Cultiver l’amabilité

De même que la colère ou le mal-être peuvent être contagieux, la paix intérieure peut se communiquer et répandre une atmosphère de sérénité et de joie de vivre, qui en toute circonstance rend la vie plus légère.

Nous avons tous remarqué comment certaines personnes diffusent un sentiment d’apaisement par leur seule présence. Quand on les rencontre, elles sont toujours souriantes et détendues. Elles dégagent un sentiment d’harmonie intérieure qui nous fait comprendre qu’elles n’ont rien à prouver, que leur être tout entier est à l’écoute de ce que l’on pourrait leur dire. Pas de repli sur leurs petits ou grands soucis qui restent à leur place relative, mais la volonté de ne pas attrister les autres et de leur faire passer un moment agréable qui leur rendra la vie plus belle. Il en est même qui sont tellement assimilées à cette façon d’être que le seul fait de penser à elles nous rend le sourire !

C’est un grand art de s’oublier, mais qui se révèle, ô combien fructueux pour la paix intérieure, et également pour la paix dans les familles et en société. Lutter contre l’égocentrisme, ne pas ressasser ses problèmes, et surtout faire preuve de charité en n’imposant pas aux autres ses propres croix. Ils en ont eux-mêmes bien assez comme cela !

Voilà un véritable art de vivre que nos Anciens savaient utiliser en cultivant une authentique amabilité, loin de tout stoïcisme, mais plutôt fine fleur de la Charité.

 

La mère, miroir de Dieu

Dans son livre La Mère, Miroir de Dieu, le Cardinal Joseph Mindszenty étudie de façon détaillée la maternité et la vocation féminine, magnifiées dans les vertus de la Mère des Mères, la Sainte Vierge Marie. De multiples passages auraient pu être choisis pour ce sujet sur la maternité, et nous conseillons à nos lecteurs, et particulièrement à nos amies lectrices, de méditer elles-mêmes les pages de ce livre, condensé admiratif de la vocation éternelle de la femme, qui transcende les modes passagères, réductrices et matérialistes que l’on veut nous imposer. En guise d’avant-goût, je livre à votre réflexion ce passage décrivant l’influence de la mère, formatrice de l’âme, dès les premiers mois de son enfant :

 

Ce secret accord de deux âmes.

Qui mieux que la mère comprend l’enfant ? Il ne peut pas encore parler et, pourtant, la mère guette et devine sur son visage les désirs à peine exprimés. Rien de plus mystérieux que ce secret accord de deux âmes au-delà et en dehors des mots. Pendant ces mois qui suivent la naissance, l’enfant garde encore longtemps la nostalgie du sein maternel. Il semble que chaque jour se renouvelle le miracle de la transmission de la vie, que ces baisers que la mère lui prodigue dispensent à chaque fois un souffle de vie. Ce baiser maternel est comme l’image du baiser divin du Père à son Fils ; il nous fait pressentir les desseins insondables de Dieu et l’immensité de son amour trois fois saint. Avec le Saint Sacrement, pain de notre âme, il n’est rien de plus agréable à Dieu qu’un enfant ; l’amour humain et l’amour divin se rencontrent en lui.

 

Dans le soir qui tombe

Je ne connais pas d’image plus pure ni plus sereine qu’une mère qui se penche sur un berceau. Pendant que l’enfant gazouille doucement, la mère lui parle, elle lui parle un langage que tous deux sont seuls à comprendre, un langage tout imprégné de cette poésie du cœur que seul l’amour peut dicter. Peu à peu les mots se font musique ; la berceuse, cette fleur naïve de l’âme populaire, naît dans ces moments-là. Poètes et musiciens la rediront au monde.

Dors mon enfant.

Vois au ciel briller les étoiles,

La lune est là aussi,

Qui monte à l’horizon.

Dors dans ton berceau,

Mon enfant, dors….

Le chant s’est tu. La mère jette encore un regard pour voir si l’enfant est bien endormi ; sur la pointe des pieds elle s’éloigne ; elle retourne à son travail, mais son cœur veille auprès de l’enfant, bientôt, sans doute, il faudra qu’elle revienne. Qu’il est beau l’enfant endormi ! La mère ne peut pas se rassasier de le contempler. Son visage soucieux est devenu calme et tendre ; son sommeil, à elle, est si court et si léger, et il y a tant d’elle-même dans ce berceau !

