Toujours joyeux et souriant

           Sur le chemin du pèlerinage de Pentecôte, avez-vous remarqué certains chapitres enfants chanter ces paroles sur l’air de « Trois jeunes tambours » :

« Des gens les regardaient, mais qui étaient tout tristes…

La joie chrétienne, on l’a par l’sacrifice

Un sacrifice, c’est dur quand on l’avale .

Mais après cela, on dirait que c’est du sucre ! »

  Ces paroles sont pleines de vérité : la vraie joie est une première participation au bonheur du ciel et suppose donc un certain oubli de soi pour se tourner vers Dieu ou vers le prochain.

Avez-vous réalisé la leçon que nous donne l’Eglise en classant la Présentation de Jésus au Temple dans les mystères joyeux du chapelet ? Notre-Dame offre son fils unique, elle reçoit la prophétie terrible de saint Siméon : « un glaive de douleur te transpercera le cœur ! » Marie, élevée au Temple et douée de toutes les qualités, connaît parfaitement les prophéties et les psaumes : elle sait que le Messie, son fils, souffrira, qu’il sera comme un agneau mené à l’abattoir qu’il sera rejeté des hommes, que ses os seront comptés… Toute la vie de Marie sera une souffrance, une offrande, et un abandon confiant de savoir qu’un jour, son Fils bien aimé sera mis à mort, au rang des malfaiteurs… Mystère joyeux pourtant ! Voir la beauté de l’instant présent et abandonner le futur à la volonté de Dieu : le secret de la joie. Notre-Dame de Joie et Notre-Dame des sept douleurs tout ensemble !

La joie des enfants de Dieu, une volonté

  « Introibo ad altare Dei, ad Deum qui laetificat juventutem meam » ; je m’avancerai jusqu’à l’autel de Dieu, vers Dieu qui réjouit ma jeunesse !

A chaque messe, c’est par trois fois que cette phrase est répétée ! C’est dire son importance.

Il nous faut redevenir de petits enfants pour entrer dans le Royaume des Cieux. L’enfant est naturellement joyeux dans sa jeunesse insouciante et confiante.

La joie est essentielle dans notre vie, elle nous donne l’élan, l’énergie, l’entrain, le bien-être et la bonne humeur. Elle s’oppose à la désolation, la tristesse, le désespoir, le désenchantement, le dégoût, l’ennui…

Réciproquement, l’énergie qui nous a permis d’accomplir un travail, une bonne œuvre, un sacrifice se transformera en joie une fois les obstacles franchis, et même pendant l’effort. Regardez le sourire des grands sportifs !

  « La joie s’acquiert. Elle est une attitude de courage. Être joyeux n’est pas une facilité, c’est une volonté1. »

  La volonté de faire le bien ou de faire confiance, la volonté de vivre à l’instant présent avec les grâces du présent sans ruminer le passé ni s’inquiéter de l’avenir nous donnera la joie.

Demander la joie

  La joie vient avec le sacrifice de soi-même et avec la grâce, aussi est-il souhaitable de la demander et de la vouloir.

« Rendez nos cœurs joyeux pour chanter vos merveilles » prient les louveteaux.

Jean-Sébastien Bach a composé une célèbre cantate pour la fête de la Visitation, titrée « Jésus, que ma joie demeure » (BWV147).  Elle commence par une prière : « Jésus, demeure ma joie, la consolation et la sève de mon cœur ! » et continue « Il est la force de ma vie, le plaisir et le soleil de mes yeux, le trésor et le délice de mon âme. Voilà pourquoi je ne laisse pas Jésus hors de mon cœur et de ma vue (…) Serviteur de Satan et des péchés, tu es libéré par l’apparition réconfortante du Christ de ce fardeau et de cette servitude ».

Concrètement, pour obtenir la joie

  En tant que père de famille, nous avons des occasions incomparables d’obtenir et d’entretenir notre joie en nous occupant de nos enfants.

Que nous soyons harassés par le travail, préoccupés par les soucis légitimes ou non, notre devoir d’état de nous occuper de nos enfants nous aide à sortir de nous-même, nous oublier et oublier pour donner aux enfants. Essayez en vous donnant à fond, en retrouvant une âme d’enfant !

