Chers lecteurs, nous abordons maintenant la présentation de divers métiers d’art, afin de vous les faire découvrir ou mieux connaître.
Nous avons rencontré Philippe et Laurence, deux époux qui exercent le métier de doreur ornemaniste depuis plus de 30 ans.
Foyers Ardents : « Laurence, que signifie le nom « doreur ornemaniste » et quelle formation avez-vous suivie ? »
Laurence : « Le doreur ornemaniste travaille principalement sur bois ou sur métal aussi, quand il faut pour redorer des grilles, par exemple, comme celles du Conseil d’Etat que nous avions réalisées, il y a quelques années. Sur bois, très souvent les ornements -sculptures, motifs de décoration- sont abîmés. Il faut donc les reconstituer avec de la résine, en relevant sur des parties identiques et saines des empreintes, qui nous serviront à remplacer les parties manquantes. D’où « ornemaniste » …
Quand cela le nécessite, il faut parfois l’intervention d’un sculpteur sur bois qui va recréer une pièce importante.
Ce travail nécessite une grande connaissance de l’histoire de l’art afin de savoir dater l’objet dans son époque avec les attributs et allégories qui le décorent pour choisir la teinte d’or qui correspond à sa période.
Philippe a donc fait une licence d’histoire de l’art avant de travailler en atelier et passer son C.A.P de doreur. Ensuite, il m’a « entraînée » dans ce métier.
Nous sommes tous les deux issus de familles de restaurateurs ou peintres, qui nous ont donnés le goût du beau et la sensibilité de l’ancien.
D’ailleurs, jusqu’au XVIIIème siècle, les doreurs étaient rattachés aux peintres et leur nom était « peintre doreur vernisseur ». Une corporation a ensuite été spécialement créée dont le saint patron est saint Eloi, par similitude avec les orfèvres… »
F.A : « Quelle est votre clientèle ? »
Laurence : « Nous travaillons pour des particuliers qui nous confient des objets à restaurer : glaces, trumeaux, encadrements de tableaux, sièges ou objets ou bois dorés et/ou polychromés, comme des consoles, statues… mais aussi avec la DRAC (Direction Générale des Affaires Culturelles, qui dépend du ministère de la culture) pour les objets classés, que ce soit mobilier de préfecture, mairie, ou liturgique. Nous restaurons ainsi boiseries en bois doré, maîtres-autels, retables, statues, lutrins, etc… Notre métier est donc varié et chaque fois, l’objet sur lequel nous travaillons est toujours différent à travailler. Nous ne faisons pas de créations. »
F.A : « Quelles sont les qualités et aptitudes pour exercer ce métier ? »
Laurence : « Il faut donc le goût de l’ancien et du respect des œuvres d’art, la connaissance approfondie des styles. De la minutie, aussi, car les gestes sont délicats et nous ne pouvons nous contenter « d’à peu près ». Beaucoup de patience également, le travail est long, répétitif. Nous pouvons rester plus d’un an sur une pièce compliquée… >>> >>> Il faut, par ailleurs, des qualités de dessinateur et le sens des proportions quand nous avons à recréer les manques. »
F.A : « Y-a-t-il plusieurs moyens pour dorer un objet et quelles sont les étapes ? »
Laurence : « La dorure existe depuis les égyptiens, en témoignent les objets funéraires recouverts de feuille d’or car les égyptiens ont su battre très tôt la feuille d’or. Ce métal inoxydable était, à cause de cela, symbole d’éternité d’où sa présence dans les tombeaux des pharaons et de personnes de haut rang.
Il existe, comme pour la feuille d’argent, deux techniques : l’une dite à la « détrempe » où la feuille d’or est appliquée au moyen d’eau, l’autre à la « mixtion » où la feuille d’or est posée sur un vernis… La technique à la détrempe est donc très ancienne, tandis que la technique à la mixtion est utilisée depuis le XIXème siècle. »
Nous verrons la prochaine fois les différentes étapes de la restauration d’un objet doré, et les outils utilisés.
Jeanne de Thuringe