Euthanasie saison IV

La quatrième tentative sera-t-elle la bonne ? Après un premier débat engagé à l’Assemblée nationale sur une proposition de loi déposée en 2020 par Olivier Falorni, député de la Charente-Maritime, dont seul a été adopté en avril 2021 l’article premier qui définissait les conditions d’accès à une « assistance médicalisée active à mourir » avant que la discussion ne s’interrompe en raison de l’opposition, purement opportuniste, du gouvernement, puis une proposition de loi sénatoriale émanant du groupe socialiste  « visant à établir le droit à mourir dans la dignité », rejetée  à une courte majorité par le Sénat en mars 2021, vint le « projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie » déposé par le gouvernement, après la mobilisation d’une convention citoyenne, dont la discussion et le vote en mai et juin 2024 étaient presque achevés avant que la dissolution de l’Assemblée nationale ne le rende caduc. 

L’idée de légiférer sur la « fin de vie » ne fut pas abandonnée, loin de là, et en 2025, le projet de loi de 2024 a été scindé en deux textes distincts correspondant chacun à une proposition de loi, l’une relative aux soins palliatifs qui a été votée à l’unanimité, l’autre relative à la fin de vie. Ce dernier texte a d’ailleurs vu son titre modifié au cours des débats en proposition de loi relative au « droit à l’aide à mourir ». Au-delà des variations sémantiques qui traduisent sans doute un certain embarras du législateur pour appréhender le sujet, c’est bien à chaque fois de l’euthanasie qu’il s’agit. Le fait que le texte fasse l’objet de deux propositions de loi (d’origine parlementaire) distinctes et pas d’un projet de loi (d’origine gouvernementale) résulte de la distance personnelle qu’a voulu prendre le Premier ministre par rapport au second texte. Cela dit, Mme Catherine Vautrin, ministre des affaires sociales, qui représentait par ailleurs la France à la messe d’intronisation du pape Léon XIV, a joué, au nom du gouvernement, un rôle très actif dans la discussion et la promotion de la proposition de loi à l’Assemblée nationale. 

Le soutien le plus emblématique à cette proposition de loi est venu du chef de l’Etat dans un discours prononcé à la Grande Loge de France le 5 mai 2025 à l’occasion du 120ème anniversaire de la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l’Etat. Après avoir rappelé que « le dialogue entre la République et la franc-maçonnerie est une conversation, si je puis dire, polie par des siècles de combats, par la communion de pensée et par une connivence qui n’a rien d’un complot » et que « la franc-maçonnerie est aux avant-postes de la bataille qui importe si nous voulons façonner le siècle pour le bien de l’humanité », le président a souligné les enjeux de la proposition de loi : « Que les francs-maçons portent cette ambition de faire de l’homme la mesure du monde, le libre acteur de sa vie, de la naissance à la mort, qui peut s’en étonner ? »

La proposition de loi sur le droit à l’aide à mourir a été adoptée le 27 mai 2025 par l’Assemblée nationale en première lecture par 305 voix contre 199 et 57 abstentions. Elle a été transmise au Sénat qui l’examinera en séance publique à partir du 7 octobre 2025. Une seconde lecture dans chaque assemblée précèdera un examen de la proposition par la commission mixte paritaire et le texte devrait, sauf accident de parcours, être définitivement adopté avant la fin de l’année 2026. 

Les débats à l’Assemblée nationale ont peu porté sur les principes (« Tu ne tueras pas », « l’indisponibilité de la vie humaine ») rappelés par Pie XII en 1957 : « Dieu seul est maître de la vie et de l’existence. L’homme n’est donc pas maître ni possesseur mais seulement usufruitier de son corps et de son existence. » Ils ont porté sur les « garde-fous » mis en place par les auteurs du texte pour tenter d’en limiter les abus et rendre celui-ci acceptable pour la majorité des députés.

Une première série de garde-fous a consisté à fixer des critères d’éligibilité : la personne concernée, curieusement désignée « patient », doit être majeure et de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France. Elle doit être atteinte d’une « affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée » ou « terminale ». Cela signifie qu’elle est entrée « dans un processus irréversible marqué par l’aggravation de son état de santé qui affecte sa qualité de vie ». Le malade doit également présenter une « souffrance physique et psychologique constante » qui est « soit réfractaire au traitement, soit insupportable selon la personne » lorsqu’elle a « choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter » un traitement. Une souffrance psychologique n’est pas suffisante pour « bénéficier » de « l’aide à mourir ». Enfin, la personne concernée doit « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ».

