O Beauté Infinie

Dans la lumière blonde d’un matin de septembre, lorsque la brume s’accroche encore au fond des vallons comme un léger voile de coton,

Comment ne pas vous voir O Beauté Infinie ?

 

Dans la clarté d’un ciel de fin d’été, lorsque les constellations sont si nettes qu’il est très aisé de les retrouver sur ce bleu nuit qui clôt de velours la journée et nous donne cette grande paix du soir,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la simplicité et la blancheur de l’hostie que le prêtre à la Consécration, élève à notre vénération, offrande pour notre salut, de Celui qui s’est fait péché sur la Croix, et se redonne ainsi mystérieusement jusqu’à la fin des temps,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la bonté toute simple et lumineuse d’un sourire qui réchauffe le cœur, d’un conseil qui nous éclaire et nous fait grandir, d’un pardon spontané effaçant toute la peine, et permettant de repartir meilleur,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans la victoire, avec Votre grâce, d’un effort qui nous a coûté, d’un détachement qu’il fallait faire, d’un acte d’abandon, alors que nous voulons bien trop humainement tout maîtriser, tout mener à notre guise,

Comment ne pas vous voir Ô Beauté Infinie ?

 

Dans toutes nos journées jalonnées de joies, de peines, d’épreuves, contrariétés et sécheresses, Vous êtes sans cesse présent. Pourtant nous vous devinons si peu alors que Votre Amour nous accompagne sans cesse et veille sur nous avec tant de tendresse.

 

Que nous sachions vous voir de plus en plus pour grandir dans votre amour, afin de Vous contempler éternellement, Ô Beauté Infinie.

 

                Jeanne de Thuringe

 

L’école  

Chère Bertille,

Je te remercie pout ta lettre et les nouvelles que tu me donnes. Tu me dis que ta petite sœur, qui rentre en troisième, est un peu révoltée et ne comprend pas pourquoi il est nécessaire d’aller dans une école si loin de la maison pour y apprendre le latin et le grec, alors qu’elle pourrait aller au collège à pied et étudier des matières plus « utiles », l’informatique, l’anglais… Par cette lettre, je vais essayer de te donner quelques arguments pour que tu puisses l’aider à passer ce cap.

L’objectif des écoles chrétiennes libres est bien plus élevé que celui de l’école laïque. Il dépasse de loin le côté pratique et utile. Ces écoles, loin de vouloir former des femmes qui vont pouvoir produire pour la société, ont bien en vue que la femme est une créature du Bon Dieu, douée d’une intelligence et d’une volonté et qui doit atteindre un idéal. Une fois l’intelligence éclairée et illuminée par la Vérité, et la volonté orientée vers le Bien, la jeune femme sera en mesure de poser des actes libres.

Quel est cet idéal ? « Il est le modèle vers lequel nous levons les yeux, le but auquel nous aspirons. Nous en avons l’expression dans l’Evangile, sous la forme d’un commandement : « Soyez parfaits comme votre Père est parfait » […]. Notre Seigneur Jésus-Christ, avec l’idéal de sainteté, nous donne – et lui seul – les moyens de le réaliser.»1

Les écoles catholiques permettent de connaître cet idéal par leur enseignement. Alors que l’école laïque fait tout pour éliminer Dieu et l’ignorer, les enseignants catholiques orientent et éclairent leurs leçons à la lumière de la Foi. Le Bon Dieu est présent dans les cours de doctrine, dans la vie de prière qui règne dans l’école mais aussi dans les cours profanes où tout est orienté vers la Vérité.

La jeune fille est amenée à avoir un rôle important dans la société, notamment par la maternité naturelle ou spirituelle. C’est elle qui va former et éduquer de nouvelles générations, c’est elle qui va être l’âme de son foyer, qui va en donner l’esprit. Les œuvres de littérature étudiées en classe >>>       >>> vont lui permettre de développer son sens critique « car il ne suffit pas de montrer l’idéal, il faut aussi le défendre contre les attaques, et savoir discerner le véritable idéal d’un ersatz, frelaté, voire empoisonné.»1 Petit à petit elle va apprendre à discerner à travers les différents personnages de littérature, Antigone de Sophocle et d’Anouilh, Blanche de la Force dans le dialogue des Carmélites de Bernanos, Jeanne d’Arc de Péguy, Phèdre de Racine, quel est l’idéal de vie chrétienne, comment elle peut l’atteindre, quelle est la place des passions et comment en tirer meilleur profit. « Oui, nous disent ces héroïnes, réelles ou légendaires : oui, l’idéal est possible : il est possible de vivre dans la fidélité et l’honneur, la pureté et le sens du sacrifice.»1

 

