Fête de Sainte Cécile

Notre citation pour novembre et décembre :  

« Il n’y a de grand parmi les hommes que le poète, le prêtre et le soldat, l’homme qui chante, l’homme qui bénit, l’homme qui sacrifie et se sacrifie », Charles Baudelaire.  

 Sanctus

Messe Solennelle de sainte Cécile

Charles Gounod (1818, Paris – 1893, Saint-Cloud)

 

 

 

 

 

 

 


Le 22 novembre prochain, honneur à la patronne de cette rubrique puisqu’elle est la patronne des musiciens, honneur à sainte Cécile dont le nom est inscrit au Canon de la Messe.

 

Cette Messe solennelle en l’honneur de sainte Cécile, composition musicale de Charles Gounod, son œuvre la plus connue (hormis ses opéras), fut donnée pour la première fois le 22 (ou le 29) novembre 1855 à l’église Saint-Eustache de Paris, pour la sainte Cécile.

 

Née en l’an 200, Cécile est mariée contre son gré au païen Valérien. Le soir de son mariage, Cécile révèle à son mari qu’elle a fait vœu de virginité et le convertit ainsi qu’un peu plus tard, son beau-frère Tiburce. Elle subit le martyre par trois fois jusqu’à sa décapitation, en chantant des hymnes à Notre-Seigneur. Pour cette raison sainte Cécile est devenue patronne des musiciens.

En octobre 1599, lorsqu’à la demande du cardinal Sfondate, on ouvrit le sarcophage de la sainte, son corps était encore intact. Le sculpteur romain, Maderno exécuta la réplique fidèle du corps supplicié, œuvre que l’on peut toujours contempler dans l’Eglise Sainte Cécile du Trastevere, à Rome.

 

Sanctus, Sanctus, Sanctus Dóminus Deus Sábaoth


Pleni sunt caeli et terra glória tua


Hosánna in excélsis


Benedíctus qui venit in nómine Dómini

 

Hosánna in excélsis.

 

 

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Si le père n’est pas là…

           Pour le nouveau-né, le père est d’abord une présence. Il ne sait pas « à quoi sert un papa », mais il devine son rôle et son importance à la sécurité qui émane de lui. Le père apaise les peurs, calme les caprices, les énervements, dissipe les craintes, sème la joie. Il lui suffit pour cela d’apparaître…

Mais il arrive que l’enfant soit privé de la présence de ce papa pourtant si nécessaire à son équilibre. Que ce soit par la mort, le divorce de ses parents, un abandon…ou même un père présent seulement physiquement parce que non impliqué dans son devoir paternel, l’enfant souffre tout autant de ce manque cruel de son père.

Dans le cas de la mort, l’enfant chrétien, quoi que souffrant du vide laissé par son père disparu, sait que son père n’est pas tout à fait absent puisque, étant déjà dans l’éternité il est le plus vivant de la famille. Le défunt a ainsi encore toute sa place, son souvenir reste, les photos témoignent des bons moments passés ensemble, on parle de lui, on se recueille sur sa tombe. Papa n’est plus là à la maison, mais il ne cesse de protéger sa famille, à la manière du bon Dieu, sans secours visible ; et la prière est le moyen de rester bien uni à lui. Et puis, il y a son nom que porte toute la famille, les histoires que raconte la maman pour montrer quel homme était papa et qui engendrent une admiration certaine, parfois au détriment de la mère elle-même, ou du moins pour sa faiblesse de femme. Dans ces conditions on ne s’étonnera pas que leur père vive « parmi eux » comme le maître de famille.

Les enfants de divorcés vivent un arrachement d’autant plus cruel qu’ils sont attachés à leurs deux parents qu’ils voient « en guerre », se justifiant l’un l’autre, se condamnant mutuellement…et il faudrait que les enfants jugent cela et prennent parti pour l’un ou l’autre de leurs deux parents ?! Si le divorce disloque la famille, les enfants en subissent de plein fouet de profonds traumatismes affectifs et psychologiques. Ils ne savent plus si « chez eux » est la maison de papa ou l’appartement de maman. Inconsciemment ils se reprochent de ne pas avoir réussi à empêcher la séparation de leurs parents.

