Jésus ne lui répondit rien  

Entendant que Jésus est Galiléen, Pilate envoie Jésus chez Hérode, pensant ainsi se défaire d’une situation qui l’embarrasse. Pilate, prisonnier de l’opinion de la foule, hésite à condamner le Juste. Alors il saisit l’aubaine : Hérode tranchera. Le faible se défausse sur le roi mondain.

 

           Hérode voit là une aubaine, un beau divertissement pour lui et les flatteurs qui l’entourent. Jésus pourrait faire un miracle ? Un prodige ? Quelque chose de sensationnel ? Le monde cherche sans cesse le spectacle, mais passe à côté de ce qui est vraiment, du beau, du bon, du vrai.

Mais Jésus ne lui répondit rien.

 

  Jésus parle à Judas, à ses juges qui le bafouent, aux soldats du temple qui le giflent et lui crachent au visage. Il parle à Pilate. Il adresse une parole de charité aux filles de Jérusalem. Aux égarés par faiblesse, par peur, par ignorance, il apporte la vérité, une lumière. Il implore même le pardon à ses bourreaux lorsqu’il s’écrie sur la Croix : « Père, pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Mais à Hérode, Jésus ne répondit rien.

 

  A toutes ces paroles, s’ajoutent les regards. Imaginons-nous le regard de Jésus ? On dit que le regard est une fenêtre sur l’âme. Souvent, dans des yeux, nous percevons en effet l’insondable, l’immatériel, l’âme ! Voilà pourquoi nous sommes transpercés par le regard de la Vierge Marie, mère de douleur, son fils mort descendu de la croix dans les bras. Qui peut soutenir un tel regard sans honte et profonde componction pour ses péchés ? Voilà pourquoi le regard de Jésus retourna le cœur de saint Pierre qui venait de le trahir. Pierre se retira et pleura amèrement. Merveilleux don des larmes suscité par un regard de Jésus. Mais avec Hérode, Jésus garde les yeux baissés. Pas un mot, pas un geste, pas un regard.

 

  De dépit, Hérode affuble Jésus de la robe des fous. Les moqueries fusent, les railleries. Dieu outragé par la volupté, par la sensualité, par la recherche effrénée du plaisir des mondains. Dieu ne leur adresse pas un regard, pas un geste, pas une parole. Car les âmes enchaînées dans les plaisirs du monde ne peuvent la recevoir. Terrible sentence ! Pas un mot de Dieu. Des cœurs tellement fermés à la grâce que Dieu ne donne plus la grâce. Comme c’est terrifiant ! Pourtant Hérode était heureux que Jésus vînt chez lui. Peut-être était-il sincèrement attiré par ses prodiges. Mais, il ne voyait que l’homme, il ne voyait que le spectacle, que le sensible chez Jésus. Il ne recherchait pas la vérité, la vraie sagesse, la croix que Jésus demande de porter pour le suivre, le vrai amour fondé sur la volonté. Il ne voulait pas voir Dieu. Comme parfois, nous recherchons trop à sentir Dieu, à sentir sa paix, sa joie, à le voir nous obtenir moult bien matériels. Mais à côté, nous rechignons à méditer, à nous sacrifier, à travailler la terre de notre âme pour que la grâce y donne du fruit. Puis, nous nous étonnons que Dieu reste sourd à nos prières. >>> >>> Jésus ne lui répondit rien.

  Pour savoir parler à Dieu et obtenir la grâce de son regard et de sa parole, il faut fuir le palais d’Hérode. Fuir le monde et ses sirènes, fuir la sagesse du monde qui est folie pour Dieu.

 

  Pères de famille, n’oublions pas que nous sommes responsables de l’âme de nos enfants, même l’été ! Prenons-nous le temps de veiller sur l’organisation des vacances de chacun d’entre eux ? Vers quoi nous tournons-nous ? Les saines détentes en famille ? Les camps scouts ? Les grandes virées en montagne ou dans nos campagnes ? Les visites de nos trésors architecturaux ? Les veillées aux étoiles ou les affûts au gibier dans les bois ? Les lectures saines sous le soleil de midi ? Les longs cafés ou apéros à parler avec ses adolescents de leur avenir ? Ou plus simplement la vie simple en famille autour des grands-parents ou des amis ?

Ou projetons-nous d’emmener notre famille dans les lieux où le monde danse dans la débauche comme Salomé à la cour d’Hérode ? Méfions-nous des plages fréquentées où le péché s’étale à tous les vents. Méfions-nous des grandes fêtes mondaines où, très vite, le soir, le péché ruisselle, par les mots, les tenues, l’alcool et les danses sensuelles. Méfions-nous des lieux et des évènements où le monde a son emprise, car son emprise pourrait s’étendre sur nos cœurs. Nous avons le devoir de fuir tous ces lieux où, honnêtement, aujourd’hui, un chrétien n’a plus sa place. Comme dans le palais d’Hérode, Dieu y sera silencieux. Pas un geste, pas un mot, pas un regard de Dieu, car Dieu ne peut donner sa grâce à des cœurs qui n’en veulent pas. Cela est terrifiant !

  Méditons-cela. Demandons à Dieu la grâce qu’Il nous regarde comme il regarda Pierre après le chant du coq.

Louis d’Henriques