Le samedi 10 mars 1906, pour se conformer à la loi de séparation des Eglises et de l’Etat votée le 6 décembre 1905, le lieutenant Charles de Rose1 recevait un ordre de ses supérieurs auquel il répondit ainsi :
« Je suis désigné pour aller demain porter main forte aux autorités civiles pour l’exécution de l’inventaire de l’église d’Haussonville. Etant d’une famille très chrétienne, ayant plusieurs de mes proches parents prêtres ou religieux, j’ai reçu des principes qui ne me permettront jamais d’enfoncer des portes d’église ou de forcer des coffres-forts de sacristie. Ma décision est irrévocable. Ni moi, ni mes hommes ne porteront la main sur la maison de Dieu. »
Les conséquences de ce refus d’obéissance du lieutenant de Rose ne se firent pas attendre : il fut mis aux arrêts de rigueur à son domicile dès le 12 mars, puis transféré à Nancy où, comme il n’existait pas de prison militaire, il fut interné à la Maison d’arrêt dans une cellule à côté de celles des voleurs et des assassins.
Au Conseil de guerre, il réaffirma : « Il y avait préméditation, mais cette préméditation, je vous demande de ne pas la faire remonter à la veille du jour où j’ai été envoyé à Haussonville, mais au jour où ma mère m’a appris à prier Dieu à genoux en joignant les mains. »
Il fut mis pour trois ans en « période de non-activité » et ne fut réintégré dans l’armée que le 25 mars 1909. « Au point de vue de ma conscience, je ne peux dire à quel point j’ai l’âme légère. Je ne regrette rien, pas même les ignominies de la prison. » Il employa utilement ces années en se spécialisant dans la fabrication des moteurs à explosion, des automobiles et aéroplanes. Science qui lui sera bien utile quand en 1916 il deviendra commandant de l’aéronautique française !
1 Jean-Pierre Dumond – Le commandant de Rose, créateur de l’aviation de chasse – Héros méconnu de la grande guerre 1876-1916