Le sacerdoce caché

Mon Dieu, vous avez tiré la femme du côté de l’homme, c’est-à-dire de son cœur. Il nous est donc donné d’être le cœur du foyer, de comprendre avec intuition ce que l’homme formalisera, dans le temps, avec sa raison.

Le côté, c’est aussi une partie du corps à laquelle nul ne fait trop attention, la tête, les mains, la silhouette sont remarquées, mais pas le côté.

Aussi tirées du côté, nous avons un rôle humble et caché mais essentiel puisque le cœur assure la vie de tout le corps.

 

Mon Dieu, apprenez-moi à être ce cœur qui donne vie à ceux qui me sont confiés ou que je croise le temps d’un moment.

A être ce petit moteur silencieux qui tourne sans cesse, de façon si évidente, si normale, que nul ne le remarque.

A exercer une sorte de sacerdoce caché, puisque ne pouvant vous offrir la Victime sur l’autel, je peux offrir mon sacrifice sur l’autel de votre Cœur, pour les âmes dont j’ai la charge, celles qui sont loin de vous, celles qui se sont recommandées à mes prières.

 

Douce Vierge Marie, vous regardant dans l’Evangile, je ne vois ni discours, ni action de terrain éclatante, ni entreprise, ni miracle.

Juste une femme qui fait humblement son devoir d’état comme je dois faire le mien, attentive aux autres, devinant leurs besoins lors de la Visitation et des Noces de Cana. Une mère qui offre à Dieu la victime qu’est son Fils sur la Croix, s’unit à ses souffrances, offre les siennes toutes maternelles, et avec Lui pardonne aux bourreaux.

 

Mon Dieu, dans mes tâches du quotidien, mes peines physiques ou morales, donnez-moi de tourner mon cœur vers Vous, afin qu’avec votre grâce, j’enfante des âmes par mon offrande, dans une prière silencieuse.

Apprenez-moi à ne pas vouloir agir avec éclat, surtout quand je n’y peux rien mais à m’oublier, à me renoncer pour obtenir ainsi, bien plus sûrement la grâce souhaitée.

 

Mon Dieu, apprenez-moi à aider vos prêtres comme le faisaient les saintes femmes pour les apôtres. Après leur rude journée, ne faisaient-elles pas le repas, ne réparaient-elles pas tuniques déchirées et sandales usées dans une prière muette mais qui préparait les âmes à recevoir la parole de Dieu ?

A leur exemple, je peux porter discrètement un prêtre dans ma prière, participant ainsi au sacerdoce, réparer ou confectionner des ornements, en offrant tout le temps passé, les petits points comptés comme autant d’intentions pour son ministère.

Sœurs, mères de prêtres ou simples fidèles, nous pouvons ainsi accompagner efficacement le ministère de celui pour lequel nous œuvrons, afin de lui préparer des âmes.

 

Mon Dieu, apprenez-moi ce sacerdoce caché qui peut tant pour l’Eglise, pour le monde, et dont je ne verrai les fruits que dans votre Eternité.

         

                Jeanne de Thuringe

 

En sortant de l’école

 

Poème de Jacques Prévert (Histoires et autres histoires, 1946)

Interprétation : Les Frères Jacques – Octobre 1949

 

Pour saluer la fin de l’année scolaire et l’envol vers de nouvelles destinations… Un voyage imaginaire d’enfants, par chemin de fer.

 

En sortant de l’école
Nous avons rencontré
Un grand chemin de fer
Qui nous a emmenés
Tout autour de la terre
Dans un wagon doré

 

Tout autour de la terre
Nous avons rencontré
La mer qui se promenait
Avec tous ses coquillages
Ses îles parfumées
Et puis ses beaux naufrages
Et ses saumons fumés


Au-dessus de la mer
Nous avons rencontré
La lune et les étoiles
Sur un bateau à voiles
Partant pour le Japon
Et les trois mousquetaires des cinq doigts de la main
Tournant la manivelle d’un petit sous-marin
Plongeant au fond des mers
Pour chercher des oursins


Revenant sur la terre
Nous avons rencontré
Sur la voie de chemin de fer
Une maison qui fuyait
Fuyait tout autour de la terre
Fuyait tout autour de la mer
Fuyait devant l’hiver
Qui voulait l’attraper


Mais nous sur notre chemin de fer
On s’est mis à rouler
Rouler derrière l’hiver
Et on l’a écrasé
Et la maison s’est arrêtée
Et le printemps nous a salués.