Que dire des cas où l’un ou les deux parents se mettent à vivre avec une autre personne ?! Quel choc pour ces petits qui se retrouvent dans des foyers « décomposés/recomposés » !!! Comment une petite tête d’enfant peut-elle faire face à cela sans dégâts irréversibles ?!…

L’enfant né hors mariage n’est malheureusement pas un fait rare puisqu’en 2014 cela concernait 50% des grossesses en France (41% aux USA)*. Et n’allez pas croire que les milieux catholiques en soient préservés. Il ne s’agit bien sûr pas de juger, surtout si les jeunes filles (ou jeunes gens) ont eu le courage de garder leur enfant, de le faire baptiser et de l’élever, et parfois seules.

Ces enfants, souvent conçus alors que leurs parents ne souhaitaient pas particulièrement se marier, ne sont pas toujours reconnus par leur père et donc élevés sans lui. Parfois les deux parents ont une réelle affection l’un pour l’autre et sont prêts à se marier bien vite, surtout pour « sauver les apparences » aux yeux du monde, sans être vraiment certains de fonder ainsi un foyer solide … La prudence demande de ne pas précipiter les choses et de prendre le temps de bien se connaître pour savoir si l’on peut raisonnablement s’engager dans le mariage durablement.

On dit souvent que ce n’est pas parce qu’on a fait une « bêtise » qu’il faut en faire une deuxième ! Pour être à même de mieux réfléchir à cette question, il est bon que les parents de l’enfant vivent séparés pour faire leur choix plus facilement et librement…mais aussi plus saintement.

Ce n’est pas parce que cet enfant est né d’une « erreur » que le père sera un mauvais père. S’il s’investit dans son éducation en dépit de l’éloignement, s’il prend intérêt de lui, la mère pourra alors compter sur son soutien auprès d’elle, et, à moins d’un empêchement majeur, ils pourront unir leurs vies dans le mariage. S’il est mieux pour elle et pour son enfant de rester seule, elle aura ce courage de ne pas risquer un foyer de discorde et de souffrances pour toute la famille, ni même de mettre en danger sa foi ou sa santé nerveuse tant que physique.

Être absent, cela ne signifie pas forcément être éloigné physiquement, il y a des pères inexistants dans leur foyer tout en y étant présent ! On les voit distants, distraits, absorbés par d’autres soucis, ou tout simplement égoïstes au point de ne prendre aucune part à l’éducation des enfants qu’ils considèrent même comme « une affaire de femme » ! Il y a de bons pères qui sont marins ou grands voyageurs pour leur profession, mais qui restent présents au foyer par le téléphone et un vrai intérêt à tout ce qui se passe chez eux. Ils sont en communion permanente. Mais le père « absent », alors même qu’il est en présence de sa famille, devient un poids pour tous. Il s’agit-là de plus qu’une défaillance, c’est une démission qui peut provoquer de vraies catastrophes ! La mère s’épuise et s’endurcit, les enfants sont atteints d’exactement les mêmes symptômes que tous ceux qui ont été élevés sans la présence de leur père.

Le père a un rôle structurant dans la construction de la personnalité de l’enfant. Son absence n’entraîne pas systématiquement de carences, mais des études de l’INED dénoncent une délinquance des jeunes en pleine expansion surtout chez les enfants privés de père. Un psychologue est même allé jusqu’à intituler son livre « Père manquant, fils manqué » !

On constate chez ces enfants un manque de confiance en soi (si son père est parti, c’est donc que lui ne vaut pas grand-chose sinon il n’aurait pas été abandonné), échec scolaire, une éternelle insatisfaction qui entraîne : obésité, forte consommation d’alcool et de drogues, blessures par des piercing et tatouages, tendances suicidaires, et, phénomène récent, déviances sexuelles. Les éducateurs et psychologues qualifient l’absence du père comme un problème de santé publique actuellement. A partir de 10 ans l’enfant a pleine conscience de l’absence de son père, et en souffre davantage, parfois jusqu’à la révolte. Alors comment aider et soulager ces enfants ?

Il est clair que la foi et la pratique religieuse préservent nettement des effets secondaires négatifs en représentant une colonne vertébrale de valeurs morales qui soutiennent. Le sens de l’effort, du sacrifice et de la prière y contribue.

