Laisser transparaître Dieu

Afin que les hommes puissent connaître Dieu à travers toi, pour trouver le chemin du Ciel, veux-tu bien le laisser transparaître ?

Point n’est besoin de grands discours, il suffit d’être…

Ton âme bien unie à celle de ton Seigneur, Sa Face toujours présente en toi, pour, presque malgré toi, imprimer Sa Bonté par ta charité sur ceux qui te rencontrent.

Ton sourire qui ne juge pas, ne condamne pas mais soutient et réchauffe surtout ceux qui sont isolés ou oubliés, encourage, comme celui du Divin Maître qui devait être si doux, si entraînant.

Ton regard qui voit plus loin, ne s’arrête pas à des vues trop humaines de vains enthousiasmes ou de craintes stériles et paralysantes, pour refléter Celui du Crucifié qui ne cessait de contempler la face de Son Père.

Ton oreille attentive qui sait prendre le temps d’écouter, même si le discours est lassant, et qui devine derrière lui la peine ou ce qu’il convient de doucement aplanir et orienter vers le Bien.

Ton oreille qui sait recevoir les conseils donnés, sans amour-propre, pour grandir.

Ta parole rassurante, ferme s’il le faut, sans faux-semblants, qui dit oui quand c’est oui, qui dit non quand c’est non, pour amener vers le Verbe de Dieu.

Ta parole qui évite toute condamnation tranchée, reste mesurée pour faire comprendre la Miséricorde du Seigneur, mesure ce qu’elle dit, parfois se retient pour ne pas blesser, tait le bien que tu fais, et ne se met jamais en avant.

Tes mains donnant sans compter et se joignant souvent pour la prière implorante, quand il n’y a plus que cela pour l’âme éloignée de Dieu.

Tes actions empreintes de calme, de silence, de grandeur cachée, surtout dans le devoir d’état, sans agitation stérile afin de faire deviner Celui que tu portes, qui donne la paix et ouvre à des horizons infinis.

Tes services spontanés devinant le besoin du prochain, offerts, surtout ceux qui coûtent un peu plus de temps ou de fatigue, sans s’offusquer s’ils ne sont pas vus ou remerciés.

Tes services rendus avec le sourire, sans maugréer malgré la peine ou la lassitude, surtout pour les plus humbles ou rebutants, à l’image de celui qui s’est fait Serviteur.

Enfin ta prière constante pour être droite, d’humeur égale, phare dans la tempête du monde, solide quand tout s’écroule, instrument divin et transparence de Dieu.

                         

                Jeanne de Thuringe

 

CONFIANCE ET ABANDON

Chère Bertille,

 

Dans ta dernière lettre tu me dis que, de plus en plus, dans les conversations de sortie de messe, à table, dans les réunions de famille, il n’est question que de nouvelles alarmantes, d’inquiétudes. Les sujets sont variés : combien de temps vont tenir nos écoles catholiques ; la nouvelle épidémie de grippe ou de COVID sera-t-elle plus virulente ? Comment se chauffer en raison de l’augmentation des prix ? Comment trouver du travail avec les réglementations actuelles ? Les informations tournent en boucle ; chacun est penché sur son portable à l’affût des dernières nouvelles… Avenir bien sombre pour une jeune fille qui est dans l’âge des grandes espérances. C’est le moment où les projets d’avenir se forment. De quoi sera fait demain ?

 Je comprends ton inquiétude, et j’aimerais pouvoir t’aider à tirer le meilleur parti de cette situation en prenant un peu de hauteur.

Ma réflexion se construira autour de trois questions essentielles : Quel est le but de la vie et pourquoi sommes-nous sur terre ? Quelle est ta place, en tant que jeune fille dans la société qui traverse cette période de crise ? Où pourrais-tu trouver la force d’avancer sereinement ? 

 Nous avons tous tendance à chercher une vie idéale, sans inquiétude, sans obstacle à nos projets, à notre volonté. Mais finalement, qu’est-ce qu’une vie idéale ? Je laisse Guy de Larigaudie répondre à ma place : « la vie idéale est celle où Dieu, individuellement, nous veut moine, poète, cordonnier ou assureur. »1 La vie idéale, c’est faire notre devoir d’état d’étudiante, de jeune professionnelle, à l’époque où le Bon Dieu nous a placées. Cette vie idéale doit être atteinte même si nous ne comprenons pas le monde dans lequel nous vivons, ni pourquoi la crise de l’Eglise dure si longtemps, ou pourquoi il est de plus en plus difficile de vivre en chrétien dans ce monde. Il ne nous appartient pas de répondre à toutes ces questions. Le Bon Dieu permet que nous ne comprenions pas tout, et même rien : « nous ne comprenons rien à rien. Il y a autant de mystère dans la croissance d’un grain de blé que dans le mouvement des étoiles. Mais nous savons bien que nous sommes seuls capables d’aimer, et c’est pour cela que le moindre des hommes est plus grand que tous les mondes réunis. »2 Eh oui, ma chère Bertille, nous sommes sur terre pour aimer Dieu, voilà le but de notre vie et notre gloire !

