Qu’aurions-nous dû faire ou leur dire?

Lors d’une récente conversation, un prêtre me confiait voir passer chaque jour dans sa paroisse des parents lui demandant, tout éplorés, ce qu’ils avaient raté avec leurs grands enfants pour en arriver là ! « C’est là le quotidien du prêtre en ce moment » insista-t-il.

           La réponse est pourtant toute simple : les parents doivent éduquer leurs enfants pour le ciel !

  L’éducation d’un enfant ne se limite pas à en faire un homme pour la cité temporelle : la vocation de l’homme ne s’arrête pas au temps que nous avons à passer sur cette terre. Après quelques années ici-bas, Dieu nous appelle tous à un bonheur sans fin, à Le contempler dans sa gloire. C’est là le véritable but de notre vie. C’est à cela que nous devons nous préparer pour nous-mêmes, c’est à cela que nous devons préparer nos enfants : leur vocation d’adorateurs pour l’éternité.

  C’est donc tout petit que commence cette éducation de l’âme chrétienne, et même avant la naissance… Au départ, le petit enfant, avant ou après sa naissance, ne fait qu’un avec sa maman. D’elle il reçoit tout, d’elle dépend toute sa croissance physique, toute sa vie affective. D’elle aussi, il reçoit l’alimentation spirituelle : la prière de sa maman, dont le tout petit s’imprègne, et qu’il absorbe tout comme le lait dont elle le nourrit.

  Il est donc juste de dire que l’avenir d’un enfant se joue dès le berceau. Tout ce que ses parents tentent de faire, du tout-petit un enfant sain et droit, de l’enfant un adolescent joyeux et pur, de l’adolescent un être généreux et vertueux, tout cela prépare les choix de sa vie future qu’il fera d’un cœur honnête devant le bon Dieu, que ce soit pour la vie religieuse, pour fonder une famille solide ou se donner autrement. Examinons comment, en travaillant à former l’âme, la volonté, le caractère et l’esprit de leur enfant, les parents le préparent à son futur état de vie.

 

  Avant toute chose, il doit être bien clair que des parents catholiques se sentent dépositaires de leurs enfants qui appartiennent d’abord à Dieu. Ils doivent accepter par avance tous les sacrifices pour les élever saintement, et supporter vaillamment la maladie, ou même la mort de l’un d’entre eux si la providence le voulait ainsi. De même accepteront-ils volontiers une vocation sacerdotale ou religieuse si cela se présentait. Il s’agit certes de sacrifices sur un plan humain, mais d’une voie royale pour conduire les âmes plus assurément au ciel !

 

Le sens de l’effort

  Les fondements d’une éducation morale seraient incomplets sans l’apprentissage de l’effort et du sacrifice. La vie humaine étant un combat, la victoire ne s’obtient pas sans effort, et pas davantage sans quelques renoncements… On rencontre des efforts à faire dans tous les domaines (physique, intellectuel, moral, spirituel), ils font partie de la vie. « Chaque fois que la facilité remplace l’effort personnel (…) en fait, on enchaîne l’enfant à l’adulte, on lui fait prendre goût à la dépendance, on l’habitue à voir les autres répondre à ses besoins1. » Le rôle éducateur des parents est d’accompagner progressivement l’enfant jusqu’à ce qu’il parvienne à son autonomie. L’enfance est l’âge du dépassement, il est donc facile de satisfaire la volonté de grandir de l’enfant en lui donnant le sens de l’effort.

  Avec l’effort, le sacrifice a toute sa place dans la vie chrétienne. Baptisés, rachetés par la mort et le sang de Notre-Seigneur, les enfants, tout autant que leurs parents, doivent passer par la croix et le sacrifice pour imiter Jésus. Tout petit, l’enfant prend Jésus pour modèle : il obéira « pour faire comme Jésus » depuis son enfance et jusqu’à la croix ; il fera plaisir aux autres, « pour faire plaisir à Jésus », c’est là que commence le vrai sens du sacrifice. Renoncer généreusement à sa petite volonté, aimer les autres, se dévouer pour eux… Toujours pour Jésus, cela change tout et encourage à tous les efforts, imprégnant >>> >>> peu à peu l’âme des nombreuses vertus chrétiennes qui feront ressembler de plus en plus à Jésus !

