L’amour maternel

La famille est l’image de la sainte Trinité ; la mère y représente l’amour, le père l’autorité ; et tous les deux participent à cette sagesse qui les éclaire sans cesse. Voilà pourquoi ils sont inséparables, et doivent présider ensemble à l’éducation de leurs enfants. Chacun des deux parents y a un rôle à jouer avec le caractère et la fonction particulière de l’un et de l’autre. Mais tous les efforts tentés pour le remplir doivent être harmonisés, conjugués, et tendre au même but : la formation de l’homme futur et de l’enfant de Dieu. C’est cependant à la mère que revient la majeure partie de la tâche, surtout dans la petite enfance, car elle vit davantage avec ses enfants, elle est plus clairvoyante, et aime avec plus de dévouement.

On peut dire de la mère qu’elle a l’instinct de l’éducation ; elle le doit à la mission même que Dieu lui a confiée. Comme la fille de Pharaon l’a dit autrefois à la mère de Moïse, Dieu dit à l’épouse : « Recevez cet enfant, élevez-le pour moi. » Et comme Dieu n’emploie pas ses créatures et n’agit pas par elles sans leur communiquer quelque chose de ses attributs divins, Il a su donner aux parents, et à la mère plus spécialement, une participation de sa sagesse, de son intelligence et de sa clairvoyance pour deux raisons principales :

  • Parce que « aimer l’enfant et se faire aimer de lui, sera toujours le grand secret de l’éducation » (F. Kieffer).
  • Parce que l’éducation, qui ne va pas sans de nombreux et pénibles sacrifices, suppose, chez l’éducateur, un amour profond, dévoué et désintéressé. Or, personne n’est capable, au même degré que la mère, des tendresses et des héroïsmes de cet amour. Personne, par conséquent, ne peut lui contester la place qu’elle occupe dans la hiérarchie des éducateurs.

En venant à la lumière du jour, sauf rares exceptions, l’enfant trouve en sa mère une tendresse dans la plénitude de son intensité. Le père est heureux de son nouveau titre, content d’avoir un héritier, mais le bébé, en lui-même, n’éveille pas les enthousiasmes généreux que ressent une femme dans sa maternité expansive et triomphante. 

L’amour de la mère est fait de dévouement et d’abnégation. La mère aime l’enfant à proportion des sacrifices qu’elle s’impose pour lui. Plus il est faible, chétif, plus la part qu’elle lui réserve est grande. Le père, lui, aime davantage l’enfant dans la mesure des satisfactions que celui-ci lui procure.

L’ordre, dans l’amour maternel, consiste à aimer chacun à sa place et à son rang, lui donnant toute la mesure d’affection qui lui est due, sans transporter à l’un le sentiment qui appartient à un autre. Quand l’Évangile nous commande d’aimer tout le monde, même nos ennemis, cela ne veut pas dire qu’on doive aimer tout le monde de la même manière. Notre cœur doit aimer avec discernement, avec intelligence. La mère chrétienne aime Dieu, et doit l’aimer par-dessus tout. Elle aime son mari, ses enfants, ses parents, ses amis, ses proches… Mais ces divers amours sont distincts, chacun a son caractère, sa nuance, son degré d’intensité et de profondeur. La mère aime son mari d’une autre manière qu’elle aime ses enfants. Elle aime ses enfants autrement que ses parents ; et ses amis autrement que ses père et mère. Elle doit se garder d’intervertir l’ordre délicat de cette hiérarchie. De cette concordance, naissent les joies, l’harmonie et la paix.

Certaines mères vouent hélas parfois une affection désordonnée à leurs enfants, (ou même à certains de leurs enfants) et ne savent plus aimer Dieu. À peine leur reste-t-il, parfois, quelque amour pour leur mari ! Au lieu d’aimer leurs enfants selon Dieu et pour Dieu, elles les aiment pour elles-mêmes, elles les regardent comme des propriétés qui leur sont acquises à jamais, elles en font des objets de jouissance et d’adoration. Elles sont comme ivres d’une tendresse naturelle qui les étourdit et les aveugle, mais qui provoque trop fréquemment des regrets et des larmes.

On voit aussi des mères qui ne se contentent pas d’idolâtrer leurs enfants ; elles veulent elles-mêmes être leurs idoles ! Alors une cruelle jalousie se joint à leurs exigences, elles se posent comme le but même de la vie de leurs enfants. Elles s’inquiètent et s’agitent, veulent tout ordonner, tout prévoir, comme si elles étaient seules chargées de fixer l’avenir ; et dans leur activité débordante, oubliant le rôle de la Providence, elles excluent la part de Dieu dans les destinées.

