Familles, relevez-vous !

« La recherche de la sainteté n’est pas libre. Dieu nous a élus en Jésus-Christ avant la constitution du monde pour que nous soyons des saints (Eph I,4). Aucune créature ne peut échapper à cette nécessité absolue pour parvenir au salut. Et Notre-Seigneur a institué l’Église, l’État et la famille, pour contribuer, chacun selon sa nature, à la sanctification des âmes par Jésus-Christ (…) pour les aider à se convertir à l’unique médecin : Jésus-Christ, Vérité et Sainteté. » (Mgr Lefebvre, Itinéraire spirituel)

Sanctification pour notre famille

Se sanctifier personnellement, sans autre préoccupation que son propre salut, sans souci du salut du prochain, est une fausse conception de la vie chrétienne. « Aimer Dieu et son prochain » sont deux commandements semblables. Dieu ne nous a pas donné la foi uniquement pour notre salut personnel, et cette croyance doit animer et éclairer toute notre vie.

C’est en se sanctifiant l’un l’autre, et l’un pour l’autre, que les jeunes époux se préparent à être de bons et saints parents pour leurs enfants, et cela se décide avant le mariage, dans leur choix mutuel. Que les fiancés parlent de ce qu’ils souhaitent pour la sainteté de leur future famille, qu’ils en soient bien d’accord. Soixante-quinze pour cent des enfants délinquants sont issus de familles désunies, la plupart du temps parce que leurs parents n’étaient pas accordés au moment de leur mariage.

Dans le mariage indissoluble, la mère est le cœur du foyer, pleine d’amour pour chacun. Le père nourrit sa famille et lui apporte une sécurité stable. La vie familiale est placée sous le signe de l’unité ; unité dans l’espoir et dans la crainte, unité dans la joie et dans les larmes ; unité dans la richesse et dans la misère… Bienheureuse union des époux !

L’homme et la femme se sont indissolublement unis par le « oui » qu’ils ont prononcé devant Dieu. Il dépend d’eux de prolonger cette promesse en travaillant à la sanctification de leur famille.

Le cercle intérieur

Amour et autorité unissent la famille en un tout ; entre parents et enfants se nouent les liens de la piété, de l’amour désintéressé et chargé de respect. Pour l’homme, la famille est un petit monde sous sa responsabilité ; la femme y réalise ses aspirations maternelles ; les enfants y trouvent amour, tendresse, protection, éducation. Peu à peu, l’esprit de famille met son empreinte sur le visage de chacun, les parents récoltent la puissance du rayonnement de leur amour. On ne se rend pas assez compte que, dans le cercle étroit et modeste de la famille, se cachent le bonheur et la paix, que là s’enfoncent les racines du peuple, de l’état, de l’humanité entière. Que la famille périsse, alors se déchaîneront les plus terribles révolutions.

La famille est le saint lieu où une génération transmet à l’autre le flambeau de la vie que Dieu a allumé à la vie éternelle. Elle ne dit jamais : « Après nous le déluge. » Ses racines s’enfoncent dans le passé, en même temps qu’elles poussent leurs prolongements vers l’avenir.

Familles, relevez-vous !

Aujourd’hui, la famille est en détresse et le monde ira de mal en pis tant qu’on ne la soignera pas. La foi véritable doit reprendre dans la famille, l’Église doit renaître dans les cœurs. Où l’amour règne, la peine n’existe pas ; la sueur du travail paraît moins amère. Il est nécessaire d’éduquer de bons et saints futurs pères de familles, et de vertueuses et courageuses futures mères de familles !

Il faut à la chrétienté des parents fiers de ce qu’ils sont, et courageux dans la transmission de cet héritage sans prix. Des mères qui prononcent le nom béni de « Jésus » à leurs petits, leur faisant envoyer un baiser en passant devant le crucifix. Des pères qui racontent les histoires merveilleuses de l’Ancien Testament, en faisant gronder la voix du Bon Dieu fâché par la désobéissance des hommes… Tout est leçon de catéchisme dans la vie quotidienne. L’enfant n’a qu’à observer ses parents pour apprendre, comprendre et imiter. Il voit comment ses  parents se comportent l’un envers l’autre, leur entraide, leurs conversations, la façon dont ils se parlent, les attentions qu’ils ont l’un pour l’autre… Tout cela imprègne les petits, qui imiteront très naturellement ce qu’ils voient chaque jour.

