Soyons des passeurs

Notre-Dame de Paris est en flamme ce 15 Avril… « Pourquoi la France s’est-elle sentie, soudain, touchée au cœur comme par un coup de poignard ? (…) L’émotion qu’a suscitée la catastrophe, à l’heure où le catholicisme est devenu minoritaire (…) relève de ce besoin de l’âme humaine qu’avait identifié Simone Weil (…) : le lien vital qui nous unit à notre passé. Promis à une vie brève, l’homme ne serait qu’un météore, à l’horizon de l’histoire, s’il n’avait la capacité de placer sa destinée individuelle dans la longue mémoire de ses devanciers : ceux qui sont venus avant lui et qui lui ont procuré, en naissant, un capital de connaissances, de souvenirs, d’expériences sans lesquels il ne serait qu’un animal nu, misérable, analphabète et désarmé. Si tous les Français se sont sentis atteints, (…) c’est peut-être surtout parce que cette cathédrale résume notre histoire, (…) qui nous inscrit dans un héritage, une lignée, qui fait de nous des passeurs d’un dépôt que nous sommes conscients de devoir à notre tour transmettre, tant nous sentons à quel point, nous dépassant, il nous oblige ». Cet extrait de l’éditorial de Michel de Jaeghere dans le Figaro Hors-Série d’Avril 2019, rappelle un des rôles essentiels des parents : transmettre ce que nous avons reçu, si possible en améliorant certains aspects de notre héritage.

Savoir où nous allons et d’où nous venons

L’Espérance et l’espoir sont des moteurs de la vie que nous devons apprendre à nos enfants : ils vont vers le Ciel, ils ont l’ambition d’obtenir un métier qui leur plaise, ils vont franchir des étapes dans leurs choix de vie… la motivation des enfants grandit lorsqu’ils savent vers quoi ils vont.

Ces buts étant clairs, ils doivent prendre conscience de qui ils sont, « être quelqu’un de bien », car, selon l’adage antique, « l’Agir suit l’Etre ». 

Pour cela, apprenons-leur d’où ils viennent ! Nos parents, grands-parents et aïeux, notre région et nos terroirs, leurs métiers et savoir-faire ; leur savoir-être, l’esprit spécifique de nos familles et de nos fréquentations, certains évènements nous ont imprégnés et nous ont fait ce que nous sommes et ce que nous communiquons à nos enfants… En être conscient, en parler, en vivre -lorsque ces influences sont bonnes- sera profitable à toute la famille.

Transmission spécifique par le père de famille

Parlons donc à nos enfants de ce qui nous a formé : nos familles, notre pays, notre vie spirituelle, notre travail. La transmission doit commencer dès le jeune âge et se poursuivre sans relâche en s’adaptant à l’âge. L’effet n’est pas visible immédiatement, mais nous donnons ainsi à nos enfants, un socle, des références qui les structurent et les marquent pour toute leur vie même s’ils ne les adoptent pas en totalité.Avons-nous remarqué comme les jeunes enfants sont contents de connaître l’endroit où papa a habité, les jeux auxquels il jouait ?

Concrètement, lors de vacances, visitons des lieux historiques ou religieux adaptés à leur âge en racontant l’Histoire, en montrant comment quelques personnes, de conditions diverses, ont changé le cours de l’Histoire, ou ont laissé une trace – tels les bâtisseurs de monastères. Pourquoi pas eux ?

Racontons l’histoire des grands-parents et des aïeux. Renseignons-nous sur eux auprès des personnes âgées toujours en vie. Il y a toujours quelque chose à retirer de l’histoire familiale quel que soit le niveau social ou d’aisance de nos aïeux. Nous y verrons certainement de beaux exemples de courage, d’humilité, de piété, d’entraide, d’initiative ou de savoir-faire à raconter. Peut-être des exemples d’influence sur la vie religieuse, sociale et politique locale -ce qui était plus fréquent autrefois qu’aujourd’hui ? Des comportements courageux pendant les crises religieuses (1880-1905 ; post Vatican 2), les crises économiques ou les guerres. 

Nous évoquerons les épreuves de la famille – la Croix fait partie de la vie- en montrant comment elles ont, malgré tout, fait grandir ceux qui ont su se confier à la Providence.  

Si, malheureusement, des chutes morales ou des discordes existent – c’est le cas dans toutes les familles de manière plus ou moins proche, nous en parlerons le moins possible. Nous pourrons expliquer la fragilité de la nature humaine sans la grâce, en faisant prier pour ces intentions. Peut-être aurons-nous la chance de pouvoir montrer le progrès des générations suivantes, qui retrouvent l’amour miséricordieux de Dieu malgré cet héritage négatif.

Pour les plus grands, faisons une liste des 10 meilleurs livres de votre bibliothèque, ceux qui nous ont marqués et dont nous avons envie de transmettre le contenu.

 Enraciner dans une communauté

Au citoyen cosmopolite, individualiste, isolé, noyé dans la masse et manipulé, nous préférons l’homme enraciné dans un héritage, des traditions, une communauté de destin et de valeurs.

Les grands parents et les anciens sont de précieux auxiliaires pour enraciner nos enfants. Ils ont des points communs avec les plus jeunes, ce qui facilite la connivence : la capacité d’étonnement, de confiance, le temps qui s’écoule plus lentement. Pour les plus grands, ils sont la permanence et le rempart sécurisant ; l’endroit où l’on a le temps de parler. Un bon grand-parent saura écouter et affirmer calmement sa pensée pour orienter notre enfant, faire naître en lui les questions qu’il doit se poser ou poser.  Le grand-père racontera l’histoire de la famille, portera témoignage de sa Foi, et construira le lien familial entre hier et demain, entre l’expérience et l’espérance.

Sachons solliciter les anciens en qui nous avons confiance : au-delà du service qu’ils nous rendent, ils trouvent dans ces contacts un nouveau sens à leur vie.

J’ai transmis ce que j’ai reçu

Puissions-nous faire nôtre cette sentence au soir de notre vie. Pour cela suivons les conseils de Platon (IV° siècle av. JC) : « Aux enfants, il faut laisser un bel héritage de conscience plutôt que d’or ». Et un éducateur du XX° siècle : « Enfin, que pouvons-nous faire pour que nos enfants soient en mesure d’affronter la situation qui les attend ? Le monde change tellement vite !

Vous ne pouvez faire qu’une chose réellement efficace : former le caractère de vos enfants de telle sorte qu’ils soient capables de trouver eux-mêmes (les solutions) »

Avec la grâce du Sacrement de Mariage, que nous invoquerons régulièrement, et la consécration de nos foyers au Sacré-Cœur, tout est possible !

Hervé Lepère