Le mot de l’aumônier

L’esprit de famille

Bien sûr, lorsqu’on lit les ouvrages de la Comtesse de Ségur, « Les vacances », « Les petites filles modèles » par exemple, on peut se dire avec nostalgie que, à d’autres  époques et dans certains milieux, il était tout de même plus aisé de former et de transmettre l’esprit de famille.

Qui pourrait le nier ? Une jolie propriété ancienne où la même famille vit depuis des siècles ; un passé familial dont les pages, parfois glorieuses et édifiantes, sont connues et servent de référence ; des meubles, des bibelots, des tableaux, des portraits auxquels sont attachés tant d’anecdotes pittoresques, amusantes ou dramatiques ; un parc dont les cachettes et les secrets avaient déjà fait le bonheur des arrière-grands-pères ou des arrière-grands-mères ! Et cette chapelle sous laquelle sont enterrés les ancêtres et dans laquelle tant de messes ont été célébrées et tant de prières se sont élevées à l’occasion de ces événements qui jalonnent l’histoire d’une famille : baptêmes, mariages, enterrements. Une telle propriété était comme l’incarnation d’une famille et restait pour tous le point de ralliement et la robuste racine qui ancrait ses membres sur tel arpent de la terre de France.

Il n’est guère besoin d’épiloguer longtemps sur la prolétarisation des Français. Comprenons bien qu’elle est idéologique, recherchée pour elle-même au nom des idéaux révolutionnaires. Il s’agit de protéger tout individu venant en ce monde des influences néfastes qui viennent de la société. Pour qu’il soit libre, il faut le défendre de l’Église, de sa famille, des traditions et de tout enracinement. Tout est donc conçu, savamment pensé, traduit dans le Code Civil, pour anéantir la société d’autrefois qui était si forte de ses corps intermédiaires. Le bonheur surviendra quand chacun, arraché par l’Etat à la mamelle, sera éduqué par lui et vivra dans le refus de tout engagement profond, dans une existence de relations éphémères, sans jamais rien construire. La famille doit donc, en particulier, disparaître.

Dans ces conditions révolutionnaires, reconnaissons qu’il est bien plus difficile de transmettre l’esprit d’une famille. Toutefois, il ne faut jamais baisser les bras, et il faut affirmer que, même dans ces conditions si défavorables de la modernité, l’esprit de famille peut étonnamment subsister.

Il est fondé, dans les milieux catholiques fidèles à la Tradition, sur un ensemble de considérations dont voici quelques-unes :

– Conscience de la grâce d’avoir gardé ou retrouvé la Foi en ces temps d’apostasie ;

– Volonté de fonder sa famille dans la Foi et de faire tous les sacrifices nécessaires pour la transmettre aux enfants ;

– Acceptation courageuse de vivre à contre-courant de ce monde corrompu ;

– Fierté de maintenir et de transmettre l’héritage catholique et français, coûte que coûte ;

– Foi en ce que Dieu n’a pas dit son dernier mot, que nous devons être ses soldats chaque jour de notre vie et que nous devons rayonner autour de nous pour faire connaître nos trésors ;

– Possibilité, pour ceux qui le peuvent, de retourner à la terre, ainsi que le conseillait Monseigneur Lefebvre, il y a déjà presque cinquante ans ;

– Amour de la France, terre catholique et terre de nos aïeux.

Il est évident que la détermination à vivre dans cette orientation résolument catholique et française ne manquera pas de susciter, dans les familles, là où elle existera, un esprit excellent qui marquera tous ses membres à vie.

S’il est vrai que l’époque de la Comtesse de Ségur est révolue, et que l’on veut nous faire entrer dans celle de la dissolution de la famille, enracinons-nous dans la Foi pour garder nos familles fortes, fierté de l’Église, pépinière de vocations et espérance de résurrection.

 

Je bénis vos familles et les confie au Cœur Douloureux et Immaculé de Marie.