C’est d’abord à la maison que la vigilance maternelle, à partir de petites occasions répétées, apprend à son enfant la justice, la charité, la maîtrise de soi, le sens du devoir, le support des petites souffrances, des petites contrariétés ; toutes ces vertus nécessaires dans une vie humaine, mais que le christianisme auréole. La maman en dégage avec doigté et à propos le sens chrétien.

Il y a aussi la leçon des choses, devant une fleur, un insecte, la mer, le ciel. Leçon souriante où l’enfant prend conscience que Dieu n’est pas un étranger perdu dans le lointain, mais présent dans la vie de tous les jours.

Il y a l’éducation de l’âme et du cœur ; mais si l’on veut former « de grands hommes », les parents doivent aussi ouvrir des horizons à leurs enfants,

– en favorisant de bonnes amitiés. Pour cela, on expliquera à l’enfant comment choisir son ami, et il devra savoir dire pourquoi il l’aime : parce qu’il fait rire, rend service, entraîne au jeu, encourage à faire le bien, etc… Une bonne amitié d’enfance peut marquer une vie.

– en apprenant aussi à sentir le beau, ce qui vivifie l’âme, en visitant en famille de beaux musées, expositions, monuments, paysages qui font s’émerveiller tous ensemble, en une grande action de grâce.

Donner le goût de la lecture, d’abord par les belles images, par le ton amusant et vivant de celui qui raconte à voix haute, puis en offrant de bons livres d’aventures passionnantes, de faits historiques ou de beaux exemples qui fortifieront ses connaissances, sa réflexion, son esprit, son raisonnement. N’hésitons pas ensuite à discuter du dernier livre lu, ce que l’enfant en a pensé, pourquoi, ce qui lui a plu ou non en une vraie conversation d’idées.

Oui, vraiment, tout cela contribue au soutien des parents qui, parce que père et mère, ont le devoir d’opter pour la sainteté !

Combattre en vainqueurs

Les difficultés ne manquent pas (crise de l’Église, lois contre la vie, difficultés économiques et professionnelles…), le monde d’aujourd’hui, si hostile à nos croyances, nous fait goûter une éminente dignité, une humble et rayonnante sainteté, la ressemblance au Christ qui nous racheta par le labeur avant que ce ne fût par la Croix.

Mais nos combats et nos progrès sont aussi attachés aux grandes forces qui nous dépassent (la prière, les sacrements, la grâce, la communion des saints), ces trésors de l’Église qui sont notre secours ! Ayons du courage au bien, en collaborant à toutes ces influences salvatrices « Je puis tout en Celui qui me fortifie » : c’est là le courage chrétien !

Sophie de Lédinghen

 

Cantilène

Jacques Douai (1920, Douai – 2004, Paris)

Pour la Toussaint et le 2 novembre

  1. Si la vie frappe à ta porte,
    garde-toi de lui ouvrir ;
    elle semble joies offrir,
    Ce sont peines qu’elle apporte.
    Mais qui sait, peut-être,
    dois-tu choisir
    de la subir, comme tout être.
    Est-ce vivre, que fermer
    à tous les vents sa demeure ?
    Semblables toutes les heures,
    sauras-tu bien les aimer ?

 

  1. Si l’amour frappe à ta porte,
    vite ferme ta maison,
    le suivent la déraison
    et chagrins de toutes sortes.
    Mais qui sait, peut-être,
    sans le choisir,
    vas-tu souffrir, comme tout être ?
    L’amour par toute fissure,
    pénètre comme fumée ;
    Rien ne sert de t’enfermer
    contre ton cœur qui t’assure.
  2. Si la mort frappe à ta porte,
    ne tarde pas, ouvre-lui ;
    Hier, demain comme aujourd’hui,
    toujours elle est la plus forte.
    La pointe peut-être,
    tu dois subir,
    tu dois souffrir, comme tout être.
    En vois-tu toute belle
    puisqu’un jour tu dois mourir ;
    aime et vis sachant souffrir,
    Sera ta mort peu cruelle.