Une certaine confusion est entretenue entre l’arrêt des traitements pénibles lorsqu’il n’y a pas d’espoir de guérison, ce qui est moralement licite, et le prétendu droit à mourir. Les auteurs de la proposition de loi veulent se placer dans le sillage de la loi Claeys-Leonetti de 2016 qui autorise dans certains cas la sédation profonde jusqu’au décès, ce qui peut constituer une forme d’euthanasie car elle associe un arrêt des soins de base que sont l’hydratation et l’alimentation à une sédation profonde qui n’est pas toujours indispensable. La Conférence des évêques de France, tout en « s’inquiétant profondément » du vote de la nouvelle loi, s’est arc-boutée sur la loi Claeys-Leonetti qui ouvrait pourtant la voie à la réforme en cours. Quant aux souffrances physiques ou psychologiques réfractaires au traitement, la quasi totalité des demandes d’euthanasie disparaît lorsque la prise en charge d’un patient présentant des grandes souffrances morales et psychologiques est faite correctement grâce aux soins palliatifs.

Quoi qu’il en soit, ces critères d’éligibilité sont pour le moins flous et peuvent donner lieu à interprétation. En tout état de cause, comme ce fut le cas pour le droit à l’avortement, ce texte est une première étape qui ne demandera qu’à être dépassée le moment venu. L’essentiel est d’opérer la bascule anthropologique que constitue la reconnaissance du « droit à mourir ».

 

Les garanties procédurales constituent la seconde catégorie des garde-fous mis en place par la proposition de loi. La demande d’aide à mourir doit être expresse et adressée à un médecin qui a quinze jours pour se prononcer et notifier sa décision. Celui-ci peut en référer à un spécialiste ayant accès au dossier médical du patient et à un professionnel de santé impliqué dans le traitement en cours mais la décision finale, qui devra être rédigée et motivée, lui appartient. Le texte prévoit que l’auto-administration de la substance létale est la règle, ce qui correspond au suicide assisté, mais, si le « patient » n’est pas en mesure d’y procéder, l’administration pourra être effectuée par un médecin ou un infirmier. Une clause de conscience spécifique aux professionnels de santé leur permettra de refuser de réaliser ce geste. Cette clause ne s’appliquera pas aux pharmaciens, comme c’est déjà le cas pour les produits abortifs, car ils ne sont pas considérés comme des « auxiliaires médicaux ».

Un amendement à la proposition de loi instaure un « délit d’entrave à l’aide à mourir » visant à sanctionner le fait d’empêcher une personne de s’informer sur cette loi ou d’en « bénéficier ». Un tel délit pourra conduire à sanctionner ceux qui proposent des soins palliatifs aux candidats au « suicide médicalisé ». Un amendement proposant la création d’un délit d’incitation à l’euthanasie a été repoussé. Pour les députés, il est plus grave d’empêcher de tuer que d’y inciter. D’ailleurs, l’aide à mourir sera prise en charge par la sécurité sociale.

 

Il est difficile de conclure sans faire le parallèle, à cinquante ans de distance, entre la proposition de loi sur le droit à l’aide à mourir et le projet de loi libéralisant l’avortement. L’opposition à la réforme de 2025 semble peut-être un peu plus forte que celle de 1975 mais elle ne porte pas vraiment sur les principes des promoteurs du texte et qui sont peu ou prou considérés comme acquis. Or, c’est en défendant les nôtres que nous ferons un jour tomber les leurs.

Thierry de la Rollandière

 

Les trois Ave Maria

Ma chère Bertille,

En ce temps de rentrée, je voudrais te parler de cette magnifique dévotion des Trois Ave Maria. Une dévotion de plus, penseras-tu peut-être… Non pas une de plus mais LA dévotion qu’il ne faut jamais abandonner…

Cette pratique1 a été révélée au XIIIe siècle par la Reine du Ciel à sainte Mechtilde pour obtenir infailliblement la grâce de la persévérance finale et de la bonne mort. Saint Antoine de Padoue, saint Léonard de Port-Maurice, saint Alphonse de Liguori, saint Jean Bosco et le Padre Pio l’ont tous encouragée et même parfois donnée comme pénitence. Le Pape saint Pie X l’a indulgenciée et a accordé sa bénédiction apostolique à tous ceux qui l’ont adoptée.

