Reine de l’Eglise

Rome, la Rome qui se confond avec l’Eglise, celle qui a été fondée par Notre-Seigneur, est comme une maison ou vivent les enfants, autour d’une mère dont le cœur veille sur chacun et met tout en ordre chez elle.

Cette mère, c’est Notre-Dame, qui garde sa maison, l’orne, et la rend accueillante, comme la femme le fait pour son foyer dont elle est la reine, car elle est

Reine de l’Eglise.

 Au pied de la croix, Notre-Dame était le seul réceptacle de foi qui restait.

Malgré sa profonde douleur, elle offrait, à cause de cette douleur même, toutes les âmes à son Fils mourant, et intercédait pour tous les pécheurs, afin qu’ils trouvent ou retrouvent, à travers tous les siècles, le chemin de la Maison.

Reine de l’Eglise.

Le jour de le Pentecôte, épouse du Saint-Esprit depuis l’Incarnation, elle est là quand le souffle puissant enflamme les apôtres et se répand sur tous ceux qui le reçoivent avec bonne volonté.

Elle participe à ce grand mouvement de conversion qui ne cessera jamais et que sa prière présente sans cesse au Père.

Reine de l’Eglise.

Comme une mère qui garde toujours sa porte ouverte, son cœur attentif, et devine celui de son enfant, elle offre au Père nos pauvres prières et nos actes maladroits, bien souvent trop pleins de nous-mêmes. Elle sait présenter nos demandes sous leur meilleur jour et ne cesse de le faire.

Elle protège ses enfants qui forment l’Eglise, celle des rachetés, celle de ceux qui vont y trouver refuge, elle veille sur cette Rome éternelle, fondée par son Fils et qui ne périra pas.

Reine de l’Eglise.

N’est-elle pas forte comme une armée ordonnée et rangée en bataille, celle qui a écrasé la tête du serpent ? Alors comment ne pas mettre toute notre confiance en elle quand l’Eglise semble vaciller comme la barque dans la tempête, quand les flots des erreurs ou des scandales l’assaillent ?

Notre-Dame garde le cap de l’Eglise, dont elle est la gardienne, elle ne cesse d’obtenir des grâces pour soutenir et éclairer les âmes. Elle ne cesse de répondre à nos supplications pour déjouer les pièges de l’Ennemi.

Reine de l’Eglise.

Sans elle, pas de fidélité au trésor ancestral transmis à travers les siècles, malgré toutes les vicissitudes, les persécutions, les hérésies,

Sans elle, nous ne pouvons rester fidèles à Rome.

Avec elle nous avançons, avec elle nous persévérons, avec elle nous gardons le cœur serein et joyeux, avec elle nous sommes des témoins.

Reine de l’Eglise.

Jeanne de Thuringe

 

Mousse à la framboise

Ingrédients pour environ 10 petites mousses :

– 300 g de crème liquide bien froide

– 250 g de framboises

– 100 g de sucre

– 3 feuilles de gélatine de 2g

 

Préparation :

– Faire ramollir la gélatine dans un bol d’eau froide. Mixer les framboises dans un saladier pour obtenir une purée puis passer celle-ci dans une passoire afin d’en extraire les petits grains. Faire ensuite tiédir cette purée dans une casserole afin d’y faire bien fondre la gélatine préalablement pressée. Puis ajouter le sucre. Bien mélanger.

– Dans un autre saladier, battre la crème en chantilly. Arrêter de battre dès que la crème épaissit sinon elle se transformera en beurre. Mélanger progressivement avec une spatule la crème fouettée avec la purée de framboises.

– Verser dans les moules. Mettre au frais au moins 4 heures. Démouler avant de servir.

 

Conseils et astuces :

– Dessert léger accompagné de petits gâteaux.

– En saison, on peut remplacer les framboises par des fraises.

– Dessert qui se fait bien la veille.

– Possibilité de le congeler mais dans ce cas, ne pas oublier de le mettre au frigo environ une heure avant de servir.