 

Le monde dans lequel nous vivons a besoin de joie, de bonheur, d’amour. La vocation de la femme est justement d’apporter ce rayon de soleil. « Le rayon de soleil éclaire, réchauffe et réjouit le cœur de l’homme. Il en va de même pour la femme qui remplit son rôle. (…). La femme réchauffe les énergies, les stimule ; elle sait encourager d’un regard dans l’effort persistant. Elle aide chacun à donner le meilleur de lui-même. Sa force d’âme réside dans le fait qu’elle sait oublier ses fatigues et ses soucis pour se dépenser au bien de ceux qui l’entourent. Enfin, par son égalité d’humeur, le charme de son sourire, ses délicatesses, sa joie communicative, ses attentions sans cesse renouvelées, elle réjouit le cœur de ses proches.»3 Voilà ta place de choix, ma chère Bertille, dans notre société qui a perdu toute joie de vivre !

 

Mais comment trouver la force et la persévérance ? « La femme puisera sa constance dans une solide piété qui gardera son âme dans la paix et la joie.»4 La piété est cette habitude de vivre sans cesse en présence du Bon Dieu. Cette attitude nous permet de nous abandonner de plus en plus en la sainte Providence et de mettre notre confiance en Dieu. Le Bon Dieu n’a pas eu besoin de nous pour créer le monde, ni pour nous créer. Nous devons tout à Dieu, notre existence, la vie surnaturelle par la grâce du baptême, les petites joies quotidiennes. Pourquoi ne pourrions-nous pas rester confiants dans ses bras ? C’est donc en Dieu, ma chère Bertille, que tu trouveras la force d’avancer sereinement, « faire de sa vie une conversation avec Dieu ».5

 

Le secret de la joie, ma chère Bertille, est de faire avec amour ton devoir d’état à la place et à l’époque où le Bon Dieu t’a placée, peu importe si l’orage du monde gronde. Tel un vaisseau avançant paisiblement à travers les vagues car c’est le Bon Dieu qui souffle dans les voiles.

 Je te souhaite une bonne et sainte année remplie d’une joie profonde !

Anne 

 

Sois tranquille  

 

Mon enfant, un jour, j’ai dit à Marthe qui s’agitait avec fièvre pour me recevoir : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et te troubles de beaucoup de choses. Or une seule est nécessaire… »

 

Or bien souvent, bien trop souvent, tu es comme Marthe, agitée, agacée, désemparée et triste.

Que de sujets d’inquiétude, et pourtant si tu savais comme Je t’aime et mène tout pour ton plus grand bien, tu te reposerais dans Mes bras comme un enfant, alors,

Sois tranquille.

 

Par Mon Incarnation, J’ai connu la vie des hommes, partagé leurs joies, leurs peines, leurs souffrances. En prenant la nature humaine pour Ma Passion, j’ai été un Dieu proche, vivant, qui a vécu comme eux, sans privilèges ni facilités, dès le début.

Ma Mère et saint Joseph furent jetés sur les routes au moment de Ma naissance pour le recensement, puis ont dû fuir à cause de moi leur pays sans aide, pour une contrée étrangère, païenne, dont ils ne connaissaient pas la langue.

Pourtant, Mon Père veillait sur nous et rien ne nous a manqué, même si nous avions tout juste le nécessaire. Ma Mère a toujours tout attendu de Lui et fait confiance, sachant pourtant quelles seraient ses souffrances associées à Ma Passion.

Alors, lorsque tu avances dans la vie avec appréhension, ne sachant pas ce qu’il convient de faire ou si telle entreprise réussira,

Sois tranquille.

 

De toute éternité, mon Père a pensé à toi, te faisant naître dans cette famille, dans cette ville, dans cette époque, avec tes qualités et tes défauts, et t’a donné l’état de vie qui est le tien. Tes péchés et tes faiblesses, tes renoncements, tes regrets, tes relèvements, Il les connaît déjà. Lui qui sonde les reins et les cœurs, te connaît mieux que toi-même.

