en remettant à Dieu, malgré la douleur et la déception.

C’est celui qui va rester constant, calme dans la tempête voyant plus haut, il rassure ainsi et entraîne au bien, au dépassement de soi.

La magnanimité, comme la charité, dont elle participe, ne pêche jamais par excès. Elle nous permet de laisser le monde un peu meilleur après nous, en lui donnant un sens divin.

 

          Jeanne de Thuringe

 

Quels sont vos incroyables talents ?

Identifier ses talents n’est pas chose facile mais pourtant bien utile à l’âge du choix des études qui détermineront le métier que nous exercerons plus tard.

Tous nous avons reçu des dons spécifiques : même le serviteur le moins doté de la parabole. Ceux-ci se manifestent par des aptitudes, des facilités que le Bon Dieu nous a données pour que nous les développions afin de les mettre au service du bien commun naturel et surnaturel de la société. Ce faisant, nous accomplirons pleinement notre nature. L’accomplissement et le développement de ces puissances qui sont en nous, contribueront à nous rendre heureux mais surtout à répondre au plan de Dieu.

Mais comment identifier et détecter ses talents ? Un peu d’introspection ne peut pas faire de mal.

Se poser honnêtement quelques questions et y réfléchir pourra déjà donner des indices.

  • Qu’est-ce que j’aime faire ?
  • A quoi suis-je bon ?
  • Y-a-t-il des choses que je réalise avec facilité et qui paraissent difficiles à d’autres ?
  • Quelles sont mes plus grandes réussites ?

De plus, comme nous sommes souvent mauvais juges de nous-mêmes, n’hésitons pas à demander à nos proches qui nous connaissent bien, parents, frères et sœurs, amis et à leur poser les questions suivantes :

  • Quelles compétences perçoivent-ils en nous ?
  • Dans quels domaines les étonnons-nous par notre aisance ?
  • Ont-ils des exemples concrets de situations où nous les avons impressionnés ?

A partir des réponses à ces différentes questions, il est utile de creuser ce qui, au-delà des apparences visibles, est notre motivation profonde : là réside peut-être notre véritable force !

Enfin, n’hésitez pas à être curieux, à essayer de nouvelles activités, à découvrir de nouveaux métiers dans un état d’esprit positif, en cherchant à comprendre ce qui motive et ce qui plaît aux personnes qui vous les font connaître. Peut-être cela vous fera-t-il penser à des aptitudes qui dorment encore en vous.

N’hésitez pas à oser parler avec les adultes que vous pouvez croiser au hasard d’une rencontre (sortie de messe, réunion de parents à l’école, etc…) pour les interroger sur leur métier encore inconnu pour vous ; contrairement à ce que vous pensez, vous ne les importunez pas ! Ils seront heureux de témoigner de leur expérience.

Depuis quelques années, les chambres de Commerce et d’Industrie proposent un contrat1 pour faciliter les démarches (assurance et autre) pour les « stages de découverte professionnelle ». Il permet aux jeunes de passer 5 jours consécutifs dans une entreprise pendant les vacances scolaires sans que cela représente un coût ou des démarches administratives pesantes pour l’établissement d’accueil.  Vous pourrez ainsi découvrir de façon plus approfondie des métiers divers et vous pourrez affiner votre regard sur telle ou telle orientation. C’est une belle occasion qui est proposée là, n’hésitez pas à vous renseigner et à en profiter !

Enfin, retenez bien que ce serait de la fausse humilité que de se croire sans talent car nous avons tous des trésors cachés en nous qu’il nous appartient de trouver pour pouvoir les développer en les mettant au service du bien commun.

Alors, bonne chasse aux trésors, vous avez certainement d’incroyables talents !

 Antoine

1 Convention Mini Stage de découverte professionnelle par les CCI régionales

 

Larguez les amarres et gardez le cap !

A l’aube de l’âge adulte, nos relations avec notre famille peuvent malheureusement parfois se distendre. Le besoin d’affirmation, de démontrer son autonomie et sa capacité à se gérer soi-même peut conduire à des irritations de part et d’autre.

C’est alors que chacun doit reconsidérer sa place et ajuster son attitude. En effet, le « petit » n’a plus 10 ans et la maman n’est pas une « bonne » …

Au moment de prendre notre indépendance, la famille est en fait notre port d’attache, qui n’a de raison d’être que si l’on peut larguer les amarres, s’éloigner, voguer de par le vaste monde et s’y confronter, puis revenir faire le plein, retrouver la stabilité, l’écoute et le soutien de parents et de frères et sœurs aimants et attentifs. Tout cela pour pouvoir repartir de nouveau, sûr de son origine, de son appartenance et de ses racines.

Cependant, l’observation du monde extérieur peut parfois nous faire réfléchir sur le modèle familial, l’éducation reçue, les choix de nos parents… Ceci associé à de légères tensions dues aux différences de caractère pourraient, dans des cas extrêmes, nous conduire à prendre le contrepied de l’éducation reçue. A l’inverse, une admiration sans limite pour celle donnée par nos parents pourrait conduire à vouloir la reproduire très exactement.

Et c’est souvent d’ailleurs par l’une ou l’autre de ces périodes un peu caricaturales que nous passons avant d’être capables de prendre du recul et de choisir librement, en adulte.

En effet, c’est ce qui marque le passage de l’adolescent encore entraîné par ses parents sur le chemin de la vertu, à l’adulte responsable de ses choix et libre de les poser en conscience grâce à l’intelligence et à la vertu qu’il aura pu développer à l’aide de ses parents et pendant son éducation.