Si elle ne peut tout à fait remplacer le père, la mère a moyen de suppléer partiellement à son absence. Elle a les grâces pour cela et se doit d’être autant que possible père et mère à la fois : son enfant lui réclame inconsciemment ce qu’il attendait aussi de son père. Elle se retrouve donc face à un dilemme cruel : ou bien être trop faible, ou bien être trop dure. Allier la tendresse, la douceur, la bonté de la femme, et la fermeté, la justice, le calme de l’homme, est-ce possible, même par grâce ? S’il s’agit d’obtenir obéissance et discipline, la mère y parviendra. Mais s’il s’agit d’une transfusion de virilité cela paraît difficile.

Quelles que soient les situations citées ci-dessus, le manque du père existera toujours chez l’enfant, mais il est en partie possible de « remplacer » l’absent par une autre figure : grand-père, oncle, parrain…qui offre un contre-poids à la figure maternelle et donne à l’enfant le repère masculin dont il a besoin pour grandir. Un dernier conseil serait que l’enfant n’entende pas critiquer ou condamner son père. Même si cela se passe mal entre les deux parents, il y a des choses qui ne regardent pas leur enfant, mais surtout il y a un lien étroit entre l’image de son père et celle qu’il a de Dieu. C’est à travers le père et à l’image du père qu’est essentiellement formée la représentation de Dieu.

Sophie de Lédinghen

*Insee 

 

La prière des pères de famille

           « Qui tient la femme tient tout », s’exclama Jules Ferry, lorsqu’il plaida pour l’école laïque obligatoire. Son objectif était de faire main basse sur les consciences. Pas uniquement les consciences de son temps, mais celles du futur. Aussi voulut-il étendre l’emprise de la République laïque sur les femmes, qui souvent restaient au foyer et élevaient les enfants et les consciences de demain dans la foi catholique. Le catéchisme, la foi, la France éternelle s’est transmise ainsi pendant des siècles, sur les genoux des mères de famille parlant à leurs petits enfants.

  Comme Jules Ferry avait raison ! Peu à peu, la République pénétra les foyers, jusque dans leur intimité. Peu à peu, elle s’empara des consciences, cachée derrière les vanités. Elle avança drapée d’illusion, aidée du matérialisme et du confort, et en deux siècles, elle déchristianisa la Fille aînée de l’Eglise. La mainmise sur les consciences a tué la force d’un peuple autrefois chrétien. La République a violé les foyers, et cherche toujours à étendre son emprise totalitaire. Aujourd’hui, les Français sont démunis, désarmés, désemparés. Ils n’ont rien en quoi espérer, rien après quoi vibrer, ils s’accrochent à leurs idoles éphémères et meurent avec elles. Ils ne savent plus écouter le silence, prier, chanter, se tourner vers leur Créateur. Non, ils se prostituent et se livrent corps et âmes au premier charlatan, au premier marabout venu leur promettre richesse, confort et divertissement avec force bruit et plaisirs. Au fond de leur cœur, certains sentent le grand mensonge, ils sentent qu’on se moque d’eux, que sous couvert de fausse liberté on les enchaîne. Mais le mensonge progresse et continue son œuvre : appauvrissement moral et désormais matériel de ce peuple autrefois grand, réduit à pleurer ses cathédrales en feu sans en comprendre le sens, jeté sur les ronds-points pour crier son désarroi de se voir mourir, sans personne pour lui tenir la main, tétanisé à l’idée de se rappeler qui il est, humilié au point de battre sa coulpe sans cesse pour des crimes idéalisés au détriment de ses vrais péchés. Un peuple peureux, esclave parce qu’il ne sait plus se mettre à genoux.

  Mais il reste des chrétiens en France. Ils sont dans les foyers où l’on prie. D’abord les mères de famille, qui toujours sur leurs genoux annoncent la bonne nouvelle évangélique et transmettent la foi dans leur sacerdoce maternel. Mais plus encore par les pères de famille ! L’on a fait croire que les bondieuseries étaient choses de bonnes femmes, que les hommes vont au bistrot tandis que leurs épouses vont à l’église. Mensonge !

La prière des mères continue l’Eglise, la prière des enfants attendrit le cœur de Dieu et enchante tout le Ciel, la prière des prêtres est la seule à même de sauver l’Eglise, mais c’est la prière des pères qui reconstruira la chrétienté. Un chrétien n’est grand que lorsqu’il a le genou en terre, humilié, adorant son Dieu, le suppliant de le sanctifier et de sanctifier les siens. Le père de famille est le chef des âmes que Dieu lui a confiées. Il doit les conduire au Ciel. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus dira qu’elle découvrit l’amour de Dieu à travers l’amour de son père ; quelle responsabilité !

