Partager son enthousiasme pour la lecture

Foyers Ardents a récemment rencontré une jeune mère de famille qui, au cœur de son village, a ouvert une bibliothèque accessible à tous dans une dépendance de son habitation.

Cette initiative nous a semblé excellente et nous avons décidé de la faire découvrir à nos lecteurs, qui auront peut-être envie de suivre son exemple et de faire ainsi fructifier un ou plusieurs talents…

 FA : Bonjour Laetitia, vous avez ouvert, il y a tout juste un an : Ma Biblio Catho, pouvez-vous nous dire comment cette idée originale et magnifique vous est venue à l’esprit ?

 LB : L’idée est venue tout simplement quand j’étais une jeune maman très disponible. En effet, je suis d’un naturel très actif et en début de mariage, j’avais beaucoup de temps libre. Ne souhaitant pas reprendre le travail, et comme je m’occupais plus ou moins de la procure de notre paroisse, j’ai eu idée d’exploiter ma passion pour les livres. J’ai commencé par acheter et revendre des bons livres d’occasion que je découvrais par de bons plans. Puis l’idée d’ouvrir un espace au public est venue car la disposition de la maison était adaptée. Aussi, je trouvais cela vraiment réjouissant de recevoir des personnes partageant la même ardeur pour la lecture car je me sentais terriblement… seule dans cette région totalement inconnue.

 FA : Quel est le but (ou les buts) recherché(s) à travers cette bibliothèque ?

LB : Mon objectif initial était de proposer aux parents des livres pour leurs enfants sans avoir à mettre des milles et des cents dans les achats de livres ; en effet, ceux-ci ne sont souvent lus qu’une fois (peut-être une fois par enfant et encore…) et coûtent cher. Je voulais « investir » pour les autres. Aussi, je voulais donner la possibilité à ces parents de venir me demander l’avis sur un livre ou voir si je pouvais le leur prêter avant de l’acheter.

Dans la réalité, j’ai actuellement plutôt un public d’adultes. Cela convient aussi car les personnes moins religieuses trouvent dans ma bibliothèque de quoi se divertir sainement à travers les ouvrages que je propose. « Petit à petit, l’oiseau fait son nid » comme on dit. On peut commencer avec un bon roman avant d’aller vers les témoignages puis la vie d’un saint pour en arriver à des ouvrages religieux et donc à des réflexions d’ordre plus moral et spirituel.

 FA : Vous proposez des livres bien sûr ; mais aussi d’autres produits attractifs ?

LB : En effet, Ma Biblio Catho est non seulement bibliothèque mais médiathèque et ludothèque. Je propose donc aussi des jeux de société comme les jeux de Loupio ou La Rose des Saints, ainsi que des CD de musique classique ou chants religieux, quelques bons DVD (pièces de théâtre, vraies vies édifiantes et aussi de bons films), des CD avec des histoires pour enfants à mettre dans la voiture quand on part en vacances, et autres divertissements tout à fait sains.

Je propose, une fois par mois, une matinée de découverte de jeux de société.

FA : Quels sont vos critères de choix pour les ouvrages que vous proposez ?

LB : Mes critères sont les références que je peux avoir d’abord par ma maman, puis des conseils de prêtres. J’ai aussi une amie religieuse qui m’a suggéré toute une liste d’excellents ouvrages. Les comités de lecture sont évidemment sources d’inspiration. Quoi qu’il arrive, je me fais mes propres opinions des ouvrages en les lisant tous avant de les proposer.

Parce que j’ai certaines convictions que je sais défendre par des arguments construits, je ne propose pas d’ouvrages de Fantastique ou Science-Fiction moderne. Et, concernant la politique, je n’ai que quelques ouvrages sur les fondements.

FA : Combien de livres avez-vous en stock ? Et comment vous les procurez-vous ?

LB : Je n’ai qu’une petite structure d’environ 600 ouvrages, pour l’instant. Et ils ne sont pas tous exposés car j’ai une étagère qui bouge régulièrement (période de Noël / période de la semaine sainte / proposition de revues, etc…). Beaucoup de livres sont des ouvrages qui appartiennent à ma famille et que je prête. J’achète beaucoup d’occasion (recherches ciblées) et j’ai de bons plans que je garde pour moi… Les quelques livres neufs achetés sur facture appartiennent à l’association Ma Biblio Catho. On m’a aussi donné plusieurs ouvrages pour la bibliothèque associative. Je propose un avoir pour les personnes qui donnent et / ou qui prêtent des livres à l’association, ce qui permet d’avoir aussi une bibliothèque non figée.

 FA : Dans le concret, combien de temps cela vous prend-il par semaine ?