 

Le plus riche trésor

Dans le sourire d’un enfant, c’est toute la beauté d’une aurore qui resplendit : « Le matin, quand il s’éveille, je suis transportée de bonheur ; quand je le vois ouvrir les yeux et étirer paresseusement ses petits membres, j’ai l’impression de posséder le plus riche trésor du monde. Alors je lui chante mainte chanson. N’est-il pas juste qu’il soit entouré de joie et de bonheur ? Chaque sourire, chaque regard de la mère, semble être pour lui un événement si important ! Ces premiers mois, l’enfant ne les oublie jamais. » Puis il grandit ; le temps vient où ses lèvres forment le premier mot ; son âme se reflète chaque jour davantage sur son visage. Bientôt il fait ses premiers pas ; la mère le pose à terre, elle l’appelle : et l’enfant s’essaie, hésitant d’abord, puis il s’enhardit. Que de fois il trébuche, que de fois il se blesse : et la mère le relève, souffle sur ses plaies et le console. N’est-ce pas l’image de sa vie future ? Bien des fois, il se meurtrira ainsi aux épines du chemin.

 

« Qu’un véritable ami est une douce chose »1

Si l’Amitié vraie est la complaisance entre deux âmes qui se sont adoptées, pour atteindre des sommets de connivence intellectuelle ou spirituelle, elle ne peut se passer de quelques contraintes qui permettent de l’entretenir au fil du temps.

Qu’est-ce qui blesserait cet Ami si nous n’y prenions garde ?

Tout d’abord, la moquerie ou la dérision. D’un Ami, on ne se moque pas.

Puis la tromperie. A un Ami, on ne ment pas.

Et la négligence. L’Amitié se cultive, par des gestes simples de compassion ou d’affection.

Et enfin l’oubli. Même à la dernière extrémité, même après la mort, l’Amitié survit.

Voici une histoire vraie, d’un autre siècle puisque c’était au siècle dernier. C’étaient deux jeunes filles : Jacqueline et Thérèse, qui s’étaient rencontrées chez des cousins communs pendant des vacances, dans l’entre-deux guerres. Une grande amitié, vive, fulgurante, et très joyeuse les avait rapprochées, pour peu de temps car l’une et l’autre se marièrent rapidement et Jacqueline se retrouva sur un autre continent.

Elles continuaient à s’écrire, une fois par an, pour partager des nouvelles et garder précieusement cette amitié vivace. Mais cinquante ans plus tard, Jacqueline revint s’installer en France et ne laissa pas s’écouler un mois sans avoir invité son amie de jeunesse qu’elle n’avait pas revue depuis un demi-siècle. Et ce furent les retrouvailles insouciantes de ces deux dames de soixante-dix ans, avec le charme, la légèreté juvénile et la joie que leur procurait leur amitié retrouvée. Elles se retrouvaient comme au temps de leurs vingt ans, comme si elles ne s’étaient jamais quittées ! Quel trésor précieux que l’Amitié fidèle ! Elles continuèrent à se voir ou à s’appeler au téléphone de temps à autre et un jour, Thérèse reçut un appel étrange : personne ne parlait, on entendait seulement un souffle au bout du fil et une plainte, qui pouvait ressembler au murmure de son prénom. Elle ne reconnut pas la voix, et – comme elle s’en voulut plus tard ! – elle raccrocha… Jacqueline mourut le soir-même, soulagée d’avoir pu dire adieu à son amie Thérèse.

Gageons qu’elle a prié pour elle, et attendu paisiblement de revoir Thérèse au Paradis !

 

1 La Fontaine, Livre VIII – Fable 11 Les deux amis

 

Si l’Amitié vraie est la complaisance entre deux âmes qui se sont adoptées, pour atteindre des sommets de connivence intellectuelle ou spirituelle, elle ne peut se passer de quelques contraintes qui permettent de l’entretenir au fil du temps.

Qu’est-ce qui blesserait cet Ami si nous n’y prenions garde ?

Tout d’abord, la moquerie ou la dérision. D’un Ami, on ne se moque pas.

Puis la tromperie. A un Ami, on ne ment pas.

Et la négligence. L’Amitié se cultive, par des gestes simples de compassion ou d’affection.

Et enfin l’oubli. Même à la dernière extrémité, même après la mort, l’Amitié survit.

Voici une histoire vraie, d’un autre siècle puisque c’était au siècle dernier. C’étaient deux jeunes filles : Jacqueline et Thérèse, qui s’étaient rencontrées chez des cousins communs pendant des vacances, dans l’entre-deux guerres. Une grande amitié, vive, fulgurante, et très joyeuse les avait rapprochées, pour peu de temps car l’une et l’autre se marièrent rapidement et Jacqueline se retrouva sur un autre continent.