Racontez une histoire ou une bande dessinée, dès le jeune âge, avec 2 enfants sur vos genoux et un autre à vos côtés. Mettez le ton, exagérez les bruitages, les cris d’animaux, le suspense… et observez les réactions de votre jeune public… Encore papa ! Encore !…

Les jeux de cartes ou de société sont aussi l’occasion d’observer les sentiments et de s’en réjouir : joie de celui qui fait un bon coup ou qui gagne…surtout lorsque papa a mal joué (parfois volontairement). Occasion aussi d’apprendre au perdant à s’oublier et à se satisfaire du fait de jouer, pas seulement du résultat.

Foot, rugby, ping-pong ou volley mais aussi cache-cache, chat perché et tous les jeux de plein air stimulent l’énergie de chacun, et dévoilent les tempéraments… les fonceurs, les magouilleurs, les crieurs, les fédérateurs : « tous ensemble pour battre papa ! »…

  Oui, cela peut demander un effort de sortir de soi, mais la récompense est immense dans la joie des enfants, la contribution à leur développement psychologique et physique, sans oublier le sourire de la maman déchargée de ses soucis pour un moment, et heureuse de voir sa famille unie.

Les enfants sont le modèle de la joie, avec leur simplicité. Tous ceux qui s’en occupent en se donnant recevront une part de leur joie : parents, éducateurs, célibataires, religieux…

Souriez !

  « Un saint triste est un triste saint » dit l’adage. « La joie intérieure réside au plus intime de l’âme ; on peut aussi bien la posséder dans une obscure prison que dans un palais2 ». Si nous en sommes conscients, et que nous essayons d’en vivre, alors sourions fréquemment !

Se forcer à sourire, lorsqu’on est tenté par la tristesse, aide à voir la situation de manière plus positive et à se souvenir que nous sommes portés par la grâce de Dieu

« Mais qui donc peut vous nuire si vous vous montrez zélés pour le bien3 ? »

  Au-delà de nous rendre plus sympathique à notre entourage, le sourire encourage ceux que nous croisons à relever les yeux, voire à nous rendre la pareille. Le sourire, c’est un petit rayon de soleil dans la grisaille des transports en commun, dans les commerces ou les couloirs du bureau.

  Peut-être aurez-vous la chance d’entendre comme moi, plusieurs collègues de travail vous dire: « quel est ton secret ? Tu souris tout le temps même dans les périodes difficiles ! »  

  Le sourire est contagieux ! Le sourire est un témoignage ! Sourions souvent !

Hervé Lepère

1 Abbé Gaston Courtois (1897-1970)

2 Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus

3 1ère épitre de saint Pierre, ch3, le 5ème Dim. ap. Pentecôte

 

 

Cercle vicieux

           En cours élémentaire, la maîtresse rappelle l’importance du respect des horaires.

Votre maman vous dit certainement qu’il faut venir à table en obéissant au premier appel. C’est pareil à l’école.

Un petit garçon commente : « Oh oui, d’ailleurs hier soir maman s’est mise en pétard contre papa… Elle l’a appelé 3 fois. Il faisait ses jeux à l’ordinateur comme tous les jours. Comme il ne venait toujours pas, on a commencé le dîner sans lui… »

Visiblement ce n’était pas un cas isolé….

La fuite du père, parfois inconsciente

  Tous les pères, à un moment ou un autre, sont attirés par une activité qui peut devenir une dépendance. Que les activités soient bonnes ou mauvaises en soi, presque toutes peuvent entraîner une addiction : les jeux, internet, les réseaux sociaux, le sport, l’alcool voire la drogue ou la pornographie, et même le travail. Il s’agit d’un processus progressif : d’abord des cas ponctuels, puis excessifs avant la dépendance pathologique difficile à traiter.

Cette évolution aboutit à une certaine fuite du père par rapport à sa famille ou son épouse. Souvent inconsciente, c’est une entrée dans un cercle vicieux qui peut faire de gros dégâts.

L’origine est fréquemment compréhensible : la fatigue liée aux jeunes enfants, le souci donné par les adolescents, le vide une fois les grands enfants partis de la maison, l’ambiance entre mari et épouse, le stress professionnel ou simplement la pression de ses responsabilités de chef de famille.

Face à la difficulté qui est réelle, le père croit trouver une solution, un soulagement ou un oubli par un mauvais moyen.

