L’éducation du respect

Dans le contexte social actuel, le mot et la pratique du « respect » n’ont pas vraiment bonne presse. Les gestes, les attitudes, le vocabulaire, la tenue…toutes ces  manifestations extérieures de respect n’ont que trop tendance à disparaître pour faire place à l’insolence, la désinvolture, l’arrogance… oui, il est bien certain que l’environnement ne nous facilite pas la tâche et nous pousse même à aller à contre-courant car, dans un souci de véritable éducation catholique, nous avons à lutter contre les mauvais exemples que nos enfants voient à l’extérieur.

Le respect dû à Dieu est la base fondamentale – de là découle ensuite le respect dû aux personnes et aux choses-. Sur lui repose la valeur morale de l’influence que les éducateurs exerceront sur le comportement de l’enfant. C’est dans la mesure où les parents comprendront que l’enfant est un être sacré depuis son baptême, qu’ils le traiteront avec la délicatesse et les précautions qui conviennent aux créatures de Dieu. Ils ne tromperont donc pas sa confiance, et formeront sa conscience en lui apprenant à distinguer le bien du mal sans l’abandonner à ses caprices ou instincts. C’est parce que l’enfant est destiné à  la perfection que nous devons d’abord le respecter.

Ce respect dû à l’enfant ne va pas sans réciprocité, et celui-ci apprendra le respect de lui-même : tenue vestimentaire, effort de bonne tenue et de langage châtié, propreté, rangement… Un enfant qui n’est pas habitué à se respecter lui-même, ni dans son corps, ni dans ses actes, ni dans ses paroles, est un enfant voué d’avance à toutes les déviations et perversions de la nature. C’est surtout en lui rappelant qu’il est une créature de Dieu et en l’habituant à vivre en Sa présence que l’on apprendra à l’enfant le respect de lui-même.

Au respect de soi, l’enfant ajoutera le respect des personnes : ses parents, grands-parents, professeurs, mais aussi frères et sœurs, camarades, s’effacer devant une porte pour laisser passer quelqu’un le premier, aider à porter un panier ou à traverser la rue, laisser sa place dans le métro ou le bus, se lever quand le professeur entre dans la classe … Il respectera en premier lieu les personnes qui sont chargées de son éducation. Les parents exigeront que leur enfant soit toujours respectueux à leur égard. Mais ils l’habitueront aussi à se montrer poli et bienveillant avec tout le monde, riches ou pauvres, savants ou ignorants, vertueux ou pécheurs…Dieu est leur Créateur et Il les aime tous. Par respect du prochain l’enfant ne triche pas aux jeux, respecte le travail de ses camarades, ne prononce pas de paroles blessantes ou injustes.

Parce qu’ils sont créatures de Dieu aussi, l’enfant aura le respect des animaux, mis au service de l’homme. S’il a le droit de les soumettre, voire de les tuer pour sa nourriture ou pour sa défense, il n’a pas celui de le faire par plaisir ou par cruauté. Il en est de même du respect des choses, créations de Dieu ou oeuvres du travail des hommes. L’enfant apprendra à s’en servir sans les détruire ou les abîmer, il ne jettera pas de papiers par terre et respectera la nature, prendra soin de ses vêtements…

Mais tout n’est pas respectable dans la vie, et l’on apprendra à mépriser le mal sous toutes ses formes, en veillant à ne pas confondre le mépris du mal avec le mépris des personnes. C’est là une éducation délicate d’apprendre à respecter les personnes, tout en méprisant le mal qu’elles font !

Savoir se faire respecter fait partie de notre devoir de parents. C’est imposer aux enfants des limites à ne pas dépasser. Ne laissons jamais passer une insolence, un geste agressif, un haussement d’épaules ou des yeux levés au ciel avec un énorme soupir ! Vis-à-vis de qui que ce soit, il faut tout de suite réagir : rectifier et demander des excuses. Deux pièges sont alors à éviter :

  • Soit trop de faiblesse: si on laisse passer une insolence, elle sera vite suivie de beaucoup d’autres, et nous serons vite submergés, dépassés…Il faut tout de suite demander des excuses (tout de suite, pas demain car l’enfant vit dans le présent). La faiblesse des parents dans ce domaine n’est que démission de l’autorité ; cette faiblesse est coupable.
  • Soit trop de dureté : on croit montrer son autorité en criant plus fort que l’enfant…il se taira peut-être, mais la tension est montée : s’il n’a pas demandé pardon et fait la paix avec sincérité, son cœur restera fermé, mal disposé à notre égard…le mal reste et se manifestera de nouveau à la première occasion. Il est capital que l’autorité se fasse respecter. Une autorité qui n’est pas respectée est pratiquement sans influence. Le respect est une sorte de crainte admirative qui prépare et facilite la docilité de l’enfant. Pour faire naître le sentiment du respect, l’autorité ne doit pas encourager des familiarités qui suppriment les distances ; elle doit s’adapter aux besoins de l’enfant sans, pour autant, rien perdre de son « prestige », ce qui n’empêche pas, bien sûr, le rire et la complicité !

Comment voulez-vous que l’enfant respecte la supériorité morale de ses parents si ceux-ci ne pratiquent pas eux-mêmes ce qu’ils exigent de leurs enfants : un père mal rasé avachi dans le canapé, une mère qui arbore une tenue vestimentaire irrespectueuse d’elle-même ou de son entourage, ou qui néglige son devoir d’entretien et d’ordre dans son foyer…Les parents ont bien souvent des attitudes de grands adolescents très « cool », c’est une des maladies actuelles où les générations ne se différencient plus, on se sent soi-disant « plus proches », or cela désoriente profondément les enfants ! Il y a deux générations distinctes qui ont chacune leur place propre dans la famille.

Souvenons-nous que l’on ne respecte que ce que l’on admire, et l’éducateur doit être, une fois encore, irréprochable ! Nos enfants sont nos miroirs, ils se permettront tout ce que nous nous permettons…mais s’interdiront aussi tout ce qu’ils nous voient nous interdire ! Nous restons leurs meilleurs exemples ! Et cet exemple passe inévitablement par nos discours, tout autant que par nos actions, notre aspect extérieur et notre langage.

Demandons bien les grâces dont nous avons besoin pour être respectables nous-mêmes, pour respecter  nos enfants et leur inculquer les valeurs de ce respect. Ainsi aurons-nous la certitude de faire d’eux les adultes que nous voulons qu’ils soient demain…

Sophie de Lédinghen