La grâce est là qui t’accompagne si tu la demandes et si tu te jettes toute confiante dans Ses bras, comme un enfant,

Alors lorsqu’il faut avancer, recevoir Son Pardon sans rien dissimuler, quand une entreprise te coûte, ne crains rien,

Sois tranquille.

 

Bien souvent, tu imagines tel résultat, désire telle issue à ton épreuve ou ton doute. Tu organises déjà intérieurement ton scénario, heureux ou malheureux.

Mais la Volonté du Père n’est pas forcément la tienne, parfois oui, parfois non. La vie quotidienne est tissue de petits riens, de fidélités imperceptibles mais nécessaires et cette régularité donne la paix intérieure. Certains ont des vies toutes simples, toutes discrètes, sans grands résultats, ni belles réponses.

C’est dans cette humilité confiante, combat parfois caché mais bien réel que la grâce de sainteté travaille dans leur âme, qu’ils sont un témoignage du Père, presque malgré eux. La paix et la joie en sont les fruits. Alors à leur image,

Sois tranquille.                             >>>   >>> Lorsque Ma Croix est à son tour mise sur tes épaules, avec son âpreté, sa soudaineté, sa violence, incompréhensive, presque injuste, ne crains rien.

Elle est là dans un dessein d’amour mystérieux qui te fera grandir et te prépare dans l’Eternité une place de choix. Je suis toujours à tes côtés et mets alors sur ta route ce qu’il faut pour t’aider à la porter, même si c’est difficile.

Tu y rencontras Ma Mère, Simon de Cyrène et Véronique.

Toujours, tu constateras que l’issue en est bien plus belle que tout ce que tu avais pu imaginer.

Et puis dans tes manques de charité, dans tes jugements téméraires, Je te montrerai souvent tes erreurs, ta mauvaise compréhension des intentions et comme tu alourdis seule les difficultés avec ton prochain. Certaines âmes ont des mystères intérieurs que Seul je connais.

Là aussi, apprends à regarder avec Mon regard, sans chercher à tout comprendre et

Sois tranquille.

 

A l’heure dernière, quand Mon Père te rappellera, Je serais là avec Ma Mère pour le dernier combat. Le découragement et l’indignité te tenteront, mais si tu as toujours su être confiante et joyeuse en Dieu, malgré les vents contraires, tu aborderas le rivage de l’Eternité et le Père te dira

Entre tranquille dans la paix de mon Royaume car tu as combattu le bon combat.

 

                Jeanne de Thuringe

 

La garde du cœur  

« Elle court, elle court la maladie d’amour… »

Comme ne le dit pas la chanson, aimer n’est pas une maladie, mais bien la plus merveilleuse capacité que Dieu ait déposée dans le cœur de l’Homme. Dieu n’est-il pas l’Amour incarné ? De l’amour du Père pour son Fils et du Fils pour son Père ne résulte-t-il pas le Saint-Esprit ? Telle est la capacité de l’Amour infini. Donc non, aimer ce n’est pas être malade. Mais alors qu’est-ce qu’aimer ?

– Est-ce ressentir quelque chose d’indéfinissable et de merveilleux au fond du cœur ?

– Est-ce flotter sur un petit nuage en pensant nuit et jour à la personne « aimée » ?

– Est-ce ce trouble qui nous envahit quand cette personne nous sourit ou nous regarde ?

Et si c’est tout cela en même temps, alors je l’aime, je l’aime ! Et si je l’aime, il faut qu’elle devienne ma femme ! Serions-nous des marionnettistes ? Car heureusement, ce n’est pas seulement cela aimer !

 

Être amoureux, car c’est bien de cela qu’il s’agit, est un état presque instinctif, qui peut permettre au véritable amour de naître. Distinguons-le de l’amour, le vrai, celui qui mènera au mariage et qui suppose l’assentiment et l’énergie de la volonté qui seule peut permettre à l’amour de durer dans le temps.

Être ému par une jeune fille, chacun de nous l’a été, peut-être plusieurs fois, parfois même de personnes différentes. Cependant, cela ne préjuge absolument pas de la pérennité de ce sentiment, ni même de la possibilité d’une suite, et aucunement de sa prédestination. Tout bon Roméo qui est ému par une jeune fille pour la première fois, y voit la main de Dieu et tend à considérer cet amour naissant comme écrit de toute éternité dans le ciel et voué à un merveilleux avenir. La littérature, les musiques et l’atmosphère ambiante propagent en chantant cette légende dorée qui contribue en partie au drame de l’instabilité des familles aujourd’hui.

