Tes père et mère honoreras, afin de vivre longuement

Chers grands-parents,

« Les peuples ne perdent la vie que lorsqu’ils ont perdu la mémoire. » Foch

 « Tes père et mère honoreras, afin de vivre longuement. »

Ce 4ème commandement de Dieu est le 1er qui ne se rapporte pas directement à Dieu. Quand on sait que les commandements sont placés dans leur ordre d’importance, c’est dire la place qu’il tient dans le cœur de Dieu.

« Et il leur était soumis » nous dit l’Evangile parlant de Jésus retrouvé au temple. Ainsi, Dieu lui-même, notre divin exemple, nous donne l’exemple de la soumission à ses parents terrestres. Saint Joseph et la Sainte Vierge avaient autorité sur leur Divin Fils ! Quelle leçon merveilleuse !

Eux-mêmes, remplissaient leur devoir en obéissant aux autorités religieuses et civiles. Ainsi les voyons-nous, sur l’injonction orgueilleuse du César, se rendre à Bethléhem au moment où il nous semblerait utile que la Sainte Vierge se reposât. Et c’est par cette obéissance que se réalise la prophétie de Michée et que la naissance de notre Sauveur se déroule là où elle avait été annoncée… Quelle leçon !

Ce commandement s’impose à tous :

Aux parents :

– qui doivent eux-mêmes fidélité aux bons exemples et usages que leur ont laissé leurs propres parents.

– qui doivent éloigner les occasions de péché de leurs enfants et donc leur imposer une juste obéissance.

– qui doivent obéissance aux autorités civiles, sauf pour le péché1.

 

Aux enfants, bien sûr :

– qui doivent honneur – obéissance, respect et assistance – à leurs parents.

– qui doivent honorer leurs parents par leur obéissance et leur comportement conforme à ce qui leur a été enseigné.

 

Les travers de l’époque peuvent nous conduire à traiter avec mépris toute autorité non familiale ou religieuse, considérant que « dans notre société opposée au Christ », tout est mauvais… On peut donc gruger les impôts, tricher dans les transports en commun, ne pas respecter toutes ces lois agaçantes souvent guidées par l’idéologie du moment. Eh bien non ! Hors le péché, nous devons être soumis à nos supérieurs.

Souvenons-nous de l’exemple donné par David, combattant l’infâme roi d’Israël Saül, pour ses actions contre son propre peuple, mais le traitant avec un grand respect quand il l’a à sa merci, car c’est le roi choisi par Dieu.

Nous devons respect à nos parents, même pécheurs, à nos autorités religieuses, même quand elles nous persécutent, aux autorités publiques, même dévoyées.

Nous n’avons le droit de désobéir que lorsque nous en avons le devoir.

Nous ne pouvons évidemment obéir aux lois iniques et antichrétiennes car nous devons nous battre pour le règne du Christ ! Les lois diaboliques sur l’identité humaine, le mariage, la vie doivent être combattues – bien entendu >>> >>> par la prière – mais aussi par tous les moyens légitimes et efficaces.

Prions pour nos parents, pour nos dirigeants, combattons leurs actions infâmes, mais sachons qu’à l’instar du roi Saül, ils ont été choisis par Dieu – sans doute parce que nous ne méritions pas mieux.

Que nos maisons soient des lieux où l’on combat le mal par la prière et par l’action, mais aussi où l’on donne l’exemple du respect aux traditions, de l’obéissance aux autorités et de la prière pour tous ceux qui ont la charge de nous guider.

 

Prions sainte Anne de nous donner le courage de suivre cette délicate ligne de crête située entre le combat contre l’erreur et le respect dû aux chefs que Dieu nous a donnés !

 

Des grands-parents

 

1 Le catéchisme de Saint Pie X précise que dans père et mère sont compris « tous nos supérieurs tant ecclésiastiques que laïques, auxquels nous devons donc obéissance et respect ».