Elles continuaient à s’écrire, une fois par an, pour partager des nouvelles et garder précieusement cette amitié vivace. Mais cinquante ans plus tard, Jacqueline revint s’installer en France et ne laissa pas s’écouler un mois sans avoir invité son amie de jeunesse qu’elle n’avait pas revue depuis un demi-siècle. Et ce furent les retrouvailles insouciantes de ces deux dames de soixante-dix ans, avec le charme, la légèreté juvénile et la joie que leur procurait leur amitié retrouvée. Elles se retrouvaient comme au temps de leurs vingt ans, comme si elles ne s’étaient jamais quittées ! Quel trésor précieux que l’Amitié fidèle ! Elles continuèrent à se voir ou à s’appeler au téléphone de temps à autre et un jour, Thérèse reçut un appel étrange : personne ne parlait, on entendait seulement un souffle au bout du fil et une plainte, qui pouvait ressembler au murmure de son prénom. Elle ne reconnut pas la voix, et – comme elle s’en voulut plus tard ! – elle raccrocha… Jacqueline mourut le soir-même, soulagée d’avoir pu dire adieu à son amie Thérèse.

Gageons qu’elle a prié pour elle, et attendu paisiblement de revoir Thérèse au Paradis !

 

1 La Fontaine, Livre VIII – Fable 11 Les deux amis

 

Ciel et terre

 Le culte rendu à nos défunts ne fait-il partie que d’une subsistance d’habitudes de savoir-vivre ancien ?

Offrir des messes, entretenir et fleurir nos cimetières, gagner des indulgences, faire célébrer un trentain grégorien, prier quotidiennement pour nos défunts, tout cela n’est-il qu’ancienne tradition, piété filiale surannée, réminiscence d’un culte des ancêtres d’un autre temps ?

Ou n’y aurait-il pas un lien plus mystérieux entre l’au-delà et nous, entre l’Eglise triomphante et souffrante et nous, qui formons l’Eglise militante de la terre ?

Ces âmes des défunts, même si elles sont invisibles, ne sont-elles pas omniprésentes ? Et elles qui possèdent la Vraie Vie, n’ont-elles pas maintes occasions de se rappeler à nous et de nous aider dans notre quotidien ?

Si c’est un devoir de charité pour nous de gagner des mérites et de prier pour elles, de leur côté, comment ne nous aideraient-elles pas dans nos tâches matérielles, et surtout dans l’acquisition des vertus, qui nous permettra de les rejoindre dans leur béatitude céleste ?

Ne retrouve-t-on pas la piété de tel grand-parent dans la fulgurante conversion de certains de ses petits-enfants ? De quelle protection discrète ne jouissons-nous pas grâce aux mérites acquis durant leur vie par certains de nos proches ou certaines âmes du Purgatoire pour lesquelles nous avons prié, et qui intercèdent pour nous ? Quelle grâce de discernement, quelles inspirations, quelle idée soufflée à l’oreille, quelle rencontre providentielle comme inspirée par nos Anciens, ne viennent-elles pas bouleverser notre esprit rationnel et notre incrédulité ?

Nous en avons tous fait l’expérience et savons bien que, si nous aidons par nos prières une âme à sortir du Purgatoire, nous nous amassons un trésor dans le Ciel, mais aussi bien, des grâces dès cette vie terrestre.

Alors pourquoi hésiter à transmettre et renouveler ces anciennes habitudes de piété, si vivaces en terre chrétienne et ne pas demander leur aide à nos amis du Ciel, dans tous les moments délicats de notre vie ? Ce sera ainsi rétablir ce grand dialogue des générations, au-delà du temps et des lieux, et rentrer de plain-pied dans le mystère divin de la Communion des Saints.

 

Faire fructifier ses talents pour les autres et en vue du Ciel !

Quand on parle à des personnes âgées, ou même seulement à des personnes qui ont dépassé la cinquantaine, il est frappant de voir la différence entre celles qui se sont « laissé vivre », ont profité de l’existence en touriste et se sont aménagé une petite vie tranquille, où la préoccupation de leur propre personne tient beaucoup de place ; et celles dont la vie fourmille encore de mille curiosités, d’atomes crochus toujours renouvelés, qui les font se porter vers les autres et les aider, toujours en quête de petits services à rendre à droite et à gauche, toujours avec un ouvrage ou un bricolage en cours, toujours d’une activité d’abeille infatigable. Elles ont réussi à vaincre l’attrait des nouvelles technologies qui, à force d’envahir la vie quotidienne, freinent et même empêchent toute réalisation concrète, toute culture, tout progrès spirituel. Certaines ont cultivé leurs talents intellectuels, d’autres leurs aptitudes pratiques, toutes ont lutté contre la paresse et l’acédie, ce dégoût décourageant de l’existence qui devient un mal spirituel tout autant que psychologique ; la plupart ont compris qu’il ne fallait pas se préoccuper uniquement de leur bien-être personnel parce que ce temps leur était donné pour un bien supérieur. L’époque de l’activité intensive (travail professionnel ou occupations familiales) est passée, elles ont décidé de se consacrer davantage aux autres ; en pensant à l’au-delà qui approche, elles pensent à leur âme.

Nous n’avons qu’une vie, qu’une jeunesse, qu’un âge mûr, qu’une vieillesse, qu’une âme !