Avoir le temps

« Quel rêve pour tant d’hommes et de femmes tombés sous le joug de la « vie moderne » ? Ne savions-nous pas que le propre de la tyrannie c’est d’empêcher les peuples de penser ; et pour cela, de ne plus leur en laisser le temps ? Ce qui s’obtient en les abrutissant de travail ; mais mieux encore, et plus sournoisement, en leur occupant l’esprit de curiosités vaines ; en leur faisant croire qu’ils pensent, alors qu’on les fait s’épuiser sur de faux problèmes ; en les égarant pour les détourner des problèmes vrais qui leur feraient prendre conscience de leur servitude. »

Père Paul Doncoeur – Cahiers Sainte Jehanne, mars 1958

 

Réjouissez-vous

Nous, chrétiens, nous avons un idéal infini, un idéal qui ne nous décevra jamais et vers lequel nous pouvons tendre de toutes nos forces. Enfants de Dieu, nous sommes faits pour participer à sa vie propre. Nous avons un idéal élevé, sublime, qui nous maintiendra toujours dans l’enthousiasme, tant que nous le garderons présent à l’esprit pour le réaliser de tout notre pouvoir. Il est dès lors impossible d’en douter : dans sa bonté, Dieu donnera tous les moyens nécessaires. Ces âmes garderont toujours confiance, elles verront toujours le bon côté des choses, n’apercevront en tout que la main paternelle de Dieu. Ces âmes enthousiastes seront par suite des âmes heureuses. Elles seront en effet conscientes de ne vivre que pour Dieu, pour Le glorifier. Leur unique désir sera de Lui donner tout ce qu’Il peut attendre d’elles. Ces âmes enthousiastes seront enfin joyeuses. L’idéal : c’est la grande force, le grand bienfait, la grande joie de la vie. C’est Dieu qui est la source de leur joie. « Réjouissez-vous dans le Seigneur, toujours », malgré tout, quoi qu’il arrive.

Dom Godefroy Bélorgey

 

Cultiver l’amabilité

De même que la colère ou le mal-être peuvent être contagieux, la paix intérieure peut se communiquer et répandre une atmosphère de sérénité et de joie de vivre, qui en toute circonstance rend la vie plus légère.

Nous avons tous remarqué comment certaines personnes diffusent un sentiment d’apaisement par leur seule présence. Quand on les rencontre, elles sont toujours souriantes et détendues. Elles dégagent un sentiment d’harmonie intérieure qui nous fait comprendre qu’elles n’ont rien à prouver, que leur être tout entier est à l’écoute de ce que l’on pourrait leur dire. Pas de repli sur leurs petits ou grands soucis qui restent à leur place relative, mais la volonté de ne pas attrister les autres et de leur faire passer un moment agréable qui leur rendra la vie plus belle. Il en est même qui sont tellement assimilées à cette façon d’être que le seul fait de penser à elles nous rend le sourire !

C’est un grand art de s’oublier, mais qui se révèle, ô combien fructueux pour la paix intérieure, et également pour la paix dans les familles et en société. Lutter contre l’égocentrisme, ne pas ressasser ses problèmes, et surtout faire preuve de charité en n’imposant pas aux autres ses propres croix. Ils en ont eux-mêmes bien assez comme cela !

Voilà un véritable art de vivre que nos Anciens savaient utiliser en cultivant une authentique amabilité, loin de tout stoïcisme, mais plutôt fine fleur de la Charité.

 

Instrument de paix

Dans les rencontres prévues ou imprévues, des âmes viennent parfois vers toi avec le cœur las, lourd d’épreuves mystérieuses, et ploient sous le fardeau. La croix a fragilisé une foi apparemment solide pour certains, les leurs ont pu se détourner de Moi et le vase intérieur semble prêt de se briser. Que dire alors, et comment soulager,

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

Tu ne peux être un instrument de ma paix, de cette paix intérieure que Seul je donne, si tu n’es pas centrée sur Moi.

Si ton cœur, chaque matin ne s’unit pas au Mien, par la communion physique ou spirituelle, par un regard échangé entre toi et Moi assez longtemps pour que J’habite en toi pour la journée, Je ne pourrai donner à travers toi, la paix

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

Celle qui dépose dans le secret de ton cœur, ses doutes, ses faiblesses, ses peurs, ses révoltes, me cherche. C’est Moi qui permets que tu sois mon instrument, auquel je vais donner les grâces, afin que ma Providence s’accomplisse.

Tu dois être ma main fidèle et ne pas tirer fierté de tes compétences car tout vient de Moi, sans Moi, tu ne peux rien,

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

Aie une oreille attentive, un cœur affectueux, un regard doux, à l’image de ce que Je fus sur les routes de Palestine pendant ma vie terrestre. Ne brusque pas une âme, ne la juge pas, comment serais-tu à sa place, le cœur broyé ? Relève la moindre belle et bonne chose pour t’y appuyer comme levier afin d’encourager, et prie. Prie ma Mère tout en écoutant et en répondant, demande-lui de parler à ta place,

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

Si tu as toi-même souffert ou souffres encore, tu sais la valeur de la discrétion. Les larmes, devenues perles plus tard dans mon Royaume, ne se jettent pas aux quatre vents. Ta bouche est donc scellée.

Ta peine doit être mise de côté, pour accueillir pleinement celle de l’autre, pour t’effacer devant une souffrance plus grande.