 

Ma Bibliothèque

Vous trouverez ici des titres que nous conseillons sans aucune réserve (avec les remarques nécessaires si besoin) pour chaque âge de la famille.

En effet, ne perdons pas de vue combien la lecture d’un bon livre est un aliment complet ! Elle augmente la puissance de notre cerveau, développe la créativité, participe à notre développement personnel, nous distrait, nous détend et enfin elle enrichit notre vocabulaire.

Dès l’enfance, habituons nos enfants à aimer les livres ! Mais, quel que soit l’âge, le choix est délicat tant l’on trouve des genres variés… N’oublions jamais qu’un mauvais livre peut faire autant de mal qu’un mauvais ami !

ATTENTION : Quand nous conseillons un titre, cela ne signifie pas que tous les ouvrages du même auteur sont recommandables.

SACERDOCE ET CELIBAT – Abbé B. de Lacoste – Iris – 2024

En ce temps où le célibat des prêtres est attaqué de toute part, ce livre est d’une grande actualité, répondant aux vingt objections courantes sur le sujet. L’auteur donne les raisons profondes pour lesquelles « le prêtre aimera son vœu de chasteté et s’efforcera, sous le regard de la Sainte Vierge, de progresser dans cette vertu. » Pour tous, pour ceux qui veulent savoir répondre aux questions avec des arguments de valeur et particulièrement pour les jeunes gens.

L’ART D’ÊTRE HEUREUSE – C. Jéglot – Éditions Saint-Remi, réimp. 2024

Ces petits chapitres toujours d’actualité seront facilement utilisés à notre époque. Chacune saura y trouver les réponses à ses questions et les conseils appropriés. Savoir être heureuse, voici un art qui se découvre, se cultive et s’entretient ! A offrir à toutes les jeunes filles à partir de 18 ans. Elles sauront en extraire les mots-clés dont elles ont besoin.

CEUX QUI DEVRAIENT DEMANDER PARDON – La légende noire espagnole et l’hégémonie anglo-saxonne – M. Gullo Omodeo – ed. de l’Artilleur – 2024

Remettre l’histoire à l’endroit, voilà le but de ce livre très approfondi et enrichi de nombreuses références. L’auteur fait redécouvrir une très belle page de l’Histoire, méconnue aujourd’hui des Espagnols eux-mêmes et que le travail des historiens dignes de ce nom extirpe petit à petit de l’oubli… L’Espagne catholique peut être fière et n’a pas à rougir de l’œuvre de civilisation qu’elle a accompli.

PRINTEMPS ou ETE – Mizuho Fujisawa – Nathan – 2025

Ces petits livres aux phrases très courtes font admirer au fil des pages, le même paysage étudié selon les saisons. Les dessins aux mille détails, très fins et réalistes, raviront les enfants et leur apprendront ainsi à voir comment la nature évolue selon les saisons. Quelques pages en fin de volume reprennent animaux et plantes pour en donner le nom. D’excellents livres pour développer les dons d’imagination et d’observation de la nature. Pour l’instant, seules deux saisons sont disponibles. Nous attendons l’automne et l’hiver !

 

Les oligo-éléments (suite) L’hypertension artérielle

L’hypertension artérielle se traduit par une hausse de la pression du sang dans les artères au-dessus des chiffres habituellement normaux. La pression artérielle est considérée comme normale à 120/80, mais les chiffres varient en fonction d’une même personne et de situations différentes. Il existe cependant des marges acceptables, c’est à dire qu’une TA est considérée comme normale à 140/90 au cabinet médical et 135/85 en auto-mesure. 

Elle est mesurée en millimètres de mercure. Le premier chiffre appelé systolique correspond à la pression sanguine dans les vaisseaux du corps lorsque le muscle cardiaque se contracte et le second chiffre, appelé diastolique, correspond à la pression sanguine lorsque le muscle cardiaque se détend et se relâche.