Qu’en résulte-t-il ? Dieu laisse faire. Les enfants eux-mêmes, étouffés sous les étreintes d’une affection égoïste, s’impatientent contre ces excès d’attachement ; et ils secouent le joug, au risque de déchirer le cœur de leur mère.

Notre-Seigneur nous offre, dans l’Évangile, de remarquables exemples de ces divers degrés d’amour. Il aime toute la multitude de ses disciples ; mais il aime de préférence les douze apôtres. Parmi ces douze, trois sont manifestement l’objet d’une distinction spéciale (saint Pierre, saint Jacques et saint Jean) : seuls ils assistent à la divine agonie ; seuls ils sont témoins de la scène du Thabor. Et enfin, parmi ces trois préférés, il en est un qui est l’objet d’une prédilection plus singulière ; c’est celui que l’Évangile désigne toujours sous le nom de bien-aimé (saint Jean).

Telle est la gradation des affections saintes. C’est ainsi que les sentiments s’harmonisent dans un ordre sacré, sans se confondre et sans s’exclure les uns les autres. Le cœur chrétiennement organisé aime tout le monde, et par-dessus tout, Celui qui est le foyer de l’éternel amour.

 

        Sophie de Lédinghen 

 

Porter deux âmes en son corps

Alice von Hildebrand est un écrivain contemporain, mort en 1922, auteur de nombreux livres dont The privilege of being a woman. Nous ne savons d’elle que ce que l’on nous a obligeamment montré sur Wikipedia (!) : c’était une femme catholique, jouissant d’un certain renom en philosophie. Nous avons recherché ces renseignements parce que notre avis nous avait été demandé sur un extrait de son livre Le privilège d’être femme dont nous ne croyons pas qu’il a été traduit en français. Nous ne pouvons pas nous prononcer sur la totalité du livre mais le passage que nous avons lu nous a paru constituer une pensée suffisamment intéressante et belle sur la maternité pour être mentionnée ici.

On peut en effet se dire que tout a été déjà dit et bien dit sur la maternité de la femme et que si l’on ne perd certes pas son temps à s’extasier sur ce qui est l’un des plus beaux mystères de l’ordre naturel, on ne peut plus guère espérer mentionner des idées vraiment inédites. Celle que nous empruntons à Alice von Hildebrand l’est-elle ? Il est bien possible que non. Mais c’est la première fois que nous l’avons rencontrée et elle est sans doute l’une de celles que légitime le titre que cet auteur a donné à son livre.

Alice von Hildebrand remarque d’abord que le don que le mari fait à sa femme dans l’acte conjugal est celui d’une semence vivante mais que, neuf mois plus tard, au terme de sa grossesse, c’est un être humain doté d’une âme immortelle faite à l’image de Dieu qu’elle présente à son mari. C’est que Dieu, quelques heures après l’étreinte des époux, au moment de la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde, a créé l’âme de l’enfant.

Et elle admet ici ce « privilège » maternel qui est d’être touchée par Dieu, à l’instant de la création de cette âme, dans son habitacle intérieur. Peut-être, ailleurs dans son livre, admire-t-elle aussi la docilité divine qui ne manque jamais de répondre à la fécondation des gamètes par le bienfait de cette âme immortelle. De ce contact privilégié de Dieu avec la femme résulte un second privilège que la femme, pendant neuf mois, porte en elle deux âmes, la sienne et celle de son bébé.

Soyons reconnaissants à cet auteur d’avoir su mettre en valeur cette belle réalité qui manifeste, en demeurant encore sur le seul plan naturel, la dimension spirituelle de la maternité.

Que de pensées doivent alors surgir dans l’esprit de la mère chrétienne ! Une grande émotion à l’intervention de Dieu au plus profond d’elle-même, une reconnaissance pour son don, plus achevé encore que celui qu’elle a reçu de son mari, une attention à la seconde âme immortelle qu’elle porte en elle, mais une souffrance aussi car cette âme, lors de l’infusion dans la matière, n’a pas manqué de contracter la souillure originelle, une prière vers sainte Anne et sainte Marie, les deux seules femmes qui portèrent des enfants conçus sans aucune souillure, la première par un privilège unique fait à son enfant, et la seconde à cause de son union hypostatique, une autre prière d’espérance de baptême pour l’enfant à naître.