 

Millefeuille breton

Ingrédients pour 8 personnes :

– 8 galettes de sarrasin (encore meilleur fait maison)

– 14 tranches de saumon fumé

– 250 g de fromage frais aux herbes

– jus d’1/2 citron

– ciboulette

– sel, poivre

 

Préparation :

– Dans un bol, mélanger le fromage, le citron et assaisonner à votre convenance. Ciseler la ciboulette à réserver. Sur une grande planche à découper, déposer une galette de sarrasin et la tartiner de fromage frais. Disposer 2 tranches de saumon fumé puis parsemer d’un peu de ciboulette ciselée ; recouvrir d’une galette de sarrasin, puis répéter l’opération jusqu’à obtenir 8 couches.

– Couper soigneusement en morceaux à l’aide d’un emporte-pièce ou d’un couteau bien aiguisé puis piquer chaque petite mille-feuille avec un pic en bois.

– Réserver au frais jusqu’au moment de servir.

 

Conseils et astuces :

– Très bien pour l’apéritif.

– C’est tout aussi bien en faisant moins d’étages.

 

Le sédévacantisme

Est-il pensable qu’un successeur de Pierre puisse œuvrer à la destruction de l’Église ? Les sermons, les discours, les interviews et les vidéos de François accroissaient la tentation du sédévacantisme. Mais c’est dès la clôture du concile Vatican II que plusieurs catholiques ont adopté cette position. Si certains papes postconciliaires ont pu paraître plus conservateurs, ils appartenaient néanmoins à la même école et ils avaient le même idéal, un idéal qui n’est pas celui de l’Église catholique.

Oui, c’est une formidable tentation ! Quelle libération de se reporter en esprit à l’époque de saint Pie X ou de Pie XII et de déclarer que l’homme en blanc qui vit aujourd’hui à Rome n’est qu’un imposteur ! L’Église immaculée n’aurait rien à voir avec les bouleversements qui ébranlent les âmes !

Mais le bon Dieu permet-il que nous nous engagions dans une telle voie ? N’est-il pas dangereux de résoudre la crise de l’Église de cette manière (car pour les sédévacantistes il n’y a pas de crise de l’Église puisque les papes conciliaires n’appartiennent pas à l’Église) ? Qui nous dira où se trouve le vrai pape le jour où il plaira à Dieu de faire cesser la crise ? Il est vrai que nous devons nous en remettre à la Providence divine mais encore faut-il être capable de se soumettre à ses mystérieuses dispositions. Il y a des déclarations préliminaires qui rendent les problèmes insolubles. Cela est vrai en mathématiques comme en politique, dans la famille comme dans l’Église. Dire que le pape n’est pas pape, c’est s’empêcher de regarder vers Rome dans l’espoir de trouver une solution aux problèmes qui affligent l’Église.

Le sédevacantisme, une opinion

Tout d’abord, il faut savoir que la possibilité qu’un pape perde le souverain pontificat est une opinion, c’est-à-dire une vérité que les catholiques ne sont pas tenus de professer. Les théologiens ne sont pas d’accord sur cette difficile question. Un pape peut-il cesser d’être pape autrement que par une abdication volontaire ? Même ceux qui admettent cette éventualité ne sont pas d’accord quant aux conditions qu’elle doit remplir. Faut-il une déclaration de « l’Église » ? Quelle est cette « Église » qui n’a plus de tête ? Les cardinaux, qui ont élu le pape, doivent-ils intervenir pour cette déposition ? Faut-il un concile œcuménique ? Mais qui convoquera celui-ci ? Or la Providence ne peut pas laisser les âmes dans le flou d’autant que la possession du souverain pontificat par tel ou tel homme est un fait dogmatique, c’est-à-dire qu’il est lié à la foi (par exemple, si Pie XII n’était pas pape, alors l’Assomption n’est pas un dogme).