           Quel fils n’a pas compris beaucoup des choses de Dieu lorsqu’il surprit un matin ou un soir, son père, à genoux dans le salon, droit comme un « i », dignement et simplement abandonné dans les mains de Dieu. Qui n’a pas eu envie de prier à son tour, de découvrir la profondeur de l’intimité avec Dieu, de devenir un saint, rien qu’à voir son père prier ?

  Si la République a déchristianisé la France en prenant en otage les femmes, le cœur du foyer, Dieu reconstruira la France par la prière des pères de famille, par la tête du foyer. Quand un homme se met à genoux, droit, les yeux levés vers le ciel, c’est le regard de Dieu qui se pose sur la terre. Voilà la responsabilité des pères de familles : de preux à pieux, seule une lettre change, le « i ». Droit comme un « i » …

 

Louis d’Henriques

 

 

Quand l’époux devient père

         Il y a en tout homme qui se respecte le goût et l’espoir des responsabilités. On le voit déjà chez le jeune garçon lorsqu’il revêt son uniforme de louveteau, ou utilise pour la première fois la débroussailleuse… Mais quelles responsabilités sont comparables à celles de la paternité ? « La paternité prend tout l’homme et le prend toujours ». Être père, c’est être majeur, c’est accéder aux plus hautes fonctions pour lesquelles l’homme se sent préparé : le voici législateur, juge, maître, défenseur, prêtre, roi. Qui pourrait nier que l’homme est fait pour cela ? (Même dans un foyer sans enfant, on peut exercer une paternité spirituelle, le prêtre accède lui aussi à une paternité plus haute encore…). La paternité humaine est la révélation de la paternité divine, le père est l’image du Père.

Il est frappant de voir aujourd’hui combien le père est dévoyé, ridiculisé… Tenez, il suffit d’entendre quelques publicités à la radio pour observer à quel point il est rabaissé : il est toujours le « pauvre homme » à qui sa femme (qui sait tout sur tout !) explique quel sirop prendre pour sa toux, ou quel concessionnaire automobile aller rencontrer pour la nouvelle voiture familiale que madame a déjà choisie ! Quand ce ne sont pas les enfants eux-mêmes qui expliquent à leur benêt de père quelle nouvelle pâte à tartiner convient le mieux à leur goûter ! Et écoutez bien les voix : l’épouse est des plus charmantes, et les enfants très polis avec une jolie expression…Il n’y a que le malheureux père qui semble toujours tombé de la lune ! Pauvres pères, réveillez-vous ! Ne vous laissez pas enfermer pas dans cette case de « papa-bien-gentil qui dit « amen » à tout », retrouvez votre dignité de chefs de famille, la noblesse de votre belle mission !

La première vertu du père est la dignité, qui prend sa source dans la vie intérieure. Être père, c’est d’abord avoir désiré un enfant. Celui qui a prié pour la fécondité de son union, qui a accepté dans sa finalité l’acte qui appelle à la vie, n’est-il pas mieux préparé à assumer son rôle de père ? Il a prié pour son enfant avant de le connaître. Il est quelqu’un qui sait ce qu’il veut et ce qu’il fait.

Lorsque l’enfant naît, l’homme devenu père mesure ce que c’est que d’avoir fait commencer une destinée éternelle. Il prie tous les jours pour ce petit. Il le prend en charge. Il sent son amour pour sa femme transfiguré et approfondi. Faire réussir cette vie qui paraît si frêle, éveiller cette âme encore endormie, faire grandir jusqu’à l’âge adulte ce tout petit être, voilà la pensée qui l’habite, qui illumine toute sa vie.

Le père sait que son enfant l’admirera, puis le jugera. Est-il digne d’être admiré ? Il lui faut, pour ne pas décevoir un jour son enfant, travailler à se perfectionner, à acquérir davantage pour pouvoir donner davantage. Il essaie d’aiguiser sa foi, son intelligence, de devenir celui qu’il voudrait que son enfant soit un jour. Ainsi l’homme devenu père sent en lui le besoin d’augmenter sa valeur humaine, de grandir pour être le guide et le modèle de demain. Il faut qu’il se refasse enfant, pur et jeune, à l’image de l’enfant qui lui est confié et de l’Enfant-Dieu. La naissance de l’enfant est ainsi, pour le père, une nouvelle naissance.