L’objet et le but de l’éducation sont justement de former des hommes libres et responsables, capables de poser des choix raisonnables et vertueux en autonomie. La famille et ses références deviennent une base solide pour se construire et commencer à bâtir sa future famille selon ses propres choix mais toujours avec l’objectif de s’élever au mieux vers le ciel, dans des conditions différentes de celles qu’ont vécues nos parents. Et si parfois des circonstances malheureuses et le dessein de la Providence ont pu faire que la famille dans laquelle nous avons grandi n’ait pas pleinement partagé cet objectif d’élever vers le Ciel, il est important de chercher dans les familles amies quelques bons exemples pour nous appuyer sur elles.

Sachons donc tirer le maximum de l’exemple de nos familles pour grandir et préparer la nôtre, en passant au-dessus des imperfections inhérentes à toute institution humaine, plutôt que de perdre notre temps dans la critique et l’opposition. Nous serons alors de vrais adultes, libres et autonomes, et nous satisferons au devoir du respect filial dû à nos parents envers qui nous avons une dette qui n’est pas solvable, si ce n’est en la transmettant à nos enfants.

 

 Antoine

 

L’amour-propre

Ma chère Bertille,

 Je pense que tu dois particulièrement apprécier le thème de ce numéro, toi qui es tellement attachée à ta famille et je suis contente de pouvoir approfondir avec toi tout ce qu’il représente.

Je voudrais en profiter pour te faire découvrir le plus grand ennemi de l’entente familiale. Tu crois peut-être le connaître ? Sans doute penses-tu que je vais te parler des méfaits de la langue ? Eh bien, non ! Car pour ma part, je pense plutôt à celui qui est à la racine de tout : l’amour-propre !

N’est-ce pas lui le véritable responsable d’un mot un peu aigre, d’une réflexion désagréable, de rancunes tenaces et de toutes ces petites ou grandes rancœurs qui empoisonnent l’esprit de famille…? N’est-ce pas lui qui nous chante à l’oreille qu’il faut que chacun nous reconnaisse comme « le meilleur », celui qui « a toujours raison », celui qui « sait toujours bien s’y prendre », et qui nous inspire sans cesse des mots ou des pensées (car même les pensées sont coupables) contre la charité ? Il nous rend délicats, ombrageux, soupçonneux, rigides et excessifs sur nos droits, aisés à offenser ; il entretient dans nos cœurs une certaine malignité, une joie secrète des petites mortifications qui arrivent au prochain…

Et pourtant… Ceux qui nous regardent ne devraient-ils pas pouvoir s’exclamer : « Voyez comme ils s’aiment » ?

Ne récitons-nous pas soir et matin la prière du Pater : « pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons… » ? Pourquoi alors garder dans notre cœur toutes ces rancunes contre l’un ou l’autre ?

Ne disons-nous pas avec conviction : « Que votre volonté soit faite » ? Pourquoi croyons-nous alors que les autres doivent nous être reconnaissants puisque tout vient de Dieu et de Dieu seul ?

Ne communions-nous pas chaque dimanche ? Pourquoi alors déchirons-nous ensuite à belles dents la réputation de notre prochain ?

N’égrenons-nous pas avec régularité les grains de notre chapelet pour tous ceux qui sont dans l’épreuve ? Pourquoi alors dans le secret de notre cœur avons-nous eu cette petite joie du malheur qui arrive aux autres ?

 

Prenons quelques instants pour examiner si vraiment nous avons « l’esprit chrétien » selon les paroles de l’Evangile. Osons marcher vers la vérité lumineuse et écoutons Celui qui a dit :

– « Je veux la miséricorde, et non le sacrifice1 » et regardons alors avec amour celui à qui nous faisons l’aumône d’un sourire ou d’une aide.

– « Aimez vos ennemis2 » et recommençons tous les « Notre Père » que nous avons dis alors que nous avions de l’amertume dans le cœur.

– « Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés3 », et prions pour celui qui erre plutôt que de l’enfoncer davantage.

– « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous, et le serviteur de tous4.» Oublions nos susceptibilités mesquines et notre besoin instinctif de briller en restant à notre place avec le sourire.

– « Nul ne peut servir deux maîtres5 » et demandons-nous si nous n’essayons pas constamment de faire des compromis dangereux pour notre âme tout en maintenant une apparence un peu pharisienne…

– « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce lui-même, qu’il porte sa croix chaque jour, et me suive6 » et humblement examinons si vraiment nous suivons le Christ honnêtement et non pas de façon hypocrite, car accomplir la loi est nécessaire mais n’est pas suffisant. On n’est pas chrétien parce que l’on pratique. On pratique parce que l’on est chrétien. Dieu nous veut tout entiers ; Il va jusqu’au plus profond de l’homme ; non pas seulement dans ses apparences ou ses actes, mais aussi au fond de son cœur et de sa conscience.

Notre christianisme doit être la source d’inspiration vivante de chacun de nos actes ou de nos pensées. Alors seulement nous aurons vraiment compris le message du Christ qui est venu sur terre pour nous dire : « Mes enfants, aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés ! »

Voilà ma chère Bertille, ce que je voulais partager avec toi aujourd’hui afin de te faire découvrir le grand ennemi de l’esprit de famille, – au sens large aussi car ne sommes-nous pas tous frères ?

 Je te souhaite déjà une très belle fête de Noël, grande fête de famille s’il en est, où la paix règnera là où l’esprit chrétien sera.

Avec toute mon affection,

Anne

 

1 Saint Matthieu, 12-7

2 Saint Matthieu, 5-44

3 Saint Matthieu, 7-1

4 Saint Marc, 9-34

5 Saint Matthieu, 6-24

6 Saint Luc, 9-23