Vous pouvez toujours appeler… vos enfants ne vous entendent pas, ils sont branchés, scotchés, connectés…ou plutôt déconnectés de la vie normale au profit de ce monde fascinant des écrans en tous genres, enfermés dans une bulle dont ils peinent à s’extraire. La liste des troubles générés par ces moyens modernes de prétendue « communication » s’allonge d’année en année : attention, mémoire, isolement, violence, difficulté dans l’expression… Nos enfants sont en danger sur bien des plans : moralité, pornographie, « rencontres », temps perdu, perte des notions de réalité… nous n’avons pas fini de découvrir la nocivité de ces écrans multiples sur cette jeunesse d’autant plus surexposée du fait de l’actuelle période de confinement.
Les enfants de moins de 10 ans passent en moyenne 4 heures par jour devant les écrans, et les petits de moins de 2 ans, 3 heures ! C’est beaucoup trop pour ces jeunes intelligences qui sont d’autant plus fragiles et réceptives à toutes les émotions et excitations suscitées par les jeux et films regardés. Nous sommes plus marqués par ce que l’on voit, personne ne peut y être imperméable, alors quel impact sur de jeunes esprits ?!
Tous ces simulateurs désincarnent la personne qui regarde, et trompent ses sens (la vue et l’ouïe d’abord, et maintenant le toucher) entraînant une confusion entre le réel et l’irréel. Tromperie également dans la facilité à faire les choses : d’une simple pression du doigt l’enfant arrive à faire des choses extraordinaires : combats, constructions, longues distances parcourues… le poussant hors de la difficulté de la vie réelle. On s’invente alors un autre monde où l’on exclut l’effort et le sacrifice, n’acceptant plus de contraintes. Un monde où l’on se réfugie au lieu de se divertir, pour goûter cette facilité si contraire à ce que l’on vit hors des écrans.
Les adolescents, eux, sont plus attirés par le phénomène des réseaux sociaux. Alors qu’ils ne parlent pas chez eux, ils recherchent les mises en relations avec d’autres, un contact immédiat où ils se racontent, se montrent, se valorisent, développant à outrance ce narcissisme propre à leur âge, et espérant que l’autre se livre à son tour.
Il faut savoir que les réseaux sociaux manipulent nos cerveaux, modifient nos intentions, captent notre attention. Les ingénieurs qui y travaillent ont mis en place une panoplie d’astuces pour nous maintenir connectés le plus longtemps possible. La science de cette manipulation s’appelle la « captologie », elle utilise sciemment l’informatique et les nouvelles technologies pour influencer les utilisateurs. Elle crée de nouveaux algorithmes dans le but de nous manipuler (ex : Facebook, Google…).
Par exemple, parfois des étiquettes de notifications rouges s’allument, donnant un sentiment d’urgence à notre cerveau pour nous pousser à cliquer. Leur objectif est de nous garder en ligne le plus longtemps possible. L’algorithme connaît tout de nous, ce que l’on aime, ce que l’on va regarder sur nos écrans, nos sujets d’intérêt… aussi nous envoie-t-il de nouvelles informations sur ce que l’on aime regarder !
Il y a aussi des jeux ou des actions qui s’activent en tirant vers le bas, comme les machines à sous au casino ! Cela nous envoie un choc de dopamine (hormone du plaisir). Le problème étant que l’on peut très vite être dépendant à la dopamine qui nous récompense un instant, pour nous laisser ensuite une sensation de vide… alors on recommence pour en avoir d’autres, comme un chien ramène la balle pour obtenir son sucre ! Ainsi les ingénieurs captent les failles de notre cerveaux pour nous donner un maximum de dopamine, ils poussent la machine à nous rendre de plus en plus dépendants. Seulement voilà qu’à force de pousser la machine, cette dernière s’est mise à évoluer toute seule, pour finir par échapper aux ingénieurs. Aujourd’hui elle n’est bien souvent plus sous contrôle, au point d’inquiéter tous ces chercheurs et inventeurs. Ils connaissent parfaitement le danger addictif et manipulateur de ces outils qu’ils ont inventés et les interdisent à leurs propres enfants, les mettant même dans des écoles où l’on ne travaille pas sur des ordinateurs !
Sur les réseaux sociaux, c’est la réalité qui est faussée ; tout y est beau, mis en valeur, idéal alors que ce n’est pas la vérité, ce qui modifie les relations en profondeur. La captologie pousse les jeunes à se comparer à ce qu’ils voient, et leur donne un sentiment de déprime, de culpabilisation.