Des circonstances défavorables

  Untel a l’habitude de consulter et traiter ses mels professionnels le soir, le week-end, en vacances. Devant ses enfants, ses amis ou en tête à tête avec son épouse, il a toujours de bonnes raisons. Mes clients (ou mon patron, ou mes collègues) comptent sur moi…je travaille sur des sujets qui ne peuvent pas attendre, c’est important…il faut bien que j’obtienne cette promotion pour notre bien…

De nombreux hommes se réfugient dans un travail acharné à cause d’un complexe d’infériorité qui remonte souvent à l’enfance. Le message reçu par l’enfant était du genre : « tu n’es pas aussi doué que ton frère », « tu ne feras jamais rien de bon dans la vie ». Peu d’encouragements, peu de travail sur les qualités humaines de l’enfant en dehors de celles concernant sa réussite scolaire. Ils ne se sont pas sentis aimés pour eux-mêmes. Le complexe d’infériorité pousse l’adulte à devenir perfectionniste et à vouloir prouver sa valeur aux autres. D’autres hommes, à l’opposé, se réfugient dans la paresse « pourquoi travailler sérieusement ou faire des efforts en famille, puisque je ne suis qu’un bon à rien ? »

Certains ne se méfient pas des addictions, parce qu’ils ont eu l’exemple de leurs parents ou les influences de leurs amis : à famille de fumeurs, enfants fumeurs… de mauvais amis (ou un internet sans dispositif de filtrage) amènent à la pornographie.

La fuite du père est un cercle vicieux. Certains ne se sentent pas capables de participer à l’éducation des enfants et même à leurs soins matériels. Peut-être n’ont-ils pas eu la chance de voir l’entraide de leurs pères et mères dans ces circonstances ? Peut-être sont-ils trop perfectionnistes ou manquent-ils aussi de confiance en eux, en leur épouse et en la Providence ?

Les reproches de l’épouse peuvent aggraver le cercle vicieux : l’homme qui aime sa femme ne veut pas affronter une épouse contrariée. Si cela dure, il se dit qu’il ne réussira jamais à être agréable à son épouse…et fuit le conflit en s’isolant.

Culpabiliser ne sert à rien, prendre conscience du danger, des circonstances qui y contribuent et avoir envie de changer est essentiel. Chacun doit y contribuer.

Conséquences pour les enfants

  Le dépendant vit dans un monde égocentrique. Il se replie sur lui-même, absorbé par ses peines ou ses plaisirs, ce qui va à l’encontre du don de soi nécessaire à une vie de famille réussie et sanctifiante. Les impacts sont nombreux : sur l’ambiance familiale, sur la qualité de la prière, sur le moral ou la santé, sur l’équilibre de vie.

Les dépendances du père donnent le mauvais exemple aux enfants et peuvent blesser leur personnalité d’une manière qui ne se révèlera que plusieurs années après. 

De nombreuses études se sont penchées sur un cas extrême : l’augmentation des suicides de jeunes1. Au-delà des cas liés à des maladies psychiatriques ou des troubles psychiques aigus, le suicide est l’aboutissement d’un cheminement douloureux mais souterrain. Derrière l’évènement déclencheur final, il existe souvent des mobiles plus profonds. « Dans 50% des cas, le jeune suicidaire appartient à une famille au sein de laquelle il ne peut recevoir la stabilité, la sécurité et la chaleur affective nécessaire à son épanouissement2. »

Sans arriver à cette extrémité, des enfants peuvent changer de comportement à l’école ou à la maison parce qu’ils souffrent de l’attitude de leur père ou de l’ambiance familiale. Soyons attentifs à ces indices !

Rien n’est perdu, tout est possible !

  Si vous lisez cette revue, c’est que vous voulez réussir votre rôle de père et conduire votre famille vers le ciel. Ne souhaitez-vous pas le bonheur et l’épanouissement de vos enfants et de votre épouse ? Malgré vos imperfections, avec vos qualités et avec la grâce de Dieu ? Tout reste possible !

Détectez vos dépendances et leurs impacts négatifs par l’examen de conscience, par les conseils ou les réactions de votre épouse, de vos amis voire de vos enfants est la première étape pour décider d’agir. La motivation doit être profonde : les enfants, l’épouse, l’amour de Dieu, la nécessité de casser le cercle vicieux avec ses souffrances et ses épreuves pour se sentir mieux.