Jeune homme que tu es, ne sois pas gêné outre mesure de ce trouble qui t’envahit pour la première fois quand ton regard croise le sourire d’une bonne amie. Ce sentiment n’est pas honteux, mais juste instinctif. Sache-le simplement, cela permettra peut-être à ta volonté d’envisager la situation plus sereinement.

Avant d’envisager d’aller plus loin et de savoir si tu veux donner suite, voici une première question toute simple qui peut t’aider à discerner car, dans cette situation, le jugement est souvent obscurci par la passion naissante :

 

– Es-tu en mesure d’assurer la subsistance d’une famille ?

Si la réponse est négative, alors garde cela pour toi et surtout ne révèle pas ce sentiment à la principale intéressée, ni en parole, ni par tes attitudes car cela risquerait de prendre des proportions plus importantes et d’échapper au contrôle de ta volonté. Pense à autre chose et ne t’entretiens pas dans des rêveries irréalisables.

Si, après quelques années, ce sentiment est toujours présent et que la jeune fille est toujours libre, alors, à toi d’examiner les autres questions qui se posent pour le choix d’une épouse et d’envisager quelque chose de sérieux (cf. FA 34 : Les fiançailles). Mais tant que tu n’es pas autonome, ce n’est objectivement pas la volonté de >>>  >>> Dieu. Or, dans nos vies, cela seul doit compter : faire la volonté de Dieu.

Si Dieu a prévu que ce sentiment naissant conduise au mariage, alors sa Providence organisera les choses en temps voulu pour que cela se fasse !

De plus, la jeune fille à laquelle tu penses est aussi certainement trop jeune pour poser un choix libre et éclairé. Ne serait-ce pas alors lui manquer de respect ou au moins de délicatesse en demandant un choix qu’elle n’est pas encore en mesure de poser.

Méfie-toi aussi de l’orgueil qui joue son rôle… En effet, quoi de plus flatteur que de se savoir aimé par une jolie jeune fille ? N’est-ce pas la meilleure preuve de ta valeur auprès de tes amis ?

 

– Eh non, je suis encore étudiant ! Alors quoi, serais-je le seul à ne pas avoir le droit d’aimer quand tous mes camarades et même mes amis sortent, et ont leur « copine » ? C’est trop dur, c’est impossible et surtout à quoi bon ? Faut-il que je fasse comme ces jeunes un peu « timides » qui n’osent pas parler aux filles de peur de ressentir ce trouble ?

Non si tu es amoureux, tu es un homme comme les autres.

Mais si tu es capable de garder ce sentiment pour toi tant que le moment n’est pas venu, alors là seulement tu dois savoir que tu es un homme pas comme les autres !

Tu es capable de te maîtriser, de dompter tes sentiments, tu es un homme digne d’amour et d’estime, et ta femme plus tard en sera d’autant plus fière ! Elle aura épousé un homme de caractère, différent de ces mous qui pullulent et étalent leur vague à l’âme sur la place publique sans être capable de se maîtriser. Elle aura épousé un homme capable de conduire une famille car capable de se conduire lui-même. Elle aura surtout épousé un homme qui aura gardé son cœur pour elle plutôt que d’en éparpiller des morceaux à chaque regard charmeur !

 

Alors je suis amoureux, je n’ai que 18 ans, c’est grave docteur ? Non, c’est que tu es un vrai gars, mais garde-le pour toi et là, tu seras vraiment un homme !

Et plutôt que d’occuper ton esprit à des considérations qui ne sont pas encore d’actualité pour toi, prends le temps de te construire, d’établir ta personnalité en travaillant à développer ta volonté et toutes tes qualités qui feront de toi un homme. Entretiens de solides amitiés surtout avec des bons garçons. Partage aussi des activités avec des filles, cela te permettra de découvrir leur caractère parfois si mystérieux et de te familiariser avec elles.

Et enfin, abandonne ce sentiment qui dort en toi à la Sainte Vierge, confie-lui la garde de ton cœur, elle en fera bon usage et telle une mère attentionnée à qui tu peux tout dire, elle te guidera parmi les embûches et mirages de la vie étudiante jusqu’à te faire rencontrer celle qui sera ta femme, en temps voulu. Et si tu as la grâce d’avoir été choisi par Dieu pour le servir alors cette garde du cœur te permettra d’être assez fort pour le suivre.

