Les grandes vacances d’été sont un temps long, propice à préparer la rentrée. Les repas en famille, les emplois du temps allégés, les longues discussions le soir quand la chaleur se fait plus douce, les retrouvailles avec les cousins et les grands-parents, tous ces moments sont des temps précieux où nous pouvons regarder notre vie, sortir la tête de l’eau et apercevoir l’horizon au loin. Ce sont aussi des temps où nous pouvons contempler ce qui nous entoure, nous nourrir des multiples enseignements que la Providence glisse dans notre vie quotidienne et que souvent nous ne voyons pas quand nous courrons après les obligations de l’année scolaire qui rythment nos journées sans répit.
Aujourd’hui c’est la rentrée. Le quotidien revient avec ses nouveaux impératifs, comme chaque année en septembre. Alors, avant de replonger et affronter les courants, prenons quelques minutes pour replacer la fin au dessus de nos actions. Que faisons-nous ? Mais surtout pourquoi ?
L’école est un lieu où nos enfants vont recevoir un enseignement. Le but est de former la nature humaine blessée par le péché originel. Nos premiers parents avaient la science infuse et l’amitié avec Dieu en naissant. Mais, depuis le premier péché, nous devons acquérir le peu de science que les siècles ont accumulé et nous devons apprendre à connaître Dieu par le catéchisme et l’éveil spirituel. Là est le premier but de l’école, qui vient en complément de l’éducation que nous recevons de nos parents. L’école apporte ce que la famille ne peut apporter. Mais le but est le même. L’enfant est comme un verre vide, sec et creux, seule l’eau de la connaissance peut le remplir. Connaissance de Dieu, de la Création et de ses lois, de la culture de nos pères. Cela doit nous conduire à être docile face au maître, accepter notre ignorance afin de recevoir l’enseignement. L’élève qui croit tout savoir est un enfant arrogant, demain, il sera un adulte sot. Aussi, que les enfants se rappellent leur ignorance, de là viendra l’envie d’apprendre. Que les parents veillent à ce que leurs enfants soient dociles à la maison, afin de l’être aussi à l’école. Ceci est la première réflexion.
L’eau vive de la connaissance que les maîtres enseignent, ce sont nos parents, nos aïeux, les générations passées qui l’ont puisée. Aristote, saint Thomas d’Aquin, saint Augustin, Mendel, Newton, Pythagore, derrière chacun de ces noms qui parsèment les manuels scolaires se trouve un homme qui est venu ajouter sa pierre à l’édifice de la connaissance humaine, l’un ne pouvant avancer sans son prédécesseur. Et nous au milieu ? Souvent, nous peinons à acquérir ce que nos anciens ont inventé. Car finalement la nature humaine reste la même. Nous ne sommes pas plus intelligents que nos anciens avec nos téléphones et nos ordinateurs. Peut-être même sommes-nous plus bêtes, ayant des encyclopédies en deux clics dans nos poches mais pas grand chose dans nos caboches. Cela doit nous conduire à plus d’humilité. De cette humilité découle la confiance en nos maîtres et l’obéissance à nos éducateurs. Que les parents travaillent cette humilité, malgré les grands débats en famille ou sur internet, les avis tranchés et la multitude d’inepties que nous ingérons, nous sommes des nains juchés sur les épaules de ceux qui nous précédent. Voire des sots abrutis par l’instantanéité et la sentimentalité de notre époque. Que les enfants apprennent à se mettre à l’écoute de leurs aînés, afin de continuer jusqu’à la mort à s’émerveiller. Voilà la deuxième réflexion.
Enfin, notre époque moderne a inversé les valeurs. Nous savons cela et en constatons les dégâts partout autour de nous : sous-culture bon marché et vulgaire, débats politiques et sorties littéraires souvent médiocres quand ce n’est pas sordide ou scandaleux (causant de nombreux péchés), collègues de travail ne sachant plus ni écrire, ni exprimer une idée, et de plus en plus anti-culture, wokisme et culture de mort. Mais sommes-nous si certains de ne pas être nous aussi infectés par l’air ambiant ? Après tout, nous respirons, nous aussi, ce même air vicié. Notamment, ne sommes-nous pas parfois influencés par les idées modernes : individualisme et négation du péché ? Nos enfants, malgré leur jolies petites bouilles, sont blessés par le péché. Comme nous, ils seront paresseux, orgueilleux, menteurs ou insolents, ou tout cela à la fois. Comme nous, ils feront la foire en classe, rechigneront à l’effort, mépriseront leur professeur ou répondront à l’abbé, ou tout cela à la fois. Depuis quelques années, les enfants hyper-actifs, surdoués, incompris ou inadaptés au système pullulent. Mais, il n’y aurait plus de cancres ? De paresseux ? D’orgueilleux et de menteurs ? Ne tombons pas dans le panneau. Si certain cas sont avérés et si les parents font bien de veiller à cela, n’oublions pas que nos enfants sont de jeunes pousses qui ont besoin de tuteur droit et contraignant pour pousser vers le Ciel, sans quoi ils ramperont sur le sol ou casseront au premier coup de vent. Voilà la troisième réflexion.
En cette période de rentrée, gardons ces petites réflexions à l’esprit. Le bon élève est celui qui, docile et humble, se met à l’écoute de ses maîtres pour grandir vers le Ciel, celui qui travaille à corriger ses défauts avec l’aide de ses éducateurs, celui qui travaille au mieux de ce qu’il a comme talent pour accomplir la volonté de Dieu et un jour parfaire la Création par son métier. Le mauvais élève est celui qui méprise l’enseignement donné, refuse de se corriger et ménage son petit confort. Et nous-mêmes, parents ou adultes ? Sommes-nous de bons élèves ? L’école ne cesse jamais. Dieu place sans cesse des maîtres sur notre route : nos abbés, nos anciens dont les écrits doivent s’aligner dans nos bibliothèques, la Création qui nous entoure et que Dieu nous donne pour nous émerveiller et nous initier à la contemplation et à la connaissance de ses perfections. Sommes-nous humbles et dociles envers ces maîtres ? Sommes-nous de bons élèves ? Méditons cela tandis que les dernières journées d’été meurent avec septembre.
Louis d’Henriques