Comment appliquer ces théories à la crise que connaît l’Église depuis le concile Vatican II ?

Beaucoup de sédévacantistes invoquent l’opinion du cardinal Bellarmin à savoir que s’il arrivait que le pape tombât dans l’hérésie notoire, il perdrait ipso facto le pontificat (c’est en fait plutôt sa deuxième opinion, car sa première était que jamais le Bon Dieu ne permettrait une telle épreuve pour l’Église). Mais il est évident que ce grand théologien ne pensait pas à la débâcle universelle que nous constatons. Il est vrai que les réunions œcuméniques, les discours (publiés dans l’Osservatore Romano) qui réaffirment sans cesse la liberté religieuse et l’œcuménisme (en opposition avec le magistère constant de l’Église) sont notoires. Pourtant le langage reste flou, difficilement saisissable. Les modernistes sont des hérétiques d’autant plus redoutables qu’ils le sont moins ouvertement. Ils ne nient pas, par exemple, qu’il n’y ait pas de salut hors de l’Église. Ils le diront même, mais après avoir affirmé que l’Église ne fait que subsister dans l’Église du Christ… Ainsi les réactions face au nouveau magistère peuvent être très différentes même de la part de chrétiens sérieux qui veulent garder la foi. Les sédévacantistes ne peuvent pas prétendre être les seuls à vouloir rester catholiques ! Peut-on donc parler de « péché d’hérésie » de la part des papes conciliaires ? Or la théorie de saint Robert Bellarmin (ou du cardinal Billot, son émule) est tout entière fondée sur cette supposition. À cause de cela, elle ne semble pas s’appliquer à la situation actuelle de l’Église.

Le « UNA CUM »

Et si même, malgré tout, nous pensions pouvoir utiliser la conclusion du cardinal Bellarmin, il n’en demeurerait pas moins qu’elle ne serait qu’une simple opinion, alors que les sédévacantistes qui la suivent en font une vérité dogmatique, jusqu’à refuser d’assister à la messe d’un prêtre qui ne la professerait pas. Le prêtre ne dit-il pas dans le canon de la messe qu’il est « en communion » avec le pape et tout son enseignement ? La traduction (que l’on trouve dans n’importe quel dictionnaire de latin) de l’expression « una cum » n’est certainement pas « en communion avec ». Le Gaffiot propose « ensemble », « de compagnie », « en même temps ». À la messe, on prie pour l’Église ainsi que pour le pape, l’évêque diocésain, (le Roi) et tous les gardiens de l’orthodoxie et de la foi catholique et apostolique. Et puis, même si cette expression signifiait « en communion avec », il est évident que par nature une telle prière exclurait l’hérésie. On est en communion avec le pape dans la mesure seulement où il est, par fonction, le garant de l’unité de l’Église.

Dernier argument des sédévacantistes : le pape Paul IV dans sa constitution apostolique Cum ex apostolatus n’a-t-il pas statué que si le Souverain Pontife avait dévié de la foi avant son élection, son élévation serait nulle, non avenue, sans valeur ? Mais ce texte a été abrogé par le pape saint Pie X dans sa constitution Vacante sede apostolica du 25 décembre 1904, ainsi que par le code de droit canonique promulgué en 1917. Par ailleurs le code précise que l’élection du Souverain Pontife n’est réglée que par la constitution de saint Pie X. Pie XII en 1945 reprend les mêmes dispositions.

En adoptant la position sédévacantiste, est-on plus assuré d’éviter l’hérésie ?