 

Actualités culturelles

  • Paris (France)

Peint en 1613 par Pierre-Paul Rubens, Le Christ en Croix s’était par la suite volatilisé, laissant supposer qu’il avait disparu. C’est en septembre 2024 que le commissaire-priseur Jean-Pierre Osenat, président de la maison de vente du même nom, a par hasard remis la main sur l’œuvre ; alors qu’il réalisait l’inventaire d’un hôtel particulier du VIe arrondissement à Paris, il a été frappé par cette peinture à l’huile de 105,5 cm sur 72,5 cm. Les propriétaires du tableau ne se doutaient de rien, mais les analyses techniques furent formelles ! « We have a new Rubens ! » s’exclamèrent les chercheurs du Rubenianum (Anvers), spécialistes des peintres flamands des XVIe et XVIIe siècles, et plus particulièrement de Rubens. Le chef d’œuvre aurait également appartenu au peintre William Bouguereau (1825-1905), lui-même auteur d’un célèbre Christ en Croix : Compassion ! (1897). C’est le 30 novembre prochain, à Fontainebleau, que la maison Osenat mettra aux enchères le tableau de Rubens, aujourd’hui estimé plus de 2 millions d’euros.

 

  • Cité du Vatican (Italie)

Le 26 juin dernier, la salle de Constantin du Vatican rouvrait ses portes au public après 10 ans de restauration, qui ont apporté de nouvelles connaissances sur les techniques picturales de Raphaël ; cette pièce est la plus vaste des 4 chambres de Raphaël peintes par l’artiste italien et ses élèves à partir de 1508 à la demande du pape Jules II (1503-1513). Raphaël avait alors 25 ans et ne put achever le chantier car il mourut en 1520 ; ses disciples achevèrent donc la dernière chambre à l’aide de ses dessins préparatoires. Quelques mois après la rénovation de ce chef-d’œuvre, c’est au tour de la chapelle Sixtine d’être rafraîchie : une opération d’entretien est en effet prévue pour la monumentale fresque du Jugement Dernier réalisée par Michel-Ange entre 1536 et 1541. Les 7 millions de visiteurs recensés chaque année causent en effet des dégradations en apportant humidité, poussière et CO2 ; l’intervention se rapproche plus d’une opération de maintenance (nettoyer, noter le niveau d’usure, etc.) que d’une véritable restauration. Il n’empêche que les 200 m2 de fresque et ses 391 personnages seront cachés derrière un gigantesque échafaudage à partir de janvier 2026 ; le chantier devrait être achevé avant la Semaine Sainte, c’est-à-dire en mars prochain.

 

  • Bayeux (France)

C’est en 2018 que le président Emmanuel Macron promettait pour la première fois un prêt de la Tapisserie de Bayeux au Royaume-Uni ; ce geste fortement symbolique venait également servir des causes diplomatiques, puisque l’objectif était de faire avancer la question de la frontière transManche. Représentant la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant, l’œuvre constitue un joyau inestimable pour les Anglais, ce qui explique plusieurs demandes de prêt de leur part (notamment en 1953 et 1966) ; sans succès. En 2020, la tapisserie n’avait toujours pas bougé et les Français déclarèrent qu’une restauration serait nécessaire étant donné l’état critique de l’œuvre ; ces tergiversations finirent par contrarier l’Angleterre.

Néanmoins, le 8 juillet 2025, Emmanuel Macron annonça que la célèbre tapisserie serait bel et bien prêtée au British Museum de Londres de septembre 2026 à juin 2027, le temps que le musée de Bayeux refasse peau neuve. Cette décision en a surpris plus d’un, les dernières études effectuées affirmant de façon catégorique que la broderie du XIe siècle était trop fragile pour être transportée ! Les manipulations et les vibrations du transport risquent effectivement d’endommager l’œuvre de façon irrémédiable. Une pétition lancée le 13 juillet dernier contre le projet récolta 73 754 signatures et plusieurs spécialistes (même anglais) se prononcèrent. La décision n’a pourtant pas été révoquée : le projet dépasse en effet le cadre culturel et constitue un véritable geste diplomatique de la part du président en vue de se rapprocher de l’Angleterre.