Ce qui nous intéresse, ce sont les hausses de la pression artérielle parce que le danger vient de là.

 

On peut retrouver :

– Des maux de tête,

– Des vertiges,

– Des éblouissements,

– Des mouches volantes dans le champ visuel,

– Des sifflements ou bourdonnements dans les oreilles,

– Des tremblements,

– Une hyperexcitabilité neuro-musculaire,

– Mais aussi des symptômes psychiques : agitation, nervosisme, hyperactivité, anxiété, insomnie, aboulie, syndrome anxio-dépressif…

 

Le traitement par oligo-éléments est simple. Il existe des OE prépondérants et d’autres plus secondaires.

 

1) Les oligo-éléments prépondérants :

 

Le MANGANESE :  il est à donner en première intention.

Il peut en évitant les oscillations tensionnelles ramener les chiffres tensionnels à la normale dans 50% des cas.  Il est à utiliser à raison de 3 prises par semaine pendant 2 mois. Sur un terrain allergique, le manganèse est à utiliser une fois par semaine seulement.

 

Le MANGANESE COBALT : il est à associer au Manganèse dans les hypertensions de la ménopause, dans les états spasmophiles, à raison d’une prise tous les deux jours.

 

Le PHOSPHORE : on peut l’utiliser dans toutes les formes cliniques et en particulier en cas de dysthyroïdie ou de spasmophilie.

 

Le COBALT :  il est intéressant dans les formes d’hypertension accompagnées de vertiges, acouphènes, paresthésies…

 

2) Les oligo-éléments secondaires :

 

Cuivre Or Argent : indispensables dans les états anxio-dépressifs

Lithium : dans les états de nervosisme, anxiété, syndromes anxio-dépressifs

Magnésium : en cas de spasmophilie

Zinc : en cas de dysthyroïdie

Zinc/Nickel/Cobalt et/ou Zinc/Cuivre dans toutes les formes liées au stress.

 

Pour conclure, si après le traitement par oligo- éléments, les résultats tensionnels ne sont pas satisfaisants, c’est-à-dire si les chiffres tensionnels restent toujours élevés, mieux vaut consulter son médecin traitant car un traitement par Béta Bloquants s’imposera alors.

 

Dr Rémy

Noé ivre ou l’humiliation d’un patriarche

Tous nous connaissons Noé, patriarche incontournable de la Genèse, qui reçut de Dieu la mission de sauver toutes les créatures du Déluge. Beaucoup oublient en revanche ce qu’il devient après la sortie de l’arche. D’abord reconnaissant envers Dieu, Noé offre un sacrifice en action de grâce. Puis obéissant à l’ordre divin, réitéré, de cultiver la terre, il plante une vigne et produit du vin. Comme tout vigneron, il boit son vin, mais il en boit trop et finit par s’enivrer. S’allongeant sous sa tente, il dévoile alors sa nudité. C’est l’épisode de son ivresse, épisode qui est notamment représenté à la voûte de l’abbatiale de Saint-Savin-sur-Gartempe (XIe siècle, Vienne, Nouvelle Aquitaine).

Noé à Saint-Savin

A Saint-Savin, le cycle de Noé est divisé en deux parties presqu’égales. La première, relatée sur le versant nord de la voûte, retrace le Déluge et s’achève, à l’est, sur la plantation de la vigne de Noé. La seconde, dont le sens de lecture s’inverse et part en direction de l’ouest, traite des évènements qui suivent : Noé boit son vin, puis ivre il est découvert par ses fils, enfin il maudit Cham. Le cycle s’achève par la représentation de la Tour de Babel qui clôt le récit du Déluge.

En raison de l’ivresse, l’inversion du sens de lecture du cycle de Noé à Saint-Savin est souvent comprise comme un signe de la déchéance du patriarche et de l’échec de son alliance avec Dieu. En effet, côté nord le récit du Salut de l’homme dans l’arche de Noé se dirige vers l’est, en direction de l’autel majeur, tandis qu’au sud le sens de lecture repart vers l’ouest pour raconter l’ivresse. Il semblerait donc bien que d’un côté les hommes se rapprochent de l’autel, et donc de Dieu, tandis que de l’autre ils s’en éloignent. Mais en réalité, l’inversion du sens de lecture est plus complexe.