 

L’admiration

  Admirer, c’est aimer ! Pour aimer Dieu, il faut prendre le temps de le contempler dans sa création, toutes ces merveilles mises à la disposition des hommes et dont la beauté élève si naturellement les âmes. Avec l’admiration, naît la piété, le besoin de prier. Il faut fonder sur l’admiration l’éducation du cœur adolescent. Les élans d’un jeune cœur jaillissent dans tous les sens, impatients de toutes les découvertes, prêts à tous les enthousiasmes. A l’égoïsme un peu retors de la petite enfance succèdent la générosité, le désir de connaître, de servir. Ces élans éveillent une joie d’aimer qu’il faudra nourrir tout en la guidant, la canalisant sans se préoccuper du jour où elle se fixera sur une vie consacrée à Dieu, ou sur un être élu parmi les autres… C’est en famille que l’on ira visiter de beaux monuments, les œuvres des hommes, des cathédrales comme des petites églises romanes ; que l’on contemplera des sculptures ou des peintures somptueuses au hasard des déplacements ou lieux de vacances ; que l’on ira écouter chanter de beaux chœurs d’enfants ou jouer des symphonies magistrales. On visitera des couvents pour discuter des différents ordres, les comparer. Peut-être même que le père de famille et ses fils pourront rentrer dans la clôture pour mieux comprendre la vie des moines. On recevra aussi à la maison des familles qui ont le même idéal et que l’on admire ; ou encore on accueillera des prêtres à la table familiale, eux qui ont donné leur vie à Dieu en se mettant au service des âmes, et avec lesquels les enfants entreront en confiance pour discuter ou se confier. Et puis, on dirigera aussi les amitiés, les lectures, préférant celles qui stimulent et élèvent. La poésie, les hauts-faits, les dévouements prestigieux, les vies de saints, tout ce qui transforme l’admiration en désir d’imitation, en désir d’union ou en acte d’adoration quand elle s’élève jusqu’à Dieu.

Les parents n’ont pas à orienter les choix de vie de leurs enfants, mais ils ont à nourrir et préparer les âmes et les cœurs dans une sanctification constante. On lancera des sujets de conversations constructifs, formateurs, provoquant parfois, pourquoi pas, quelques débats animés ! Les religieux ou personnes détenant une autorité ne seront jamais critiqués, et l’on se forcera à voir le bon côté des gens dont on parle pour garder un grand respect de leur état. Dans la mesure où l’éducation aura été cohérente, avec une vie de prière familiale régulière, un choix d’écoles correspondant à leurs valeurs religieuses et éducatives, les enfants acquerront un équilibre naturel et surnaturel qui, plus tard, portera tout simplement le jeune homme ou la jeune fille à faire un choix de vie solide qui assurera le mieux le salut de son âme, et fera la joie de ses parents.

 

  « L’enfant, pris dans de nouveaux liens, confronté à de nouveaux devoirs, comprend brusquement par le dedans la vie et l’âme de ses parents. Une illumination intérieure éclaire d’un jour spirituel tout le passé, toute son enfance, tant de soins et tant de vertus que deux êtres ont dépensés pour faire de lui un homme.

  Heureux s’il peut alors s’abandonner au chant de la reconnaissance et si ceux à qui il doit tout sont encore là pour en savourer la douceur2. »         

Sophie de Lédinghen

 

 

1 Ivan Gobry, Les fondements de l’éducation, Téqui

2 Roger Pons   

 

La vocation

N’ayez qu’une crainte, dit sainte Thérèse, c’est de craindre quelque chose (…) Faites tout, dit-elle, comme s’il n’y avait au monde que Dieu et votre âme.

           Voilà deux principes qui, s’ils sont bien compris et appliqués, montrent la supériorité de notre religion et surtout, la liberté et l’épanouissement qu’elle procure, par cette relation de confiance avec notre Dieu, à la fois Père et Maître bienveillant de notre destinée.

  Quoi de plus libérateur que de se savoir infiniment aimé et choyé par la Providence ?

  Alors pourquoi craindre de s’engager, quelle que soit la voie envisagée, si l’on a la ferme volonté de suivre la volonté divine ? C’est cette confiance que nous devons inculquer à nos enfants, avant même le moment du choix, choix qui sera d’autant plus ferme qu’il aura été préparé par de bonnes discussions familiales, bien en amont.

  De plus, quand les enfants savent qu’ils peuvent compter sur le jugement perspicace et sage de leurs parents, sur leur approbation au moment de l’hésitation sur une vocation religieuse ou sacerdotale, sur leur aide et leurs prières quand des doutes les assaillent, cela leur est d’un grand réconfort et assure une stabilité psychologique et spirituelle bien rares de nos jours.