Dans un premier temps, la tapisserie a été extraite du musée de Bayeux afin que les travaux puissent y commencer ; elle n’avait pas quitté sa vitrine depuis 40 ans. L’opération de décrochage menée par une centaine de personnes a pris 7h15 : 350 kg d’étoffe répartis sur 70 mètres de long ne se déplacent pas si facilement !

 

 

 

Devons-nous être des héros ?

Chers grands-parents,

Dans l’imaginaire collectif, le héros est une personne qui a réalisé des actions extraordinaires, qui s’est engagé au-delà de ce que peut un homme normal, en général au péril de sa vie… Le héros est donc un surhomme !

Est-ce donc cela qui nous est demandé pour devenir des saints ?

Devons-nous réaliser des actions extraordinaires ? Devons-nous être prêts à donner notre vie ?

La réponse est oui ! Mais pour cela, il n’est pas nécessaire d’être un surhomme.

Quelle est donc la recette ?

 

« La fidélité aux petites choses, c’est ce qui nous garantit la fidélité aux grandes, c’est Notre Seigneur qui l’a dit » disait un saint évêque, et c’est bien cela qui nous est demandé.

Vivre en catholique n’est pas simple aujourd’hui car dans notre monde « anti-chrétien » où toutes les injonctions sont contraires au catholicisme, il n’est pas facile de rester fidèle dans toutes les choses de la vie. Être différent des autres : là réside certainement l’héroïsme du chrétien d’aujourd’hui !

Ne nous méprenons pas, cela n’est pas facile :

– Il est héroïque pour un étudiant de rester honnête alors que la tricherie est considérée comme une simple habileté…

– Il est héroïque pour un homme d’affaires d’agir toujours comme un enfant de Dieu alors que le profit est pour le monde le signe de sa compétence…

– Il est héroïque pour un avocat de ne jamais mentir alors que l’acquittement de son client est pour le monde, la seule mesure de son talent…

– Il est héroïque pour une jeune fille de s’habiller en chrétienne alors que l’indécence est considérée comme une preuve d’ouverture d’esprit…

– Il est héroïque pour des parents de gouverner leur famille selon les principes catholiques alors que le respect de la liberté de l’individu est l’alpha et l’oméga de l’éducation moderne, et que seule compte la « réussite ».

Et quel est le point commun entre tous ces héroïsmes ? C’est tout simplement la pratique des vertus chrétiennes à leur niveau : à l’artisan, il est demandé de faire de « la belle ouvrage » correspondant aux besoins et désirs du client. Au patron, il est demandé de gouverner son entreprise selon les principes de la société chrétienne. A l’avocat de défendre son client avec habileté et honnêteté… Rien de plus !

Sainte Thérèse n’est pas montée en haut de l’Everest ! Elle a simplement vécu sa vocation de carmélite le plus exactement possible dans les règles de son ordre. Elle est la « plus grande sainte des temps modernes » et patronne des missions alors qu’elle ne s’est appliquée qu’à toujours « trouver merveilleuse » la part que Jésus lui donnait : prête à tout, prête à donner sa vie pour Dieu dans les épreuves de sa vie…

L’héroïsme réside donc dans un acharnement quotidien à faire notre devoir : chaque jour renouveler nos promesses de fidélité et les résolutions qui y conduisent, et employer nos talents généreusement pour la gloire de Dieu.

Si nous avons reçu un talent, faisons-le fructifier par une simple vie chrétienne, si nous en avons reçu deux, engageons-nous plus dans des engagements pour la foi, si nous en avons reçu cinq, rayonnons par nos actions, peut-être spectaculaires, mais surtout proportionnées à ce que nous avons reçu.

Combien la petite sainte de Lisieux avait-elle reçu de talents ? Un, deux, cinq ? Cela dépend certainement des domaines. Elle a été l’héroïne de la foi que nous vénérons !