Nous sommes corps et âme : dans toute dépendance, des facteurs physiologiques et physiques (les substances psychoactives et les hormones) se combinent aux facteurs psychologiques (la volonté, le tempérament). Par exemple, la dopamine, hormone du plaisir, est stimulée par la plupart des activités sur écrans, et incite à les prolonger.

Pour s’en sortir, il est donc utile de remplacer la dépendance que l’on fuit, par une activité bénéfique et d’observer les effets positifs qui nous encourageront à nous priver de la dépendance initiale. Ainsi l’excès de smartphone ou d’internet sera mieux combattu en remarquant le plaisir venant des jeux avec les enfants, des discussions, des moments de qualité avec son épouse, de la lecture ou du bricolage…

Il faudra persévérer… le carême, l’avent ou l’été sont des périodes suffisamment longues pour faciliter des changements d’habitudes, éloigner les tentations et réussir un sevrage. La prière et le recours fréquent aux sacrements seront un atout majeur.

Dans tous les cas, bénins ou sévères, l’aide de personnes de confiance, au-delà de son conjoint, est essentielle à la réussite : bons amis, prêtres mais aussi médecins ou associations spécialisées pour les cas difficiles.

  Nous avons tous nos faiblesses, voire des dépendances : les accepter et chercher à s’en corriger sont des occasions d’humilité et de progrès dans la sainteté. Ne nous décourageons pas, le bon Dieu saura nous guider si nous avons confiance en Lui.

 

Hervé Lepère

1 600 suicides de jeunes de moins de 25 ans par an, soit 16% du total des décès de cette tranche d’âge. Source : Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, janvier 2015

2 Revue du Centre Catholique des médecins français N° 54, cité par AFS N° 33

 

Prions!

           « Les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Saint Jean 4,22). Au-delà de l’obligation de la messe dominicale, de nombreuses pratiques de prières sont recommandables pour les pères de famille (chapelet, prière en famille, messe…), mais leur accumulation n’est pas un critère de sainteté. Selon les circonstances, en faisant attention à l’harmonie avec son conjoint, chacun prendra conseil d’un bon prêtre pour choisir ses dévotions régulières. Cet article attire l’attention seulement sur le début et la fin de la journée du père de famille, et sur son attitude face aux difficultés.

 L’énergie pour commencer sa journée

   Il est 6h45, les enfants réveillés un peu avant l’heure du lever chuchotent :

– « C’est allumé dans le salon depuis un moment… tu crois que c’est normal ? »

– « Mais oui, tu sais bien que c’est papa qui fait sa prière avant de partir travailler ! Il fait même une méditation. »

  « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, tout le reste vous sera donné par surcroît ! » Jean-Pierre, le père de cette famille, a médité cette phrase lorsqu’il était étudiant et la met en pratique avec succès ! Il a compris que la prière était la sève d’une vie d’homme catholique et la condition de son bonheur dès ici-bas sur terre et bien sûr ensuite au ciel.

Lors d’un camp de jeunes, il a été frappé par un de ses camarades qui pratiquait 15 minutes d’oraison quotidienne au lever. Ce qu’on conseille en retraite est donc possible ! Depuis ce moment-là, il donne donc 15 minutes de son temps au Bon Dieu chaque matin.

Il a connu des difficultés professionnelles, des soucis pour l’éducation des enfants, le découragement… Il trouve que sa prière est souvent pauvre, sèche ou distraite par ses préoccupations… Peu importe : il donne 15 minutes de son temps à Dieu, son Créateur, son Sauveur, son Père. Il aime cette phrase de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus : « Ce qui attire le plus de grâces du Bon Dieu, c’est la reconnaissance, car si nous le remercions d’un bienfait, il est touché et s’empresse de nous en faire dix autres… J’en ai fait l’expérience, essayez et vous verrez. »

Il donne du temps à Dieu, comme il donne du temps à son épouse, sans se préoccuper de savoir ce qu’il va en retirer pour lui-même, simplement par amour. Parfois, c’est une conversation, parfois une écoute, ou une présence en silence…

Plus tard, ses enfants devenus adultes se souviendront d’avoir vu leur père à genoux devant Dieu, malgré toutes ses occupations… ou plutôt à cause d’elles. Belle leçon qu’ils n’oublieront pas.