Alors, comment faire quand on sait que le téléphone portable est aujourd’hui devenu un outil indispensable en dépit de ses nombreux inconvénients, que les jeunes de 13 à 18 ans passent 40% de leur temps de veille sur les écrans, que 60% des Français se disent incapables de se passer de leur téléphone durant une journée… que 50% des Français, et 70% des jeunes consultent leur téléphone toutes les dix minutes ?!
La première chose à faire est de donner le plus tard possible un téléphone à son enfant : après le bac si on le peut (oui, je sais bien que cela paraît sévère, mais il faut savoir si l’on veut vraiment « le bien supérieur de notre enfant »). Il est impératif de ne pas lui permettre d’avoir accès à internet tout de suite. Qu’il apprenne progressivement à s’en servir : un téléphone est fait pour téléphoner ! On peut très bien lui confier (plus facilement aux jeunes filles) un téléphone très simple et limité à l’occasion d’un voyage seul en train, par exemple, pour se rassurer (votre enfant, lui, est souvent moins inquiet que vous de prendre le train seul…, il pourra toujours emprunter le téléphone de son voisin pour signaler le retard du train). Par ailleurs cela apprend aussi à savoir se débrouiller. Plus de maturité avant de commencer à utiliser un téléphone retarde l’addiction. Quand on est plus mûr, on est plus fort.
Il doit y avoir des règlements familiaux à respecter (et pour cela les parents en donneront l’exemple) : pas de téléphones dans les chambres, ni dans le salon. L’idéal étant que chacun le laisse dans l’entrée ou la cuisine. Combien de jeunes (et de moins jeunes !) consultent leur téléphone même dans leur lit, pour des informations de bien peu d’importance ?!
Savoir dire « non », mais en proposant autre chose. Si vous dites « arrête ton téléphone et prends un livre ! », cela ne marchera pas. À vous parents de lancer une conversation, d’organiser une activité, un jeu de société, une promenade… Décidez aussi en famille tous ensemble de ce que vous pouvez faire.
Pour limiter les multiples activités sur le téléphone, on peut également « déconstruire l’outil téléphone » en offrant à nos enfants un appareil photo, un réveil, un lecteur de CD pour écouter de la belle musique…
Pour les plus jeunes, le téléphone de papa ou de maman est souvent devenu « une nounou » ! Au moins, a-t-on la paix pour un bon moment ! Or les jeux excitent les enfants en les gavant de dopamine ! Pas étonnant que ces petits redoutent de se coucher le soir, mettant des heures à trouver le calme nécessaire à leur endormissement ! Si nos plus jeunes font un peu de chahut, c’est qu’ils ont besoin d’être occupés, ou que l’on s’occupe d’eux, ou tout simplement besoin de sortir prendre l’air et se défouler.
Enfin, il est nécessaire de « veiller », de contempler, de réfléchir, de faire ce silence en soi alors que les écrans empêchent nos enfants de « se retirer », d’avoir une vie intérieure qui puisse les élever vers le bon Dieu.
Il suffit d’observer un quai de métro ou un arrêt de bus : les gens sont tous rivés sur leurs téléphones en jouant des pouces à toute allure, écouteurs sur les oreilles ! On ne sait plus rester à ne rien faire… il faut que les doigts bougent et que la tête traite plusieurs idées à la fois ! Aujourd’hui le silence fait peur, l’inaction inquiète…mais alors quand réfléchit-on ?
Apprenons à nos enfants à écouter le chant des oiseaux, le bruit du vent dans les feuilles. Aidons-les à prendre le temps de bien faire les choses, sans précipitation et à aimer le silence reposant de notre maison.
Tout n’est pas perdu, nous avons encore la main et pouvons encore maîtriser l’usage familial du téléphone. Pour cela apprenons tous, parents et enfants, à nous passer de nos téléphones plusieurs heures chaque jour et même plusieurs jours d’affilée, à ne communiquer que les informations importantes… notre vie de famille ou personnelle ne regarde pas les autres, le gâteau du dimanche, si réussi soit-il, n’a pas à faire le tour de toutes nos connaissances ! Notre vie de famille est notre histoire à nous, et ne regarde que nous, ce sont des petits secrets que nous nous réservons comme de petits trésors. C’est aussi tout cela qui fait la force d’une famille : ses souvenirs précieux, ses combats pour le bien commun, l’unité familiale qui préserve du mal ambiant, et toutes les grâces que l’on puise chaque jour, tous à genoux devant le crucifix… « Ne nous laissez pas succomber à la tentation, mais délivrez-nous du mal ! »
Sophie de Lédinghen