Antoine

 

Voir le beau  

A la philharmonie de Paris, les dernières notes du Miserere d’Allegri viennent de s’évanouir ! Le public, peu à peu, redescend sur terre après avoir été élevé vers le ciel par la beauté vibrante de cet air aérien magnifié par la pureté d’une voix d’enfant.

Au même moment, le soleil se couche sur le Mont Blanc révélant à l’alpiniste qui bivouaque en montagne les sombres arêtes qui se détachent, flèches bleues acérées sur le fond rougeoyant du ciel embrasé. Instant d’éternité, beauté sublime et passagère que l’homme est incapable de reproduire.

La beauté contient en elle une capacité à toucher, à émouvoir notre sensibilité. Est beau ce qui sonne juste, vrai, immuable, authentique. Le beau, le vrai, le bien sont des transcendantaux qui nous élèvent vers le ciel et qui vont d’ailleurs toujours ensemble. Le beau nous ramène imperceptiblement à notre nature profonde de créature dont l’objet est de louer Dieu notre créateur. Le beau nous parle de Dieu et nous conduit vers Dieu que nous savons être la beauté même.

Chaque beauté que nous pouvons contempler sur terre est un peu comme une étincelle d’un feu d’artifice qui résulterait de la beauté de Dieu.

Toute cette beauté que Dieu a, sans compter, répandue sur toute la terre et qu’il a permis aux hommes de développer est une source inépuisable d’émerveillement et de joie. Cette source ne compense-t-elle pas largement les motifs de crainte et de tristesse qui peuplent cette « Vallée de larmes » ?

Mais pour trouver cette joie, il faut être capable de la recevoir. Ceci requiert au moins deux dispositions d’âme :

La curiosité, d’une part, qui nous fait ouvrir les yeux, observer le monde et la nature qui nous entoure, discerner et repérer les éléments de beauté qui parfois se cachent et ne se laissent pas saisir par le premier venu. Et la capacité d’émerveillement, d’autre part, cette souplesse de l’âme qui se laisse émouvoir. Fraîcheur de l’esprit qui reste ouvert aux découvertes et sait se laisser toucher, surprendre.

Véritables trésors, ces deux dispositions d’âme sont des sources inépuisables de richesse intérieure qui permettent de trouver de la joie partout, quelles que soient les vicissitudes de la vie.

Dilapidez-les bêtement, éparpillez-les au gré de votre vie numérique, laissez-en une parcelle dans chaque vidéo, réseau « social », tweet, Tchat ou Snapchat et bientôt elles auront disparu sans que vous ne vous en soyez même aperçu. Et, petit à petit, sans savoir pourquoi, vous constaterez que la vie devient morne, triste et sans relief. Le soleil brille et se couche partout tous les soirs et pour tout le monde, mais seuls les hommes heureux le regardent et seuls ceux qui sont capables de s’émouvoir à son coucher sont heureux.

Si, ayant gardé cette curiosité, nous sommes les heureux témoins d’un bel instant, notre premier réflexe en tant « qu’Homo Numericus » est de le « capturer » à l’aide de notre smartphone pour être sûr que cet instant de bonheur ne nous échappe pas. Le second réflexe est de le partager avec nos amis pour leur procurer à eux aussi de la joie. Joie qu’ils ont du mal à éprouver en visualisant le paysage que nous leur proposons au travers d’un écran de 10 cm2. Ils nous répondent néanmoins instantanément et notre vie numérique, abandonnée une minute reprend son cours immédiatement, pendant que la lumière change et que >>>   >>> nous passons à côté d’un surcroît de beauté et de bonheur potentiel.

Même si l’intention de partager les bons moments est louable, apprenons à la différer. Cela permet de prendre le temps d’observer plus complètement la beauté, de s’en émerveiller encore plus, de s’en imprégner et surtout de louer le Créateur à son origine. Que de joie et de bonheur éprouverons-nous plus tard à décrire à nos proches, avec nos mots, ce que nous aurons contemplé. Ils seront encore plus heureux de constater notre émerveillement que de recevoir un « screen shot » muet de notre vie, avec pour tout commentaire des « smileys » évocateurs.

La beauté du monde est un réservoir inépuisable de joie et de bonheur déposé par Dieu sur terre et dans nos vies pour nous faire lever le regard vers lui, l’entr’apercevoir et ainsi le désirer. C’est cette même beauté qui d’ailleurs imprègne toute la liturgie.

 

Allons y puiser régulièrement et conservons notre âme d’enfant pour accéder à la contemplation de Dieu au royaume des cieux.

Antoine