Il n’est pas trop de neuf mois pour mener un enfant à terme…  Mais sans doute les mères peuvent-elles dire aussi, il n’est pas trop de neuf mois pour méditer, pour savourer, pour admirer toutes les grandeurs et les beautés du mystère de la maternité.

Bien à vous dans le Cœur Douloureux et Immaculé de Marie,

R.P. Joseph

 

La maternité

Chers amis,

La place manque pour détailler ici les multiples facettes de ce magnifique thème ! Nous évoquerons la maternité de celle qui enfante naturellement mais nous ne pouvons oublier la maternité spirituelle, apanage, de la religieuse mais aussi de toutes celles qui, ayant ou non donné la vie, élargissent généreusement leur cœur en tenant un rôle capital auprès de toutes les âmes qui les entourent. Répondant alors, de façon durable ou éphémère, à l’appel de quiconque a besoin d’elles, elles exercent la première des charités. Et qui mieux que le cœur de la femme est apte à donner sans compter puisque c’est dans sa nature même ?

Qui mieux qu’une maman saura éveiller l’enthousiasme, diriger les lectures, prêcher le sacrifice, inculquer l’amour du Christ, enthousiasmer pour l’apostolat, développer le sens patriotique, orienter une vocation et donner le sens de la famille à son enfant ? Et qui mieux qu’une maman saura combien, après avoir tout donné, elle devra aussi s’effacer le jour où elle aura achevé sa mission et où elle devra laisser son enfant partir seul sur le chemin que Dieu a choisi pour lui. Combien de larmes parfois, et surtout de renoncement et d’effacement cela lui coûte, mais la méditation tant de fois répétée du cinquième mystère joyeux la soutiendra dans les heures difficiles et l’aidera à imiter le modèle de toutes les mères !

Joseph de Maistre remarquait qu’« il y a une femme au fond de tous les événements », et l’Histoire ne le contredira pas. Souvenons-nous de la mission de ces mères : de sainte Hélène relevant les murs de Jérusalem et communiquant les ardeurs de sa foi à Constantin, du « Dieu de Clotilde » invoqué par Clovis, de la célèbre Monique qui enfanta saint Augustin par ses prières et ses larmes, de Blanche de Castille, mère de saint Louis, d’Isabelle d’Espagne, la reine catholique par excellence. Mais n’oublions pas non plus le rôle de ces femmes au cœur empli de charité : la douce figure de Geneviève qui arrêta Attila aux portes de Paris et dispersa l’armée des barbares, de Jeanne d’Arc, l’humble bergère, de sainte Thérèse, de sainte Jeanne de Chantal, et de tant d’autres encore… Loin des figures que les féministes nous présentent, elles nous rappellent par la dignité avec laquelle elles ont rempli leur mission quel rôle éminent est celui de la femme.

L’actualité juridique, des « conseils pour oser », une contemplation à propos de notre Mère la Sainte Eglise, un article sur la science et toutes nos rubriques familiales viendront compléter ce numéro et nourrir les temps libres laissés par les vacances. Pensez à profiter de tous les articles déjà proposés sur Foyers ardents – depuis bientôt 8 ans – et en libre accès sur notre site : vous y trouverez sûrement de quoi répondre à l’une ou l’autre de vos questions du moment ! https://foyers-ardents.org/

Nous avons été obligés d’adapter légèrement notre cotisation en raison de l’augmentation des frais postaux. Un très grand Merci à ceux qui nous aident ainsi à conserver un « tarif réduit » accessible aux étudiants, à ceux qui rencontrent des difficultés financières ou à ceux qui offrent des abonnements multiples. Chaque mois, une messe est célébrée à l’intention de tous nos lecteurs, et en particulier de nos bienfaiteurs.

Nous vous souhaitons de bonnes vacances sous le regard de Notre-Dame des Foyers Ardents !

Marie du Tertre

 

Ami et amitié

Le choix d’un ami est dirigé et limité par la considération du meilleur.

P Sertillanges

L’ami qu’on doit aimer en qui l’on doit se fier c’est celui qui vous secoue et vous protège quand tout le monde vous fait défaut. 

Joinville

Ce qui me rassure le plus sur la durée de notre amitié, c’est le sentiment religieux qui nous unit. Puissions-nous par nos exemples mutuels nous raffermir dans ces doctrines sublimes, et qu’entre toi et moi, elle soit, comme dit  Bossuet, une immortelle médiatrice.

L.Cornudet à Charles de Montalembert

 

 

 

L’amitié est un commerce pour s’aider à jouir de Dieu.

Bossuet