L’exégèse de l’ivresse

Aux yeux de beaucoup, l’épisode marque la déchéance de Noé, signe que l’homme même sauvé par le baptême est toujours pécheur. D’autres exégètes, dont saint Augustin, s’interrogent toutefois sur les raisons de cette ivresse. Sans pour autant justifier l’excès de vin qui conduit Noé à ne plus se maîtriser, certains avancent que Noé est le premier à produire du vin. Il ne pouvait donc pas en connaître les effets. Il découvre l’effet du vin et subit son ivresse plus qu’il ne la recherche. Cette interprétation clémente de l’attitude de Noé tire son origine du texte même de la Vulgate : nudatus est in tabernaculo suo, littéralement « Noé est nu sous sa tente ». La voix passive utilisée pour désigner sa nudité est très claire et ne laisse place à aucun doute. Noé subit une humiliation, il ne s’adonne pas à la débauche.

Ce verset invite également à considérer Noé comme l’image du Christ. La tente, tabernaculum, sous laquelle se repose Noé évoque une autre tente, celle qui, placée sur l’autel, abrite les saintes espèces, et qu’on appelle aujourd’hui le tabernacle. L’ivresse de Noé est de nature sacrificielle, elle préfigure le sacrifice du Christ : Noé, ivre, nu sous sa tente et moqué par son propre fils, est l’image par anticipation du Christ, nu sur la Croix, ivre d’amour pour le genre humain et moqué par son propre peuple.

Suivant cette logique christique, à Saint-Savin, Noé est allongé sur une couche dont les motifs rappellent ceux du marbre, et sous une construction qui, loin de ressembler à une tente de toile, est un édifice comparable à une église. Enfin, le linge que présentent Sem et Japhet pour le recouvrir, particulièrement ouvragé, s’apparente aux linges d’autel. L’ivresse de Noé est ici sacrificielle et son vêtement lui-même établit un parallèle avec le Christ en Croix : Noé à demi-nu, subit l’humiliation de découvrir à son insu la partie la plus intime de son corps, qui est aussi celle par laquelle il a engendré ses fils. Ce faisant il est le reflet inversé du Christ en Croix, uniquement vêtu d’un périzonium par pudeur. L’ivresse de Noé est ici préfiguration de l’humiliation du Christ sur la Croix.

 

L’irrespect de Cham

Même si tous les exégètes rappellent que la vertu de tempérance est de rigueur et qu’en cette posture Noé n’est pas imitable, un autre fautif est désigné dans l’histoire : il s’agit de son fils Cham. Cham, voyant son père ivre et nu, s’en moque et avertit ses frères. Sem et Japhet, au contraire de Cham, adoptent une attitude de respect vis-à-vis de leur père : ils pénètrent sous sa tente à reculons, pour ne pas le voir nu, et le recouvrent d’un linge par respect pour sa pudeur. C’est ce qui est fidèlement représenté à Saint-Savin : tandis que Sem et Japhet s’apprêtent à recouvrir leur père, Cham pointe un index moqueur dans sa direction. Il désigne irrespectueusement la nudité de son père, qui est pourtant la partie de son corps par laquelle il a été engendré.

En apprenant son geste, Noé maudit Cham et sa descendance. Il condamne Canaan, le fils de Cham, à être l’esclave de la descendance de Sem et Japhet. Cham est puni par où il a péché. Son fils est châtié car lui-même a péché par impiété filiale. Il attire la colère de son père, et par là également la colère divine, pour avoir livré au mépris son père humilié.