Pour nous, grands-parents, notre rôle résidera donc principalement dans notre engagement à la mesure de nos moyens, dans l’exactitude dans la pratique de notre devoir quotidien et, quand la situation le permet, dans la prédication des vertus chrétiennes…

Prions sainte Anne pour que nos familles soient le creuset de cet héroïsme quotidien que nous demande notre Père du Ciel.

Des grands-parents

 

 

L’Evangile : LE guide pratique de la communication réelle

La belle vertu de charité chrétienne qui provient de l’union de l’âme à Dieu, nous demande d’aimer notre prochain. Et quelle meilleure preuve d’amour que de lui montrer le chemin du ciel ?

Si cette charité prend ses racines dans la contemplation de l’exemple de Notre-Seigneur et dans la méditation des mystères du Rosaire, elle nécessite que nous sachions communiquer avec ceux que Dieu a mis sur notre chemin. Or en ces temps postmodernes, la communication authentiquement relationnelle est en grand péril ! Bientôt, il ne sera plus possible de communiquer avec son prochain sans l’intermédiaire des outils numériques et de ses multiples applications magiques. « Tous connectés », voilà la promesse déclinée sous tous ses angles par la doxa médiatique. Connectés ? Certes, mais de plus en plus en grande difficulté de faire le « premier pas », de demander service, d’écouter, de poser des questions, de préciser et d’affirmer naturellement son opinion. Comment alors être capable de faire de l’apostolat ?

Les outils et moyens dits « de communication », au nombre desquels le portable occupe une place prépondérante dans nos vies, élèvent une muraille virtuelle dans nos relations. Tant et si bien que la qualité du dialogue se dégrade à grande vitesse. Chacun pour soi : l’égocentrisme s’érige en mode de vie. Une forme de malaise exponentiel, caractérisé par une timidité sociale et un besoin phobique de s’enfermer dans son monde virtuel, se développe. Toutes ces prothèses communicatives nuisent de plus en plus aux contacts directs, francs et attentifs à l’autre que l’on se doit d’entretenir avec nos semblables, en respectant l’ordre requis du plus proche au plus lointain : d’abord dans nos foyers, auprès de nos familles et ensuite vers les autres.

La belle vertu de la charité chrétienne qui se prouve dans les petits et grands gestes quotidiens de la communication, risque d’y perdre sa noblesse. Elle s’émousse de jour en jour, et sans elle la vérité ne peut croître et embellir.

Jésus nous montre au travers de ses nombreuses rencontres comment s’y prendre, comment entrer simplement en relation, comment pratiquer le sourire intérieur qui se lit sur le visage et met en confiance, comment demander service, comment considérer une personne, quelle qu’elle soit. Il suffit de lire et de relire les Evangiles sous le prisme de la communication pour s’exercer à imiter celui qui se nomme en toute simplicité : le Fils de l’homme, lui le Fils de Dieu !

Le Christ, qui se présente toujours et encore plus aujourd’hui comme un salutaire signe de contradiction, nous a donné l’exemple des gestes de communication remplis de charité. Ses « gestes » sont précieux parce qu’intemporels, efficaces, et nous donnent la pleine mesure de l’authentique charité à laquelle nous sommes appelés. Imités avec foi, résolution et simplicité tout catholique pratiquant peut et doit s’en emparer au quotidien.

Ces huit « gestes » de la communication relationnelle de Notre-Seigneur sont à imiter sans restriction autant dans notre vie familiale et professionnelle que dans une perspective d’apostolat catholique.

A son exemple, considérons d’abord, dans notre manière de communiquer que toute personne est appelée au salut éternel.

Nous nous proposons de présenter ces huit gestes au cours des prochains numéros. Ils commencent tous par le verbe « oser » (expression chère à Charles de Foucauld, saint et grand missionnaire en pays Musulman).                                   « OSER » :                   

1. Faire le premier pas

2. Demander service

3. Donner de son temps

4. Ecouter sans juger

5. Questionner

6. Affirmer

7. Déléguer

8. S’effacer pour passer la flamme

Devenons, osons le mot, des apôtres soucieux de la cohérence entre nos modes de vie et notre foi chrétienne.