Cela ne peut se faire que si tu possèdes toi-même la paix intérieure, ma paix, voyant en tout, la volonté divine, même brutale et incompréhensible. Au plus fort de ma Passion, mon âme était en paix car toujours unie à mon Père, souviens-t’en,

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

Enfin, garde toujours ta porte ouverte, prête à renouveler l’écoute. Cultive la bonne humeur par des journées bien équilibrées, où la place reste pour celui qui peine et s’invite dans ta vie avec sa charge. Si ton cœur compatissant est toujours uni au Mien, tu sauras ne pas être dérangée et faire passer la charité avant tes projets, sans mauvaise humeur.

Tu pourras ainsi transmettre ma paix, la faire grandir et être bon instrument, pour ramener vers Moi,

Lorsqu’une âme souffrante s’ouvre à toi.

 

     Jeanne de Thuringe 

 

La paix soit avec vous

Chers grands-parents,

Lundi de Pâques : le Christ-Dieu a été tué par les hommes, tous ses fidèles sont désespérés. Les Saintes Femmes se rendent au sépulcre pour embaumer le Corps de Notre-Seigneur. Il est là, bien vivant, et que leur dit-il tout d’abord ? « La paix soit avec Vous. »

C’est bien sans doute ce que nous demande notre Divin Maître dans l’effondrement actuel et l’éclipse que subit notre Eglise. Et le père Calmel décrit magnifiquement ce que nous devons faire…  « Ce que Jésus veut de nous dans cette tornade, c’est la paix, la prière confiante, la détente dans le sacrifice quotidien, la sagesse pour garder notre vie équilibrée… »

La paix intérieure ne se décrète pas ! Certainement elle nécessite du courage, un travail constant sur soi pour se l’imposer ! « Imposez-vous la Paix, n’attendez pas qu’elle vienne toute seule. Il faut se l’imposer à soi-même, » nous conseille un chartreux.

Comme le dit le père Calmel, cette paix se trouve dans le véritable abandon à Notre-Seigneur, « la prière confiante » qui nous conduit à tout comprendre à la lumière de la Providence, « la détente dans le Sacrifice quotidien » qui nous rappelle sans cesse que nous travaillons pour Dieu et que ça n’est pas le succès qui compte mais la volonté de faire le bien, et enfin la sagesse « pour garder notre vie équilibrée ». Les difficultés de l’époque pourraient nous conduire à un désespoir destructeur de toute initiative considérant la malignité de notre société et l’effondrement de notre civilisation… Eh bien non, nous devons continuer à faire notre devoir, à travailler au redressement de la société, en commençant par nos familles… Nous devons – tout en n’ignorant pas la gravité de la situation – garder une règle de vie équilibrée, en sachant que, surtout aujourd’hui, notre action sera perturbée par la pression du monde.

La Paix ne s’obtient pas d’un simple décret, et nous, grands-parents, par le recul que nous pouvons avoir par rapport à la vie active, avons probablement une place singulière à jouer dans le maintien de cette paix.

D’abord en obtenant la paix pour nous-mêmes. La retraite nous donne le temps de nous éloigner du tourbillon des affaires. Profitons-en pour « perdre » du temps chaque jour à méditer, à prier et à réfléchir pour obtenir la Vraie Paix du Christ.

Ensuite en diffusant cette Paix ! Nos enfants sont « au feu » ! Ils courent pour les logements, les écoles, les activités de leurs enfants, leur vie sociale, et n’ont pas beaucoup de temps pour prendre le recul nécessaire sur les choses. Essayons donc d’être le havre de paix où ils pourront se ressourcer, recevoir une vision d’Espérance qui les consolera. Mais pour cela, soyons d’abord en paix nous-mêmes !

Enfin en montrant que, dans ces temps troublés, nos devoirs restent simples ! Un responsable d’une communauté en difficulté que nous interrogions sur sa mission nous répondait que l’enjeu était de s’appliquer à faire chaque jour encore mieux son devoir, c’est-à-dire à respecter le mieux possible sa règle et prendre toutes ses décisions sous le regard de Dieu.

Le Diable s’acharne à rendre les choses compliquées, à multiplier les obstacles, à nous montrer qu’il est presque impossible de faire le bien. Dieu, qui nous connaît bien, ne nous donne que des choses simples à faire. Dans cette crise apocalyptique, Dieu nous demande simplement de faire notre devoir quotidien et non de multiplier les obstacles…

Soyons de bon chrétiens, fidèles à leur devoir quotidien : chapelet en famille possible, bonnes écoles catholiques, vie morale exemplaire sans tomber dans des scrupules inutiles…

Soyons de bons Français, fidèles à leur devoir d’état, honnêtes, consciencieux dans leur travail et ainsi exemplaires pour les autres. Dieu ne nous demande rien de plus.

Peut-être nous sera-t-il demandé un jour le sacrifice suprême ? Pas aujourd’hui ! « La fidélité aux petites choses nous garantit la fidélité dans les grandes, c’est Notre-Seigneur lui-même qui l’a dit », disait récemment un évêque. Voilà la vraie sagesse ! Nous avons aujourd’hui les grâces nécessaires pour le sacrifice de ce jour, nous aurons, si nous sommes fidèles, les grâces pour le sacrifice de demain ! Abandonnons-nous ! Et ça n’est pas facile !

Pie XII n’hésitait pas à affirmer que, pour résister chaque jour aux tentations du monde moderne, il ne fallait pas « un moindre héroïsme que pour rendre le témoignage du sang ». Pour faire des choses aussi simples que garder la paix, continuer à prier, faire son devoir d’état, Dieu nous donne des grâces immenses ! C’est simple mais il faut être courageux ! Voilà ce que nous devons enseigner à nos ménages !

Que sainte Anne fasse de nous des artisans de paix !

 

  Des grands-parents