Le demi-tour narratif du cycle de Noé à Saint-Savin ne s’explique donc pas par l’attitude de Noé. Au contraire, l’inversion du sens de lecture s’opère sur la question du vin au plus près de l’autel, en écho au vin, consacré avec le pain, lors de la messe. La faute est reportée sur Cham qui, se moquant de son père, provoque sa chute. Le cycle du Déluge s’achève avec l’épisode de la Tour de Babel. Lors de cet épisode s’illustre le géant Nemrod, image de l’orgueil humain, que des traditions apocryphes désignent comme étant non seulement le commanditaire de la Tour de Babel mais aussi le petit-fils de Cham. C’est donc Cham par son geste qui cause ce retour en arrière et l’éloignement de Dieu qu’il signifie. Le respect dû à ses parents prime sur la condamnation de l’ivresse.

Conclusion 

La mémoire de l’épisode est restée dans le langage puisque le plus vieux cépage connu, le « Noah » est nommé précisément en référence à Noé, mais aujourd’hui l’ivresse de Noé est tombée dans l’oubli, non sans raison : la tempérance est vertu de rigueur. Au-delà des considérations exégétiques sur les torts de Noé ou de son fils, cet épisode d’ébriété de la part d’un patriarche de la Genèse nous rappelle avant tout que la piété filiale n’est pas une option. Même un père déchu a droit au respect de ses fils. On pourrait même dire : un père déchu a plus que tout autre besoin du respect et du soutien de ses fils.

 Une médiéviste

 

L’esprit de famille

constituée en tant que communauté de vie et d’amour, la famille reçoit la mission de garder, de révéler et de communiquer l’amour. Le premier échange entre un enfant nouveau-né et ses parents est le plus souvent un échange d’amour d’une intensité inégalée sur cette terre et qui déterminera leur relation pour toujours, sauf regrettable désordre. Nous en avons tous fait l’expérience et pouvons le mesurer.

Or l’amour ne se partage pas mais se multiplie. A l’image de Dieu, les parents aiment leurs enfants d’un amour intégral et les enfants, se sachant aimés, aiment ceux qui sont aimés par ceux qui les aiment d’un même amour, dans un échange incessant. Tous les membres de la famille, chacun selon ses propres dons, ont la grâce et la responsabilité de construire, jour après jour, la communion des personnes, en faisant de la famille une école d’humanité plus complète et plus riche. Il me semble vraiment que l’on trouve ici la raison la plus profonde à ce que l’on pourrait appeler l’esprit de famille.

Aujourd’hui, il est bon de connaître la racine de ce qu’est la famille pour comprendre les enjeux recherchés par sa destruction et les valeurs à maintenir.

La famille souche

Mgr Delassus1 décrit ce qu’était la famille souche et ses avantages. «  L’intérêt que la famille-souche considère comme majeur et qu’elle place avant tous les autres, c’est la conservation du bien patrimonial transmis par les aïeux. La famille est semblable à une ruche, de nouveaux essaims y naissent, en partent, mais la ruche ne doit pas périr. Pour la maintenir, les parents, à chaque génération, associent à leur autorité celui de leurs enfants qu’ils jugent le plus apte à travailler de concert avec eux, puis à continuer après leur mort l’œuvre de la famille. Cet enfant n’est pas de droit l’aîné. Il se prépare de bonne heure aux obligations qui lui sont en quelque sorte imposées par la volonté divine. A l’époque de son mariage, il est institué héritier du foyer et du domaine ; ou plutôt, il en est constitué le dépositaire pour le transmettre, après l’avoir fait valoir, à la génération suivante.

Cette qualité lui impose les charges de chef de la famille. Il a l’obligation d’élever les plus jeunes enfants, de leur donner une éducation en rapport avec la condition de la famille, de les doter et de les établir avec l’épargne réalisée d’année en année par le travail de tous.