Pour être un père accompli, l’homme n’est pas seul, il a à ses côtés cette compagne dont la mission est de partager sa vie. « Le chef d’œuvre d’une femme, c’est le père. Comment l’homme, ce grand garçon qu’elle a épousé, deviendrait-il ce souverain au cœur grave et juste si son intelligente et patiente tendresse n’y travaillait jour après jour ? Comment comprendrait-il ses enfants si elle ne les lui expliquait ? Comment honoreraient-ils et aimeraient-ils leur père si elle n’orientait pas leurs cœurs vers lui 1? »

La présence du père est essentielle à l’équilibre moral de l’enfant. Mais qui ne voit que c’est la mère qui fait découvrir « papa » au tout petit ? De même qu’elle donne l’enfant au père, elle doit donner le père à l’enfant. Le père et la mère offrent d’abord à leur enfant l’image d’une union parfaite, d’une tendresse et d’une confiance sans nuages. Ils doivent faire régner au foyer ce climat de paix, de joie qui fait les enfances heureuses. Il est impossible de mesurer, sur la sensibilité d’un enfant, les effets d’une mésentente simplement soupçonnée, pressentie. Aux parents de purifier leur amour, de rectifier leurs caractères, de s’aider à faire rayonner la paix. L’amour paternel, c’est l’épanouissement de l’amour conjugal. Le père sera d’abord pour l’enfant ce que le fera la maman. A elle aussi de modeler son image. Elle parlera souvent de lui, fera désirer son apparition, respecter ses affaires, admirer son courage au travail, elle fera comprendre qu’il apporte soutien et réconfort.  « On demandera à Papa. » C’est dans la mesure où elle sera tout à fait l’épouse qu’elle sera tout à fait la mère. Elle veillera cependant à ne pas trop idéaliser le père de ses enfants qui risqueraient de croire qu’il est un modèle inaccessible. Les garçons se décourageraient de ne pas lui ressembler, et les filles peineraient à s’engager dans le mariage, ne trouvant « le mari parfait » !

Les années passant, l’épouse s’est souvent affirmée dans l’éducation de ses enfants et la tenue de sa maison au sens large du terme. On pourrait en effet qualifier une maîtresse de maison, de chef d’une petite PME tant il faut organiser, agencer, diriger, fabriquer, surveiller, économiser, acheter, prendre les rendez-vous, assurer le transport, déléguer tout en supervisant…La petite fiancée tout intimidée a parfois peu à peu laissé place à une vraie matrone plus ou moins acariâtre et directive ! L’essentiel est d’en prendre conscience pour rester vigilante. Si la mère a un certain « pouvoir », elle ne le détient pas au point de mettre la maisonnée au pas, mari compris !

Lorsque le père parle, la mère s’efface et montre son soutien autant que sa confiance : n’ont-ils pas déjà abordé ensemble ces sujets de discussion pour les accorder ? Une décision a été prise ? C’est le père qui, en famille, fait part de ce que son épouse et lui ont décidé. Les enfants ne doivent sentir aucun désaccord sur des choses importantes entre leurs parents. De façon habituelle, le père bénira la table, dirigera la prière et le chapelet, et bénira ses enfants, ce sont là des marques du chef de famille. Cependant c’est à l’épouse d’être la flamme intérieure qui veille et fait que, d’un seul cœur, la famille répond à l’appel du Père.

Sophie de Lédinghen

 

1 P. Henri Caffarel

 

 

Les devoirs de vigilance et de commandement

           La piteuse réponse d’Adam, interrogé par Dieu, après la faute originelle, au sujet du fruit qui a été dérobé sur l’arbre, mérite notre réflexion ! « Dieu lui dit : Mais qui t’a appris que tu étais nu, si ce n’est que tu as mangé du fruit de l’arbre dont je t’avais défendu de manger ? Et Adam répondit : La femme que vous m’avez donnée pour compagne m’a présenté du fruit de l’arbre et j’en ai mangé.1»