La prière en elle-même consiste à réciter matin et soir avec dévotion trois Je vous salue Marie selon une méthode qui nous conduit à chaque personne de la Trinité en nous faisant entrer en contemplation des attributs divins de puissance, de sagesse et de miséricorde.

– En l’honneur du Père qui vous donne sa Puissance (Je vous salue Marie…)

– En l’honneur du Fils qui vous donne sa Sagesse (Je vous salue Marie…)

– En l’honneur du Saint-Esprit qui vous donne sa Miséricorde (Je vous salue Marie…)

O Vierge Marie, ma bonne Mère, préservez-moi du péché mortel pendant cette journée / cette nuit.

Par le premier Ave en l’honneur de la Toute Puissance divine, nous demandons à notre Père du Ciel de laisser Notre-Dame venir nous assister, nous réconforter et chasser loin de nous le démon.

Par le deuxième Ave nous implorons la sagesse de Dieu le Fils afin que Notre-Dame remplisse notre âme à l’heure de notre mort des lumières de la foi et de la science, et que nous soyons protégés contre toute ignorance et toute erreur.

Par le troisième Ave nous invoquons le Saint-Esprit afin que notre Maman du ciel soit présente à l’heure de notre mort pour répandre en notre âme la suavité du Divin Amour afin de triompher des douleurs et de l’amertume de la mort au point de les voir se changer en douceurs et allégresses2.

Pureté de l’âme et pureté du corps, assistance à l’heure de notre mort. Que demander de plus ?

– « Et si je dis déjà mon chapelet quotidien, cela ne suffit-il pas ?», me diras-tu…

Sans aucun doute la prière du chapelet est très puissante mais le but n’est pas le même. Le rosaire et les Trois Ave se complètent et préparent l’un à l’autre. Les Trois Ave possèdent une puissance interne qui ouvre le cœur afin que nous vivions toujours davantage en union avec Notre-Dame et travaillent le cœur avec une énergie toute divine.

– « Pourquoi « préservez-moi du péché mortel » ? Je n’en fais pas/plus ? »

N’oublie jamais que personne n’est à l’abri du péché, et que bien souvent celui qui commence à penser qu’il en est loin est tout proche d’y tomber. Nous ne sommes pas vertueux par notre force mais par celle de Dieu car nous ne pouvons rien sans lui. C’est pourquoi il est capital de toujours implorer son aide mais aussi de le remercier de ses grâces en honorant sa Mère.

Au quotidien, cette pratique se révèle être une véritable arme contre la pornographie et ses ravages. Nombreux sont ceux qui témoignent que cette récitation quotidienne a été pour eux comme un bouclier et que toutes les tentations malsaines se sont enfuies.

« Qui sauve une âme, sauve la sienne » dit saint Augustin. Tu as là un moyen d’apostolat très aisé ; n’hésite pas à en parler à tous ceux que tu rencontres. La dévotion à la Sainte Vierge est encore très  >>>   >>> sensible en bien des cœurs et la distribution de cette simple image3, accompagnée de tes prières, sauvera de nombreuses âmes.

N’hésite pas à honorer notre maman du ciel par cette invocation : « Lys blanc de la Trinité, rose éclatante qui embellit le ciel, protégez-nous4. » et Notre-Dame, sans nul doute, répandra ses grâces en profusion.

Je te laisse, ma chère Bertille, en te confiant tout spécialement à Notre-Dame,

Anne

1 Pour en savoir plus : Manuel complet de la dévotion des trois Ave Maria – P. J-B de Chémery

2 Sainte Mechtilde – Livre de la grâce spéciale

3 Envoi sur simple demande d’images à offrir sur le site https://sanctuaire-trinite.com/priere-des-trois-ave/   

4 Révélation à sainte Gertrude la Grande   

 

A l’heure de la mort…

Seigneur, lorsque dans nos bras nous tenons le corps alourdi de nos morts, ce corps qui s’abandonne à nos derniers soins, il nous semble que l’âme, en son départ, nous relie brusquement à Vous. A l’heure où l’âme affronte votre jugement, nous Vous tendons, Seigneur, ce corps brisé, torturé, portant les cicatrices de toute une vie pour que ses souffrances rachètent la peine due au péché car, dans la balance de votre justice, les souffrances humaines peuvent peser d’un poids de gloire éternelle.

