C’est le mois où l’on commence à parler orientation ou Parcoursup.
– Je voudrais être chirurgien, parce que c’est le métier qui paye le mieux !
– Je préfère être fonctionnaire dans un bureau tranquille pour avoir du temps libre.
Hubert, le père de famille, renchérit : pourquoi pas banquier ou trader ? Il ne lui vient pas l’idée de considérer le « métier » de prêtre ou de religieux comme une possibilité d’avenir heureux pour ses enfants. Ni même d’autres métiers présumés moins brillants mais animés par des motivations plus nobles. Quel idéal veut-il leur donner pour la vie ?
Ton moteur sera là où est ton cœur
Le travail ne suffit pas à rendre l’homme heureux. « Tous nous possédons, au plus profond de notre être, une incomparable réserve d’énergie. Mais il nous faut une étoile polaire, vers laquelle nous puissions, même aux heures les plus sombres, diriger nos efforts. Sans cela, nous travaillons, nous peinons, nous endurons peut-être le plus torturant des martyres, celui qui consiste à patiner sur place ou à reculer aussitôt qu’on avance, pour n’aboutir à rien1.»
Notre but, celui que nous enseignons à nos enfants, sera bien sûr d’aller au ciel. Notre idéal premier sera de ressembler à Jésus-Christ, la voie, la vérité et la vie, et à Notre-Dame, sa sainte mère et notre mère. Un idéal humain n’a de valeur qu’autant qu’il nous rapproche de ce modèle divin.
L’éducation à l’idéal
Les saints et les héros de l’Histoire ou de notre famille ne sont pas des modèles parfaits du Christ, mais leurs exemples illustreront telle vertu ou tel comportement, ce qui rendra l’idéal plus concret.
« La fin de l’éducation est que l’enfant en vienne à préférer librement, et pour toujours, le Vrai au Faux, le Bien au Mal, le Juste à l’Injuste, le Beau au Laid, et Dieu à tout. (…) Dans cette éducation totale, faite de contrainte, de persuasion et surtout d’amour véritable, il y a la plus grande preuve de respect que nous puissions donner à nos enfants2.» C’est à la famille qu’il revient, avec l’aide de l’Église et de l’école, d’élever les enfants dans un esprit de courage et d’énergie ainsi orienté. Donnons-leur de l’enthousiasme pour leur idéal, il leur donnera des ailes.
L’éducation doit bien sûr s’adapter à chaque enfant, à son âge et son tempérament, mais il convient toujours de former le caractère et d’exercer aux vertus, c’est-à-dire à la prise d’autonomie qu’il faut donner progressivement.
Y a-t-il une hiérarchie des valeurs à transmettre3 ?
Pour Mgr Freppel4, il est certain que le respect de la vérité et les principes vrais sont à transmettre en priorité. Cette transmission comporte d’abord le contenu de la Foi qu’il faut connaître pour l’aimer. Elle se complète avec le souci de la vérité par l’étude et la saine curiosité, et la lutte attentive contre tout mensonge spécialement en famille.
Vient ensuite l’usage de la liberté qui doit s’apprendre avant les années critiques de l’adolescence et de l’âge étudiant. La liberté dépend >>> >>> de ce que nous aimons : il s’agit de choisir le Bien donc de l’aimer, de se détacher de l’esclavage des mauvaises habitudes, de l’oisiveté et de l’orgueil. La formation au jugement et à la volonté sont essentielles pour y réussir, et se réalisent au cours de l’entraînement à la liberté. Il faut trouver la ligne de crête, le juste équilibre entre deux tentations extrêmes. Soit mettre l’accent sur le règlement, la contrainte, les punitions et récompenses, ce qui fait rester au niveau du « dressage ». Il faut pourtant arriver à une adhésion intérieure progressive par rapport au règlement. C’est cette adhésion intérieure qui est source d’héroïsme et de sainteté chez les moines ou les soldats, pas l’obéissance forcée à la contrainte.
Soit, au contraire, imaginer que le vent de liberté un peu anarchique des jeunes passera tout seul et que les expériences de la vie suffiront à leur apprendre la vertu… C’est oublier la faiblesse humaine et l’attrait du mal, conséquences du péché originel. C’est oublier aussi les leçons de la psychologie concernant la nécessité d’un cadre et du rôle du père comme incarnation de l’autorité. L’enfant a besoin de bases solides, de guides et de rappels. Bref, ni rigorisme, ni laxisme ! Le rôle de nos foyers et des écoles est donc d’aider à former des caractères heureux et bien équilibrés, par l’apprentissage des vertus.
La famille, modèle d’idéal et de sainteté
L’exemple des parents, d’autant plus méritoire voire héroïque qu’il dure au cours des années, et l’éducation donnée par la famille sont des clés à la portée de chacun. Dans la famille, on peut enseigner facilement, avec le respect des personnes humaines, la pratique des vertus, l’apprentissage de la liberté, la formation du jugement et de la volonté, la solidarité familiale, le service de la société, et l’amour de la patrie et de l’Église. Le choix d’une école qui vit des mêmes principes et idéaux – la famille coopérant ouvertement avec l’école – sera un atout essentiel de la réussite de l’éducation. Si on ne peut trouver une telle école, alors la famille devra donner beaucoup plus de temps et d’attention pour former son enfant.
Il faut donc prendre et garder le bon cap. C’est le devoir, c’est le salut, c’est la volonté de Dieu. Aussi pouvons-nous prendre la route avec confiance, nous appuyant spécialement sur la grâce du mariage, et la pratique régulière des sacrements de pénitence et d’Eucharistie. Avec Dieu en nous, et tenant la main de Notre-Dame, nous marcherons sur les voies de la sainteté.
Hervé Lepère
1 Soyez des Hommes, F.A Vuillermet.
2 Abbé Berto, célèbre éducateur, en Mai 1968.
3 D’après l’AFS-Action Familiale et Scolaire, brochure « Former des hommes de caractère ».
4 Mgr Freppel (1827-1891), évêque d’Angers, député du Finistère, fondateur de l’Université Catholique de l’Ouest, soutien des Catholiques sociaux.