Si l’héritier meurt sans enfant, un des membres établis hors du foyer quitte sa maison pour y revenir et remplir les devoirs de chef. Ces devoirs comprennent, en outre de ceux que nous avons dits, l’entretien du foyer et de ses dépendances, la garde du tombeau des ancêtres, la célébration des anniversaires religieux, etc. Tout cela lui impose une existence sévère et frugale dont l’exemple est bien fait pour initier les jeunes générations à la vertu. »

L’organisation de la famille-souche, bonne à la société, est bonne aux individus. Elle distribue équitablement les avantages et les charges entre les membres d’une même génération. A l’héritier, en balance des lourds devoirs, elle confère la considération qui s’attache au foyer des aïeux. Aux membres qui se marient en dehors, elle assure l’appui de la maison-souche avec les charmes de l’indépendance. A ceux qui préfèrent rester au foyer paternel, à ceux qui sont plus fragiles, elle donne la quiétude du célibat avec les joies de la famille. A tous elle ménage, jusqu’à la plus extrême vieillesse, le bonheur de retrouver au foyer paternel les souvenirs de la première enfance.

Détruire la famille : un objectif atteint ?

Le code civil a tué chez nous la famille-souche. Par la liquidation perpétuelle du patrimoine familial qu’il impose, les grandes familles ont été condamnées à s’amoindrir de génération en génération, les familles bourgeoises ont été mises dans l’impossibilité de s’élever et même de se maintenir et les familles ouvrières sont enfermées dans leur condition. Il faut relire ici cette lettre que Napoléon écrivait à son frère Joseph, roi de Naples, le 6 juin 1806, pour comprendre qu’il s’agissait bien de détruire la famille : «  Je veux avoir à Paris cent familles, toutes s’étant élevées avec le trône et restant seules considérables. Ce qui ne sera pas elles, va se disséminer par l’effet du Code civil. Etablissez le code civil à Naples ; tout ce qui ne vous est pas attaché va se détruire en peu d’années, et ce que vous voulez conserver se consolidera. » C’est tout à fait clair. Il n’y a plus chez nous, légalement du moins, que des familles instables. L’esprit et le texte du code civil sont opposés à toute consolidation, à toute perpétuation. Il n’attache à la famille que l’idée d’une société momentanée qui se dissout à la mort d’un des contractants.

Alors même si la famille souche n’a pas disparu du jour au lendemain et que les plus anciens d’entre nous ont pu en voir encore quelques traces au fond des campagnes, il est bien clair que nous n’en vivons plus du tout aujourd’hui et que le modèle a complètement changé. Pour autant, la famille demeure et demeurera jusqu’à la fin des temps tant elle est essentiellement naturelle et il est peu probable que le Bon Dieu permette la fin de l’espèce humaine et son remplacement par l’Homme artificiel.

 « Tes père et mère honoreras afin de vivre longuement2» 

En ce qui concerne les valeurs fondamentales de la famille, après la remise en cause du principe essentiel de l’éducation donnée en priorité par la famille, l’attaque menée contre ce commandement revêt une actualité et une gravité croissantes. Les caractéristiques intrinsèques du troisième et du quatrième âge tiennent naturellement à l’affaiblissement des forces physiques, à la moindre vivacité des facultés spirituelles, à un dépouillement progressif des activités auxquelles ils étaient attachés, aux maladies et aux invalidités qui surviennent, à la perspective des séparations affectives entraînées par le départ vers l’au-delà. Ces caractéristiques attristantes peuvent être transformées par les certitudes de la foi. On peut affirmer que la manière dont une famille et plus largement une civilisation assume le grand âge et la mort comme élément constitutif de la vie, et la manière dont elle aide ses membres âgés à vivre leur mort, sont un critère décisif du respect qu’elle porte à ses membres. Nous n’aborderons pas ici l’abomination de l’euthanasie, signe manifeste du déclin de notre civilisation…