C’était lui le garde-barrière
Et il nous a bien remerciés
Et toutes les fleurs de toute la terre
Soudain se sont mises à pousser
Pousser à tort et à travers
Sur la voie de chemin de fer
Qui ne voulait plus avancer
De peur de les abîmer


Alors on est revenu à pied
À pied tout autour de la terre
À pied tout autour de la mer
Tout autour du soleil
De la lune et des étoiles
A pied, à cheval, en voiture et en bateau à voiles.

 

L’autorité de l’époux vis-à-vis de l’épouse

Comment comprendre l’injonction de saint Paul, entendue lors des messes de mariage : « Que les femmes soient soumises à leurs maris1 » ? En quel sens le mari est-il « le chef de la femme2 » ? Jusqu’où s’étend l’autorité de l’époux à l’égard de l’épouse ? Avançons pas à pas, en vue d’essayer d’apporter quelques éléments de réponse à ces questions.

 

  1. « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, je lui ferai une aide semblable à lui3 Dieu donne à Adam une aide, une compagne qui lui est semblable en humanité et en dignité. Par conséquent, l’époux et l’épouse seront égaux en droits dans les choses qui sont propres à la personne et à la dignité humaine. S’étant engagés par le même contrat de mariage, ils seront encore égaux en droits et en devoirs à l’égard des choses qui découlent du pacte nuptial et qui sont impliquées par la vie conjugale. Par exemple, ils auront le même droit sur le corps du conjoint, et le même devoir général d’éducation des enfants.

 

  1. Égale en nature et semblable à l’homme, la femme n’est pourtant pas sa copie pure et simple. « Je lui ferai une aide qui soit semblable à lui » : ce ne serait pas assez aider le premier homme que de le répéter tel qu’il est ; il vaut mieux l’achever, en dotant sa compagne de certaines qualités qui ne se rencontraient pas suffisamment en sa personne : la sensibilité, la délicatesse, la grâce…

Ainsi, il y a égalité de nature, mais encore, du fait de la différenciation des sexes, mutuelle complémentarité.

 

  1. L’égalité de nature et la complémentarité n’empêchent pas qu’il y ait une hiérarchie et par conséquent une subordination entre les époux. Ceux-ci, égaux en humanité et en dignité, sont inégaux dans la société conjugale, en tant que celle-ci, comme toute société, exige, avec la distinction des fonctions, d’un côté l’exercice de l’autorité et de l’autre la soumission ct l’obéissance. C’est à l’homme que Dieu a conféré l’autorité au sein du foyer. « Ton mari dominera sur toi4. » Cette domination n’est pas en elle-même la conséquence du péché originel, car elle aurait existé même sans le péché (et elle existait de fait avant qu’Adam et Eve ne pêchent) ; ce qui est un fruit du péché >>> >>> originel, c’est le caractère pénible que pourra revêtir cette subordination.

La supériorité conférée à l’homme dans l’ordre du gouvernement familial est en accord avec les dons particuliers que Dieu lui a concédés. En effet, l’intelligence masculine a généralement (selon la nature) plus d’étendue, plus d’élévation, considérant plus facilement les choses dans leur principe ; ses jugements sont moins dépendants de la sensibilité. C’est donc d’abord à l’homme que reviendra par nature la mission du gouvernement dans la cellule familiale. La femme devra, quant à elle, obéissance à son mari. Voici ce que dit Léon XIII à ce sujet, dans l’encyclique Arcanum : « L’homme est le chef de la famille et la tête de la femme ; celle-ci cependant, parce qu’elle est la chair de sa chair et l’os de ses os, doit se soumettre et obéir à son mari, non comme une esclave, mais comme une compagne, afin que l’obéissance qu’elle lui rend ne soit ni sans dignité ni sans honneur. »

 

  1. Jusqu’où s‘étend l’autorité de l’époux sur l’épouse ? A-t-il directement autorité sur elle, ou bien son autorité n’est-elle en quelque sorte qu’indirecte, par l’intermédiaire de la famille dont il est le chef ?