En niant l’existence d’un pape et d’une hiérarchie, les sédévacantistes sont acculés à affirmer que l’Église est une réalité invisible qui ne subsiste que dans le cœur des fidèles. Or la visibilité de l’Église est une vérité de foi implicitement définie par le concile Vatican I (constitution Dei Filius au chapitre 3) et constamment reprise par le magistère ordinaire de l’Église. Voici par exemple ce qu’affirmait le pape Pie XII dans son encyclique Mystici Corporis : « Ce n’est pas assez de dire : un et indivisible ; il doit encore être concret et perceptible aux sens, comme l’affirme Notre Prédécesseur d’heureuse mémoire, Léon XIII, dans sa Lettre encyclique Satis cognitum : c’est parce qu’elle est un corps que l’Église est visible à nos regards. » Il est étonnant que ces catholiques qui hypertrophient la notion d’infaillibilité pontificale et de magistère ordinaire, jusqu’à réduire la vie catholique à une obéissance aveugle au pape (comme le font les conservateurs), en arrivent à nier une vérité aussi fondamentale ! Notre-Seigneur a fondé une société que tous peuvent et doivent reconnaître.

Une épreuve douloureuse

Dans les épreuves douloureuses que traverse l’Église, on connaît la position que Monseigneur Lefebvre a adoptée. Dans son sermon des ordinations de 1982, il compare l’Église à Notre-Seigneur, vrai Dieu et vrai homme. Le Christ a pu souffrir la Passion sans cesser de soutenir l’univers dans l’existence. Jamais les apôtres n’auraient pu imaginer que les humiliations de Dieu lui-même auraient pu aller aussi loin. De même l’Église est sainte, mais elle est composée de pécheurs. La liturgie nous fait implorer la miséricorde divine afin qu’elle veuille bien « purifier l’Église » (cf. oraison du quinzième dimanche après la Pentecôte). Aujourd’hui nous devons bien constater que, par une disposition mystérieuse de la Providence, les papes ont laissé entrer l’hérésie, et l’ont favorisée même, dans l’Église. C’est un fait que nous ne pouvons nier. Accepter les nouveautés de Vatican II et de la réforme liturgique, ce serait nous mettre en opposition, que nous le voulions ou non, au magistère constant de l’Église. Alors pourquoi le bon Dieu permet-il une telle épreuve si ce n’est pour accroître notre amour de l’Église telle qu’elle est et non pas telle que nous voudrions qu’elle soit ?

Professer la foi en une société visible et indéfectible instituée par le Christ Jésus

Chrétiens du début du XXIe siècle, nous serons jugés en particulier sur notre amour de l’Église. Certains s’accommodent d’une Église libérale dont la prédication est imprégnée de l’esprit du monde. D’autres sont persuadés que la crise que traverse l’Église est irréversible et que jamais les papes ne prêcheront plus le règne social du Christ. À nous de professer la foi en une société visible et indéfectible instituée par le Christ Jésus pour établir son règne dans les cœurs et sur toutes les institutions, au risque de passer pour plus papistes que le pape !

Mais notre amour de l’Église nous oblige-t-il à nier absolument la vacance du siège de Pierre ? Dans la mesure où toute la hiérarchie actuelle de l’Église a été établie par des papes conciliaires, il semble que ce soit le cas. Pourtant il faut bien remarquer que Monseigneur Lefebvre tenait une position plus nuancée : « Cela ne veut pas dire pour autant que je sois absolument certain d’avoir raison dans la position que je prends. Je la prends surtout d’une manière, je dirais, prudentielle ; prudence que j’espère être la sagesse de Dieu, que j’espère être le don de conseil, enfin prudence surnaturelle. C’est plutôt sur ce domaine-là que je me place, je dirais, plus peut-être que sur le domaine purement théologique et purement théorique. […] Nous nous trouvons dans une situation pratique, réelle. Alors le problème se pose pour nous, bien sûr. Comment se peut-il, étant donné les promesses que Notre-Seigneur Jésus-Christ a faites d’assistance à son Vicaire sur la terre, comment peut-il se faire qu’en même temps celui qui est Vicaire puisse, par lui-même ou par d’autres, rompre la foi des fidèles ? Comment est-ce possible ? C’est là notre grand problème. » (le 5 octobre 1978)