« Signes de contradiction » nous sommes, signes de contradiction nous demeurons ! Nos temps sont impitoyables, mais aussi merveilleux car ils nous « obligent » sinon à la sainteté du moins à la « virtuosité » !

1er geste : Oser faire le premier pas !

Aller vers autrui, faire le premier pas, ne pas attendre que l’on vienne vers soi.

Quand, à l’âge de douze ans, Notre-Seigneur se dirige vers les grands prêtres du temple, il fait en toute simplicité le premier pas en leur direction pour les interroger avec une énergie et une audace qui démontrent à quel point Il est impatient d’aller au contact des âmes. Pendant toute sa vie publique Il ne cesse d’aller au-devant des enfants, des femmes et des hommes de toutes conditions : hérétiques, pharisiens, pauvres et riches, malades et indigents, adversaires et grands pécheurs !

On ne saurait trop imiter Jésus dans ses initiatives renouvelées et audacieuses du « premier pas ». Acte de communication relationnelle par excellence, qui revient à aller avec autant de simplicité que de volonté au-devant d’autrui. Ne nous y trompons pas, faire le premier pas est un acte de pure charité, si rare d’ailleurs, qu’il est souvent apprécié à sa juste mesure. Ajoutons que ce beau geste peut être à l’origine d’une conversion aussi belle qu’inattendue.

« Faire le premier pas » c’est aussi, à l’instar de Jésus, savoir se retirer du monde, en monastère par exemple ou dans la nature, pour redonner à son âme le temps de mieux se réunir à elle-même et à son Créateur. S’offrir le silence, comme Jésus qui régulièrement s’échappait du bruit et de la foule, pour se remplir de forces spirituelles.

L’exemple de Notre-Seigneur

Les Evangiles nous racontent à longueur de pages les multiples actes de « premier pas » de Jésus, depuis sa visite aux dignitaires du temple à l’âge de douze ans, jusqu’à sa rencontre avec Jean-Baptiste mais aussi le recrutement de ses apôtres un par un, jusqu’à ce moment douloureux où il est obligé de présenter ses plaies à saint Thomas. C’est toujours Jésus qui vient au-devant de nous et rarement l’inverse. Il est exaltant de le prier pour s’exercer à vraiment communiquer comme lui !

Jésus n’a pas cessé dans sa vie publique de donner l’exemple en montrant de l’intérêt et de l’amitié aux plus humbles, aux malades, aux pêcheurs et même à ses adversaires. La scène remarquable de sa rencontre avec la Samaritaine1, constitue de ce point de vue un précieux moment relationnel à observer. Ce jour-là, il faisait encore plus chaud que d’habitude, les journées et les longues soirées de prédication étaient harassantes. Jésus voit une jeune femme à la peine, près d’un puits où elle tire de l’eau. Sans l’ombre d’une hésitation, sous le prétexte d’une soif brûlante, il engage une longue causerie avec elle. Au grand dam des apôtres quelque peu étonnés par cette proximité avec une femme, de surcroît schismatique. Mais Jésus sait pourquoi il fait le premier pas en s’adressant à la Samaritaine. Ses simples mots de circonstance, « J’ai soif » aident à « briser la glace ». On ne peut s’empêcher de penser qu’ils font écho à un autre moment tragique de sa vie, douloureux entre tous, quand il criera sur la croix : « J’ai soif ! ». Oui, si Jésus a vraiment soif, c’est d’abord et surtout de convertir nos âmes appelées à l’accompagner au salut éternel… Quel plus beau motif pour aller à la rencontre d’autrui ? Exerçons-nous à notre tour, à être dans les mêmes dispositions humbles de cœur que celles de Jésus pour favoriser à temps et à contretemps une nouvelle connaissance. Se désaltérer est un prétexte pour Jésus, c’est le moyen efficace pour aborder la Samaritaine. N’en doutons pas cependant, si Jésus a vraiment soif, ce qui l’intéresse au premier chef, c’est le salut de l’âme de la Samaritaine. Enrichissante leçon de charité que s’approcher d’autrui pour lui-même, en dépit de tout intérêt égoïste. La communication du « premier pas » est toute entière inscrite dans cet acte de communication de Jésus avec la Samaritaine.                     