La famille est la première des sociétés ; et cette société existe dès lors qu’elle est formée par l’union légitime de l’homme et de la femme, quand bien même il n’y aurait pas encore d’enfants issus de cette union. Le mari, chef de la société familiale, est donc, selon l’ordre divin, le chef de la femme ; il détient une autorité directe et réelle sur son épouse : « Le mari est le chef de la femme, comme le Christ est le chef de l’Eglise.5»  « Le chef de la femme (mariée), c’est l’homme (l’époux)6.» C’est ainsi que ces deux égaux sur le plan naturel sont inégaux sur le plan social (dans la société domestique). La femme pourra bien être plus riche en dons de la nature ou de la grâce (et être, sous ce rapport, supérieure à l’homme), elle n’en restera pas moins inférieure sous l’angle de la hiérarchie familiale, étant soumise au gouvernement du mari.

L’homme a donc le devoir de commander. « Maris, vous avez été investis de l’autorité. Dans vos foyers, chacun de vous est le chef, avec tous ses devoirs et toutes les responsabilités que comporte ce titre. N’hésitez donc point à exercer cette autorité ; ne vous soustrayez point à ces devoirs, ne fuyez point ces responsabilités. La barre de la nef domestique a été confiée à vos mains : que l’indolence, l’insouciance, l’égoïsme et les passe-temps ne vous fassent pas abandonner ce poste7.»

 

  1. Il va sans dire que cette autorité n’est pas absolue et qu’elle a des limites. La première de ces limites est la loi de Dieu. Lorsque l’ordre donné va à l’encontre des commandements, il ne faut pas obéir, mais résister, et défendre, avec respect, calme et affection sans doute, mais encore avec une inébranlable fermeté les droits de Dieu.

L’autorité étant donnée par Dieu à l’homme pour le bien commun de la famille, ce dernier ne doit rien demander à son épouse qui aille contre ce bien. S’il est évident que telle décision va contre le bien commun, l’épouse est tenue de s’y opposer par tous les moyens moralement permis. Mais si, à la place de la certitude, il y a seulement un doute, l’épouse, ayant fait part à son mari de ses réserves et appréhensions, obéira tout de même, si l’époux n’a pas changé d’avis.

Puisqu’il s’agit d’une autorité sociale, le mari n’a pas à diriger son épouse au for interne (dans le domaine de sa conscience). Cette dernière, dans les domaines de sa vie intérieure et spirituelle, reste parfaitement maîtresse d’elle-même et n’a de compte à rendre qu’à Dieu. Elle pourra bien sûr s’ouvrir de son intérieur à son mari ; mais son époux pourra faire de même à son égard, et sur ce plan, ils sont parfaitement libres et égaux.

Pie XI résumera ce paragraphe : « Cette soumission n’abolit pas la liberté qui revient de plein droit à la femme, tant à raison de ses prérogatives comme personne humaine, qu’à raison de ses fonctions si nobles d’épouse, de mère et de compagne ; elle ne lui commande pas de se plier à tous les désirs de son mari, quels qu’ils soient, même à ceux qui pourraient être peu >>>         >>> conformes à la raison ou bien à la dignité de l’épouse… mais elle interdit cette licence exagérée qui néglige le bien de la famille, elle ne veut pas que, dans le corps moral qu’est la famille, le cœur soit séparé de la tête, au très grand détriment du corps entier8.

 

  1. L’épouse se souviendra donc qu’elle doit obéissance à son mari, et qu’en lui obéissant dans les choses légitimes, elle accomplit la volonté de Dieu : « Que les femmes soient soumises à leurs maris, comme au Seigneur » dont l’époux est dans la famille, l’intermédiaire et le représentant.