Le soin porté à nos anciens n’est pas quelque chose de facultatif. Nous le leur devons en justice. « Aie soin de ton père, dit saint Ambroise, aie soin de ta mère. Tu as pourvu aux besoins de ta mère, mais tu ne l’as pas payée de ses douleurs ; tu ne l’as pas payée des peines qu’elle a endurées pour toi ; tu ne l’as pas payée de la faim qu’elle a soufferte en se privant de manger ce qui aurait pu te nuire, de boire ce qui aurait pu vicier le lait qu’elle te destinait : c’est pour toi qu’elle a jeûné, pour toi qu’elle a mangé ; c’est pour toi qu’elle n’a pas pris la nourriture de son goût ; pour toi elle a veillé, pour toi elle a pleuré et tu la laisserais dans le besoin ? O mon fils, quel jugement tu te prépares si tu n’as pas soin de ta mère ! A celle à qui tu dois l’existence, tu dois ce que tu possèdes. »

Au niveau spirituel, pensons à l’âme de nos vieux parents qui, se détachant de tout, ont parfois du mal à se tourner vers le Bon Dieu. Il faut prier pour eux, veiller à ce que leurs derniers jours terrestres soient consolés par la réception des sacrements et qu’après leur mort, nos suffrages et le saint sacrifice de la messe les mettent au plus tôt en possession de la gloire du Ciel. Du côté matériel, il est important de penser à l’avenir pendant qu’il est encore temps car réorganiser la vie d’un vieillard qui ne vit que d’habitudes est à peu près impossible.

Dieu récompense ceux qui honorent leur père et mère et châtie ceux qui violent le quatrième commandement. « Celui qui aura maudit son père ou sa mère sera puni de mort. » Et « celui qui afflige son père et chasse sa mère est un misérable et un infâme » ou encore « Celui qui maudit son père ou sa mère verra sa lampe s’éteindre au milieu des ténèbres ». Tout le monde connaît l’épisode de l’ivresse de Noé.

Le catéchisme du Concile de Trente nous indique qu’accomplir nos devoirs envers nos pères et mères est pour nous une obligation de tous les instants et ne contredit pas du tout le fait de quitter son père et sa mère et de s’attacher à sa femme. Le terme « quitter » en hébreu se dit « azab », ce qui signifie « laisser derrière, rendre libre, laisser aller, libérer ». Au travers de ces termes, nous comprenons qu’une fois mariés, les époux ne sont plus sous l’autorité de leurs parents, qu’ils se détachent du foyer parental et sont libérés pour désormais vivre leur propre vie. Ils deviennent responsables de leur propre vie, de celle de leur foyer et des enfants que le Bon Dieu leur donnera. Cependant, il ne leur sera pas interdit de recevoir certains conseils de leurs parents si ceux-ci sont bons et non contraires à la morale. Se détacher de la tutelle parentale n’interdit pas de les honorer, nous le comprenons tous.

Nous sommes des héritiers

L’homme est un animal social et un héritier. Cette notion est si universelle qu’elle s’impose à toute personne qui observe honnêtement la réalité. On la trouve reconnue par tous, qu’il s’agisse de la famille ou de la société tout entière : « L’humanité a seule la possibilité de capitaliser ses découvertes, d’ajouter de nouvelles acquisitions à ses acquisitions plus anciennes, si bien que chacun de nous est l’héritier d’une somme immense de dévouements, de sacrifices, d’expériences, de réflexions qui constituent notre patrimoine, fait notre lien avec le passé et avec l’avenir3. »

Si cette vérité s’impose, si elle reste manifestement déposée dans la conscience de tous, c’est qu’elle est une vérité de l’ordre humain. La notion d’héritage est inséparable de la notion d’homme qui, s’il n’est pas héritier, n’est plus qu’une bête, et d’ailleurs la plus bête des bêtes car la plus dépourvue d’instinct. Il serait tout à fait puéril ou malhonnête de se demander si on doit l’admettre. Qu’on le veuille ou non, nous sommes des héritiers.