Ta petite sœur, ma chère Bertille, est à un âge où l’on s’enthousiasme pour un grand idéal, elle a une énergie telle qu’elle veut transformer le monde. Elle en a la capacité comme fille de l’Eglise : « Nous savons ce que nous voulons : fils de la Sainte Eglise et nourris par des siècles de civilisations chrétiennes, nous voulons vivre de l’Eglise et travailler à l’édification d’une cité chrétienne – d’une cité qui soit fidèle à l’Eglise et qui se développe sous l’empire des valeurs désintéressées d’honneur, de vérité, de liberté, de justice et de beautéune cité qui, avec sa technicité elle-même, soit une fleur vivante de la sagesse chrétienne et non pas une construction artificielle de la technique sans âme, » écrit le Père Calmel dans « Ecole chrétienne renouvelée ». Voilà cet idéal auquel nous tendons tous. « Et pour cela, continue-t-il, nous prenons le parti des auteurs, … nous prenons le parti de la philosophie thomiste, et avant cette classe décisive, nous prenons le parti du français, et des langues modernes ou anciennes ; les langues étant étudiées dans un sens de culture plus encore que d’utilité.»1

 

  Voici ma chère Bertille, l’école où est ta petite sœur lui permet de s’enthousiasmer et d’œuvrer pour l’Eglise en accomplissant sa vocation de jeune fille catholique.

Je t’embrasse,

Anne 

1 Extrait de la Conférence donnée par les Dominicaines enseignantes de Fanjeaux lors du Congrès des familles du MCF à la Martinerie le 9 juillet 2022 sur le thème « Quel idéal pour nos jeunes ? »

 

A l’école du Divin Maître

Il est une école où il n’y a pas de bancs, sauf peut-être ceux de l’église, pas de professeurs, si ce n’est le prêtre, pas de cahier, si ce n’est nos bonnes ou mauvaises pensées et œuvres, pas de notes, si ce n’est notre récompense (ou non) au Ciel, pas de cour de récréation si ce n’est le champ immense de la vie, pas de camarades si ce n’est notre prochain, pas de livres de références, si ce n’est l’Evangile.

Tu l’auras deviné, c’est l’école du Divin Maître

 

Les seuls, dans cette école, qui ont un diplôme en poche et l’assurance d’un bon travail, sont ceux qui, comme les saints, travaillent à se réformer, à s’oublier sans cesse, à deviner avec délicatesse le besoin des autres, à vivre profondément de l’Evangile, à présenter tous leurs besoins et la misère humaine dans ses tréfonds et ses grandes peines, au Bon Sauveur. Là pas de risque de se tromper d’orientation, avec la Sainte Vierge, notre sainte maîtresse qui nous accompagne sur le chemin,

A l’école du Divin Maître

 La littérature est apparemment sans logique puisqu’il est dit « Bienheureux ceux qui pleurent, ils seront consolés », « Bienheureux les pauvres en esprit car le Royaume des Cieux leur appartient », « Bienheureux ceux qui sont persécutés pour la justice car grande sera leur récompense dans les Cieux », et ainsi pour tout le sermon sur la montagne avec ses béatitudes.

Quant aux mathématiques, il semblerait qu’elles fussent réduites souvent aux nombres 7 ou 12…

Les lois de la physique sont mises à mal avec la marche de Notre Seigneur et de saint Pierre sur les eaux, et les poissons pêchés contre toute attente dans des zones inconnues.

A l’école du Divin Maître

 

La géographie est quelque peu malmenée puisque les collines sont priées de s’abaisser, les vallées de se combler et les chemins tortueux de se redresser…

De même en Histoire puisqu’il nous est rappelé que pour Dieu, mille ans sont comme un jour, et qu’Il voit en un instant toutes les époques à la fois.

Enfin, aucun effort d’apprentissage des langues étrangères, qui après être tout à coup apparues avec une histoire de Tour de Babel, sont comprises sans effort un jour de grand vent…

A l’école du Divin Maître

 

Pour ce qui est des études supérieures, l’économie est apparemment sans fondement moral puisque l’intendant infidèle y est loué, la loi salariale défie toute logique, le salaire étant le même pour une heure ou une journée du travail.

Enfin le droit et la politique font état d’un royaume sans pouvoir visible, sans armée, sans défense où les brebis seront au milieu des loups et les serviteurs persécutés et tués.                  >>>   >>> Et pour conclure, il n’est nul besoin de briguer les premières places, puisque les premiers seront les  derniers et les derniers, les premiers.

A l’école du Divin Maître

 

Pourtant, un petit enfant qui vit de cette école-là, est bien plus savant que celui qui aura fait de longues études, comme le dit le saint Curé d’Ars à un pénitent.