  Voilà de quoi nous inciter à renforcer nos liens familiaux et nos discussions en famille, bien avant l’âge des choix d’avenir de nos enfants.

 

Ma bibliothèque

           Vous trouverez ici des titres que nous conseillons sans aucune réserve (avec les remarques nécessaires si besoin est) pour chaque âge de la famille.

           En effet, ne perdons pas de vue combien la lecture d’un bon livre est un aliment complet ! Elle augmente la puissance de notre cerveau, développe la créativité, participe à notre développement personnel, nous distrait, nous détend et enfin elle enrichit notre vocabulaire.

  Dès l’enfance, habituons nos enfants à aimer les livres ! Mais, quel que soit l’âge, le choix est délicat tant l’on trouve des genres variés… N’oublions jamais qu’un mauvais livre peut faire autant de mal qu’un mauvais ami !

  ATTENTION : Quand nous conseillons un titre, cela ne signifie pas que tous les ouvrages du même auteur sont recommandables.

ENFANTS :

Pour les tout-petits : Mon imagier nature : Le printemps – Père Castor – 2022

Pour préparer à la 1ère Communion : Histoire du Roi et des trois maisons – Téqui – 2022

– Dès 10 ans : Le roman de renard – Blanche de Peuterey – 2022

– A partir du collège :  Merveilles de la nature à l’aquarelle – Dessain et Tolra – 2022

– Pour les filles dès 16 ans : Ma tante Giron – René Bazin –  Le drapeau blanc – 2022

 

ADULTES (à partir de 16 ans)

– Biographie : Un père et une mère (Les parents de Mgr Lefebvre)– Iris éditions – Journal Controverses

– Spiritualité : Marie-Madeleine – Père Jean-Dominique – 2021

Histoire religieuse : La révolution liturgique – Jean Vaquié – Chiré – 2021

Education : Mamans vers le ciel -Le Sel – réimp. 2021

– Histoire : La guerre de Vendée – Chanoine Auguste Billaud – Chiré – 2021

 

 

 

 

 

Répondre à l’appel de Dieu  

Pie XI définit le but de l’éducation comme étant de « former l’homme et lui enseigner comment il doit se comporter pour aller au ciel » et donc répondre à l’appel de Dieu, ce qui est bien le sujet de ce numéro.

           Les matérialistes prendront les mêmes moyens pour « former l’homme et lui enseigner comment il doit se comporter pour » correspondre à la société matérialiste qu’on lui proposera. Georges Orwell, dans l’étonnamment prophétique « Le meilleur des mondes » imagine comment nos sociétés procéderont. Ces quelques citations illustrent bien le processus. Tous les aspects de l’éducation sont pris en compte ! C’est nous qui avons souligné les objectifs à atteindre, le reste de chaque phrase concernant les modalités.

« Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser ».

« On poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle ».

« Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif ».

« En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté »

« Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclu du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur ».

« Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels…».

 

  Comme c’est limpide ! Il s’agit donc d’empêcher de penser pour conditionner, de désarmer en supprimant la philosophie, de discréditer tout ce qui est grand et beau, de menacer ceux qui voudraient réagir et de discréditer les doctrines traditionnelles. Voilà comment, il y a près de 100 ans, Huxley imaginait la pédagogie ou plutôt le système permettant de conduire l’homme à refuser Dieu en lui donnant l’illusion de la liberté et du bonheur…

         

Comment faire pour contre-attaquer et amener nos petits à se tourner vers ce que Dieu veut d’eux ?

  Eh bien, proposons dans nos maisons un cadre permettant un développement exactement opposé à celui que décrit Huxley. Nous ne reprendrons que les sujets sur lesquels les >>> >>> grands-parents peuvent agir de manière pratique.

  Permettre de penser ! Le passage des petits-enfants dans la maison de leurs grands-parents doit leur permettre de sortir de la frénésie de la vie courante et de bénéficier d’une tranquillité suffisante pour prendre du recul. Si les grands-parents ont la chance de vivre à la campagne, organiser des activités calmes, des conversations, du silence permettant de réfléchir. Certes, la musique, les films ne sont pas en eux-mêmes des mauvaises choses mais, leur échapper périodiquement est certainement profitable. Ça sera dur ! La musique et les bavardages sont des drogues dont il est difficile de se passer !