L’idée en est sans cesse rappelée dans la Sainte Écriture où les bénédictions de Dieu ne sont presque jamais mentionnées sans qu’il soit indiqué qu’elles s’étendent à la famille entière et aux générations qui en découleront. Le mystère de notre destinée lui-même ne s’insère-t-il pas dans les mêmes perspectives ? « Si nous sommes enfants, nous sommes héritiers, héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ4 » et c’est bien pourquoi Il a choisi la famille comme lieu privilégié de cette transmission.

L’honneur de la famille : une valeur à transmettre

Au général allemand qui, pendant la seconde guerre mondiale, occupe son château et lui reproche de ne pas se présenter à lui, le duc de Plessis-Vaudreuil, héros du roman de Jean d’Ormesson ‘Au plaisir de Dieu’, lui présentant tous ses titres acquis par sa famille au cours des siècles, conclut en lui disant : « Depuis neuf siècles, je suis sur les terres et dans la maison de ma famille », s’identifiant totalement, se confondant à sa lignée. Nous sommes héritiers et même bien au-delà.

Il est bien sûr que l’héritier est redevable envers tous ceux qui l’ont précédé, qui lui ont donné ce qu’il est. Ce dû s’exprime par l’honneur rendu à la famille, au nom qu’elle porte et transmet. Il ne suffira pas de reconnaître les vertus de ceux qui nous ont précédés, par la piété filiale ; il faudra surtout songer que d’autres portent ce même nom, aujourd’hui, et le porteront encore demain. Notre famille nous oblige. Qui s’honore, honore les autres à proportion qu’il s’honore lui-même. Il les élève à la hauteur où il a fixé son point d’honneur. Les mœurs d’une famille se vérifient et se mesurent à la rigueur avec laquelle chacun de ses membres précise et respecte son point d’honneur.

Pour autant, l’orgueil n’a pas sa place dans l’honneur. Les auteurs spirituels se sont toujours méfiés de l’honneur. Saint Jean Chrysostome, par exemple, enseigne qu’une bonne réputation durable et l’honneur ne s’acquièrent pas par des grands monuments, par des colonnes, des titres, mais par d’héroïques vertus. Pour l’abbé Berto, « L’honneur consiste précisément à faire de certaines valeurs une raison de vivre, et aussi bien une raison de mourir, c’est-à-dire à tenir ces valeurs pour transcendantes.» Saint Thomas d’Aquin rappelle que « Les démonstrations d’honneur ne sont rien si elles ne sont pas l’hommage rendu à la rectitude d’un homme. C’est pourquoi l’honneur consiste essentiellement dans la valeur intime, dans la droiture de la raison et de la volonté…, l’opinion des hommes n’en est que la constatation accessoire. » Cette droiture de la raison et de la volonté consiste donc à ne vouloir que le vrai et le bien, et finalement le Vrai et le Bien ultime, Dieu.

Je laisserai le dernier mot à Henry Bordeaux. Monsieur Roquevillard, admirable type de père, se voyant dans l’obligation de vendre une partie de ses domaines, répond à ceux qui tâchent de l’en dissuader : «  Dans le plan des choses humaines, il y a un ordre divin qu’il faut respecter. Au-dessus de l’héritage matériel se place l’héritage moral. Ce n’est pas le patrimoine qui fait la famille. C’est la suite des générations qui crée et maintient le patrimoine. La famille dépossédée peut reconstituer le domaine. Quand elle a perdu ses traditions, sa foi, sa solidarité, son honneur, quand elle se réduit à une assemblée d’individus agités d’intérêts contraires, préférant leur destin propre à sa prospérité, elle est un corps vidé de son âme, un cadavre qui sent la mort, et les plus belles propriétés ne lui rendront pas la vie. »

 Jérôme Colas

 

1 L’esprit familial

2 Les 10 Commandements de Dieu selon le Livre du Deutéronome Dt 5, 6-21

3 Ernest Renan

4 Epître de saint Paul aux romains 8:17