Quant à l’homme, il devra se rappeler, dans l’exercice de son autorité, qu’il s’adresse à une compagne et non à une servante. L’épouse lui est soumise, mais comme une aide, une conseillère et une amie. Avec quelle précaution, quelle douceur et quelle délicatesse devra-t-il commander ! Son autorité sera extrêmement humble, condescendante, désireuse de s’effacer au maximum pour ne laisser paraître que l’amour et la liberté. D’où les recommandations de saint Paul : « Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé l’Eglise et s’est livré lui-même pour elle… Que chacun de vous aime sa femme comme soi-même. » Alors, transfigurés par l’amour, les ordres auront la douceur du conseil.

 

  1. La femme, soumise à son mari « comme au Seigneur », n’oubliera pas qu’elle est son aide, sa conseillère, et qu’elle ne doit pas être passive à l’égard de l’autorité de son mari. Elle a, vis-à-vis de son époux et de sa famille, un rôle actif à jouer. Sans parler des cas exceptionnels (car, en soi, il ne devrait pas en être ainsi), quoique fréquents (car en fait, cela arrive souvent), ou c’est la femme qui possède les qualités masculines du gouvernement et doit les exercer, en cas de défaillance du mari, pour le bien commun de la famille, l’épouse apporte dans le foyer les richesses du cœur et du dévouement, les intuitions ct les finesses qui sont le fruit de sa grande sensibilité. Ainsi, elle « affine » l’homme, lui communique l’esprit de douceur et de patience et se fait en toutes choses son conseil et son soutien. Cette influence, la femme l’exerce avant tout par l’amour. C’est pourquoi elle est en vérité le cœur du foyer dont la tête est l’époux : « Si le mari est la tête, la femme est le cœur, et, comme le premier possède la primauté du gouvernement, celle-ci peut et doit revendiquer comme sienne la primauté de l’amour. »

 

  1. La maîtresse vertu de l’épouse, c’est l’obéissance surnaturelle. Cela signifie que l’épouse fait son salut principalement en obéissant à son époux. Bien entendu, l’épouse chrétienne a d’autres obligations que celle-là ; mais c’est l’obéissance qui donne son mérite surnaturel à sa vie d’épouse. Rien de ce qui la détourne de cette obéissance ne sera fécond devant Dieu. Mais si elle obéit surnaturellement, par amour et comme au représentant du Christ, alors elle progresse incomparablement mieux que si elle faisait tout autre chose selon son jugement propre.

Il y a dans l’attitude de soumission chrétienne de l’épouse un profond acte de foi en la Providence qui mène à bien son dessein surnaturel avec des instruments limités et déficients. Il ne s’agit donc pas d’abord d’estimer les qualités humaines de son mari, son intelligence ou sa prudence ; non, il s’agit d’avoir confiance dans le Christ, dans le Christ qui saura, malgré toutes les déficiences humaines de l’époux, rattraper les choses si l’épouse obéit. C’est dans cet acte de foi et d’espérance, renouvelé quotidiennement, que l’épouse trouvera le secret de sa sainteté.

 

Alors, épouses, « élevez vos cœurs ! Ne vous contentez pas d’accepter et presque de subir l’autorité de votre époux à qui Dieu vous a soumises par les dispositions de la nature et de la grâce. Dans votre sincère soumission, vous devez aimer l’autorité de votre mari, l’aimer avec l’amour respectueux que vous portez à l’autorité même de Notre-Seigneur, de qui descend tout pouvoir de chef10. »

R.P. Cassien-Marie

1 Eph. 5, 22

2 id. 23

3 Gen. 2, 18

4 Gen. 3,16

5 Eph. 5, 23

6 I Cor. 11, 2

7 Pie XII, 10 septembre l94l

8 Encyclique : Casti Connubii (31 décembre 1930)

9 S. S. Pie XII

10 Pie XII, 10 septembre 1941

 