Examinons-nous

Repérer et imiter les premiers pas de Jésus constitue donc une excellente méditation-action. Comparons, et examinons nos propres comportements relationnels de premiers pas. Allons-nous spontanément vers autrui ? Proches ou plus éloignés…Qu’il s’agisse des membres de nos familles, ou bien des collègues de notre travail, ou encore des personnes que l’on ne connaît pas et qui semblent isolées. Quelle attitude avons-nous à l’occasion des sorties des messes, par exemple ? Posons-nous sincèrement la question : faisons-nous l’effort de nous libérer de notre petit cercle de connaissances habituelles ? Faisons-nous l’effort d’aller vers l’inconnu, vers le ou la fidèle de passage qui apprécierait un simple geste d’accueil ? A l’exact inverse, attendons-nous toujours que les autres viennent à notre rencontre ? Est-il inscrit sur notre visage : « je suis ailleurs, ne pas me déranger ».

Posons-nous, aussi sincèrement que possible, la question : telle personne, telle rencontre, tel étranger sur ma route, en quoi puis-je contribuer à l’aider ? Comment l’aborder et lui offrir un sourire. Puis-je lui donner un moment d’intérêt ?  Qu’est-ce que Jésus ferait à ma place : un simple regard, (parfois cela suffit…quand on rencontre un mendiant…), une attention particulière, in signe amical, un service à lui rendre, un mot de bienvenue à la sortie de la messe auprès d’une personne inconnue par exemple ?

En pratique, que faire ?

Allons plus loin, aux côtés de la Samaritaine dont l’âme est tourmentée, comme parfois la nôtre. Donnons la préférence aux relations directes et libérons-nous de la tentation irrésistible des écrans. Dans la « vraie vie », les relations humaines impliquent effort, générosité, réciprocité parfois, et même souvent, oubli de soi. A l’image exacte de Jésus qui vient dans notre monde « non pour être servi mais pour servir ! » 

Ouvrons notre âme, rendons-la disponible à la rencontre de nouvelles personnes, qui ont des opinions différentes, réveillons notre « intelligence du cœur » afin que comme celle de Jésus, elle soit attentive à l’autre, libérée de toute fausse pudeur et de tout « respect humain ».

Faire « le premier pas », c’est se libérer de ses préjugés, laisser pour un temps son cadre de références, privilégier l’attention portée à la personne plus qu’à ses a priori ! C’est d’ailleurs, souvent dans de telles circonstances que l’on fait les plus belles et les plus improbables rencontres suscitées par l’Esprit-Saint et les anges gardiens. Laissons-nous guider par l’Esprit-Saint, « expert en communication relationnelle » ; invoquons son aide pour être guidé à bon escient sur le chemin de nos rencontres.

Avec qui communiquer ? Tel collègue, telle personne isolée, tel enfant, tel étranger ? Oui, dans cette perspective de « faire le premier pas », n’ayons pas de restriction… Libérons-nous de l’esprit utilitariste qui guide le plus souvent notre univers relationnel. Ayons cette saine curiosité de faire connaissance avec la singularité de chacun. Cherchons à être intéressés plutôt qu’intéressants. On ne saurait trop imiter Jésus dans ce geste de communication du « premier pas » au passage, singulièrement efficace, si l’on en juge l’effet produit sur la Samaritaine qui deviendra une magnifique ambassadrice : « allez le voir ! » ne cessera-t-elle de dire à tout le monde.

Nous y insistons beaucoup parce qu’il s’installe chez nos contemporains une véritable timidité, si ce n’est une aversion phobique à la relation humaine spontanée et simple. Tant que la personne ne nous est pas présentée, nous restons indifférents et froids. A chacun de s’examiner au quotidien et de réagir, de se faire violence afin de privilégier une communication plus énergique et, pour tout dire, plus missionnaire. « Car si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains ne le font-ils pas aussi ? Et si vous saluez vos frères seulement, que faites-vous de surcroît ? Les païens ne le font-ils pas aussi ?2 »       C’est un vrai combat à mener contre sa timidité et sa fierté, parfois mal placée d’autant plus que nos outils dits de « communication » nous éloignent habituellement des relations de proximité. C’est, d’une certaine façon, un combat de charité !