Dans l’attente de la résurrection, Seigneur, nous confions le corps de nos morts, comme nous confions leur âme, à votre amour.

Daignez entendre nos prières pour ceux qui nous ont précédés. Que notre prière les accompagne afin qu’il ne soit pas dit que nous ayons laissé souffrir au Purgatoire l’âme de l’un des nôtres en raison de notre négligence.

Catholique et Français… toujours ?

« Les plus grands devoirs de l’homme sont d’abord ceux qui l’obligent envers Dieu, ensuite ceux qui lient sa conscience à l’égard de ses parents et de sa patrie. Comme donc, la religion rend un culte à Dieu, ainsi la piété doit rendre un culte aux parents et à la patrie1. » Notre patrie, la France, est donc digne de notre amour et de nos honneurs. Cependant, un problème se pose si l’on s’interroge sur ce qu’est la France, sur sa nature profonde. Jean de Viguerie, dans son ouvrage Les deux patries, distingue clairement entre une France « Fille aînée de l’Eglise2 », et une France « Terre des Droits de l’Homme3 ». Sont-ce là les deux faces d’une même pièce, ou deux entités complètement opposées ? Doit-on les aimer pareillement, et comment ?

La patrie charnelle

L’étymologie latine signifie « Terre des Pères ». Pour les Romains, la Patrie est le lieu de sa naissance, de son éducation et de sa vie. Elle se retrouve dans la Cité, être moral personnifié qui rassemble ceux nés sur le même sol. Cette Patrie est aimable, digne des plus grands sacrifices, et est une part intime de notre être. Elle est également mère de vertus, apprenant à ses citoyens les mœurs permettant la vie en communauté. Chaque patrie a ses vertus propres, qui permettent de la distinguer des autres. Gardienne du bien commun, elle pousse chacun à s’élever par le travail, le courage, la piété, l’honneur. Elle s’incarne non seulement dans le sol, mais également dans les personnes qui la composent.

On retrouve dans les chansons de geste4 des traces de ce qu’était cette patrie pour nos ancêtres. « France la doulce5 » est sur les lèvres des chevaliers mourant au combat, des poètes en voyage. Elle est aimée pour ce qu’elle représente, le lieu de la naissance, de la famille et des amis. Elle est admirée pour ses vertus : la « clergie » et la « chevalerie », c’est-à-dire la science et la vaillance, avec les mérites qui leur sont annexes. « De toute vertu la France est une école », dira le poète Ronsard. Chacun de ses fils en est le garant : « Ne plaise au Seigneur Dieu que la France perde son honneur à cause de moi ! » s’écrie Roland. Cette France charnelle et aimable est chantée et célébrée tout au long de l’époque médiévale. Elle est soutenue à la fois par le Roi, et l’Eglise, qui veillent à sa prospérité et à sa sauvegarde contre les dangers temporels et spirituels. Cette France n’est-elle en effet pas née du baptême de Clovis par saint Rémi ? A travers son premier souverain, « choisi pour régner […] au sommet de la majesté royale pour l’honneur de la Sainte Eglise et la défense des humbles6 », elle reçoit pour mission de défendre la chrétienté et les plus faibles, et s’en acquittera pendant des siècles, malgré les défaillances de certains rois. Puis vint la Révolution.

La patrie idéologique

On ne peut expliquer la catastrophe que fut la Révolution sans parler des époques charnières que furent la Renaissance et les Lumières. L’évolution que connaît alors le terme de France et de patrie est symptomatique d’un changement des modes de pensée des acteurs de l’époque.