Notre-Seigneur et Notre-Dame

« Lorsque l’Esprit de Dieu agit dans certaines âmes élues pour accomplir une même œuvre, il les pousse, les unes vers les autres, et les rapproche par un mouvement irrésistible1

Pour donner de la lumière sur la question de la complémentarité de l’homme et de la femme, nous nous proposons de considérer, dans la perfection du plan divin de notre Rédemption, les rôles que tiennent Jésus et sa Mère. Leur divine association en vue d’assurer notre salut constitue à jamais le modèle de toutes les œuvres accomplies de concert par un homme et par une femme. Nous avons l’assurance que la part respective que chacun d’entre eux y prend est exactement celle qu’il doit y tenir puisqu’elle a été déterminée par Dieu. Cette pensée est d’une très grande importance à nos yeux puisque nous savons ainsi ce que la Sagesse divine a décidé de confier au nouvel Adam et à la nouvelle Eve. Toutes les plus secrètes harmonies étant connues et respectées de Dieu, ne nous suffit-il pas de remonter, à partir de la répartition de leurs attributions respectives, vers les caractères propres de la masculinité et de la féminité, et de mieux comprendre leur admirable complémentarité ? Nous ne serons pas exhaustifs, loin s’en faut ! Nous nous bornerons à remarquer trois aspects de cette complémentarité entre le Christ et sa Mère. Le premier sera celui de l’extériorité et de l’intériorité ; le deuxième de la paternité et de la maternité et le troisième de la parole et de l’exemple.

A) Extériorité et Intériorité

Celui dont nous parlent les Evangiles, dont les paroles et les actes nous sont rapportés, c’est le Verbe qui s’est incarné, c’est Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’est de sa passion que la narration nous est donnée. Nous y lisons tous les supplices que son corps endura et nous comprenons un petit quelque chose du martyre intérieur dans lequel vécut son âme. Nous savons qu’en toutes choses, Il réalise à la perfection le plan que son Père lui avait fixé pour l’accomplissement de notre Rédemption. C’est l’exécution par l’obéissance du Christ du grand sacrifice salvateur, qui se trouve au cœur du Mystère, que nous découvre la Révélation.

Pour comprendre la place qu’y prend Marie, il nous faut considérer qu’elle vit en elle-même, avec toute la force de son amour, tout ce que Jésus entreprend sous ses yeux. La plus parfaite harmonie unit leurs deux cœurs au point que ce qui affecte l’un retentit au même instant dans l’autre. Pour comprendre donc la compassion de Marie, il suffit de s’arrêter sur chaque information que nous donnent les Evangiles à propos de Notre-Seigneur, pour en méditer la répercussion dans son âme. C’est au-dedans d’elle-même qu’elle vit l’agonie de Gethsémani, la flagellation ou la crucifixion. C’est elle qui recueille dans toute leur plénitude les sept paroles tombées de la Croix. Rien de ce qui émane de Jésus n’est perdu par sa divine associée. Saint Luc l’a excellemment noté et sa parole est l’une des plus éclairantes qui soit sur la très Sainte Vierge Marie : « Elle gardait fidèlement toutes choses en son cœur2

Ce que nous avons dit là du rôle extérieur et du rôle intérieur de Jésus et de Marie ne leur a pas été dévolu par Dieu sans la prise en considération de ce que le premier est homme et que la seconde est femme. Au premier revient l’œuvre visible, qui apparaît extérieurement, dont le caractère est public. A la seconde, l’appropriation intérieure de cette réalisation masculine. Au génie et à l’amour qui se dévoilent se trouvent associés le génie et l’amour qui demeurent sous le voile.

Est-ce à dire que nous refusons à la femme la capacité d’initiative et d’œuvre personnelle ? Ne le penseront que des esprits univoques. Ce n’est pas en effet parce que nous admirons la merveilleuse capacité féminine à s’ouvrir par l’intelligence et par le cœur aux œuvres masculines que nous leur déniions pour autant l’intuition de l’entreprise adéquate. Nous avons simplement voulu dire bienheureux l’homme à qui Dieu a associé cette créature féminine qui devine son cœur et l’épouse avant même qu’il ait formulé un mot.

