L’esprit du XVIIIème siècle

L’époque du style Louis XIV se caractérisait par une grande créativité de meubles et de décors, mais aussi par un style très chargé comme nous l’avons vu.

Le XVIIIème siècle qui recouvre le style Régence, Louis XV et Louis XVI marque un tournant important par son raffinement, peu égalé depuis.

Attardons-nous donc sur ses caractéristiques avant de poursuivre dans nos prochains numéros plus en détail.

Pendant tout le XVIIIème siècle, la prospérité est générale, les clients exigeants dépensent donc largement, et incitent ainsi les architectes et les décorateurs, à proposer des productions de grande qualité avec toujours plus de talent.

L’architecture civile reste marquée de classicisme et symétrie, gardant le goût sobre de l’antique. Les appareillages de pierre sont parfaitement agencés, le fer forgé orne avec grâce les balcons et la justesse des proportions garantit une harmonie peu égalée jusque-là. Cela est vrai tant à la campagne qu’en ville et vous pouvez encore admirer cet équilibre à Bordeaux, Compiègne, Nancy, Aix en Provence, et dans bien d‘autres villes en France.

Les jardins viennent « présenter les demeures » leur offrant un écrin de verdure pour les mettre en valeur, c’est la grande époque des jardins dits « à la Française », auxquels vont succéder à partir du milieu du XVIIIème siècle les jardins dits « à l’anglaise », marqués par une nature apprivoisée même si elle ne paraît pas, ce qui est là tout leur art…

Les murs sont souvent recouverts de boiseries très recherchées ou plus modestes selon le rang et la fortune du propriétaire, et leurs couleurs commandent celles des meubles et des étoffes. Rien n’est laissé au hasard et si les couleurs blanc et or dominent dans les pièces les plus luxueuses, les plus usitées sont le bleu ou le vert, le jonquille, lilas, diverses nuances de gris et aussi les décors peints avec des singeries, des chinoiseries, des fleurs ou des scènes champêtres.

L’organisation du métier des artisans du meuble obéit aux règles strictes des corporations et si une même corporation peut ainsi réunir menuisiers et ébénistes, d’autres seront distinctes dans un même art, selon l’orientation du travail. Les marchands merciers passent commande aux artisans et vendent ensuite les meubles à leur clientèle de plus en plus désireuse d’être à l’avant-garde. Beaucoup de petits meubles astucieux voient le jour, combinant plusieurs fonctions en une et comportant aussi des secrets (caches).

Enfin en 1743 (enregistré en 1751) il est fait obligation aux menuisiers et ébénistes de  marquer leurs meubles de leur nom ou initiales, « l’estampille ».  Souvent celle-ci n’est pas facile à trouver, soit qu’elle ait été omise, ou en partie effacée  (on parle alors de trace d’estampille), soit qu’elle ait été effacée.

Les bois utilisés pour les sièges sont le noyer, puis le hêtre doré ou peint.

Pour les meubles d’ébénisterie ce sera du chêne pour les montants, sapin ou tilleul. Ensuite nous trouvons divers bois fruitiers comme le poirier, prunier, merisier (cerisier sauvage), noyer, houx, olivier.

Les bois exotiques viennent d’Amérique du Sud, même s’ils sont appelés bois des Indes et appréciés pour leurs couleurs vives : bois violet (dite de violette), rose (dit bois de rose), citron, etc…

Les assemblages sont à tenon et mortaise, à rainure et languette, et à queue d’aronde pour les tiroirs.

Le bâti du meuble est souvent recouvert de bois exotiques dont les feuilles sont de plus en plus minces, technique du placage jusqu’à pouvoir arriver à 2mm d’épaisseur…

Puis suivent le cas échéant, la marqueterie et les bronzes pour orner les meubles (pieds, poignées, chutes pour protéger les angles) qui peuvent être simplement cirés mais sont souvent vernis pour exalter la couleur du bois et les protéger.

Quant aux sièges, ils sont très souvent peints de couleurs claires déclinant les gris pâles verts et bleutés, recouverts de velours, de soies, de tapisseries représentant des chinoiseries, des entrelacs de fleurs, des scènes de fables.

Le XVIIIème siècle se caractérise donc par un grand raffinement, des dimensions plus réduites, des lignes courbes pour adoucir les formes rigides du XVIIème siècle, des couleurs pastelles. Les styles qui le rythment deviennent progressivement de plus en plus légers et féminins comme nous le verrons.

Jeanne de Thuringe