Quelle subtilité pour délicatement faire peser le poids du péché sur tout le monde sauf sur lui … Sur tout le monde et d’abord sur Dieu lui-même. En effet – lui rappelle-t-il – c’est « la femme que vous m’avez donnée pour compagne » qui « m’a présenté du fruit de l’arbre ». Dieu est presque rendu responsable du péché parce qu’Il a placé Eve aux côtés d’Adam. Dans un deuxième temps, le premier homme « charge » autant qu’il le peut sa malheureuse épouse en dénonçant son rôle qui a été de lui présenter le fruit. Ce n’est qu’en dernier lieu, en un mot, qu’il finit par dire qu’il en a mangé …

Lorsque nous relisons cette scène, nous songeons peut-être à de brefs épisodes de bêtises enfantines où les petits hommes sont tout aussi impitoyables pour se débiner de leurs torts en accentuant ceux des autres et paraître immaculés à nos yeux. Ils sont bien là de dignes enfants d’Adam et Eve et la Genèse n’a rien perdu de son actualité.

Mais il est plus facile, justement, d’en tirer les leçons pour les autres que pour soi-même. Les pères de famille doivent les premiers, et avec tout le sérieux requis, se demander si la peu glorieuse dérobade d’Adam devant Dieu n’est pas un peu la leur. Leur honnêteté est d’autant plus requise qu’ils doivent avoir retenu de leur catéchisme que -Adam a beau dire – son péché est en réalité plus grave que celui d’Eve parce que c’est lui le chef.

Il nous semble, aujourd’hui, que la fréquente dérobade des pères de famille trouve comme alibi la puissance du féminisme. L’homme ne trouverait plus sa place dans une société féminisée et, pour éviter d’envenimer la situation, s’aménagerait une petite vie de démissionnaire. Nous ne voulons certes pas dire que, dans nos familles traditionnelles, la chose se passe souvent de la sorte. En revanche, oui, les tendances à aller dans ce sens et les tentations de s’y enfoncer ne manquent pas.

Faut-il le dire ? Pas plus que les paroles d’Adam ne le dédouanèrent de sa responsabilité devant Dieu, ceux qui abdiquent de leur rôle de chef de famille ne trouveront pas non plus grâce devant Lui en se défaussant sur leurs épouses. En, effet, lorsque Dieu donne aux êtres humains une mission, Il leur procure les secours surnaturels dont ils ont besoin pour la mener avec abnégation et courage et Il veut qu’ils la remplissent.

 Il appartient au chef d’être vigilant – c’est le premier de ses devoirs – Mais à quoi cela servirait-il de voir si on n’agit pas ? Aussi, il lui faut ensuite indiquer la route, être celui qui a le pouvoir de direction ou de commandement. Ai-je prononcé des gros mots ? Non. Je sais bien que le mot « commandement » apparaît aujourd’hui connoté d’une façon très négative, surtout s’il est utilisé dans le cadre de la vie familiale … Et pourtant !

Si Adam avait été là, avec sa femme, pour qu’elle n’aille pas  traîner auprès de l’arbre, il aurait rempli son devoir de vigilance et si, la voyant sous le coup de la tentation, il lui avait commandé de rebrousser chemin avec lui, quelle reconnaissance elle lui en aurait eue !

Laissons de côté la dialectique des marxistes … Une épouse doit encourager son mari à remplir ses devoirs de vigilance et de commandement. Il y a bien plus à craindre d’un mari démissionnaire de ses devoirs que de celui qui, même avec ses limites et ses maladresses, s’efforce courageusement de tenir son rôle. Comme l’a très justement remarqué Pie XI « (…) C’est au détriment de la femme elle-même que tourne cette fausse liberté et cette égalité non naturelle avec son mari ; car si la femme descend de ce siège vraiment royal où elle a été élevée par l’Evangile dans l’intérieur des murs domestiques, elle sera bien vite réduite à l’ancienne servitude (sinon en apparence, du moins en réalité) et elle deviendra – ce qu’elle était chez les païens – un pur instrument de son mari 2»

 

Que l’épouse ne lorgne pas de conquérir ce gouvernement qui, dans la réalité, se passe de la manière la plus douce et la plus partagée entre un mari et une femme quand chacun comprend, accepte et aime la complémentarité conjugale. Et, en définitive, qui a le plus beau rôle ? Est-ce l’homme parce qu’il gouverne ? Ou n’est-ce pas plutôt la femme qui façonne le cœur de ceux qui gouvernent et gouverneront ?

 

Père Joseph

1 Gen. 3 ; 11-12

2 Pie XI in « Casti Connubii » du 31 XII 1930