B) Les réalisations de l’homme et l’homme à réaliser :

Ce qu’aurait pu faire la très sainte Vierge Marie si elle avait été évangéliste, apôtre ou premier pape dépasse, et de très loin, tout ce qu’ont fait de meilleur tous les évangélistes, tous les apôtres et tous les papes réunis. Bien mieux que tous, elle eût écrit la vie de son Fils, évangélisé les Juifs et les Gentils, gouverné l’Église naissante ! Allons-nous donc soupirer en regrettant que ces missions éminentes ne lui aient pas été confiées ? Que ce soit saint Pierre, et non pas elle, qui ait pris la parole le jour de la Pentecôte ? Qu’il n’existe pas un Evangile selon sainte Marie ? Nous sommes portés à considérer les œuvres extérieures, qui se voient et qui s’apprécient. Nous estimons ce qu’elles ont pu coûter d’énergie, supposer de vertu et de persévérance. Nous en saluons les héros avec enthousiasme et reconnaissance ! Mais il y a une pensée qu’on trouve dans l’Evangile, exprimée par une femme du peuple, mais qui vient malaisément dans nos esprits d’hommes. Saint Luc nous raconte qu’un jour, une voix s’éleva au milieu de la foule et s’adressant à Jésus, fit l’éloge de Marie : « Heureuse le sein qui t’a porté et les mamelles que tu as sucées3.» Et cette voix était celle d’une femme qui sait bien ce qu’un homme accompli doit à sa mère.

Infiniment mieux que de raconter la vie de Jésus, Notre-Dame L’a mis au monde, que d’évangéliser les foules, elle a appris à Jésus tout ce qu’Il devait apprendre de science humaine, que de gouverner l’Église, elle L’a enfanté. C’est ici qu’il s’agit d’établir la comparaison décisive entre la mission de l’homme et celle de la femme et de se demander ce qu’il y a de plus grand entre le gouvernement du monde et le façonnement du cœur de celui qui gouverne le monde. Marie est incomparablement plus grande que tous les anges et tous les saints pour Celui qu’elle a conçu, porté dans ses entrailles, tenu sur son sein et élevé, lui qui était le Fils de Dieu.

Chez les hommes comme chez les femmes, il n’est pire signe de superficialité que celui d’avoir oublié ou méconnu l’incomparable grandeur naturelle de la maternité.

C) La parole et l’exemple :

Notre dernière association est celui de la parole et de l’exemple. Celle des trois Personnes Trinitaires qui s’incarne est le Verbe, la Parole. Les Mystères de notre Foi nous ont été dévoilés par l’Homme-Dieu. Il nous a transmis toutes ces vérités inestimables qui forment ce dépôt révélé de la Foi. S’Il a aimé le silence et s’Il nous a donné l’exemple admirable de ses vertus, Il savait que son devoir était de nous instruire de sa Parole de vie qui transformerait les âmes et le monde. Et Il a voulu que ses apôtres et que ses disciples, sur lesquels des langues de feu s’étaient déposées au jour de la Pentecôte, parcourent après lui le monde pour évangéliser, pour annoncer la Bonne Nouvelle. Il faut bien le reconnaître : c’est ici la parole qui est d’or tandis que le silence n’est alors que d’argent.

Mais l’exemple ? Que vaut la parole et que reste-t il d’elle, si elle n’est accompagnée de l’exemple ? Ce qui demeure dans notre esprit est bien davantage l’image de nos parents agenouillés chaque soir pour la prière familiale que des bonnes raisons qu’ils nous fournirent de nous mettre à genou !

Nous comptons les paroles de Marie. La plus longue est le Magnificat et, toutes mises bout à bout, elles tiennent sur une page. Voilà donc tout ce qu’avait à nous dire la Mère de Dieu ? Elle est en réalité le premier et le meilleur disciple de son Fils, et sa fille chérie. Elle illustre par sa vie les paroles qu’Il prononce. Et cela tient encore à la complémentarité de l’homme et de la femme qu’on apprend à vivre en écoutant le premier et en regardant la seconde.