Si vous n’avez pas ce temps ou ce courage, faites au moins une vraie prière du matin à genoux devant la statue du Sacré-Cœur ou au « coin prière » de la maison ! Ces 2 ou 3 minutes consacrées au Bon Dieu vous seront rendues au centuple !

Face au rythme de l’activité professionnelle moderne, les spécialistes en management et les psychologues prônent ouvertement la méditation (bouddhiste, yoga, pleine conscience). Nous avons beaucoup mieux : la méditation catholique qui, au-delà de nous dépouiller des perturbations extérieures, est la seule à nous remplir de la joie et de la grâce de Dieu !

Lorsque vous êtes deux ou trois….

   Le soir, Jean-Pierre prie avec son épouse : à deux, renforçant ainsi l’unité des cœurs et des âmes sanctifiées par leur mariage. Ce moment clôture saintement leur journée en ravivant les grâces du sacrement, même lorsqu’ils ont dit la prière en famille avec les enfants. Si besoin, il est aussi l’occasion de pardon mutuel ou de remerciements particuliers.

 Et dans les difficultés ?

   Le père de famille, comme tout responsable, a nécessairement ses moments de doutes, de fatigue et ses difficultés. Ils sont le signe qu’il prend sa mission à cœur, et sont l’occasion de progrès dans la grâce de Dieu.

Le chef, l’homme peut-être plus que d’autres doit alors reconnaître sa faiblesse et montrer sa Foi, son Espérance et son amour de Dieu en se confiant à sa Providence, par les mains de sa sainte mère, Notre-Dame.

Qui dira les grâces et les consolations reçues par la prière humble et persévérante ? Marie est notre mère, elle attend nos prières et ceux qui ont recours à elle ne seront jamais déçus !

N’hésitons pas à prendre la suite de Péguy, père de famille éprouvé à une époque de sa vie, et dont la prière sous ses apparences désordonnées n’en était pas moins exemplaire :

« Il avait dit, par la prière, il avait dit : Je n’en peux plus. Je n’y comprends plus rien. J’en ai par-dessus la tête. Je ne veux plus rien savoir. Ça ne me regarde pas1. »

« Prenez-les. Je vous les donne. Faites-en ce que vous voudrez. J’en ai assez.

Celle qui a été la mère de Jésus-Christ peut bien être aussi la mère de ces deux petits garçons et de cette petite fille.

Qui sont les frères de Jésus-Christ. Et pour qui Jésus-Christ est venu au monde.

Qu’est-ce que ça vous fait. Vous en avez tellement d’autres.

Qu’est-ce que ça vous fait, un de plus un de moins.

Vous avez eu le petit Jésus. Vous en avez eu tant d’autres.

(…) Il faut que les hommes en aient un aplomb, de parler ainsi. A la Sainte Vierge.

Les larmes au bord des paupières, les mots au bord des lèvres il parlait ainsi, par la prière il parlait ainsi. (…)

Comme il s’applaudissait d’avoir eu le courage de faire ce coup-là. Tout le monde n’aurait pas osé.

Il était heureux, il s’en félicitait en riant et en tremblant. Il n’en avait pas parlé à sa femme. Il n’avait pas osé. (…)

Depuis ce temps-là tout marchait bien. Naturellement. Comment voulez-vous que ça marche autrement. Que bien. Puisque c’était la Sainte Vierge qui s’en mêlait. Qui s’en était chargée.

Elle sait mieux que nous. (…)

Il est même curieux que les chrétiens n’en fassent pas autant. C’est si simple. On ne pense jamais à ce qui est simple2. »

 

  Il n’est pas de difficulté personnelle, familiale, professionnelle, sociale qui ne puisse être résolue par Marie. Les moyens sont multiples : chapelet, prière personnelle, messe en semaine, pèlerinage, neuvaine… Comme l’a répété Notre Dame à Pontmain, il y a 150 ans, « mais priez, mes enfants, mon Fils se laisse toucher !».

Dans les joies, comme dans les soucis, soyons proches de notre mère du ciel !

 

Hervé Lepère

 

1 Il faut que France, il faut que chrétienté continue

2 Le Porche du Mystère de la Deuxième Vertu

 

Je n’ai pas fait exprès!