Monseigneur Lefebvre n’affirmait donc pas être certain que le pape le fût en réalité. En revanche, dans la même conférence, il rejetait avec force les erreurs du concile Vatican II que certains admettent par fausse obéissance. « Alors certains insistent donc sur le caractère d’assistance au pape, et donc il ne peut pas se tromper, et donc il faut obéir, et donc nous n’avons pas le droit, en aucune manière, de discuter de ce que fait le pape, etc. Ça, je dirais, c’est une obéissance aveugle qui ne me paraît pas non plus conforme à la prudence. Donc nous constatons qu’il y a des choses qui nous sont enseignées et qui nous sont maintenant diffusées par l’Église, qui ne sont pas conformes à ce que la Tradition nous enseigne, à ce que les autres papes nous ont enseigné. Donc il y a là une situation de fait devant laquelle nous nous trouvons. Quand on met en parallèle les textes de la liberté religieuse tels qu’ils sont dits dans le Concile et les textes sur la liberté religieuse des papes Pie IX, Léon XIII, Grégoire XVI, enfin tous les papes précédents, c’est le contraire. Exactement le contraire ! »

Sauver son âme

La question que le Bon Dieu nous posera au jour de notre jugement ne portera pas sur des opinions théologiques. L’important est de sauver son âme. En quoi le fait d’affirmer qu’il n’y a plus de pape rendrait le salut éternel plus facile ? « Cela n’a pas une telle influence sur notre conduite pratique. Pourquoi ? Parce que nous rejetons fermement, courageusement, tout ce qui est contre la foi. Il n’y a rien à faire. Je dirais même sans savoir d’où ça vient, sans savoir qui est le coupable, en laissant à Dieu le soin de juger le coupable, si c’est celui-ci, si c’est celui-là. »

Dans une lettre au père Guérard des Lauriers, Monseigneur Lefebvre avançait le même argument, digne d’un vrai pasteur d’âmes : « Si vous avez l’évidence de la déchéance juridique du pape Paul VI, je comprends votre logique subséquente. Mais personnellement j’ai un doute sérieux et non une évidence absolue. Dans l’attitude pratique, ce n’est pas l’inexistence du pape qui fonde ma conduite, mais la défense de ma foi catholique. Or vous croyez en conscience devoir partir de ce principe qui malheureusement jette le trouble et cause des divisions violentes, ce que je tiens à éviter. »

Le Bon Dieu nous demande de garder la foi, ce qui nous oblige à résister à l’autorité défaillante comme le fit saint Paul (cf. Gal. II, 11). Voilà un devoir que les sédévacantistes croient ne plus avoir. Devant les défaillances de l’autorité, ils préfèrent dire qu’elle n’existe plus. Une telle attitude se juge aussi par ses fruits. Des prêtres qui vivent isolés les uns des autres et qui exercent un ministère sans supérieur réel ne donnent certainement pas un bon exemple. Jamais l’Église ne pourra approuver cet esprit d’indépendance. Ce qui est remarquable dans l’œuvre de Monseigneur Lefebvre, c’est que tout y respire l’esprit et la pratique constante de l’Église. Le jour où Rome reviendra à la foi de toujours, la reconnaissance de la Fraternité Saint-Pie-X se fera sans heurt, sans que cela n’affecte la vie concrète des prêtres et des fidèles. Nous sommes catholiques tout simplement.

 Abbé Thierry Gaudray

 

 

Le latin, langue de la Rome éternelle

L’histoire de Rome commence par l’ordre, elle commence par la paix intérieure, par la discipline politique, par l’équilibre bien assis des fortunes, d’ailleurs toutes modestes et presque toutes basées sur la terre.

En même temps que la terre, le Romain chérissait son épée de guerrier car, dès l’origine, il avait dû cumuler les tâches du laboureur et du soldat, creuser le sol en gardant son glaive au côté.

