La Présentation de Jésus au temple.
Fruit de ce mystère : l’obéissance, la pureté.
Quarante jours après la naissance de Jésus, Marie et Joseph se rendent à Jérusalem. La loi de Moïse réclamait deux actes aux couples modestes : la purification légale de la mère et la présentation de l’enfant car il était écrit : « Tout mâle premier né sera consacré au Seigneur ».
De grand matin, par une belle journée de février où la nature sourit déjà, le couple saint s’élance vers Jérusalem. Marie serre dans ses bras cet enfant qu’elle va offrir à Dieu comme toutes les mamans et Joseph tient dans sa bourse les cinq pièces d’argent qui vont le racheter. Sans doute, Marie a dû le faire bien beau, son petit Jésus, et les bonnes femmes de Bethléem, sur le pas des portes du village, au moment du départ sont venues l’admirer pendant que Joseph fermait son atelier pour tout le jour. Et maintenant les voilà, au milieu des autres, des jeunes mamans toutes fières d’avoir mis au monde pour la première fois un fils ! Joseph, modestement, achète dans leur cage, les deux tourterelles des pauvres…
Mais au milieu des autres qui sans doute bavardent en attendant leur tour, Marie se recueille. Elle apporte un tel sérieux à tous les actes de sa vie religieuse. Elle, toute pure, obéissante comme toujours, elle se soumet à la purification légale, faisant de tous les actes de toute sa vie un acte d’obéissance filiale.
Et voici qu’un vieillard est entré dans le temple. Il a pris l’Enfant entre ses bras ; Marie lui laisse prendre son enfant ; elle écoute la prophétie qui ne l’étonne pas… elle sait mieux que personne les prodiges qui ont déjà entouré cette naissance. C’est une joie toujours très douce pour une maman d’entendre prédire les grandeurs de son petit ; mais quand Siméon les eut bénis, ce furent d’autres paroles qui tombèrent de ses lèvres : « Un glaive transpercera votre âme ! »
Avez-vous pâli, Mère chérie, quand ces mots sont tombés sur votre cœur ? … Les attendiez-vous ?
Il me semble que vos deux mains ont dû bien vite reprendre votre petit enfant et le serrer passionnément. Mais, la prophétie est tombée sur votre cœur et jamais plus vous n’oublierez ce « glaive de douleur » qui vous menace… Tous les petits enfants appartiennent à leur maman, mais le vôtre encore plus… pourtant ce trésor, voici qu’on vous rappelle que vous devez l’abandonner pour le salut du monde et vous associer généreusement à la rédemption… « C’est le sacrifice du matin qui deviendra plus tard, dit Saint Thomas, entre les bras de sa croix, le sacrifice du soir… »
L’Evangile tait ce qui se passa en vous, ô Marie, mais nous savons bien que votre cœur ne fut qu’un acquiescement généreux…
Mon chapelet aux doigts, je vous regarde, Vierge Marie… je sais que vous êtes l’Unique et que seule, parmi toutes les femmes, vous avez pu monter un matin au temple pour offrir à Dieu le Fils de Dieu Lui-même. Et là, Dieu vous a demandé votre Fils… votre tout petit, la tendresse pure et chaude de votre cœur…Ce n’était pas la Mère de Dieu qui montait ce matin là les escaliers du temple, c’était une maman, une femme comme toutes les autres, soumise comme toutes les autres à la grande loi chrétienne de toutes les tendresses. Apprenez-moi, ô Vous dont le cœur était semblable à nos pauvres cœurs de femme, comment je dois reconnaître les droits de Dieu sur mes tendresses pour les sanctifier…
Moi aussi, aussi fort que vous serriez le petit Jésus sur votre cœur, je serre sur le mien les tendresses que la vie m’a données. Peut-être suis-je somptueusement servie à cette table royale de l’amour. Peut-être ma part est-elle toute petite, mais non moins précieuse… Un mari, des enfants, des amis, ce tout petit si semblable au vôtre qui rit dans son berceau… cet homme qui est ma part pour porter avec moi tout au long « la bonne et la mauvaise fortune »…, tous ces visages, jeunes ou vieux qui m’entourent et sans lesquels la vie pour moi n’aurait pas de lumière, tant il me semble que ce sont leurs yeux qui me la dispensent… Moi aussi j’ai mes trésors, et vous savez que je les serre contre mon cœur bien fort, en vous regardant monter les marches du temple.
Il ne m’a pas été demandé par la loi de venir « racheter » mes tendresses et mes joies avec cinq pièces d’argent et deux tourterelles roucoulantes… non ! mais il m’est demandé de reconnaître les droits absolus de Dieu sur mon cœur et de bien savoir que tout lui appartient à Lui avant de m’appartenir à moi… Ce cœur que vous me demandez, mon Dieu, ce n’est pas une abstraction, c’est ce cœur vibrant… Ce cœur, avec tout ce qu’il renferme, mes enfants, mon mari, mes parents, mes amis… car tous ceux-là sont à vous avant d’être à moi, n’est ce pas ô Mon Dieu ! C’est facile de le dire, ce n’est pas facile de le réaliser ! Vierge Marie comme j’ai besoin que vous m’appreniez à comprendre ces choses pour que mon cœur devienne un cœur chrétien ; que la tendresse, en moi, ne soit pas une prise de possession païenne et farouche où mes droits passeraient avant ceux des autres… mais cette chose aérienne et ailée qui entraînera mon cœur vers le ciel le purifiant de tout égoïsme ! Vierge Marie, je veux avoir le courage de regarder sincèrement au fond de mon cœur… Est-ce que je sais aimer chrétiennement, comme vous le souhaitez ? Est-ce que j’ai l’habitude de lever en offrande mes deux mains pleines comme une coupe ? N’ai-je pas plutôt envie de refermer jalousement mes deux bras en regardant Dieu avec méfiance, comme un voleur ?…
Oh Vierge Marie aidez-moi ! Cet homme qui a mis un jour sa grande main dans la mienne et qui sera mon « compagnon d’éternité », il est à vous avant d’être à moi et mon amour doit le fortifier et non pas l’amollir. Tous ceux que j’aime doivent marcher virilement vers vous. Vous avez laissé partir votre Jésus vers les hommes et vers la mort, apprenez-moi à laisser partir sans égoïsme ceux que j’aime vers le beau destin qui les appelle.
Aimer c’est s’engager à fond dans le mystère d’une autre vie. O Mère, donnez-moi un cœur fort qui accepte, qui ne soit pas un pauvre cœur tremblant de femme ne désirant que le confort mais un cœur prêt à marcher courageusement vers Dieu en portant le poids de l’amour aussi bien que celui des douleurs. Faites que je regarde avec confiance, mon Dieu, l’ombre de votre main sur mes tendresses, non pas une main de voleur, mais une tendre main de père. Faites que ce soit ma sécurité de les sentir à vous avant que d’être à moi. Donnez-leur ce que je suis si impuissante à leur donner ! Gardez l’âme de mon petit, veillez sur l’absent, ramenez-moi l’oublieux… Il n’y a que ce que vous gardez qui est bien à moi, je le sais, car vous êtes le lien suave et fort entre les cœurs.
En récitant ces Ave, j’accepte à l’avance tout ce qui sera la volonté de Dieu sur mon cœur de femme. Je tends vers lui mes mains pleines avec confiance. Qu’il me rende ce qui m’est bon en ce monde… je sais qu’il me garde tout pour l’éternité !
D’après Paula Hoesl