           Martin se confie à son ami Patrick : « Depuis la dernière réunion, Florent me fait la tête… qu’est-ce que j’ai dit pour mériter cela ? il est trop susceptible, c’est injuste ! »

Patrick rumine de son côté : « ma sœur Albane a hérité de la jolie commode de maman, alors que papa m’avait dit, il y a 10 ans, qu’elle était pour moi… c’était dit, c’est injuste ! »

S’ils n’y prennent garde, Martin et Patrick vont rentrer dans un cercle vicieux au bureau ou en famille : une rancune plus ou moins cachée va créer de la distance, leur sensibilité irritée va guetter la prochaine maladresse, un malaise va s’installer avec leur collègue de bureau ou leur famille. Le tempérament sanguin, extraverti, va exploser et ses paroles violentes vont laisser des traces. Le mélancolique, introverti, va ruminer, s’endurcir et créer un fossé. Silencieuse ou visible, la rancune va nuire au Bien Commun. Patrick et Martin doivent la détecter et agir en conséquence !

 

Notre psychologie peut nous jouer des tours

 

  Soyons-en conscients ! Certains ressentent vivement ce que d’autres considèrent comme un détail, une maladresse, et vice-versa.

Une grille d’analyse des types psychologiques1, utilisée dans les entreprises nous aidera à comprendre la manière dont nous préférons, naturellement, traiter les informations et nous faire une opinion. Certains privilégient les aspects logiques et objectifs, avec une tonalité intellectuelle (préférence « Pensée »), d’autres les aspects personnels et subjectifs, basés sur des valeurs et avec une tonalité affective (préférence « Sentiment »). Nous fonctionnons tous avec un mélange des deux, mais dans un dosage qui peut être très différent d’une personne à l’autre. 

Ainsi Martin et Patrick, avec leur préférence « pensée » recherchent des critères objectifs, impersonnels ; la justice, la logique. La fermeté et l’esprit critique leur paraissent nécessaires pour avancer. Florent, de préférence « sentiment », privilégie l’harmonie et l’empathie dans l’équipe, la chaleur humaine et la confiance, et a été choqué par une réflexion à l’emporte-pièce.

En réunion, Martin a critiqué une équipe ayant eu de mauvais résultats « ils sont mauvais, c’est nul ! ni fait ni à faire… ».

Florent : « mais ils se sont donnés du mal, ce sont des gars bien. Ils ont travaillé dur »

Martin : « c’est le résultat qui compte, et le résultat est mauvais ! »

Florent : « peut-être, mais tu es méprisant pour eux, c’était difficile ! »

Martin : « arrête de toujours les défendre. Si on ne peut plus se dire la vérité… »

Florent bouillonne et grimace en silence : « Martin m’attaque personnellement, la confiance manque, ses mots montrent un manque de respect pour les équipiers. C’est inadmissible ! »

Martin et Florent ont chacun des efforts à faire pour se comprendre et sortir de ce cercle vicieux.

À nous aussi, la charité commande de nous adapter à l’autre, de nous mettre à sa place. Il ne s’agit pas de nous aplatir et de renoncer à nos convictions, mais d’œuvrer au bien commun et, en passant, de mortifier notre amour-propre.

Savoir nous excuser même si nous n’avons pas fait exprès d’offenser l’autre

   Si vos bons amis vous disent régulièrement « arrête de t’excuser en permanence », ce paragraphe n’est pas pour vous ! Soyez simples et avancez malgré vos imperfections. Sinon, voici quelques conseils.

Choisissez le bon moment, où votre interlocuteur est seul, au calme. Commencez par une « formule de protection » pour signaler à votre interlocuteur que vous êtes venu en paix : « je t’apprécie, ton avis compte pour moi, puis-je te parler ? ». Puis faites vos excuses simplement et, si la réception est bonne, partagez une résolution pour l’avenir.