Maître d’une bourgade (bâtie par Romulus en 737 avant Jésus-Christ) convoitée par ses voisins, puis, bientôt entraîné à capturer villages et cités, le Romain, gagnant les mers et les déserts, étendait son empire sans connaître le repos : les villes de Méditerranée grouillantes de population, l’Espagne étalant ses plaines jusqu’à l’Afrique de Carthage, la Gaule qui deviendra le joyau de l’Empire. Mais surtout la Grèce de Sparte et d’Athènes, l’Égypte dont le vertige de l’Orient va tenter Rome. Puis la future Angleterre, les Pays-Bas et cette route du Rhin où règnera, bien plus tard à Aix la Chapelle, cet empereur franc, Charlemagne, qui se réclamera de Rome.

À Rome aussi étaient nées des vertus individuelles précieuses : la piété des liens du foyer domestique, le respect dû au Pater familias, celui de la femme, mère et maîtresse de maison, morale que saluera saint Augustin. Vertus du soldat aussi : courage et sens du sacrifice, fidélité à la foi jurée, goût de l’honneur et de la justice.

En l’an 60, en arrivant à Rome, saint Paul sait qu’il a devant lui la ville de la hiérarchie et de la force organisée. Encore quelques années et Rome reçut son double baptême avec les martyres de saint Pierre et de saint Paul.

La culture romaine

Par sa conquête de la Grèce aux IIIe et IIe siècles avant Jésus-Christ, Rome s’est imprégnée très rapidement des découvertes de ses philosophes, de ses savants, de ses écrivains, de ses artistes. C’est à cette école que s’éveillera le génie romain et que s’épanouira la période classique de Rome.

La Grèce a fixé le destin intellectuel de Rome, et la Gaule fixe son destin politique. Ainsi, quand l’empereur Constantin donne au christianisme droit de cité dans son Empire, et que bientôt l’Église adopte la langue de Rome, elle reçoit véritablement les dons d’un empire universel. « Si les Grecs avaient pu rêver d’un domaine pour tous les hommes et avaient forgé le mot Œcuménisme, c’est Rome qui réalisera leur rêve, et ce rêve s’appellera d’un mot grec latinisé : Catholique1

Rome croyait en des centaines de dieux, mais les Celtes, dont beaucoup s’étaient rendus en Asie Mineure et y avaient entendu saint Paul (Epîtres aux Galates), devenaient de plus en plus monothéistes. Les Romains et les Celtes avaient en commun une piété qui s’adressait à un clergé savant et puissant.

Au moment où l’assaut des Barbares et la décadence totale du monde païen antique semblent faire s’écrouler l’Empire, les évêques chrétiens, s’apercevant qu’on ne peut prêcher une religion dans l’anéantissement total de toute société, comprennent ce qu’avait apporté l’empire. Ils relèvent et soutiennent alors de leurs mains les murs ébranlés de Rome, parce qu’ils y trouvent le seul rempart qui leur permette de ne pas disparaître. C’est à travers la permanence des diocèses et de l’action des hommes d’Église, que l’Occident d’alors ne quitta jamais complètement Rome. Sans l’Église, du Ve et IXe siècle, la Rome civilisatrice serait morte en occident. Mais on peut dire aussi que, sans Rome (et la divine Providence), l’Église aurait été refoulée pour des siècles en de définitives catacombes.

La langue de Rome

Quand l’Église adoptera cette langue latine, elle y trouvera les mots rudes et précis d’un long passé. Elle y apprendra à nommer la création avec « des termes qui semblent fraîchement sortis de la main de Dieu1 », cela est tranquille et familier, c’est bien le Dieu des Évangiles qui vient rassurer l’humanité. L’hébreu excellait aux développements poétiques aimés de l’Orient, le grec avait  appris aux hommes des termes de clarté et de finesse ainsi que la discussion d’idées. Mais le latin seul offrait « ce génie de puissance et d’équilibre qui faisait ressembler les affirmations de la foi à une voûte de basilique ou à ces colonnes célébrant la victoire des armées1. »