Sous Louis XIV, on ne parle déjà plus de France mais d’Etat. Cela peut sembler étrange de prime abord, mais en définitive, il y a un parallèle logique à établir avec la montée en puissance de l’absolutisme politique et de la centralisation du pouvoir. Avec le remplacement de la France par l’Etat, on perd l’être moral au profit d’un être administratif, délimité par des frontières et régi par des décrets et édits royaux. Ce qui importe n’est plus la France et son honneur, mais la Couronne et son prestige. Cette cause exige les plus grands sacrifices de la part des citoyens, et se traduit par des guerres quasi-permanentes avec leur lot d’atrocités. Une autre nouveauté est l’appel à mourir pour le service de la patrie, appel relayé par les grands écrivains de l’époque. Corneille nous apprend que :

« Mourir pour la patrie est un si digne sort

Qu’on briguerait en foule une si belle mort7 »,

tandis que Bossuet proclame : « Il faut être bon citoyen, et sacrifier à la patrie dans le besoin tout ce qu’on a, et sa propre vie8. » A l’époque médiévale, rien de tout cela n’était demandé au commun peuple.      

Cette même époque voit également     >>>       >>> l’apparition d’un sens complètement inédit de la patrie, porté par les libertins. Ces derniers rejettent l’idée de terre maternelle pour la remplacer par un universalisme désincarné. Ils sont « citoyens du monde9 », ont leur patrie dans « tout l’univers10 ». La patrie est le lieu « où l’on est bien ». Adieu la France, bonjour la Terre ! Pour ces hommes éclairés, mourir pour la patrie est stupide et contre-nature, puisque la seule chose qui importe est leur propre plaisir et confort. Les Francs-Maçons partagent ce cosmopolitisme, en défendant l’idéal de la fraternité universelle. On est loin de Roland et des chansons de geste…

La Révolution achève le retournement des valeurs, et la mort de « France la Douce ». La Loi remplace la terre nourricière, et les Droits de l’Homme se substituent aux vertus. « Elle a pour cadre la France, et les Français en sont très fiers », nous dit l’historien Jean de Viguerie, « mais elle s’étendra un jour au genre humain tout entier11 ». Elle décapite le Roi, elle exile et massacre les prêtres : les deux piliers de la France une fois effondrés, la place est prête pour créer une France nouvelle, une France de l’universalisme athée, qui n’est en fin de compte qu’une France du néant, une France vidée de sa substance et condamnée à se trahir continuellement. Sur l’autel de cette France bâtarde, on va bien vite immoler les Français en masse : les guerres de Vendée, les guerres de la Convention et celles de l’Empire permettent d’apporter un sang neuf, une génération baptisée dans les massacres républicains et marquée de la devise Liberté, Egalité, Fraternité, devise vide de sens car dirigée vers le néant qu’est l’homme sans Dieu. Le mythe du Volontaire, du Drapeau, des Droits de l’Homme, parvient « à sacraliser ce qui n’a et n’aura jamais rien de sacré12 ». Cette utopie qu’est la patrie révolutionnaire ne s’appuie sur rien de réel : où est la Liberté, s’il n’y a plus la Morale ? Où est l’Egalité, s’il manque Dieu et sa justice ? Où est la Fraternité, si l’on corrompt la Charité évangélique ? Qu’importe : dans l’esprit des révolutionnaires, ces mots ont force de Loi, et s’ils ne se retrouvent pas dans le réel, alors il faut forcer le réel à les accepter : « Nous ferons un cimetière de la France plutôt que de ne pas la régénérer à notre manière13 », disait en ce sens Carrier.

Cette France nouvelle, cette patrie des Droits de l’Homme s’est répandue dans l’Europe entière grâce à Napoléon, digne fossoyeur de la « France des vertus », comme se plaît à l’appeler Jean de Viguerie. Les deux guerres mondiales, et surtout la première, ont achevé d’enterrer ce qu’il restait de la Douce France, en donnant l’illusion qu’on se battait pour le Drapeau d’abord, puis pour l’Humanité. C’est décidément dans le massacre de ses enfants que la patrie républicaine aime à se régénérer.

Alors que faire devant ce constat somme toute déprimant ? Se résigner, baisser les bras ? Se recroqueviller sur soi-même en attendant la fin des temps ? Certes non. La France, la Patrie, vit dans nos familles, dans nos foyers, dans nos paroisses et les écoles qui enseignent aux enfants l’amour de Dieu et de la France, car les deux sont liés. On ne peut être réellement français si l’on n’est catholique, et puisque nous sommes catholiques en France, on ne peut être réellement catholique sans l’amour de notre Patrie, qui s’incarne dans une terre, dans des vertus, dans des hommes et dans une histoire. « La France se relèvera chrétienne, ou ne se relèvera pas14

 R.J.