Ainsi Martin retourne voir Florent le lendemain et après sa formule de protection :

« Florent, j’ai l’impression que je t’ai blessé hier, en critiquant une de tes équipes, excuse-moi, je ne voulais pas t’offenser »

« …. »

« Visiblement, nous avons des réactions différentes, j’aimerais qu’on se comprenne mieux. Ce qui m’a gêné, c’est ce résultat, ces circonstances…. Cela a provoqué en moi tel sentiment (important de le dire), j’ai eu peur de… Je comprends une partie de ton point de vue mais j’ai voulu insister sur tel objectif, telle valeur…. Je ne voulais pas critiquer les personnes dans l’absolu, mais la manière de faire et le résultat… »

« Peut-être, mais c’était important… »

« En fait, nous avions des points de vue différents. Puisque nous nous apprécions et nous respectons, la prochaine fois que l’un de nous sent une tension, veux-tu que nous essayions de désamorcer en reformulant ? Disons par exemple : que veux-tu dire ? je ne me sens pas à l’aise, qu’est-ce qui compte pour toi sur ce sujet ? Ce sera notre code pour détecter que l’autre ne réagit pas comme nous… »

Martin a eu raison de faire le premier pas : il a compris qu’il avait involontairement blessé Florent et a donc présenté ses excuses. Mieux ! Il a montré de l’empathie : son souci de mieux comprendre son collègue si différent de lui. Enfin, il a donné des clés à Florent pour qu’ils se comprennent mieux à l’avenir.  

Ce qui est nécessaire du point de vue naturel, l’est encore davantage du point de vue surnaturel de l’humilité, de la justice, et de la charité. Comme Martin, n’hésitons pas à nous excuser même si nous n’avons pas fait exprès d’offenser un interlocuteur !

 

Réciproquement

 

  Si vous vous êtes senti offensé, pensez que cela a peut-être été involontaire de la part de quelqu’un qui n’a pas le même tempérament que vous…. cela vous aidera à pardonner !

Vous pouvez d’ailleurs faire la même démarche que Martin, à l’envers. Faire le premier pas vers l’autre est source de grâces.

« Pardonnez jusqu’à 77 fois 7 fois », afin qu’on puisse dire de vous « regardez comme ils s’aiment ! »

Hervé Lepère

 

 

Devant tous, je m’engage!

           Arnaud est très occupé : père de famille nombreuse et un travail prenant. Une vie bien remplie qui garde aussi du temps pour la prière, la lecture, les distractions en famille et avec quelques amis. Il ne lui reste plus de temps !

Arnaud a cependant trouvé une solution pour remplir son devoir d’état de chef de famille vis-à-vis de la société et de l’Eglise en s’engageant comme adjoint puis comme chef de chapitre au pèlerinage de Pentecôte. Il y consacre seulement 2 jours de congés par an. La préparation, il la fait par ses lectures spirituelles qu’il adapte au thème de l’année. Il recrute à la sortie de la messe ou de l’école et par quelques coups de téléphone. Il le dit lui-même : « il fallait seulement que je décide de cet engagement ferme, et que je réalloue quelques activités, sans dommage ni pour mon travail ni pour ma famille. Cet engagement m’oblige à sortir de moi-même et de mon train-train, à me donner et à progresser dans ce devoir d’état difficile »

Une nécessité morale pour tous les pères

   Déjà Pie XII le 7 septembre 1947 interpellait ainsi les fidèles : « Il n’y a pas de temps à perdre. Le temps de la réflexion et des projets est passé, c’est l’heure de l’action ! Etes-vous prêts ? Les fronts opposés dans le domaine religieux et moral se délimitent toujours plus clairement. C’est l’heure de l’épreuve. La dure course dont parle saint Paul est engagée. C’est l’heure de l’effort intense. Quelques instants seulement peuvent décider de la victoire. »

Les mots sont pesés et restent d’actualité ! Être prêts, donc se former régulièrement, équipés, associés avec quelques amis, dans le domaine religieux ou moral. Cela réclame un effort, mais il est nécessaire pour que Dieu donne la victoire !

 « Ce qui est en question, c’est de savoir ce que nous pensons de nous-mêmes. Sommes-nous une arrière-garde ? (…) Cherchons-nous à ne conserver que le droit de proclamer d’énergiques refus, de solennelles exhortations ? Notre ambition se borne-t-elle à cultiver un souvenir ?… actions, occupations fort honorables…mais très éloignées d’une entreprise de reconquête sociale…du travail avec efficacité au triomphe, universellement sauveur, de la Vérité »- Jean Ousset1.