Les monastères couvrent de plus en plus l’Europe en proie aux guerres et aux dévastations. Ils étaient deux cents au VIIe siècle, ils seront deux mille à la grande époque de Cluny (XIe siècle), véritables cités vivant complètement sur elles-mêmes, avec l’aide de laboureurs et d’artisans, formidable armée de défricheurs de forêts et d’assécheurs de marais, les moines bénédictins vont transformer les campagnes d’Europe. C’est ici l’aurore d’une civilisation dont la France ne se déprendra jamais complètement jusqu’à la fin du XIXe siècle. C’est la Rome de Virgile et des très vieux Romains qui ressuscitent sous la Croix du Christ. Rome n’avait jamais que deux métiers nobles : celui de la terre et celui des armes. Les Bénédictins ressuscitent ces vieux souvenirs, car il faut un langage pur pour la conservation du dogme ; et cette nécessité forcera les monastères à devenir bientôt des ateliers de copistes qui transmettront au monde moderne les leçons littéraires de l’Antiquité.

Autour des disciples de saint Benoît se rassemblent des villages et des villes. En chantant les psaumes et les hymnes de la langue latine, clercs et laboureurs se sentent participer à une civilisation supérieure et unique. Alleluia chante le moine dans le silence de la nuit. Gloria Patri et Filio et Spiritui Sancto, répète-t-il sans cesse, en union avec les louanges du ciel. A la messe du dimanche, le chevalier et l’homme des champs disent aussi Gloria in excelsis Deo. Et au-dessus de leur vie monotone, de leurs efforts si rudes et si humbles, ils entendent la langue de Rome définir la magnifique hiérarchie des chœurs célestes Cum Angelis et Archangelis, cum Thronis et Dominationibus, Cherubim et Seraphim… 

Credo, disent les parents pour leurs enfants portés au baptême ; Miserere, implorent les familles, lorsqu’elles conduisent au tombeau ceux qu’elles ont aimés. Et tous pensent qu’il en sera ainsi, à travers les siècles, comme ces Romains de jadis qui n’imaginaient Rome qu’éternelle. N’est-ce pas ce que répète le prêtre à l’autel : Per omnia sæcula sæculorum … ?

« O langue des Césars et des triomphes, devenue la seule expression de l’espérance des chrétiens1 ! »

Le vieux monde s’écroule dans les ruines et les désastres des guerres, mais à l’abri des monastères, ils chantent tous, dans ce langage si bien fait pour la victoire ; Rome leur a prêté son génie de la construction, qui bravait le temps.

C’est des monastères que sortiront de grands papes comme saint Grégoire, Urbain II qui prêchera la première croisade. Ces moines ont appris, chez saint Benoit, combien la discipline romaine gagne à être ennoblie par l’amour du Christ. La base de leur éducation a été la langue latine, et, à travers elle, les leçons mêmes de la civilisation. L’Église suscitera, en Occident, des rois et des empereurs qui auront appris d’elle la leçon du pouvoir envisagé comme un dévouement suprême, comme le plus haut des devoirs, en étant utile aux petits et aux humbles.

Quand on raconte l’histoire d’un peuple, il faut chercher patiemment son essence véritable, son message unique, sa permanence et ce qu’il a apporté de meilleur au monde. L’erreur, depuis quatre cents ans, et voici qu’une partie du clergé commet cette erreur aussi, est de considérer Rome et la langue latine comme les expressions d’une nation et d’un particularisme, alors qu’ils représentent LA FORME UNIVERSELLE de l’organisation, de l’équilibre, de la hiérarchie, de la vraie paix. Nous pourrions ajouter que le latin est la langue de la science, la langue-mère de la langue française et de presque toutes les langues modernes ; mais il est surtout la langue de l’Église catholique ; et c’est par là que ses destinées sont admirables, providentielles comme celles de l’Église elle-même.

Sophie de Lédinghen

 

1 Le latin immortel, Marie-Madeleine Martin