Pour découvrir et approfondir :

– Sur la notion de patrie et de nation : Saint Th. d’Aquin, De regno.

– Sur la patrie française : Jean de Viguerie, Les deux patries.

 

1 St Thomas d’Aquin, Somme théologique, IIa, IIae, qu. 101a

2 Discours sur la vocation de la nation française, prononcé le 14 février 1841 par le père dominicain Henri- Dominique Lacordaire dans la cathédrale Notre-Dame de Paris

3 Depuis la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789

4 Poèmes épiques des XIe et XIIe siècles

5 La chanson de Roland

6 Testament de Saint Rémi

7 Horace, Acte II, scène 3

8 Politique tirée des propres paroles de l’Ecriture Sainte

9 La Motte le Vayer

10 Saint-Evremond

11 Les deux patries

12 Ibid.

13 Jean-Baptiste Carrier, député de la Convention, en 1793

14 Cardinal Pie, Lettre pastorale du 15 oct. 1873

 

Le quatrième commandement

L’enseignement de la foi est, en quelque sorte, construit sur quatre piliers. Les piliers sont ce qui soutient l’édifice. Il serait donc dangereux de les supprimer tous, ou même un seul. Ces piliers nous indiquent ce que nous devons croire et faire pour vivre en enfants de Dieu.

Nous pouvons résumer ainsi cet enseignement :

Ce qu’il faut croire : le Credo

Ce qu’il faut faire : les Commandements

Les secours que Dieu nous donne par sa Grâce pour y parvenir : les Sacrements

Ce que nous pouvons espérer de Dieu et Lui demander (la prière) : le Notre Père.

C’est par amour que Dieu nous a créés et qu’Il a fait de nous ses enfants. En retour, Il attend que, librement, nous l’aimions. Or, pour l’aimer, il faut faire sa volonté, c’est-à-dire obéir à ses Commandements. Nous pouvons en toute confiance nous soumettre à sa volonté, car nous savons qu’Il nous aime comme un Père et veut toujours notre bien. « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. » (Jn 14, 15).

Qu’est-ce que les commandements ?

Après le péché d’Adam et Eve qui ont désobéi à Dieu, la plupart des hommes se sont éloignés toujours davantage de Dieu qui, les voyant devenir de plus en plus mauvais, décida de former son peuple. Le peuple de Dieu, c’est toute l’histoire d’Abraham, Isaac, Jacob et ses douze fils, puis la vie en Égypte, et la sortie d’Égypte avec Moïse.

Trois mois après le départ d’Égypte, le peuple juif se trouvait à camper au pied du mont Sinaï. Moïse, appelé par Dieu, était monté prier tout en haut. Les Hébreux ont vu la montagne s’embraser et, au milieu des éclairs et du tonnerre, Dieu a donné à Moïse ses Commandements sur deux tables de pierre. Ces Commandements s’appellent le DECALOGUE, c’est-à-dire « les dix paroles » : les dix Commandements.

Ce sont les directives données par Dieu pour régler notre vie, car, étant notre Créateur, Il sait mieux que nous ce qui est bon ou mauvais pour nous ; c’est le « mode d’emploi », les règles à suivre pour gagner le bonheur du Ciel :

1-Tu adoreras Dieu seul et tu l’aimeras plus que tout.

2-Tu ne prononceras le nom de Dieu qu’avec respect.

3-Tu sanctifieras le jour du Seigneur.

4-Tu honoreras ton père et ta mère afin de vivre longuement.

5-Tu ne tueras pas.

6-Tu ne feras pas d’impureté.

7-Tu ne voleras pas.

8-Tu ne mentiras pas.

9-Tu n’auras pas de désir impur volontaire.

10-Tu ne désireras pas injustement le bien d’autrui.

Parmi les dix, les trois premiers concernent notre relation à Dieu, les sept autres nos relations avec notre prochain. Le quatrième commandement ouvre la seconde table de la Loi, et indique l’ordre de la charité : après Dieu, viennent les parents, puis le prochain.