  Montrer le sérieux de l’existence. Il existe parfois une coquetterie chez les anciens qui consiste à relativiser les règles et les idées qui régissent notre civilisation. Ne tombons pas dans cet écueil ! Nous savons que notre fidélité tient à nos convictions mais aussi aux pratiques que nous nous imposons ! Il est important de faire chaque jour ce que l’on doit ! C’est sérieux ! Là, c’est probablement – comme souvent – l’exemple qui sera la meilleure des pédagogies. Le spectacle des grands-parents rigoureux dans leurs devoirs quotidiens, leur tenue, leur présence à la prière, leur respect des règles édictées sera sûrement de nature à pousser les jeunes vers le respect de ce qui doit être. Nous ne sommes pas « au-dessus de ça » et le « jeunisme » est une gaminerie qui peut se payer cher !

  Faire preuve de personnalité. Ne pas craindre d’être « exclu du système ». Nos papes ont longuement insisté sur la philosophie « anti-Christ » du monde moderne. Tirons-en les conclusions ! Si notre société était celle de saint Louis, nous devrions craindre d’en être exclus… Elle est probablement celle de Mammon, craignons plutôt de trop nous y adapter. La vie quotidienne impose parfois des concessions en la matière. Le temps des vacances peut permettre de retourner à la vraie vie chrétienne !

         Finalement, c’est simple ! Que nos maisons soient, à l’image de la maison de Nazareth, des lieux où sont pratiquées les vertus familiales d’amour, de dévouement et de travail… Nos familles en ressortiront mieux tournées vers Dieu et nos petits répondront probablement mieux à leur vocation.

  Prions sainte Anne de nous donner l’autorité et la délicatesse pour piloter notre navire, prions pour que nos petits-enfants fassent ce que Dieu attend d’eux !

Des grands-parents

 

La puissance de l’exemple  

Rien n’échappe à nos enfants, notre conduite, nos paroles, le ton même de notre voix, et tout petits déjà, ils nous imitent plus ou moins consciemment. Nous sommes de véritables références pour eux : « Papa a dit », « Maman a fait » ; et dans la mesure où nous voulons de bons enfants, ne sont-ils pas notre premier encouragement à la perfection ? Or, pour être de bons et saints parents, nous devons d’abord être de bons et saints époux.

 

  Pour nous y aider, nous avons nous-mêmes besoin de modèles à suivre, d’exemples de saints époux à observer. Il est fort probable que vous en ayez tous dans votre entourage, et cela est bien rassurant de voir leur bonne entente, leur affection mutuelle, leur rayonnement qui laisse entendre que cela a l’air tout simple, ou du moins réalisable ! 

 

  Voici trois grands et beaux modèles : les époux Louis et Zélie Martin, les époux René et Gabrielle Lefebvre, et les époux Luigi et Maria Beltrame Quattrocci. Ces trois ménages ont en commun d’avoir été très unis, d’avoir fondé un foyer profondément catholique, et d’avoir plusieurs vocations religieuses parmi leurs enfants puisque les Martin ont eu cinq carmélites sur cinq enfants, les Lefebvre deux prêtres et trois religieuses sur huit enfants, les Beltrame un prêtre, un moine bénédictin et deux religieuses sur quatre enfants. On pourrait penser que ces foyers devaient être de vrais petits couvents, des endroits tristes et ennuyeux. Bien au contraire, voyons ensemble ce qu’il s’y passait…

Une famille stable et unie

  C’est l’amour des parents qui créé l’atmosphère du foyer, et c’est cette atmosphère qui, dès les premières minutes de sa vie, pénètre l’enfant et compose son âme. Par la façon dont ils s’aiment et dont ils vivent, les parents enseignent ce qu’est aimer, ce qu’est le mariage. Pour un enfant, les images de l’enfance toutes centrées sur le père et la mère laissent des marques indélébiles : modèle ou cauchemar. Les souvenirs laissés par un père ou une mère qui s’aimaient noblement éclairent à jamais la conscience. La clé de l’énigme, c’est de s’aimer en chrétiens. La charité est l’âme du foyer. « La communauté ainsi fondée se trouve spiritualisée dans son essence. La sainteté, loin de dessécher l’amour, en fait une création continue, un chef d’œuvre de compréhension mutuelle, de dévouement désintéressé, de don total dans l’oubli de soi. Leur vie à deux n’est pas un égoïsme dans le mariage, mais une ascension collective dans et par le mariage. Ainsi réalisèrent ils en plénitude le plan du Créateur1. »

  Un foyer où règne le respect, où l’amour se prouve davantage qu’il ne se déclare, où la générosité entretient la gaieté, où la prière en commun nourrit les âmes et scelle l’union, est un foyer éducateur par son seul rythme, par son simple style de vie. Rien ne remplace cette péda- >>> >>> -gogie du bonheur, cette paix profonde qui récompense les vraies tendresses et qui rend supportables les peines et les souffrances.