Là encore, ne conclura que la femme est perdante dans cette comparaison que celui qui ne pénètre pas dans les profondeurs de l’être et qui n’entend pas que le bon exemple qu’on reçoit exprime bien plus certainement la qualité d’un être que la bonne parole qu’on reçoit de lui.

Nous aurions une longue et édifiante litanie de comparaisons à égrener. Rien que d’y penser, elle nous ravit. Chacune d’entre elles chanterait à son tour que Dieu a fait une belle chose en créant l’homme et une non moins belle en créant la femme, mais que leur union et leur complémentarité ajoutent encore incomparablement à la beauté de l’un et de l’autre.

R.P. Joseph

1 Père Didon, Jésus-Christ, p. 110

2 Lc 2, 51

3 Lc 11, 27

 

 

Editorial

Chers amis,

Ne croyez pas que ce numéro « enfonce des portes ouvertes » et que tout a déjà été dit sur ce sujet ! La puissance des lobbies ne relâche pas son étreinte et nous sommes harcelés sans cesse, que ce soit par les slogans, les affiches ou les arguments en tout genre. Petit à petit nous nous affadissons : hommes et femmes perdent leur identité chez nous comme ailleurs, même si nous sommes un peu plus résistants…

Le démon a réussi ce tour de force : la femme, par orgueil, a renié sa féminité, elle a mis sous le boisseau les qualités de son cœur et a pris la place de l’homme.

L’homme, par faiblesse, s’est laissé voler sa virilité, il a perdu sa fierté. Il cherche sa tranquillité, s’amuse doucement de celles qui n’hésitent pas à prendre sa place. Comme au temps de Samson, ces nouvelles Dalila l’ont aveuglé et l’ont trahi ; elles lui ont ôté force et autorité.

Et les forces du Mal s’acharnent sur cette soi-disant égalité allant jusqu’à proclamer l’indifférenciation des genres et à l’enseigner à nos tout-petits ! Dissocier la génération de la procréation, détruire la famille, confier l’éducation des enfants à l’Etat dès le plus jeune âge, insérer des puces dans le cerveau humain, laissant l’intelligence artificielle anéantir nos volontés : tout est dans une logique définie qui veut bannir Dieu de sa Création… Mais qui a pris la mesure de l’importance et de la continuité du système philosophique qui mène ce monde ? Hommes et femmes sont complémentaires ; ils ne sont ni égaux, ni opposés. Dieu l’a voulu ainsi.

Aussi appartient-il au catholique de défendre son Dieu à sa mesure et de réagir du plus petit élément au plus grand en ne niant l’importance ni de l’un ni de l’autre. C’est un ensemble. Cette lutte demande de la vertu, des sacrifices, de la force, mais ce système doit être refusé dans sa globalité. Il n’est plus temps de se cacher les yeux : même nos enfants sont pris en otage ! Il nous faut donc aborder ces sujets dès l’adolescence pour leur en montrer la logique et leur en faire comprendre l’enjeu : du pourquoi de notre habillement jusqu’aux fondations de nos convictions. L’heure n’est plus aux concessions en essayant de vivre comme le monde tout en gardant notre conscience, autant que faire se peut, à l’abri d’un masque qui n’est plus suffisant… Le combat est là, présent chaque jour. Il nous demande de marcher fièrement sur les routes de Chartres à Paris, comme lors de nos processions dans les rues, d’être fiers de notre foi et de nos convictions dont la réalité de la complémentarité homme/femme n’est pas la moindre !

Découvrons dans ce numéro comment étayer notre raisonnement et défendre nos arguments pour les assumer sans nous décourager. Notre force est dans le Seigneur ! Nous savons que la victoire est au bout !

Que ces vacances soient l’occasion pour chacun d’entre nous de prendre le temps de réfléchir sur ce sujet essentiel, et que Notre-Dame nous aide et nous soutienne dans ce combat !

 

Marie du Tertre