 

R.P. Joseph

 

L’esprit de famille

Chers amis,

S’il y a une « marque de fabrique » qui doit caractériser nos foyers catholiques, c’est bien l’esprit de famille ! Partager la même foi, les mêmes épreuves, les mêmes joies, les mêmes travaux, les mêmes traditions, voici les secrets d’une famille unie ! Et si Dieu a permis que certains de nos lecteurs n’aient pas reçu cette grâce, souhaitons que ce numéro leur donne la force et l’opportunité de pouvoir fonder à leur tour ce qui leur a manqué.

Nous vivons en société et c’est bien dans l’époque formidable qui est la nôtre que Dieu nous a demandé d’exister : aujourd’hui et maintenant ; mais pour cela il nous faut puiser dans nos racines les valeurs qui nous ont construits et avoir comme objectif le ciel, lieu des retrouvailles familiales éternelles. Tous, nous gardons dans le cœur un exemple, une histoire, un évènement qui nous a marqués et a orienté notre vie dans une certaine direction, et même un orphelin saura se construire à partir de ces moments une « famille d’adoption » pleine de richesses.

La famille se dresse comme une cathédrale ; sa voûte protège ses moindres recoins et, depuis sa construction, elle veille comme une mère sur ses enfants en dressant sa flèche vers le ciel. Les rayons du soleil traversant les vitraux apportent à son intérieur des nuances et des tons changeants, qui évoluent selon les heures de la journée et les saisons de l’année. N’est-ce pas l’image des reflets que laisse transparaître une famille unie où chacun rayonne à son tour ou ensemble, souffre et prie dans l’épreuve et les difficultés, partage les mêmes joies simples et transmet la mémoire du passé familial ?

Mais si « l’esprit de famille » est une expression qui fait rêver les plus pauvres, il faut cependant être bien conscient que c’est une richesse à cultiver, à entretenir, à faire grandir. Rien n’est jamais acquis. C’est au père, chef de famille, et à la mère, gardienne du foyer, d’y veiller : en attendant patiemment le retour de l’enfant prodigue, en apaisant les rancœurs qui créent des blessures, en laissant le temps de cicatriser les plaies, en inspirant un plus grand amour du prochain et en conservant fidèlement les principes intangibles…

Vous trouverez dans ce numéro quelques conseils pour sauvegarder ou entretenir cet esprit qui doit réjouir le cœur de Dieu car n’est-ce pas Lui qui, de toute éternité, a choisi de faire vivre ensemble les membres de chacune de nos familles afin que l’on puisse dire « Voyez comme ils s’aiment » ? N’oublions pas de confier tout cela à Notre-Dame et de  remettre cette intention à Dieu dans la prière familiale qui nous regroupe tous quand le soir tombe. N’est-ce pas ce temps fort de la journée qui unit et réunit, et qui ne devrait jamais être délaissé ?

Que ce mois de novembre où nous allons particulièrement confier à Dieu tous ceux qui nous ont précédés et que ce mois de décembre, sanctifié par la solennité de Noël qui fut la première fête de famille de Notre-Dame et de saint Joseph, fasse briller sur chacun de nous, l’espérance du ciel !

Marie du Tertre

 

Ne pas se préoccuper de ce qui appartient à Dieu…

Celui qui omet d’agir quand son activité personnelle suffit, et attend plutôt une aide de Dieu, agit stupidement et tente Dieu. En effet, il appartient à la bonté divine de pourvoir aux êtres non en faisant toutes choses directement, mais en disposant les autres êtres à leurs propres actions. Il ne faut donc pas s’attendre à ce que Dieu subvienne là où l’on omet une action personnelle qui suffirait ; mais nous n’avons pas, au-delà de notre capacité d’agir, celle d’assurer le succès de nos actions dans l’atteinte de leur but, à cause des obstacles qui peuvent se produire. Aussi ce succès relève-t-il de la disposition de la divine Providence.

C’est pourquoi le Seigneur nous commande de n’être pas préoccupés de ce qui appartient à Dieu, à savoir le résultat de nos actions. Mais il ne nous a pas défendu de nous occuper de ce qui nous appartient, à savoir notre propre travail…

Saint Thomas d’Aquin