  « Un tel amour ignore l’inquiétude et la susceptibilité. Il n’est ni ombrageux ni jaloux. C’est une force paisible, faite de confiance et de sécurité. Le mari laisse à la femme le ministère de l’intérieur, c’est-à-dire totale liberté dans l’agencement de la maison et la conduite du ménage. […] L’épouse pourvoit à tout amoureusement1. »

  La vie de prière est régulière et quasi diffuse, elle imprègne les âmes des enfants sans que l’on en parle à tout moment car ils comprennent bien que Dieu est partout et en toutes choses, qu’il les aime et les protège, mais veut des preuves d’amour en retour. Aimer, c’est se donner, et c’est aussi se vaincre pour plaire à celui que l’on aime, son conjoint, ou le bon Dieu.  Dans ces trois familles on peut dire que « les parents avaient l’âme religieuse, éloignant de leurs enfants les mauvaises influences, orientant leur piété et les disposant à vouloir, en tout, ce que Dieu veut, enfin les stimulant au sacrifice des âmes façonnées à dire « oui » au devoir1. »

  En toutes choses, ces parents-là montrent l’exemple, au travail comme dans les loisirs familiaux, dans le sacrifice comme dans les exercices de piété. « Nous avons passé quelques années de vie paisible en famille avec de bons parents chrétiens, profondément chrétiens. […] tous les matins mes parents s’y rendaient (à l’église) de bonne heure pour communier, et assister à la Messe quand ils le pouvaient2. »

 

Une affection équilibrée

  Deux aspects sont à relever dans cette éducation muette qu’est l’exemple des époux de ces trois familles : une affection et une entente mutuelles qui ont un grand retentissement sur l’équilibre de leurs enfants. « Je suis toujours très heureuse avec lui, il me rend la vie bien douce. C’est un saint homme que mon mari, j’en désire un pareil à toutes les femmes1. »

  Entre eux, ces ménages entretiennent une admiration mutuelle très épanouissante pour leurs enfants qui y puisent un réconfort propice à leur équilibre naturel autant que spirituel. « Entre eux, jamais le moindre nuage, tant est parfaite l’unité de vues. M. Martin exerce l’autorité à la façon d’un patriarche dont le caractère même impose le respect et la soumission […] Quant aux enfants, elles se sentaient enveloppées d’une affection tendre et ferme, accompagnée d’authentiques égards1 ».

 

  La désunion dans la famille met l’enfant en insécurité. Le ton de la discorde l’effraie, lui qui a un besoin profond d’unité se sent menacé. L’hésitation s’installe en lui : « Est-ce de ma faute ? ». Les parents doivent se persuader de l’influence de leur comportement sur celui de leurs enfants. Les foyers désunis, orageux, les foyers où manque une véritable union des âmes et des cœurs provoquent chez leurs enfants des conflits psychologiques. Ils établissent en eux l’insécurité et les poussent sans s’en rendre compte à chercher dans un monde factice l’épanouissement dont ils ont besoin. Personne n’est à l’abri de quelques tensions en ménage, mais que cela se fasse en dehors des enfants, et avec une volonté commune d’apaiser au plus vite et charitablement ses différends.

 

  Le foyer dans lequel les deux époux vivent de leur foi en toutes choses, pour leur amour et leur sanctification mutuels, seront récompensés dans l’éducation de leurs enfants qui deviendront leur couronne au ciel. On ne peut rien sans Dieu. Une vie religieuse profonde, les vertus théologales sont plus précieuses à l’éducateur que des compétences et des sécurités trop humaines. Par notre simple exemple, enseignons donc à nos enfants comment aimer, comment le grand et beau « oui » d’un jour peut durer toute la vie. Et puissent-ils à leur tour, prononcer un « oui » ferme et généreux devant Dieu, quel que soit le choix de leur état de vie.   

Sophie de Lédinghen

1 L’histoire de la famille Martin, Père Stéphane-Joseph Piat

2 La petite histoire de ma longue histoire, Mgr Marcel Lefebvre