Pas de besoin de tricher, notre ange gardien nous souffle toujours à l’oreille la bonne réponse, mais souvent, nous ne l’écoutons pas.

Chaque matin, ouvrons notre Evangile et méditons avec simplicité ces lignes si belles que nous connaissons, hélas superficiellement, alors qu’elles demandent un vécu profond et une réelle « incarnation » dans toutes nos actions. La réponse est toujours là quand nous hésitons sur la conduite à tenir et pour nous aider à voir plus haut.

Puissions-nous jusqu’au bout, mettre en œuvre, bien réellement tout ce que nous apprenons,

A l’école du Divin Maître.

                  Jeanne de Thuringe

 

Etudiant!

L’été s’achève, le Bac en poche, les grandes vacances sont passées à toute vitesse dans un mélange d’euphorie et d’inquiétude face à l’inconnu de la vie étudiante qui vient. Après les résultats parfois surprenants de « parcours sup », il a fallu trouver un logement, signe de l’indépendance nouvelle.

Etudiant ! le jour de la rentrée est arrivé. Plein de promesses et synonyme de relative indépendance vis-à-vis des parents et de vie d’adulte. Vous voilà plongé dans le grand bain du monde avec ses attraits, ses richesses et ses mirages. Si vous sortez d’une école catholique, c’est une des premières occasions de côtoyer des camarades qui ne le sont pas, qui ne pensent pas comme vous, souvent par ignorance, parfois par conviction. Quoi qu’il arrive, vous passerez souvent pour un extra-terrestre, un « visiteur » revenant du passé. Parfois hostiles, souvent surpris voire curieux, tout dans votre apparence sera soumis à leur regard interrogateur. Ferez-vous tout pour passer inaperçu, pour paraître comme eux ou resterez-vous vous-même ? La question se posera plusieurs fois et il vous faudra à chaque fois trouver la bonne réponse, seul ! La plupart du temps, vous n’aurez pas de questions directes et quels que soient vos efforts pour passer inaperçu, vous serez considéré comme différent. Mais cette différence, si elle est assumée, les attirera à vous et voyant en vous quelqu’un d’honnête et d’heureux, ils chercheront à vous connaître mieux. De nouvelles amitiés d’un nouveau genre naîtront, l’occasion pour vous d’approfondir votre foi pour être en mesure de répondre à leurs questions, et de faire de l’apostolat si l’occasion se présente, au moins par votre exemple.

Les tentations ne seront pas négligeables, alcool à volonté et autres amusements lors des soirées d’intégration. Mais cela sera facilement surmonté si vous vous appuyez sur les grâces et les armes qui sont à votre disposition.

Profitez-en pour fréquenter les groupes d’étudiants catholiques de votre paroisse. L’occasion d’établir ou de renforcer des amitiés. Confrontés aux mêmes difficultés, aux mêmes questions, aux mêmes épreuves, ce sont dans ces moments que se forment les belles et profondes amitiés qui pourront durer toute la vie. C’est aussi le temps de découvrir les joies des week-end entre amis, des dîners passés à deviser et à refaire le monde.

Les groupes d’étudiants proposant soit des prières, soit souvent des conférences seront l’occasion de continuer votre formation. Appuyée sur des lectures, des discussions et conférences, cette formation intellectuelle que vous allez pouvoir poursuivre tout au long de votre vie d’étudiant aura pour objectif principal de vous faire découvrir le monde tel qu’il est réellement, les différentes forces qui s’y affrontent et d’échapper à l’image trompeuse qu’il veut bien donner de lui, de distinguer le vrai bien qu’il offre et dont on peut bénéficier honnêtement, des vrais maux qu’il présente sous apparence de bien.

La prière et la fréquentation des sacrements seront les armes les plus puissantes qui vous permettront de tenir dans la durée, pour rester vous-même, catholique convaincu et heureux de l’être dans un monde apostat.

Enfin, si vous vous fixez dès le début un rythme de vie bien précis avec une heure de lever, une heure de coucher, temps réservé à la prière et un temps pour la lecture, vous prendrez rapidement de bonnes habitudes qui seront votre meilleur garde-fou contre l’oisiveté et le temps perdu sur internet qui est l’autre grand danger de la vie seul. C’est la tentation facile qui guette chacun d’entre nous quand nous rentrons le soir dans notre chambre d’étudiant. Allumer l’ordinateur et vagabonder sur Youtube ou Facebook ou autres futilités. Le démon vous y attend au carrefour et se frotte les mains. En plus de ces habitudes de rythme de vie, collez une image ou une médaille de la sainte Vierge sur votre ordinateur. Sous le regard de votre mère, vous serez plus fort contre les tentations et elle vous protégera.