Bien sûr, nous avons du mal à imaginer ce que pourrait être ce triomphe, le retour à un esprit de chrétienté. Mais, au temps de la décomposition de l’empire romain, les contemporains de Clovis et saint Rémi, imaginaient-ils que la chrétienté naissait grâce à leurs efforts ?

Quel père peut se refuser entièrement au rêve que, ce qu’il n’a pas vu, ses enfants le verront ? Dans la difficulté du temps présent, au milieu du troupeau de ceux qui acceptent le pire d’un cœur résigné, le père garde l’Espérance ! Sans elle et sans action, toute cité se défait comme sous l’action des flots.

Objections…

   « On ne peut pas tout faire. Tant de choses nous sollicitent déjà… »  Ceci ne nous dispense pas de chercher des solutions pour obéir à tous nos devoirs d’état.  Il est trop facile de choisir celui de nos devoirs d’état qui nous plaît davantage et d’écarter les autres.

A son insu, le père de famille qui ne s’ouvre pas à l’extérieur de la famille, seul puis avec ses enfants lorsqu’ils en ont l’âge, a une influence négative sur leur psychologie : des complexes d’infériorité, une peur de l’inconnu ou de l’hostilité, une indifférence pourraient se développer chez les enfants et les gêner dans leur vie future. Les paroles ne suffiront pas à soigner ce qu’un tiède exemple aura enseigné.

« Je ne suis pas compétent… » Personne ne vous demande de vous engager en politique si vous n’en avez pas la vocation. Le Créateur nous a donné à chacun au moins un talent. Or ces talents sont nécessaires pour reconstruire les communautés naturelles que la Révolution a détruit en laissant l’individu et son bulletin de vote seul face à l’Etat et à sa bureaucratie.

Concrètement

   De nombreuses possibilités s’offrent à vous, certaines ne prennent qu’un temps limité, d’autres nécessitent un investissement plus régulier.

La société se reconstruira parce que chacun s’investira sur le type d’action qui lui correspond le mieux :

 

  • Réunions mensuelles et actions locales ou nationales d’associations d’entraide entre familles2 ou jeunes professionnels3.

 

  • Logistique ou encadrement dans un pèlerinage, une kermesse, une école, une paroisse : il suffit de se proposer au prêtre.

 

  • Action civique locale, en se groupant à deux ou trois personnes. Dans une commune, l’action dans les domaines culturels ou historique est l’occasion de mettre en valeur les racines chrétiennes et les traditions qui constituent l’âme de la France. Les actions d’aide sociale4 ou de visite des malades dans une mairie, une association ou une paroisse permettent des contacts personnels qui, parfois, contribuent à soigner les misères spirituelles en sus de soulager la pauvreté humaine.
  • Regroupement des professionnels par métiers, autant que possible avec un esprit catholique, pour retrouver les bienfaits portés autrefois par les corporations : transmission de savoir-faire et de traditions entre les anciens et les jeunes, entraide face aux questions morales difficiles ou pour réaliser des projets, complémentarités entre les dynamiques et les savoirs des différents âges, assistance mutuelle. De telles associations existent pour les professions médicales, juridiques5, …il reste de nombreux métiers à unir et reconquérir : ingénieurs, artisans, commerciaux, financiers, chefs de projets….

  « La France n’est pas foutue. Elle est niée, écrasée, vidée, tout ce que l’on veut. Mais tant qu’il reste des Français, tant que l’on redonne du sens, que l’on défend le réel, tout en le construisant, alors, non seulement rien n’est perdu, mais il arrive un moment où l’on finit par obtenir des victoires. » – Robert Ménard (maire de Béziers)6

  Péguy avait raison de dire « les pères de famille sont les grands aventuriers du monde moderne ».

  Haut les cœurs ! Avec la grâce de Dieu, nos engagements seront féconds et nos exemples fructueux auprès de nos enfants.

 

Hervé Lepère

 

1 Pour Qu’il Règne, ouvrage de référence pour la coopération des laïcs au règne du Christ-Roi.

2 MCF-Mouvement Catholique des Familles, AFS Action Familiale et Scolaire, Civitas…

3 Dans plusieurs grandes villes de France

4 Selon les villes : Conférence St Vincent de Paul, associations de défense de la Vie, …

5 ACIM- Association Catholique des Infirmières et Médecins. Association des Juristes Catholiques

6 Abécédaire de la France qui ne veut pas mourir.