CONFIANCE ET ABANDON

Chère Bertille,

 

Dans ta dernière lettre tu me dis que, de plus en plus, dans les conversations de sortie de messe, à table, dans les réunions de famille, il n’est question que de nouvelles alarmantes, d’inquiétudes. Les sujets sont variés : combien de temps vont tenir nos écoles catholiques ; la nouvelle épidémie de grippe ou de COVID sera-t-elle plus virulente ? Comment se chauffer en raison de l’augmentation des prix ? Comment trouver du travail avec les réglementations actuelles ? Les informations tournent en boucle ; chacun est penché sur son portable à l’affût des dernières nouvelles… Avenir bien sombre pour une jeune fille qui est dans l’âge des grandes espérances. C’est le moment où les projets d’avenir se forment. De quoi sera fait demain ?

 Je comprends ton inquiétude, et j’aimerais pouvoir t’aider à tirer le meilleur parti de cette situation en prenant un peu de hauteur.

Ma réflexion se construira autour de trois questions essentielles : Quel est le but de la vie et pourquoi sommes-nous sur terre ? Quelle est ta place, en tant que jeune fille dans la société qui traverse cette période de crise ? Où pourrais-tu trouver la force d’avancer sereinement ? 

 Nous avons tous tendance à chercher une vie idéale, sans inquiétude, sans obstacle à nos projets, à notre volonté. Mais finalement, qu’est-ce qu’une vie idéale ? Je laisse Guy de Larigaudie répondre à ma place : « la vie idéale est celle où Dieu, individuellement, nous veut moine, poète, cordonnier ou assureur. »1 La vie idéale, c’est faire notre devoir d’état d’étudiante, de jeune professionnelle, à l’époque où le Bon Dieu nous a placées. Cette vie idéale doit être atteinte même si nous ne comprenons pas le monde dans lequel nous vivons, ni pourquoi la crise de l’Eglise dure si longtemps, ou pourquoi il est de plus en plus difficile de vivre en chrétien dans ce monde. Il ne nous appartient pas de répondre à toutes ces questions. Le Bon Dieu permet que nous ne comprenions pas tout, et même rien : « nous ne comprenons rien à rien. Il y a autant de mystère dans la croissance d’un grain de blé que dans le mouvement des étoiles. Mais nous savons bien que nous sommes seuls capables d’aimer, et c’est pour cela que le moindre des hommes est plus grand que tous les mondes réunis. »2 Eh oui, ma chère Bertille, nous sommes sur terre pour aimer Dieu, voilà le but de notre vie et notre gloire !

 

Le monde dans lequel nous vivons a besoin de joie, de bonheur, d’amour. La vocation de la femme est justement d’apporter ce rayon de soleil. « Le rayon de soleil éclaire, réchauffe et réjouit le cœur de l’homme. Il en va de même pour la femme qui remplit son rôle. (…). La femme réchauffe les énergies, les stimule ; elle sait encourager d’un regard dans l’effort persistant. Elle aide chacun à donner le meilleur de lui-même. Sa force d’âme réside dans le fait qu’elle sait oublier ses fatigues et ses soucis pour se dépenser au bien de ceux qui l’entourent. Enfin, par son égalité d’humeur, le charme de son sourire, ses délicatesses, sa joie communicative, ses attentions sans cesse renouvelées, elle réjouit le cœur de ses proches.»3 Voilà ta place de choix, ma chère Bertille, dans notre société qui a perdu toute joie de vivre !

 

Mais comment trouver la force et la persévérance ? « La femme puisera sa constance dans une solide piété qui gardera son âme dans la paix et la joie.»4 La piété est cette habitude de vivre sans cesse en présence du Bon Dieu. Cette attitude nous permet de nous abandonner de plus en plus en la sainte Providence et de mettre notre confiance en Dieu. Le Bon Dieu n’a pas eu besoin de nous pour créer le monde, ni pour nous créer. Nous devons tout à Dieu, notre existence, la vie surnaturelle par la grâce du baptême, les petites joies quotidiennes. Pourquoi ne pourrions-nous pas rester confiants dans ses bras ? C’est donc en Dieu, ma chère Bertille, que tu trouveras la force d’avancer sereinement, « faire de sa vie une conversation avec Dieu ».5

 

Le secret de la joie, ma chère Bertille, est de faire avec amour ton devoir d’état à la place et à l’époque où le Bon Dieu t’a placée, peu importe si l’orage du monde gronde. Tel un vaisseau avançant paisiblement à travers les vagues car c’est le Bon Dieu qui souffle dans les voiles.

 Je te souhaite une bonne et sainte année remplie d’une joie profonde !

Anne