Tout ce beau programme a un seul objectif qui sera certainement celui de votre vie de jeune homme étudiant : devenir un homme catholique accompli qui, grâce à Dieu, grâce à son caractère et à sa volonté bien trempée, à sa connaissance du monde dans lequel il évolue et à la science qu’il a acquise durant ses études peut prétendre à avoir un métier et fonder une famille.

 

Telle est la vraie vie d’étudiant, la vraie liberté des enfants de Dieu qui vous procurera le bonheur durant ces années charnières où vous vous prendrez en main et où vous deviendrez un homme ! Vous savourerez la joie d’avancer à grands coups de rame dans la vie souple comme l’eau sous le regard de Dieu ! Alors en avant et que l’aventure commence !

 

Antoine

 

Une promesse  

Chère Bertille,

           Dans mon dernier courrier, nous avions abordé la question de la vocation de la femme, au sens large. Comme tu constates que de plus en plus d’amies se fiancent dans ton entourage, je voudrais en profiter pour te dire quelques mots sur le sujet des fiançailles.

           Tout d’abord, les fiançailles au niveau historique existaient chez les Hébreux. Le fiancé offrait à la fiancée ou au père de la fiancée, un anneau d’or ou un objet de grand prix. Un grand festin terminait la journée. Dès le jour des fiançailles, la fiancée appartenait à son fiancé et lui devait fidélité jusqu’au mariage qui arrivait assez rapidement.

  Aujourd’hui, les fiançailles sont toujours une promesse de mariage. Une promesse vraie, mutuelle et acceptée de part et d’autre. Il est bien concevable qu’un engagement aussi important comme le mariage soit préparé par les préliminaires des fiançailles. Malheureusement, la législation actuelle ne tient pas compte des fiançailles. Seule l’Eglise en est la maîtresse. Les fiançailles chrétiennes sont un contrat réciproque entre deux personnes déterminées, avec le désir de se marier.

  Pour arriver aux fiançailles, il faut savoir prendre conseil avec prudence : écouter, réfléchir et méditer. Les meilleurs conseillers sont nos parents, car ce sont eux qui nous connaissent le mieux. Il y a aussi les prêtres que nous rencontrons régulièrement et quelques amis proches. La prière nous permet de tout mettre sous le regard de Dieu et de tout juger selon sa volonté. Car plaire à Dieu et faire sa volonté, là est l’essentiel.

  Avant que les passions ne prennent le dessus, il faut découvrir le caractère de l’autre, ses goûts, ses qualités morales, ses aptitudes… Cela demande beaucoup de renoncement intérieur, d’humilité et de franchise. C’est alors que l’on pourra se décider et choisir un père ou une mère pour ses futurs enfants.

  L’amour entre une jeune fille et un jeune homme se construit sur le même modèle que l’amitié. Mais c’est une amitié plus profonde. Il faut aimer avec bienveillance, c’est-à-dire de façon désintéressée. Le Père Noble dit « Aimer une personne pour l’utilité ou le plaisir qu’elle nous assure, c’est l’aimer égoïstement, pour ce bénéficiaire qui est soi-même. Au contraire, aimer quelqu’un et lui vouloir du bien : voilà l’amour d’amitié » et encore « le synonyme de l’amour, c’est « l’union », union des esprits, des cœurs, des vies… L’amour vrai résiste à la séparation. Sans doute, la séparation est la dure épreuve de l’amitié, mais elle est aussi la pierre de touche de sa solidité1 ».

 

  Voici quatre signes qui pourront aider à juger si c’est la bonne personne :

– L’estime mutuelle fondée sur des qualités réelles que l’on peut énoncer et qui consistent surtout dans la pratique de la vertu.

– La sympathie mutuelle. Les fiancés doivent être heureux de parler ensemble.

– La confiance mutuelle. Elle entraîne la certitude de ne plus être tout seul face aux difficultés et aux peines de la vie.

– Le plein accord sur l’idéal de la vie et du mariage chrétien.

 

  Le temps des fiançailles, c’est le temps pour apprendre à mieux se connaître, se confier ses défauts, apprendre à se pardonner (car le mariage sera aussi une vie de pardon), se faire confiance, se demander >>> >>> secours… Regarder l’autre vivre, agir, parler… Découvrir son tempérament, son caractère, sa santé, ses talents. Comprendre et accepter ce qui en principe ne changera pas…

  Ma chère Bertille, je te souhaite de construire de belles amitiés profondes, basées sur la générosité réciproque, et ainsi tu seras prête à répondre à l’Amour qui t’est réservé depuis toute éternité : l’amour parfait avec Dieu dans la vocation religieuse, ou l’amour humain pour fonder un foyer.

Je t’embrasse avec toute mon affection.                 

Anne

1 L’amitié de H.-D. Noble, O.P.