Pour aller plus loin et progresser

Tout d’abord, accordons une attention particulière à nos regards qui se doivent d’être francs et empathiques autant que la situation le permet. Abstenons-nous de ces attitudes froides et neutres, des regards en biais sans expression. Ensuite, travaillons notre voix, notre élocution et spécialement notre ton qui exprime beaucoup à lui seul. Souvenons-nous de Jésus dont la voix s’est fait souvent entendre en de multiples occasions.

Deux circonstances particulières démontrent qu’avec exactement les mêmes mots, le sens change diamétralement selon le ton employé : Autant le « C’est moi ! » apaisant adressé aux apôtres en pleine tempête, les rassure, autant la soldatesque romaine s’effraie, jusqu’à tomber à terre, en entendant la réponse de Jésus au jardin des oliviers prononçant sur un ton impérial ces mêmes mots : « C’est moi ».

Les mots perdent leur sens profond, si le ton ne les accompagne pas. La tendance générale de notre langue Française nous habitue à parler sur un ton plutôt monocorde. Cela se vérifie, en particulier, chez beaucoup de conférenciers. Il convient d’être plus attentif à l’intonation dans nos exposés. L’essentiel n’est pas de dire les choses, mais de se faire comprendre ! Imagine-t-on Jésus s’adressant à ses interlocuteurs ou aux foules sans y mettre le ton ?

Enfin en rapport avec ce geste d’une  communication généreuse dite de « premier pas », rien ne remplace la magie du sourire vrai et engageant. Expression certainement habituelle du visage de Jésus, apprécié tant des enfants que des personnes qui le croisent, de Marie-Madeleine à Zachée, en passant par tous les miséreux à qui il donne espoir de guérison, dès qu’ils croisent son visage apaisant.

Douce et rude pénitence que de s’exercer tous les jours à cette charité quelle que soit notre humeur. Notons-le, ces attitudes « non verbales » constituent à elles seules 70% de l’impact de la communication relationnelle. Ne nous en privons surtout pas.

Mais comment faire pour gagner du talent en agilité non verbale ?

Pas d’autres solutions que de s’exercer, et de s’exercer encore en osant, par exemple, prendre la parole en public, aussi souvent que possible. Certes, la communication est un effort, il faut s’en convaincre, un effort de tous les instants, surtout dans les situations douloureuses. Songeons à Jésus qui, jusque sur la croix, communique encore, avec sa mère et Jean, avec saint Dismas, le bon larron et enfin avec son Père.

Eviter les rencontres, fuir les contacts, avoir peur des autres, n’est pas une solution. Il faut se faire violence. La communication ne s’apprend pas dans les livres ! Pour stimuler sa confiance en soi il faut une pincée d’humilité et se jeter à l’eau. Qu’il s’agisse d’oser faire le « premier pas » ou de prendre la parole en public, la confiance en soi se gagne petit à petit et n’est d’ailleurs jamais définitivement acquise. L’illustre actrice Sarah Bernard, ne disait-elle pas que le trac venait avec le talent ? Et bien-sûr, méfions-nous de l’emprise quasi-hypnotique des écrans qui nous font perdre nos capacités naturelles à communiquer.

« Il est impossible de plaire à Dieu si on manque de charité pour un seul homme3. »

Frère Charles de Foucauld (cordigère capucin)

RESOLUTION PRATIQUE : Identifier les personnes auprès desquelles on se détermine à faire le premier pas dans un objectif d’apostolat. Ex : un membre de la famille dont on se préoccupe peu, une personne rencontrée à la sortie de la messe, un voisin à qui on pourra distribuer la médaille miraculeuse.

ENGAGEMENT SPIRITUEL : une dizaine d’AVE pour demander le secours de MARIE : 1er mystère Joyeux L’annonciation, OSER « faire le premier pas » 

Dieu par l’intermédiaire de l’ange va à la rencontre de Marie pour lui annoncer qu’elle serait la mère du Sauveur.   

1 Jean 4, 5- 42   

2 Matthieu 5, 46-47

3 Charles de Foucauld