Honore ton père et ta mère

Dieu a voulu qu’après Lui, nous honorions nos parents à qui nous devons la vie et qui nous ont transmis la connaissance de Dieu. Faire vivre les Commandements aux tout-petits, cela commence par les bonnes habitudes de comportement. Prises de bonne heure, ces habitudes seront ancrées dans l’âme et dureront toute la vie. « Instruis l’enfant de la voie à suivre : devenu vieux, il ne s’en détournera pas. » (Pr22, 6)

Dans la mesure où les enfants, tout petits, auront assimilé ces habitudes dans leur vie quotidienne, ils comprendront d’autant mieux plus tard l’enseignement des commandements qu’ils recevront ensuite, parce qu’ils l’auront d’abord vécu de l’intérieur. Le meilleur enseignement du quatrième Commandement est l’apprentissage de l’obéissance et du respect à ses parents. Pourquoi ? Parce que les parents représentent près de lui l’autorité de Dieu.

Normalement, chez les petits, ces deux notions ne posent pas trop de problèmes, mais si l’on n’a pas eu ces exigences très tôt pour lui, ce sera difficile plus tard, même avant l’adolescence.

L’obéissance

Renoncer à notre volonté propre va directement à l’encontre de nos mauvaises tendances, séquelles du péché originel, lui-même faute d’orgueil et de désobéissance. C’est ce qui explique la forte réticence que nous éprouvons toujours, malgré la purification du baptême, à nous soumettre à la volonté d’un autre. Ainsi l’obéissance est signe d’humilité, et la désobéissance signe d’orgueil.

Elle est le premier des renoncements, le sacrifice de notre volonté propre, autant pour les grands que pour les petits ; ne nous étonnons donc pas des oppositions rencontrées avec nos enfants, et si on ne sait pas se faire obéir d’un tout petit, soyons sûrs qu’il n’obéira pas mieux plus tard. L’obéissance a pour but le véritable bien de l’enfant, elle est en effet pour lui l’occasion d’exercer sa volonté, et c’est ce qui, peu à peu, le rendra libre, agissant dans la confiance qui, seule, peut faire admettre à l’enfant que cette exigence est faite pour son bien, au lieu de la considérer comme une brimade ; c’est par cette confiance que l’on obtiendra de l’enfant une obéissance sereine qui suppose qu’il se sente aimé.

 

Le respect

Cela consiste à reconnaître la valeur de la personne à qui l’on s’adresse, et à le lui exprimer extérieurement par les paroles, les attitudes ou les gestes correspondant à ce sentiment intérieur. Exiger le respect de la part d’un enfant est le signe de l’autorité que nous tenons de Dieu auprès de lui, pour le conduire jusqu’à Lui.

Mais le respect n’est pas à sens unique, et ce sera beaucoup plus facile d’obtenir le respect de nos enfants si eux-mêmes sentent l’estime que nous leur portons, ce qui génère à la maison une ambiance tout à fait favorable à l’harmonie d’une famille.

Il ne faut jamais laisser passer une insolence, un geste agressif, un haussement d’épaule, des yeux levés au ciel avec un soupir, un ton de voix revendicatif, mais tout de suite réagir : rectifier et demander des excuses.

Savoir se faire respecter fait partie de notre devoir de parents, et de tout éducateur. C’est imposer aux enfants des limites à ne pas dépasser, et les sécuriser. « L’autorité ne s’exerce pas pour la satisfaction de celui qui commande, mais pour le bien de celui qui est commandé. »  (Abbé Jean Viollet, Traité d’éducation à l’usage des parents.)

Lorsque nous expliquons les Commandements, il est indispensable de donner quelques exemples concrets pour bien faire comprendre aux enfants leur valeur et leur nécessité, et de leur rappeler qu’ils nous ont été donnés par Dieu pour notre bien.

Il n’y a que Dieu qui puisse nous donner ces règles et nous imposer des devoirs. Lui seul est le Maître, Lui seul peut récompenser ou punir suivant les mérites de chacun.

Nous pourrons faire une comparaison avec le code de la route, une règle du jeu, un mode d’emploi…Si on ne respecte pas les règles indiquées, que va- t-il se passer ?

La vie surnaturelle n’échappe pas à cette loi générale, elle a à suivre le « code de la route » pour le Ciel, ou encore le « mode d’emploi » des créatures. Ces règles divines, ce sont les dix commandements.

 

Sophie de Lédinghen