LB : Au lancement, je passais beaucoup de temps pour chercher de bons livres d’occasion. C’était surtout du temps passé sur des sites internet divers et variés. Tout ce temps n’est pas compté. Aujourd’hui, ma bibliothèque n’est ouverte qu’un après-midi par semaine en plus d’un samedi par mois. C’est un temps que je réserve donc de manière exclusive à la Bibliothèque. Au début, je prenais sur ce temps pour référencer tous les ouvrages. Désormais, je le prends aussi pour couvrir les nouveaux arrivages. Je ne laisse pas un livre sortir sans qu’il soit recouvert.

 FA : Quelle est la principale difficulté rencontrée ?

LB : Mon point faible est ma base de données. Dieu merci, j’ai récemment fait la connaissance d’une jeune bibliothécaire qui m’aide à réparer cette lacune. En effet, ce n’est pas tant l’enregistrement de tous les ouvrages, qui est le plus compliqué, mais la gestion des entrées et sorties.

 FA : Quel accueil avez-vous rencontré dans votre village ?

LB : Quasiment tous nos voisins directs étaient présents pour la bénédiction de Ma Biblio Catho. Certains voisins sont mes plus fidèles clients. Au-delà, c’est mon manque de publicité qui a fait défaut. J’ai laissé faire le bouche à oreille car Ma Biblio Catho va déjà déménager…

 FA : Quels sont les moyens que vous avez mis en œuvre pour vous faire connaître ?

LB : Tout a commencé uniquement par mes connaissances. Certaines, de la région, ont parlé de moi et m’ont ramené du monde. J’ai aussi fait une sortie de la messe paroissiale de la petite ville la plus proche pour distribuer ma carte de visite. Après cela, j’avoue ne pas avoir beaucoup donné dans la publicité car j’ai une toute petite bibliothèque et je savais que nous n’allions pas demeurer dans la région très longtemps. En fait, notre présence dans la région n’aura pas duré deux ans, mais j’ai bien l’intention de déménager Ma Biblio Catho ! Un sondage a d’ailleurs déjà été lancé en Vendée pour connaître les attentes du public et mieux organiser mon installation.

 FA : Personnellement, pouvez-vous nous dire après cette première année d’ouverture ce que cette expérience vous a apporté ? Ses richesses ? Et éventuellement vos projets d’amélioration ?

LB : Honnêtement, j’ai été très déçue du manque d’intérêt d’un public que j’espérais viser. Nous habitons à dix minutes de Paray-le-Monial (Apparitions du Sacré-Cœur à sainte Marguerite Marie Alacoque). C’est donc une région assez croyante, j’espérais toucher toutes ces familles qui fréquentent l’école privée hors-contrat de Paray-le-Monial, mais j’ai appris à mes dépens plusieurs choses :

– Les jeunes que je pensais toucher ne lisent pas autant que les jeunes conservateurs ou traditionnalistes ; ou s’ils lisent, ce sont des ouvrages que l’on trouve partout. Autant dire que ce n’est pas ce que je vise comme public puisque mon idée est bien de proposer ce que l’on ne trouve dans aucune autre bibliothèque publique.

– Il est difficile de « faire bouger » les gens qui ont déjà leurs habitudes. Ils sont bien dans leur petite ville. Ils ont des librairies à quelques coups de pédales, pourquoi prendre la voiture pour fréquenter une petite bibliothèque ?

– La localisation n’aide pas, il faut le dire. Nous sommes non seulement excentrés, mais les gens n’aiment pas beaucoup avoir l’impression de rentrer chez nous (même si nous sommes dans une dépendance de la maison). Le public est réticent à aller chez les gens. Lorsque je déménagerai Ma Biblio Catho, j’ai l’intention de l’ouvrir dans un bourg, avec une vraie visibilité, avec pignon sur rue. La visibilité est essentielle si on veut que ça fonctionne. J’aurais été en centre-ville de Paray-le-Monial, je suis sûre que ça aurait mieux pris.

Malgré cette déception, j’ai réalisé que j’avais touché, de manière inattendue, des personnes plus mûres. L’apostolat aura été de courte durée mais c’est toujours cela qui a été semé. Cela me suffit pour me donner l’envie de continuer et de faire mieux.

 FA : Recommanderiez-vous à d’autres cette initiative ? Quelles qualités principales cela demande-t-il ?

LB : Je recommande, oui, bien sûr ! Pourquoi pas, même, en étant rattaché à l’association Ma Biblio Catho ? Pour les qualités, il faut avant tout aimer lire ! Que cela concerne le roman jusqu’à la morale, on doit être capable de répondre à toutes les questions (ou presque) qui sont susceptibles de nous être posées. Pour ma part, j’ai une expérience d’aide-documentaliste qui m’a aidé à monter tout cela mais il suffit d’avoir une grande qualité : l’organisation. Il faut aimer le contact social, évidemment ! Partager quelque chose que l’on aime doit être presque de l’ordre de la passion. La passion est bonne quand on se passionne pour les bonnes choses !

 FA : Un très grand merci, chère Laetitia, pour ce témoignage très intéressant qui va sans doute faire des émules ! Et bon courage pour le déménagement !